Union bancaire européenne : la mascarade continue !

jeudi 1er mai 2014.
 

La presse économique et les grands quotidiens se réjouissent de la ratification du projet « d’union bancaire » par le parlement Européen dans la nuit du lundi 14 au mardi 15 avril.

Une adoption dans l’urgence donc, avant la fin de la dernière session du Parlement précédant les élections de mai prochain. Mais quelle est donc cette nouvelle union, vendue comme le remède à tous les maux ?

Il s’agirait du couronnement des réformes adoptées suite à la crise financière de 2008, un outil créé sur mesure pour éviter que celle-ci ne se reproduise. Tout ceci reposerait sur deux grands axes : la mise en place d’un Mécanisme de Supervision Unique (MSU) des 128 banques les plus importantes de l’UE, devant s’assurer que les grands groupes, présents sur plusieurs pays, soient surveillés par un organisme supranational. Le second axe étant la création d’un fonds de résolution bancaire, financé par les banques elles-mêmes, de 55 milliards d’euros mis en place d’ici 2023, afin que celles-ci ne soient désormais plus renflouées par les États en cas de crise.

Seulement, le fonds de résolution n’est qu’une vaste fumisterie. En sus du délai imparti bien trop large pour sa mise en place, c’est le montant proprement ridicule en comparaison des sommes en jeu qui constitue le plus grand scandale. À titre de comparaison, le bilan d’une banque telle que la BNP est de près de 2000 milliards ! Bien évidemment, les technocrates à l’origine de cet accord vous répondront que ce fonds ne doit entrer en action qu’en dernier recours, après avoir fait appel aux capitaux propres de la banque. Toujours pour le même établissement, ceux-ci s’élevaient à 94 milliards d’euros en 2012, moins de 5 % de son bilan… Il apparaît donc clairement que le fonds de résolution bancaire sera insuffisant dès la première faillite. Et ce n’est pas la possibilité d’emprunter sur les marchés, comme cela est prévu par l’accord, qui y changera quoique ce soit. Car en cas de crise systémique, les liquidités s’y font rares, et très chères.
Dès lors, se dessinent en creux les nouvelles injections massives d’argent frais par les États européens lors du prochain séisme financier mondial auquel le capitalisme nous a désormais habitués. Ou bien, comme à Chypre, une ponction sur les dépôts si la crise est plus localisée.

Le mécanisme de supervision unique peut sembler plus défendable. Face à une finance supranationale, il faut pouvoir prendre de la hauteur, apprécier les dangers globalement et effectuer des contrôles par-delà les frontières. Faute de quoi, ces monstres brassant des sommes supérieures aux PIB des États membres pourraient devenir ingérables, s’ils ne le sont déjà.
Cependant, se pose aussi la question de la place et des moyens de l’institution. En effet, celle-ci n’a de sens que si elle s’ajoute aux instances nationales déjà en place. Car outre le fait que ce n’est pas avec le recrutement de 1000 agents, comme prévu, qu’elle pourra mener à bien sa mission, puisque cela représente moins que les 1200 agents de l’Autorité de Contrôle Prudentielle et de Résolution (ACPR) déjà en place en France, ce serait encore priver un peu plus les États membre des moyens de dompter le système bancaire. Et ce n’est pas depuis la distante Francfort que le MSU sera efficacement informé de ce qui se passe dans les banques Françaises, Italiennes ou Finlandaises, et donc les contrôler efficacement.

Francfort_BCE_EuroQuant aux moyens que l’Union Européenne donnerait à cette institution, il est d’abord question de ses capacités de sanctions et de son éventuelle complaisance vis-à-vis de ceux qu’elle contrôle. A titre d’exemple, la Société générale, pour avoir extorqué des fonds à ses clients les plus démunis, ne se vit infliger qu’une amende de 2 millions d’euros. Autant avouer tout de suite que ces autorités de contrôle ne sont que cosmétiques. Comment penser qu’il en sera autrement lorsque la nouvelle autorité sera adossée à la BCE ? Cette banque centrale, aux procédures de recrutement opaques et dirigée par un ancien de Goldman Sachs, cette banque d’affaire connue pour ses nombreuses opérations nauséabondes, dont le maquillage des comptes Grecs dans les années 2000, ou son rôle dans la crise lui valant d’être poursuivie par le gouvernement américain.

Alors quels sont les raisons évoquées pour l’adoption à marche forcée de cette union bancaire au rabais ? D’une part, il aurait fallu agir dans l’urgence… Curieuse urgence, lorsque le vote intervient plus de 5 ans après la crise ou que le fonds de résolution mettra 8 ans avant d’être pleinement provisionné. Et ce malgré le vœu des parlementaires européens de voir ce délai réduit à 3 ans. Ratification au pas de course aussi car il a été négocié en amont par des ministres bien peu respectueux des assemblées nationales, et ce depuis des mois avec le moins de transparence possible ! Mais peut-être ceux-ci avaient-ils peur de retrouver après les élections européenne une majorité bien plus à gauche, moins docile avec les lobbys financiers qui sont prêts à dépenser des millions pour amadouer la commission !

Alors cette union bancaire de pacotille doit être renégociée, et de véritables mesures de protection du citoyen doivent être prises. Et puisque qu’aucun fonds ne pourra jamais couvrir les sommes colossales nécessaires au renflouement des banques, il faut la seule mesure qui s’impose, une séparation des activités bancaires à risque de l’activité de dépôt, comme cela fût le cas après la crise de 1929 outre-Atlantique. Dommage que les « têtes pensantes » de l’Europe ne soit capables de s’inspirer des Etats-Unis que lorsqu’il s’agit des pires décisions libérales…


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