NON au débat du 5 avril, « Islam et laïcité », voulu par l’UMP NON au discours d’Etat raciste et xénophobe (5 articles)

mardi 5 avril 2011.
 

5) Manifeste des Associations et Organisations laïques

LAÏCITE : PAS DE FAUX DEBATS, RIEN QUE LA LOI

Les faux débats lancés sur l’Islam et la Laïcité sont lourds de menaces dès lors qu’ils instrumentalisent des peurs et stigmatisent des citoyens.

Il n’y a pas de débat à ouvrir sur l’Islam ou sur d’autres religions. La République n’a pas à juger du contenu des croyances. L’Etat a mission de faire appliquer la loi de Séparation des Eglises et de l’Etat, le principe d’égalité des droits, et non d’encourager le communautarisme.

Les manquements graves aux principes de Laïcité, à l’origine des atteintes à la citoyenneté républicaine, sont la conséquence des compromissions, des transgressions qui se sont succédées depuis de longues années, et des atteintes aux droits économiques et sociaux. Les partis républicains doivent prendre leurs responsabilités.

Il n’y a pas de faux débats à ouvrir sur la Laïcité, mais à faire appliquer la loi de 1905, toute la loi de 1905, rien que la loi de 1905.

Paris, le 31 mars 2011

Arab Women’s Solidarity Association France

Association EGALE

Association Laïcité-Liberté

Association Le Chevalier de la Barre

Association Libres MarianneS

Association des Libres Penseurs de France

Centre d’Action Européenne Démocratique et Laïque

Comité Laïcité République

Comité Valmy

Conseil National des Associations FAmiliales Laïques

Fédération française de l’Ordre Mixte International « Le Droit Humain »

Fédération Nationale de la Libre Pensée

Grand Orient de France

Grande Loge Féminine de France

Grande Loge Féminine de Memphis Misraïm

Grande Loge Mixte de France

Grande Loge Mixte Universelle

Les Comités 1905

Ligue des Droits de l’Homme

Ligue Internationale Contre le Racisme et l’Antisémitisme

Loge Nationale Française

Observatoire International de la Laïcité Contre les Dérives Communautaires

Regards de Femmes

Solidarité Laïque

SOS Racisme

Union des FAmilles Laïques

Contact médias : martine.cerf@orange.fr

4) NON au débat du 5 avril, « Islam et laïcité » (Communiqué du MRAP)

Après le pseudo débat sur l’identité nationale - lancé le 2 novembre 2009 par Eric Besson - qui avait fortement contribué à libérer la parole raciste,

Après le discours de Brice Hortefeux du 28 juillet 2010 contre les Roms, annonçant les destructions d’habitats précaires et expulsions vers l’ Europe de l’Est ,

Après le discours de Grenoble du 30 juillet 2010 de Nicolas Sarkozy, assimilant immigration et insécurité,

Après la volonté du ministre de l’Education Luc Chatel de mettre à l’écart les mères portant le foulard de tout accompagnement de sorties scolaires,

Après les tentatives présidentielles de remise en cause du droit du sol, finalement abandonnées par l’Assemblée Nationale

Après la réintroduction par l’Assemblée Nationale d’une manifestation de volonté pour que les jeunes de 18 ans, nés en France de parents étrangers, puissent acquérir la nationalité française,

Après qu’une vingtaine de personnalités en colère de la Mosquée de Paris, dont le recteur Dalil Boubakeur, aient appelé le 10 mars à annuler le débat sur la « laïcité », promu par Jean-François Copé, et lancé un « appel pour la dignité de l’islam en France »,

Après les propos provocateurs de Claude Guéant, nouveau ministre de l’Intérieur, déclarant le 17 mars que les Français ont parfois le « sentiment de ne plus être chez eux », à cause d’une « immigration incontrôlée » puis, le 24 mars sur I-Télé, que non seulement les agents du service public « ne doivent pas porter de signes religieux, manifester une quelconque préférence religieuse mais les usagers du service public ne doivent pas non plus »,

Après les récentes discordances gouvernementales à propos du débat de l’UMP du 5 avril, dont l’emprise et la durée n’ont cessé de rétrécir au gré des difficultés politiques de la majorité, en particulier à l’issue des élections cantonales,

Le nouveau débat, en instrumentalisant une fois de plus le principe de laïcité, stigmatise et met à l’écart les citoyennes et citoyens musulmans, renforce le racisme islamophobe qui est lourd de périls pour le vivre ensemble et trouve des boucs émissaires pour faire oublier la question sociale et la crise économique qui creuse encore les inégalités.

En chassant sur les terres du front national, pour des raisons bassement politiciennes et électoralistes, le gouvernement actuel et le chef de l’Etat, relayés par de nombreux media, franchissent toujours plus les garde-fous qui séparaient la droite républicaine de l’extrême-droite raciste et xénophobe, accélèrent la lepénisation des esprits et ainsi renforcent la montée du front national.

