Le Parti de gauche travaillé par le changement d’euro

jeudi 4 avril 2013.
 

Depuis la crise chypriote, l’ancien candidat Front de gauche à la présidentielle convient d’une évolution dans sa perception de l’euro. « S’il faut choisir entre la souveraineté des Français et l’euro allemand, nous n’aurons pas peur de choisir la souveraineté », explique-t-il ce samedi dans Sud-Ouest. Dans un communiqué publié mercredi soir, Mélenchon parlait de la monnaie européenne comme d’« un luxe merkélien coûteux, mais aussi un dangereux moyen d’action contre la souveraineté du peuple ». Et interrogé vendredi après une rencontre avec des ostréiculteurs sur le bassin d’Arcachon, il a convenu qu’il était prêt au « bilan des faits » : « Il y a des colères qu’il faut savoir épouser à temps », confiait-il.

« Le retour au franc n’apporte rien »

Alors, Mélenchon va-t-il annoncer dans son meeting de dimanche matin qu’il souhaite voir la France sortir de l’euro comme le pensent certains de ses militants ? « L’Europe a fait la démonstration avec l’exemple de Chypre qu’il y a des moments où on aura à choisir entre la souveraineté du peuple et l’euro. Je choisis la souveraineté du peuple », répond-t-il Mais dans son discours de dimanche, « je n’irai pas plus loin », assure-t-il. « Je ne vais pas dire "sortie de l’euro", sinon c’est une capitulation devant l’Allemagne », justifie-t-il.

Et un risque d’assimilation avec le Front national et Marine Le Pen ? « Le FN a une longue tradition de capitulation devant l’Allemagne », ironise le député européen. « La grande différence entre nous et le FN, c’est qu’on veut transformer l’euro, poursuit Guillaume Etievant, président de la commission économie du PG. On ne veut pas être dans une position de repli, ni laisser le FN maître du jeu sur le sujet avec ses réformes simplistes. Le retour au franc n’apporte rien. »

Deux zones euros ?

Ce jeune responsable détaille le plan de route qu’aurait le Front de gauche s’ils étaient au pouvoir pour arriver à modifier les statuts de la Banque centrale européenne (BCE) et s’attaquer à l’euro fort - au PG on parle désormais d’« euro Merkel » : « La méthode classique de négociation ne suffira pas. Le rapport de force doit se mener par la désobéissance européenne », dit Etievant. La BCE ne veut pas prêter directement aux Etats ? « Ce qu’elle refuse de faire, nous pourrions le faire en France avec la Banque de France », explique-t-il.

Au risque d’être exclu de la zone euro ? « D’autres pays du sud de l’Europe pourraient nous suivre et on aurait alors deux zones euros, une au nord et une au sud », répond-t-il. Et une dernière « extrémité » possible : « Avoir une monnaie commune à l’échelle européenne où chaque pays garderait sa propre monnaie nationale », conclut Etievant.

Pourtant, samedi matin, lors de la discussion générale des délégués sur leur « plate-forme de synthèse », plusieurs intervenants ont fait part de leurs doutes. « Que la monnaie soit un problème, je comprends. Mais on ne peut pas se retirer de la bataille, lance un jeune congressiste. J’ai envie de me battre pour que l’euro soit une monnaie sociale. Qu’est-ce qu’on propose ? L’euro franc ? Qu’est ce ça veut dire ? » « Nous ne pouvons nous passer d’un projet européen clair, surtout à un an des élections européennes », poursuit une militante de Bruxelles.

« Si la France dit non, ils ne peuvent pas faire sans nous ! »

Dans les couloirs du congrès, d’autres ne comprennent pas trop pourquoi cette question sur l’euro est remise en débat. « Cela n’a pas été préparé, s’étonne Thierry, venu de région parisienne. Sur plusieurs points, je trouve qu’on se rapproche des positions du FN. » « La ligne du PG, ce n’est pas la sortie de l’euro, rétorque Dominique, de Paris. Je suis contre l’euro fort. Et si la France dit non, ils ne peuvent pas faire sans nous ! Même Hollande peut le faire s’il montrait plus de détermination. »

« Beaucoup de camarades sont arrivés il y a un an et demi après que l’on a eu nos discussions et nos débats sur l’euro, fait valoir Martine Billard, coprésidente du PG. Il faut qu’on reforme nos militants sur cette question. »

Par LILIAN ALEMAGNA Envoyé spécial à Bordeaux


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