Espagne 19 juillet 2012 : Le peuple se soulève en masse contre l’austérité

vendredi 27 juillet 2012.
 

Ce jeudi 19 juillet plus de 2 millions d’espagnols sont descendus dans les rues pour dire non aux contre-réformes et au nouveau plan d’austérité de 65 milliards d’euros du gouvernement de Mariano Rajoy.

Retour sur deux ans d’un saccage

Depuis deux ans, le peuple espagnol ne connaît que plans d’austérité et réformes structurelles seule réponse des gouvernments de gauche comme de droite à la crise qui touche de plein fouet l’Espagne avec l’explosion de la bulle immobilère en 2008.Le premier date de mai 2010 à l’initiative du PSOE de Zapatero ( 50 milliards d’euros ) donnant lieu à une première grève générale en septembre 2010 et à des élections anticipées. Le PSOE connaît alors une défaite historique aux éléctions générales perdant près de 4 millions de voix.

Rajoy au pouvoir en décembre, poursuit et accélère cette politique dans la même voie. La hausse des économies à réaliser est exponentielle et s’accompagne systématiquement de réformes de libéralisation, de privatisation et de casse des droits des travailleurs. : la "Loi de stabilité budgétaire " (janvier, deux plans d’austérité en deux semaines), une réforme du droit du travail extrêmement violente, un budget le plus austère de l’histoire de la démocratie espagnole (avec entres autres -16,9% dans les budgets de tous les ministères en moyenne) tandis que les communautés autonomes sont à l’asphyxie et que nombres d’associations d’aides sociales ferment leurs portes faute de financement.

La colère monte...

Tandis que les conséquences concrètes de ces plans touchent des millions d’espagnols dans un pays où le taux de chômage avoisine les 25% de chômeurs (50% chez les jeunes de moins de 25 ans), les mobilisations sociales qu’elles soient locales ou nationales montent crescendo tout au long de l’année et touchent tous les secteurs : écoles, universités, santé, services publics, industrie, transports....A ces mobilisations s’ajoutent les luttes locales initiées par différentes plate-formes de revendications qui ont vu le jour depuis plus d’un an avec le mouvement des indignés : logement, dette, santé, école... Ce sont toujours en centaines de milliers de personnes que se comptent les manifestants.La dernière grève générale le 29 mars dernier rassemble plus de 2 millions d’espagnols dans les rues aux cris de : "Ils veulent en finir avec tout !" (Quieren acabar con todo !") , "Non à la réforme du travail" ("No a la reforma laboral !") et "Non aux coupes !" ("No a los recortes !"

La marche des mineurs, un nouveau plan d’austérité, la contestation sociale monte d’un cran Mardi 10 juillet et mercredi 11 juillet, la lutte des mineurs devient celle de tout un peuple (http://www.lepartidegauche.fr/actua...). Ce sont des centaines de milliers d’espagnols qui sont à Madrid pour accueillir la marche des mineurs qui sont en grève depuis plus de 50 jours, la représsion policière le mercredi sera particulièrment brutale.

Dès le lendemain de l’arrivée de la marche des mineurs, Rajoy annonce le plan d’austérité, le jour même des manfestations spontanées ont lieu dans les grandes villes devant les parlements tandis que les deux centrales syndicales CCOO et l’UGT appellent à une mobilisation le 19 Juillet.Entre le mardi 10 juillet et ce jeudi 19 juillet les manifestations seront quotidiennes.La plus importante d’entre-elles a eu lieu dimanche 15 juillet à Madrid, les fonctionnaires bloquent durant plusieurs heures le trafic à Madrid.

Ces manifestations spontanées qui touchent diffférents secteurs : fonctionnaires, pompiers, policiers, étudiats...ont aussi lieu dans d’autres villes notamment à Barcelone, réunissant des centaines, parfois des milliers de manifestants .

Aux origines de ce nouveau plan

Le sommet de l’Eurogroupe a accordé le lundi 9 juillet dernier, un délai d’un an (2014 au lieu de 2013) pour parvenir aux objectifs de déficit en dessous de 3% (feuille de route : 6,3% cette année, 4,5% en 2013 et 2,8% en 2014), en échange il exige un plan d’austérité. Rajoy s’éxécute : plan de 65 milliards d’économies et de nouvelles contre-réformes qui viennent s’ajouter aux autres. En parallèle, l’UE accorde un prêt pour recapitaliser les banques de 30 milliards en juillet, celui-ci pourrait atteindre 100 milliards).

On sauve les banques tandis qu’on ruine le peuple. Viennent s’ajouter aux différents plans les mesures suivantes :

- Réforme de l’administration locale (3,5 milliards d’économies) 0% du nombre de conseillers, limitation du salaire du maire. Réduction drastique et élimination des entreprises publiques locales

- Révision intégrale de la fonction publique : réduction du nombre de jours mis à disposition librement, réduction des décharges syndicales, mobilité, suppression de la prime de fin d’année (un mois de salaire) 600 millions pour le budget 2012, notamment les subventions. -20% de subventions aux partis, aux syndicats, aux CE pour 2013.- Supression de la majorité des avantages à la signature des contrats.

- Révision de l’indemnisation chômage. (24 mois - 6 premiers mois 70% puis 50% au lieu de 60 actuels.)

