1) Violences sexuelles : un rapport accablant pour l’Eglise d’Irlande
Le constat est accablant : l’Eglise catholique d’Irlande a couvert les abus sexuels commis par des prêtres de la région de Dublin sur des centaines d’enfants pendant plusieurs décennies. Selon un rapport d’enquête officiel publié jeudi 26 novembre, quatre archevêques successifs ont protégé les auteurs d’abus et n’ont « pas signalé à [la police irlandaise] qu’ils étaient au courant d’abus sexuels sur des enfants », commis à partir des années 60.
Les conclusions de ce document de plus de 700 pages, consacré à l’attitude de la hiérarchie catholique dans l’archevêché de Dublin entre 1975 et 2004, sont terribles pour le clergé, qui a selon lui systématiquement privilégié les intérêts de l’Eglise sur ceux des enfants. « La préoccupation de l’archevêché de Dublin dans la gestion des cas d’abus sexuels sur des enfants, au moins jusqu’au milieu des années 1990, a été de garder le secret, d’éviter le scandale, de protéger la réputation de l’Eglise et de préserver ses biens », relève le rapport.
« Les autorités de l’Etat ont facilité cette dissimulation en n’assumant pas leurs responsabilités », et « le bien-être des enfants, qui aurait dû être la première priorité, n’était même pas un facteur pris en considération au début », accuse le rapport. L’enquête a permis d’examiner des plaintes portant sur plus de 320 abus sur des enfants.
EXCUSES DU GOUVERNEMENT ET DE L’ÉGLISE
La commission a notamment mis au jour « le cas d’un prêtre qui a avoué avoir abusé sexuellement de plus de 100 enfants », et d’un autre qui a reconnu avoir abusé des enfants en moyenne « une fois toutes les deux semaines pendant son ministère, qui a duré plus de vingt-cinq ans ».
Après la publication du rapport, le gouvernement irlandais a présenté ses excuses « sans réserves » pour les défaillances de l’Etat dans cette affaire. Cette enquête a révélé une « perversion systématique et calculée du pouvoir et de la confiance face à des enfants innocents et sans défense », a déclaré le gouvernement dans un communiqué, promettant que « cela ne se produira plus jamais ». « J’offre à chacun des survivants mes excuses, mon chagrin et ma honte pour ce qui s’est passé », a déclaré de son côté l’archevêque de Dublin, soulignant que « le mal causé aux enfants ne pourra jamais être réparé ».
Les conclusions de cette enquête arrivent six mois seulement après un autre rapport qui avait horrifié l’Irlande en mai, en révélant des décennies d’abus sexuels, parfois « endémiques », à partir des années 1930 dans les institutions pour enfants dirigées par l’Eglise catholique.
2) Un évêque irlandais poussé à la démission dans l’affaire des prêtres pédophiles
Trois semaines après la publication par le ministère de la justice du rapport de la commission Murphy, qui accuse la hiérarchie catholique irlandaise d’avoir étouffé des dizaines d’affaires de prêtres pédophiles dans le diocèse de Dublin entre 1975 et 2004, l’un des évêques auxiliaires mis en cause, Mgr Donal Murray, nommé par la suite évêque de Limerick, a remis sa démission au Vatican jeudi 17 décembre. Le rapport Murphy avait qualifié son comportement d’« inexcusable ».
Mgr Murray a présenté ses « humbles excuses à tous ceux qui ont été victimes d’abus » tout en reconnaissant que sa « démission ne peut supprimer les souffrances ». L’homme, âgé de 69 ans, est décrit par son entourage comme un intellectuel brillant mais timide, qui n’a jamais eu le goût du commandement. Jusqu’à récemment il refusait de démissionner, estimant simplement avoir sous-estimé l’ampleur du problème et avoir été trop clément envers les prêtres soupçonnés de pédophilie.
