Mélenchon : "La révolution citoyenne dont la France a besoin doit être arrachée par la combinaison du mouvement social et du changement institutionnel"

jeudi 2 mai 2013.
 

Dans un entretien à l’Humanité dimanche, le coprésident du Parti de gauche dénonce la "monarchie quinquennale" et l’"argent dérégulé devenu le maître de tout et de tous" et appelle à la mobilisation le 5 mai pour la VIème République. Extraits.

HD. Que révèle l’explosion des affaires Cahuzac et Offshore Leaks de la société française ?

Jean-Luc Mélenchon : Une conjonction explosive. La monarchie quinquennale évacue le contrôle populaire et déresponsabilise tous les dirigeants. Cela, au moment où l’argent dérégulé est devenu le maître de tout et de tous. Dès lors, l’ampleur des connivences dépasse les pires caricatures. Le conseiller financier des Le Pen a ouvert un compte en Suisse à un des principaux dirigeants socialistes. En quatre mois de scandale, l’état-major du FN, parfaitement informé, n’a strictement rien dit !

Ce symptôme révèle un sentiment d’impunité totale. En cause, la dérégulation financière. L’argent propre et l’argent sale se mélangent en un seul et unique torrent...

N’oublions jamais que placer de l’argent dans un paradis fiscal, c’est abonder le pot commun de la traite des êtres humains, du trafic de drogue, de l’argent fraudé au fisc, les uns garantissant les dépôts des autres.

HD. De quoi la France a-t-elle besoin dans ce contexte ?

Jean-Luc Mélenchon. D’une révolution citoyenne. Changer de fond en comble les institutions politiques. Le faire pour rendre possibles les changements profonds dont le pays a besoin. Pouvoir le faire tranquillement par la démocratie politique, au lieu de devoir aller d’une crise à l’autre pour changer ce qui doit l’être. Tout cela, il faut l’arracher par la combinaison du mouvement social et du changement institutionnel. C’est le coeur de notre stratégie. La démocratie est la meilleure école populaire disponible.

HD. C’est l’objectif de la manifestation du 5 mai ?

Je an-Luc Mélenchon. Notre méthode, c’est l’implication populaire. Dès que l’affaire Cahuzac a éclaté, on a voulu nous intimider. Certains espéraient, de notre part, la complaisance qu’ils obtenaient du Front national. Nous avons au contraire déployé une stratégie offensive de sortie par le haut à la crise politique. Nous avons mis en avant deux leviers concrets. Pierre Laurent a lancé l’idée d’une session spéciale du Parlement sur la fraude fiscale. Puis, j’ai proposé la manifestation pour permettre l’implication de masse. D’un côté, l’outil parlementaire ; de l’autre, l’implication populaire. Par sa force, la marée citoyenne du 5 mai va créer une nouvelle situation politique. Elle va substituer la logique de la présence populaire à celle des arrangements politiciens.

HD. La VIème république, c’est un numéro de plus ? Que pourrait-elle changer ?

Jean-Luc Mélenchon. D’abord, elle doit régler le problème de l’articulation entre l’initiative populaire spontanée, permanente, et la stabilité institutionnelle. Le point de connexion entre les deux, c’est le référendum révocatoire. En toute circonstance, le peuple peut démettre ses représentants en cours de mandat.

Ensuite, installer la démocratie sociale en instituant le droit des citoyens dans l’entreprise. La citoyenneté, c’est le pouvoir. Compte tenu de la place et du rôle des salariés, le salariat est une classe d’intérêt général.

Enfin, cette nouvelle constitution devra pour la première fois valider le droit écologique de l’homme avec l’inscription de la règle verte dans la Constitution. C’est à dire ne jamais prendre plus que ce que la planète peut reconstituer.

Cette nouvelle révolution française, sera, comme la précédente, un message universel.

HD. Le combat pour le changement de république pourrait-il rassembler la gauche, socialistes compris ?

Jean-Luc Mélenchon. Je pense beaucoup à eux. Les militants savent qu’ils sont dans une impasse. Les électeurs sont écoeurés. Beaucoup n’ont pas oublié que je viens de leurs rangs. Ils sont en train de faire le même cheminement que moi...

Le PS a tellement changé dans son histoire ! Celui que nous avons sous les yeux est un astre mort. Les évènements que nous vivons peuvent provoquer un déclic. J’ai le sentiment qu’à la manifestation du 5 mai, ainsi qu’au comité d’appel, il y aura des milliers de socialistes...


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