Le MRAP tient à souligner que ce débat, en alimentant les peurs irrationnelles et les fantasmes, dresse des citoyens les uns contre les autres, favorise le repli, met gravement à mal le vivre ensemble.

Le MRAP appelle à un sursaut général pour faire échec au projet néfaste du 5 avril. Il appelle à une forte mobilisation de toutes et tous - en particulier par la création de collectifs locaux - pour préparer activement la manifestation nationale du samedi 28 mai « contre le racisme, la politique d’immigration du gouvernement et pour la régularisation des sans papiers ».

Paris, le 30 mars 2011.

3) François Asensi "Une instrumentalisation évidente du thème de la laïcité"

Pour François Asensi, député maire communiste de Tremblay-en-France (Seine-Saint-Denis), la loi de 1905 reste éminemment moderne.

En liant débat sur la laïcité et sur la place de l’islam, les responsables de l’UMP cherchent-ils à stigmatiser les musulmans de France ?

François Asensi. Comme l’UMP est en grande difficulté électorale, le calcul de ses dirigeants est d’aller chasser sur les terres du FN pour gagner ses électeurs au vote UMP. Dans cette optique, il y a une instrumentalisation évidente du thème de la laïcité, qui a pour but de remettre en cause la place des musulmans en France, et donc de stigmatiser l’islam. Ce qui est tout à fait contraire à la loi de 1905 de séparation de l’Église et de l’État, dont l’article premier stipule que « la République assure la liberté de conscience » et qu’elle « garantit le libre exercice des cultes ».

S’agit-il, sous couvert de laïcité, d’une incursion de l’État dans les affaires religieuses ?

François Asensi. On ne peut aborder ce thème sans se rappeler le discours de Latran du président de la République et les propos qu’il a tenus sur le rôle des prêtres face aux instituteurs. On est à mille lieues d’une conception républicaine qui veut que, selon la belle formule de Victor Hugo, c’est « l’État chez lui, l’Église chez soi ». La séparation de l’un et de l’autre est la seule garantie de la liberté d’exercer sa foi si on le souhaite, tout comme celle de ne pas croire et de ne pas avoir de religion. La loi de 1905 affirme la liberté de conscience qui permet le vivre-ensemble dans un cadre librement accepté par tous.

On insiste beaucoup sur la place à accorder aux cultes. Mais qu’en est-il de celle des non-croyants ?

François Asensi. La liberté des cultes est consubstantielle à la liberté des noncroyants de pouvoir affirmer leur philosophie dans le cadre républicain. La loi de 1905 ne s’adresse pas qu’aux pratiquants des religions, elle garantit également aux athées le droit de ne pas croire en toute liberté. On voit bien comment l’UMP cherche à tordre cette vocation universelle, qui est celle de garantir la liberté de penser, de croire et de ne pas croire.

Pour vous, il n’est donc nul besoin de réviser la loi sur la laïcité ?

François Asensi. Cette loi garde toute sa valeur, car elle est à caractère universel. C’est un cadre unique, qui permet la construction de lieux de cultes sans que l’État ne participe à leur financement. C’est justement cela que l’UMP souhaite remettre en cause aujourd’hui.

Quelle est la part de responsabilité des pouvoirs publics dans la garantie de l’exercice des cultes ?

François Asensi. Selon la loi de 1905, il appartient aux pouvoirs publics d’entretenir les édifices religieux, non de les construire. À Tremblay, nous avons simplement veillé à dégager un terrain au coeur de la cité que les croyants ont acheté sur leurs propres deniers pour y construire la mosquée. Ce qui est inacceptable, c’est de contraindre certains cultes à aller prier dans des lieux désaffectés, cachés, loin, en périphérie des villes. Je le répète : permettre à chacun de vivre sa foi dans des conditions dignes et décentes, ce n’est pas contraire à la laïcité, c’est une condition de celleci. Cela permet d’éviter de voir les rues transformées en lieu de prière, ce à quoi je suis catégoriquement opposé.

ENTRETIEN RÉALISÉ PAR SÉBASTIEN CRÉPEL, L’Humanité

2) La droitisation de l’UMP a généré des fractures au sein de la droite

Les UMP de la Droite populaire, passerelle entre le parti présidentiel et le FN, font des pointages. « C’est à qui fera connaître parmi les ministres et responsables de l’UMP ceux qui ne participeront pas », se lamente Lionnel Luca. Il ajoute menaçant : « Il est surprenant que ceux qui se veulent l’expression du dialogue et de la tolérance se révèlent aussi sectaires et si complaisants dans l’autodénigrement. » « Il y a désormais deux majorités présidentielles », analysait, il y a quelques jours, Jean-Louis Borloo. La « droitisation » imposée par Nicolas Sarkozy depuis le discours de Grenoble en passant par le ni Front national ni front républicain, ou encore le débat national sur l’islam, a généré des fractures au sein du camp présidentiel où semble prédominer la droite la plus dure, réactivant l’existence de plusieurs droites.

