1) La balkanisation de l’Europe a commencé en Belgique (Parti de Gauche)
Les résultats élections gouvernementales qui se sont tenues hier pourraient bien marquer la fin de la Belgique fédérale. En Flandres, les nationalistes de droite du NVA, Nouvelle Alliance Flamande qui étaient à 5% aux dernières élections de ce type, ont enregistré une large victoire avec 32% des voix au Sénat et 27% à la Chambre. Ils deviennent du même coup le premier parti flamand, loin devant le CDV (9,99% et 10 , 85%)de Herman van Rompuy et le PS flamand (le SP.A) qui n’enregistre que 9,48% et 9,2% des voix.
En Wallonie, le PS a fait campagne sur une ligne de gauche basé notamment sur la défense du modèle social belge. Avec 33% des voix au Sénat et 26% à la Chambre, il redevient le premier parti francophone, devant la droite libérale MR (-8% à 24%). Preuve s’il en faut qu’il n’y a pas meilleur rempart au séparatisme que la défense des acquis sociaux communs.
La gauche de transformation sociale belge était représentée par les listes du PTB, Parti du Travail de Belgique, formation néomaoiste (0,79%), du Front des Gauches qui réunit le PC, la LCR, le PSL, le PH, CAP et Velorution, petits mouvements de la gauche radicale (0,44%) et du MS+, mouvement sorti du PS en 2003 en réaction à sa dérive social libérale (0,16 %). Elle double son score des dernières élections en passant de 1,97% à 3,41% chez les électeurs francophones. Unis, ces mouvements auraient pu s’approcher des 5% nécessaires pour avoir un représentant au Sénat et à la Chambre.
La situation politique d’une gravité récurrente appelle l’union de toute la gauche de transformation sociale. Elle seule prône l’intérêt général et donc la cohésion du peuple qu’il soit flamand ou wallon. Gageons que nos camarades sauront s’inspirer de l’expérience du Front de Gauche français pour y parvenir. Nous les y encourageons de toutes nos forces.
THOMAS VAN ZWOL, CÉLINE MENESES
2) L’unité belge est-elle plus menacée que jamais ?
La percée sans précédent des nationalistes flamands fait planer le spectre du démantèlement sur le pays, dans un scrutin où la Flandre a penché fortement à droite et la Wallonie plutôt à gauche.
La Belgique s’est réveillée avec la gueule de bois. Celle des partisans du triomphateur de ce scrutin, le séparatiste flamand Bart de Wever, qui ont fêté la conquête par la NVA du premier groupe à la Chambre. C’est lui qui a été appelé le premier en consultation par le roi Albert II hier, avant le socialiste Elio di Rupo, grand vainqueur en Wallonie. Le PS talonne la NVA avec 26 députés contre 27. Avec les 13 députés socialistes flamands du SPA, la famille socialiste devient la première du pays, ce qui pourrait présager d’un gouvernement dirigé par Elio di Rupo. Cadeau empoisonné, car il ne sera pas facile de s’entendre avec celui qu’un journal flamand, Het Last Neews, qualifiait hier de « Kannibal ». Surnom donné à Eddy Merckx quand il gagnait toutes les courses, mais aussi allusion à la manière dont ce nouvel Obélix, tombé dès sa naissance dans la marmite du nationalisme pur et dur [1] , a dévoré l’électorat des autres partis : de la droite classique en déroute à l’extrême droite raciste du Vlaams Belang qui chute, certes, mais reste fort avec 12 députés. Soit, avec la List Dedecker, 50 sièges sur 150 pour les nationalistes.
C’est pourquoi il y avait hier une autre sorte de gueule de bois : celle de l’immense majorité des Francophones, qui savent que la Belgique ne sera plus jamais comme avant. Car Bart de Wever, même s’il adopte un langage plus conciliant qu’en campagne, est décidé à aller jusqu’au bout de son programme. Il s’est donné deux buts hier à la télévision : « Nous allons réformer l’État et assainir les finances publiques. » Assainir les finances, c’est, clairement, une cure d’austérité qu’il annonce. Réformer l’État, c’est transférer aux régions des compétences dévolues à l’État fédéral, qui deviendrait une coquille vide chapeautant deux États, l’un wallon l’autre flamand. Le nouveau « lion de Flandre » l’a dit : « Il y a deux pays, deux sociétés, deux opinions, il faut adapter les institutions à cette réalité. » Mais il se dit « raisonnable » et veut le faire par la négociation avec les francophones.
Ces derniers, assommés par les résultats, n’y sont plus opposés. Elio di Rupo s’est dit « prêt à accepter la main tendue » et à « prendre ses responsabilités ». Tous les partis francophones se sont déjà résignés à une « grande réforme de l’État » mais ils mettent une ligne rouge : « pas touche à la sécurité sociale ni à Bruxelles ».