Cette position était devenue intenable : plusieurs membres éminents du clergé ainsi que des intellectuels catholiques réclamaient sa démission afin que l’Eglise puisse commencer à tourner la page et poursuivre les réformes nécessaires. L’actuel archevêque de Dublin, Mgr Diarmuid Martin, a approuvé la décision de Donal Murray.
Cette démission pourrait être suivie de plusieurs autres, car le rapport Murphy cite cinq anciens évêques auxiliaires de Dublin aujourd’hui en fonction dans d’autres diocèses. Depuis des semaines, les médias irlandais et une bonne partie des politiques se déchaînent contre eux. Fait sans précédent, le gouvernement irlandais a officiellement critiqué le Vatican et le nonce apostolique en poste à Dublin pour avoir refusé de coopérer avec la commission Murphy.
Militants « sécularistes »
David Quinn, directeur de l’Iona Institute, centre de réflexion lié à l’Eglise catholique, souhaite qu’au moins huit ecclésiastiques de haut rang, coupables d’avoir étouffé ou toléré des affaires de pédophilie, quittent leurs fonctions.
Les militants « sécularistes », qui militent pour la réduction du pouvoir de l’Eglise dans la société irlandaise, vont plus loin. Colm O’Gorman, proie d’un prêtre pédophile dans son adolescence et fondateur d’une association d’aide aux victimes, estime que la démission ne suffit pas : « La police doit à présent mener une enquête pour savoir si Donal Murray a violé la loi en faisant obstruction à la justice et si c’est le cas, il doit être inculpé et jugé. Cela dit, rien n’est sûr, car avant la réforme judiciaire de 2006, la loi n’était pas claire. »
Le 16 décembre, Thomas Naughton, 78 ans, l’un des prêtres pédophiles qui avait bénéficié de la protection de Mgr Murray, a été condamné à deux ans et demi de prison pour avoir abusé d’un enfant de choeur au moins 70 fois dans les années 1980. Thomas Naughton aurait agressé une douzaine d’enfants : après chaque plainte, sa hiérarchie se contentait de le muter dans une autre paroisse. Il avait déjà été condamné pour des faits similaires en 1998. Le juge a justifié la relative légèreté de la sentence en invoquant l’âge et la mauvaise santé du prévenu.
Yves Eudes
LE MONDE du 18 décembre 2009
3) Abus sexuels : un deuxième évêque irlandais démissionne
Un deuxième évêque irlandais a présenté sa démission au pape Benoît XVI, à la suite d’un rapport accusant l’Eglise catholique d’avoir couvert les agissements de prêtres pédophiles dans la région de Dublin, a annoncé son diocèse, mercredi 23 décembre. « J’espère que cela fait honneur à la vérité que les victimes encore vivantes (de ces abus) ont découverte et ouvre la voie à un meilleur avenir pour toutes les personnes concernées », a déclaré James Moriarty, 73 ans, dans un communiqué diffusé par ses services.
James Moriarty avait été entre 1991 et 2002 évêque auxiliaire de Dublin, dans le diocèse où des centaines d’enfants ont subi des sévices sexuels commis par des prêtres pendant plusieurs décennies. Le 17 décembre, le Vatican avait annoncé que le pape acceptait la démission d’un premier évêque irlandais mis en cause par le rapport Murphy, Donal Murray. L’évêque de Limerick avait été accusé d’avoir réagi de façon « inexcusable » en dissimulant des informations sur des enfants victimes d’abus sexuels de prêtres, dans ce rapport publié fin novembre en Irlande.
La commission avait notamment mis au jour « le cas d’un prêtre qui a avoué avoir abusé sexuellement de plus de 100 enfants », et d’un autre qui avait reconnu avoir abusé des enfants en moyenne « une fois toutes les deux semaines pendant son ministère, qui a duré plus de vingt-cinq ans ».
Après la publication du rapport, le gouvernement irlandais avait présenté ses excuses « sans réserves » pour les défaillances de l’Etat dans cette affaire.
LEMONDE.FR avec AFP du 23 décembre 2009
EUDES Yves
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