Si la gauche est vent debout, les remous, attisés par le score des cantonales, sont réels parmi les différents courants héritiers du gaullisme, et ceux de la droite libérale (au sens anti-absolutiste historique), des centristes ou chrétiens démocrates. Maquillée par le sarkozysme de 2007, la pluralité à gauche est d’autant plus revivifiée que le refus des divisions s’exprime dans la société. La déclaration commune des six grandes religions de France publiée mercredi dernier en exprimant des réserves sur l’opportunité de ce débat, en atteste, en dépit de leurs réflexions sur l’opportunité de modifier les équilibres de la loi de 1905 dans le sens discutable du rapport Machelon. Quelque 26 organisations laïques ont rendu public jeudi un manifeste dénonçant « les faux débats (...) dès lors qu’on instrumentalise des peurs et stigmatise des citoyens ». Globalement, la « droitisation » dessine un antagonisme entre ceux qui se reconnaissent dans les valeurs de la République et ceux qui entendent s’en affranchir.

1) Non au débat-procès de la laïcité (Tribune de Caroline Fourest, Le Monde

C’est l’effet produit par le débat du 5 avril. Une fronde générale qui tourne au procès de la laïcité.

L’initiative a généré tous les effets pervers redoutés.

A force de parler si fort et si maladroitement de l’islam - tout en vantant l’identité chrétienne de la France -, l’UMP doit reculer. Au risque de conforter les électeurs d’extrême droite dans l’idée d’un sujet tabou. Tombant dans le piège, des personnalités de gauche ont signé un appel pour refuser le « débat-procès de l’islam » et se découvrent accolées à des signataires intégristes (non pas un, mais plusieurs militants des Frères musulmans). Ce qui revient à refuser la critique du christianisme... en compagnie de lefebvristes. Martine Aubry, Laurent Fabius, Sandrine Mazetier ont eu raison de retirer leur signature.

Reste le climat. En une mandature, le thème de la laïcité est devenu presque aussi piégé que celui de l’immigration. Alors que des faits graves remontent du terrain, on ne peut plus en parler. Sous peine d’être accusé de servir la soupe à Marine Le Pen. Bel effet. Pour quel bilan ?

Le FN a sorti le clairon, mais n’a aucune solution pacificatrice à proposer et a bien plus de casseroles que tous les partis réunis en matière de soutien à l’intégrisme. La droite au pouvoir a sorti la grosse artillerie, mais mène une politique dévastatrice, qui asphyxie le travail de terrain d’associations laïques, au profit du repli communautariste et religieux. De son côté, la gauche aspirant à gouverner a si peur d’être accusée d’« islamophobie » qu’elle laisse le champ libre à un discours offensif, voire agressif, à l’autre bout de l’échiquier. Même si on ne peut pas laisser dire qu’elle a déserté.

Régulièrement, le Parti socialiste organise des débats sur la laïcité, où les questions que l’UMP souhaite aborder le 5 avril sont discutées. Jean Glavany travaille à une commission parlementaire permettant d’enquêter sur les dérives sectaires et intégristes au sein de l’école privée. La Mairie de Paris tente une médiation pour faire cesser les prières en pleine rue à la Goutte-d’Or. Ce qui relève en partie de la responsabilité du préfet. En espérant qu’une solution soit trouvée avant 2012.

Plus à gauche et plus laïque, le Parti de gauche s’apprête à déposer une proposition de loi pour renforcer celle de 1905, notamment l’appliquer en Alsace-Moselle, et concentrer les moyens publics sur l’école républicaine. Quant à Europe Ecologie-Les Verts et au NPA, la complaisance envers l’obscurantisme existe, mais ne doit pas cacher le travail de clarification opéré par de nombreux militants, à la fois antiracistes et laïques.

La question de la laïcité ne départage pas la droite et la gauche, mais les élus nationaux, plutôt au clair, des élus locaux, embourbés dans la volonté de satisfaire mille demandes associatives confessionnelles, dont certaines défont la laïcité. Dans ce domaine, personne ne peut donner de leçon à personne. Ou alors à tout le monde.

A Lille et à Sarcelles, où des créneaux horaires ont été accordés à des associations défendant le droit de ne se baigner qu’entre femmes. Mais aussi à Bagnolet, Bordeaux, Roubaix, Asnières et ailleurs, où des élus locaux (UMP, PC ou PS) soutiennent ou cautionnent des associations intégristes. A Roissy-en-Brie, Chantal Brunel a même inauguré une mosquée en compagnie d’un prédicateur particulièrement extrémiste, Saïd Ramadan Al-Boutih, qui refuse de voir les musulmans se « mêler » aux non-musulmans... Ce qui épouse parfaitement bien l’idée de remettre certains Tunisiens dans «  leur bateau » (sic).

Entre complaisance envers l’intégrisme et xénophobie, il est urgent de s’éclaircir les idées. Non pas en abandonnant la laïcité ou en cessant d’en parler. En insistant pour en faire une question citoyenne, et non politicienne.


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