D’Athènes à Vienne : la montée en puissance de l’anti-libéralisme mondial (Jean Luc Mélenchon)

jeudi 18 mai 2006.
 

Je vis des semaines politiques ébahissantes. L’ambiance pourrie de l’affaire Clearstream est interrompue par des déplacements à l’étranger dans des cadres militants bien plus stimulants.

Certes ma tirelire personnelle en prend un rude coup. Mais ce qui est acquis par ce moyen me rembourse au centuple en quelque sorte. D’abord à Athènes pour le Forum social européen. Ensuite à Vienne pour le contre sommet Europe Amérique latine. Dans les deux cas, le plus précieux c’est la masse des contacts et des rencontres qui se font. Elle permet d’acquérir en peu de temps une plus grande connaissance du détail des situations et des dynamiques dans les divers pays impliqués. Elle permet de découvrir des personnes, des acteurs directs de ces situations. L’action politique n’est pas une abstraction, elle s’incarne. Les personnes qui portent une cause ou un message ne sont pas de simples supports d’une idée. Ils l’interprètent et la font vivre concrètement. Bien des idées ne peuvent pas être réellement distinguées de la manière d’être de ceux qui les portent même si elles existaient avant eux et si elles continueront à vivre après eux et même s’ils ne sont pas les seuls à les « interpréter ».

Par exemple on peut appliquer tout cela à José Bové et à la lutte paysanne dont il est le porte parole. La relation personnelle, le contact, l’échange ne sont donc pas seulement des facilitations mais d’authentiques symbioses qui construisent souvent une évolution dans la façon de voir et d’agir des personnes concernées. En tous cas c’est ce qui se passe dans les milieux militants dont je parle. Puisque je parle de José Bové je peux m’appliquer quelques modifications de mon point de vue concernant la paysannerie et son rôle dans la résistance au néo-libéralisme. Je crois sérieusement que son appréciation sur le républicanisme socialiste change aussi. Donc rien à voir avec les réunions compassées que j’ai aussi connues où de grands chefs viennent lire les discours écrits par leurs assistants, font un détour pour aller parader devant les journalistes qu’ils ont amenés dans leurs bagages (ils ont d’ailleurs déjà le texte en main avec les passages importants surlignés que l’attaché de presse leur épelle en plus) et enfin vont se congratuler entre eux à des dîners où l’on met son point d’honneur à parler « d’autre chose » pour montrer sa bonne éducation et le fait « qu’on a une vie en dehors de la politique ».

En ce moment, la présence des latinos, remontés à bloc par la révolution démocratique qui gagne d’un pays à l’autre galvanise tout le monde. Et tout ce que nous nous disons pendant et après les réunions est cent pour cent de la politique qui est immédiatement digéré, traduit, réinterprété. Les doigts dans la prise coule un pur jus de renouveau politique dans nos veines... Je ne vous dis que ceci a cet instant avant d’aller défaire mes valises et courir à la réunion de la charte anti libérale des collectifs du 29 mai : toute la terre de gauche à compris le sens de notre NON à la Constitution européenne. Et nous avons directement contribué à renforcer de tous côtés les fronts anti libéraux. A notre tour nous pouvons puiser à pleine main dans l’énergie que dégage la montée en puissance de l’anti libéralisme mondial.


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