Parviendront-ils à tenir cette ligne ? Beaucoup dépendra de l’attitude des autres partis flamands. La présidente du SPA - seul avec les Groen (Verts) à avoir tenu face à la vague nationaliste - affirme sa solidarité avec le PS, en tout cas sur le maintien d’une sécurité sociale et d’une politique d’emploi unifiées pour toute la Belgique. Mais si un « front flamand » appuie les exigences de la NVA, on ne donne pas cher de l’avenir de la Belgique.
Françoise Germain-Robin
Notes :
[1] Son père, militant de l’ancienne Volksunie, parti nationaliste aujourd’hui disparu, l’avait inscrit au parti le jour de sa naissance, en 1970, et c’est là qu’il a fait ses premières armes en politique.
Source : L’Humanité
3) Communiqué du Front des Gauches belge après les législatives
Le Front des Gauches remercie les électrices et électeurs qui lui ont apporté leur suffrage et tire un bilan positif de sa campagne. En moins d’un mois, le Front des Gauches, réunissant six organisations (Parti Communiste, Parti Socialiste de Lutte/Linkse Socialistische Partij, Ligue Communiste Révolutionnaire, Parti Humaniste, Comité pour une Autre Politique et Vélorution) et des militants d’ouverture, a réussi à élaborer une première plateforme commune face aux crises sociale, écologique, économique et politique, à déposer des listes complètes et à se faire connaître comme une force de gauche active, plurielle et radicale. Quoique son score soit encore modeste, le Front des Gauches a reçu de nombreux encouragements de la population, a été bien accueilli dans les mouvements sociaux, notamment syndicaux, et a été soutenu par des personnalités connues pour leur engagement dans les luttes en faveur d’une autre société. Ce succès est un point de départ pour la construction d’une alternative de gauche face au PS et à Ecolo.
Avec l’aide des gouvernements et de l’Union européenne, les marchés financiers ont lancé une gigantesque offensive internationale. Leur but est de balayer ce qui reste de « l’Etat providence » pour accroître drastiquement l’exploitation des travailleurs et soumettre totalement à la logique du profit la gestion des ressources, humaines et naturelles. La sécurité sociale, la santé, les pensions, les conditions de travail et les services publics sont plus que jamais dans le collimateur. Le chantage à l’emploi et la chasse aux chômeurs risquent de redoubler d’intensité. Les femmes, les jeunes et les immigrés sont spécialement menacés. Dans le domaine environnemental, rien de sérieux n’est fait pour enrayer le changement climatique dont les pauvres sont les principales victimes. Au lieu de combattre cette politique, tous les politiciens traditionnels de droite comme de la soi-disant gauche l’embrassent. Le PS et Ecolo se préparent à la gérer, faisant ainsi le jeu de l’extrême droite, des populistes et de tous ceux qui veulent encore plus "diviser pour régner" dans l’espoir de faire passer sur le plan régional les mesures d’austérité qu’ils ne réussissent pas à faire passer sur le plan fédéral.
Les milieux patronaux ont déjà adressé leurs exigences au prochain gouvernement : un nouveau plan d’austérité de 22 milliards, la suppression de 70.000 emplois dans la fonction publique, une attaque contre les pensions. Le Front des Gauches appelle à la mobilisation sociale la plus large, la plus unitaire et la plus déterminée, par-delà les frontières linguistiques et nationales, pour empêcher que la population laborieuse, qui a déjà payé pour sauver les banques, ne doive payer une seconde fois.
Le nombre croissant d’électeurs/trices qui ont boudé les urnes ou ont exprimé un vote blanc témoigne de l’impopularité de la politique néolibérale menée par les quatre partis traditionnels. Cependant, dans le mécanisme électoral actuel, ces refus de vote ne sanctionnent pas les partis traditionnels mais au contraire les confortent. Le Front des Gauches s’adresse à ces électeurs/trices mécontents en les invitant à rejoindre notre combat pour une alternative de gauche aux partis traditionnels qui gèrent la crise sans remettre en cause le système.
Pour le Front des Gauches, la construction d’une alternative à gauche du PS et d’Ecolo n’a jamais été aussi nécessaire et urgente. Dans les semaines et les mois qui viennent, les composantes du Front des Gauches s’efforceront de relever le défi en consolidant et en élargissant leur alliance. Dès à présent, le Front des Gauches lance un appel à toutes les forces luttant de façon décidée contre la dictature de la finance, l’injustice sociale, la guerre, le racisme, le sexisme et le productivisme capitaliste qui détruit l’environnement : par nos actions communes, avançons vers la constitution de la force politique nouvelle dont les exploité-e-s et les opprimé-e-s ont besoin. Tous ensemble contre leurs crises, tous ensemble dans la résistance, tous ensemble pour une alternative au capitalisme !
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