Colloque sur un passé colonial et esclavagiste qui laisse des traces

samedi 17 novembre 2007.
 

Dans le cadre du Gorée Diaspora Festival, une rencontre internationale s’ouvre aujourd’hui à l’île de Gorée consacrée à la traite négrière dans l’océan Atlantique et l’océan Indien.

Des « biens meubles ». Ainsi le Code noir proclamé par Colbert définissait-il les es- claves noirs déportés par millions, d’Afrique vers les Amériques, entre 1450 et 1867.

Une tragédie longtemps enfouie dans la mémoire, occultée par l’histoire officielle, tue par les programmes scolaires, mais qui laisse des traces cruelles dans la conscience collective. Il aura fallu attendre cent cin- quante-trois ans après son abolition définitive pour que la République française reconnaisse l’esclavage comme un crime contre l’humanité. Un long silence de complaisance pour un système qui perdura illégalement après les abolitions et qui céda la place à d’autres formes de domination coloniale.

C’est là un sujet d’histoire complexe, sur lequel s’est constitué ces dernières années, sur les trois continents, Europe, Afrique et Amérique, un solide socle de connais- sances. Leur donner une visibilité, les confronter, donner la parole aux chercheurs pour comprendre cette histoire, ses causes, ses conséquences : voilà l’ambition du colloque consacré à la traite négrière coloniale dans l’océan Atlantique et l’océan Indien. Il s’ouvre aujourd’hui à l’île de Gorée, à l’initiative de l’Association des descendants d’esclaves noirs et leurs amis (ADEN), en partenariat avec le département du Val-de- Marne et la municipalité de Gorée.

Plus d’une vingtaine de chercheurs français, américains, béninois, sénégalais, caribéens, états-uniens ou réunionnais participeront à cette rencontre internationale. Placé sous le patronage d’Aimé Césaire, d’Angela Davis, de Paul Vergès, d’Édouard Glissant, ou encore de Mumia Abu-Jamal, le colloque s’inscrit dans le cadre populaire et culturel du Gorée Diaspora Festival, qui ouvre symboliquement, depuis trois ans, la porte du retour aux descendants d’esclaves noirs.

« L’expérience montre que l’oubli et les tentatives de gommer cette histoire ont des conséquences désastreuses, souligne Daniel Voguet, président de l’ADEN. On ne peut pas vivre dans le déni, dans le mensonge. Tôt ou tard, il faudra reconnaître cette histoire comme un épisode fondamental de l’histoire de la France et de l’Europe. » Un combat pour la reconnaissance, que l’ADEN n’hésite pas à lier aux répercussions contemporaines de l’idéologie raciste qui justifia pendant plusieurs siècles la traite et l’esclavage.

« Travailler sur cette histoire, sur sa transmission, c’est un gage pour construire la société d’aujourd’hui sur des bases de respect de l’autre, en particulier dans un départe- ment divers et métissé comme le nôtre », explique Danielle Maréchal, vice-présidente du conseil général du Val-de- Marne. Autre enjeu mis en avant par les initiateurs et les partenaires de cette rencontre internationale, celui de la construction de nouveaux rapports entre le Nord et le Sud. Leur conviction, aux antipodes du discours prononcé, le 26 juillet dernier, par le président français à l’université Cheikh-Anta-Diop de Dakar : la traite, l’esclavage, la colonisation puis le pillage néocolonial du continent noir, s’ils ont favorisé l’expansion du capitalisme, ont laissé l’Afrique exsangue, et ne sont pas étrangers, loin s’en faut, à la situation qui est aujourd’hui la sienne.

Rosa Moussaoui


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