- Réforme des pensions

- Hausse de l’IVA (TVA) +3 points de 18% à 21% (la tva réduite passe de 8 à 10% et celle sur les produits de première nécessité reste elle à 4%) pas de précision sur ce "pannier"

- Suppression de la déduction dans IRPF ("Impôt sur la Rente des Personnes Physiques") à l’achat d’un bien à partir du 1er janvier

- Réforme de la contribution environnementale

- Hausse de l’impôt sur le tabac.- Modification du paiement de l’impôt sur les sociétés.

- Nouveau "paquet" de réformes structurelles. -nouveau programme de fiscalité énergétique pour résoudre le problème du "déficit de tarif" (différence entre ce que paie l’usager et la compagnie électrique)

- Mécanisme de résolution des conflits entre entreprises et administrations publiques

- Libéralisation du secteur des services- Davantage de flexibilité sur les horaires des commerces (notamment dans les zones touristiques)

- Libéralisation et dans certains cas privatisation, des services ferroviaires, aéroportuaires et maritimes

Le même jour que se préparent plus de 80 manifestations dans tout le pays, Rajoy fait voter par "décret-loi" son plan d’austérité et l’aide de 18 milliards de l’UE (plus de 100 pages de memorendum) premier volet de la recapitalisation de banques.

Des manifestations massives ce 19 juillet

Des manifestations étaient appelées dans plus de 80 villes et villages.

- A Madrid le cortège allait de la Plaza Neptuno à La Puerta del Sol. Près de 800 000 personnes ont défilé derrière la banderole : "Ils veulent ruiner le pays ! Il faut l’empêcher" Pompiers et policiers sont venus renforcés les rangs des manifestants. A sol lecture du manifeste. Les pompiers deversent alors de la mousse "espuma" sur la place.

- A Barcelone, ils étaient 400 000 et 100 000 dans le reste de la Catalogne. Le slogan : "Nous ne nous taisons pas ! Défends tes droits !" ("No callem. Defensa els teus drets"). Dans le cortège à nouveau des pompiers, des enseignants, des chômeurs, des policiers, les collectifs santé, logement... Etaient aussi présents les "iaioflautas", collectif de retraités très actifs qui appellent à la grève générale.

- Dans la région de Valence, ils étaient près de 400 000

- En Andalousie, c’est aux cris de "Cette réforme est un hold-up ! " (“Esta reforma es un atraco !”) et "Rajoy démission ! " ("Rajoy, dimisión !") que près de 300 000 personnes ont défilé

- En Galice, la banderole qui ouvrait la manifestation à La Coruna disait : "Non au saccage du peuple, il faut empêcher qu’ils nous ruinent ! " (« Non ao saqueo do pobo, hai que impedir que nos arruinen »), "Ils sauvent les banquiers, et renvoient les ouvriers !".(Rescatan aos banqueiros, despiden aos obreiros ») Ce sont là-bas aussi des milliers de manifestants.

- Au pays basque à Bilbao, près de 25 000 personnes derrière le slogan : "Ils veulent ruiner le pays. Il faut l’empêcher. Révolte-toi, mobilise-toi. Non aux coupes. Ton futur est en danger.("Quieren arruinar el país. Hay que impedirlo. Rebélate, movilízate. No a los recortes. Tu fututo está en peligro", contra los recortes aplicados por el Gobierno central.

- A Murcie, 70 000 personnes

Partout où des manifestations étaient prévues ce sont des milliers de personnes qui ont répondu présent.

Une unité syndicale inédite...

L’unité syndicale qui est en train de prendre forme est inédite. Si l’appel a été lancé par les deux centrales syndicales majoritaires UGT et CCOO, celui-ci a été rejoint par près de 20 syndicats et d’associations en allant des syndicats sectoriels, en passant par les indignés du 15-M et la plate forme Plataforma Social en Defensa del Estado del Bienestar y de los Servicios Públicos....En tête de cortège à Madrid, on trouvait non seulement les logos des deux principales centrales syndicales mais aussi ceux de syndicats sectoriels (comme le Sindicato Unificado de Policía (SUP), la Unión Federal de Policía (UFP), la Asociación Unificada de Guardias Civiles (AUGC), la Unión de Actores o la anarcosindicalista Confederación General del Trabajo (CGT), la Confederación Europea de Sindicatos (CES) ou le CSI-F -organisationde la fonction publique.) et de la "Plataforma Social en defensa del Estado del bienestar y los Servicios Públicos" (y sont présents plus de 55 syndicats et associations de la société civile.Inédit aussi le nombre de pompiers et de policiers présents dans les manifestations tandis que les coupes s’abattent toujours sur les travailleurs : chômeurs, retraités, personnes dépendantes, les malades, les fonctionnaires...

Et maintenant...

Les manifestations d’hier montrent que la tension sociale est montée d’un cran à nouveau en Espagne. La seule réponse du gouvernement, la répression et pour les grands médias un quasi silence. Les syndicats vont décider des suites à donner à la contestation sociale tandis que d’aucuns en appellent à la grève générale. Izquierda unida qui a refusé de prendre part au vote du "decret -loi" à l’Assemblée appelle à un referendum et à une poursuite des mobilisations dès aujourd’hui. Le groupe parlementaire de IU, ICV-EUiA, CHA a présenté une propostion de loi sur la nécessité de "soumettre au réferendum les mesures de coupes sociales et de hausse d’impôts contenues dans le " Real Decreto-Ley" du 13 juillet" et appelle à la mobilisation devant le Palais de la Moncloa dès aujourd’hui pour une "révolte démocratique" ("Llamamiento para une rebelion democratica")


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