Pour une agriculture durable ( Texte de nos archives Maurice Frey septembre 2000)

mardi 18 avril 2006.
 

Cette semaine se déroule l’Assemblée générale de la Confédération paysanne. A cette occasion,nous publions une série d’articles de ce syndicat. Aujourd’hui nous présentons celui de notre camarade décédé Maurice Frey qui fut président national du cercle agricole de la République Sociale écrit à l’automne 2000.

"Du point de vue agricole, notre premier objectif doit être aujourd’hui la levée des sanctions imposées par l’OMC à l’encontre du Roquefort et autres produits de qualité. A court terme, nous considérons nécessaire, soit une démocratisation profonde de l’OMC, soit la mise en place d’une autre structure sous l’égide de l’ONU. En effet, comment accepter qu’un petit groupe d’experts, au service des multinationales, veuille imposer le boeuf aux hormones, les OGM, la somototropine...

Le "contrat social" d’après guerre qui était demandé aux agriculteurs était de produire plus, au moindre prix et avec moins de bras. Cet objectif a été atteint dans le milieu des années 70. Ce système montre ses limites : limites économiques (surproduction, baisse des revenus) et sociales (concentration des productions, déficit démocratique). Les problèmes s’aggravent (environnement, qualité des produits) et la réforme de la PAC (1992) devient inévitable. L’agenda 2000 ne règlera ni les problèmes de surproduction, ni les difficultés dues à l’entrée des 10 nouveaux pays dans l’Union européenne.

Notre pays, comme l’Europe, bénéficie d’une auto-suffisance alimentaire. Il n’est plus du tout nécessaire de favoriser une agriculture industrielle, certes pourvoyeuse de devises, mais coûtant très cher, notamment sur le plan environnemental. De même, le contrôle du secteur industriel agro-alimentaire se pose : que ce soit au niveau de la production, de la transformation, de la commercialistion ou des prix. L’entrée des PECO n’est pas acceptable en l’état sans un renforcement des institutions politiques européennes.

La multifonctionnalité de l’agriculture étant désormais inscrite dans la loi, les paysans français peuvent étendre leur "champ d’action". En trois ans, des avancées ont eu lieu, mais il faut maintenant enfoncer le clou, aller plus loin.

La loi d’orienatation agricole française de juillet 1999 pose les principes d’un nouveau contrat social entre l’Etat et les paysans. Ses objectifs sont une prise en compte de l’attente des consommateurs, le maintien des emplois ( donc le maintien du tissu social rural) et enfin la protection des ressources naturelles.

La prise en compte de l’attente des consommateurs passe par seux mots clés : traçabilité et qualité des produits. Constater qu’un produit est "mauvais" et le retirer du marché est sécurisnt pour le consommateur. Se doter d’un outil de contrôle au niveu locl, capable de détecter certains égarements, est sécurisant tnt pour le consommateur que pour le producteur. L’agence de sécurité sanitaire des aliments ou les services déconcentrés doivent se doter de moyens afin de contrôler les produits de l’amont à l’aval. La qualité des produits passe par la mise en place d’un signe facilement identifiable par le consommateur (comme le logo AB pour l’agriculture biologique). Comment peut-on ne pas se perdre dans les marques, labels, AOC, CCP, VDQS, et autres IGP ? Un cahier des charges minimum par produit doit être instauré au niveau national et européen. Les composants de fabrication, les lieux d’élevage, de production ou d’abattage doivent être prévus par étiquetage.

Le maintien des emplois en milieu rural passe par une dynamique territoriale. Les contrats territoriaux et les contrats de pays doivent dynamiser l’espace rural. La chute régulière du nombre d’installations de jeunes agriculteurs vide les campagnes, entraînant un phénomène de déprise : déprise humaine (emplois, services publics...), mais également déprise paysagère ( embroussaillement, abandon de parcelles...). Les aides allouées doivent obligatoirement déboucher sur une installation individuelle ou collective. Les contrats territoriaux de pays doivent associer l’ensemble des cateurs ruraux et non plus les seuls agriculteurs.Pour mettre en synergie la LOA et la LOADT, une dotation au jeune rural doit être instaurée. Elle prendra en compte la qualité du projet du jeune désirant s’installer et la création ou le maintien d’un emploi rural. Cette dotation prendra la forme d’une dotation en capital, d’une garantie de prêt ou d’un prêt à taux réduit. L’aide à l’installation d’agriculteurs doit, bien sûr, être maintenue, mais assouplie pour permettre l’installation de "citadins". Le maintien du tissu social rural est à ce prix. Cela doit permettre un retour de balancier après l’hyper concentration des villes et la déprise des campagnes.

La protection des ressources naturelles passe par un développement durable tel que défini lors de la Conférence de Rio : "C’est un développement qui correspond aux besoins du présent sans compromettre la capacité pour les générations futures de répondre aux leurs". Il faut des mesures radicales pour répondre à la crise écologique. Comment peut-on accepter que dans certaines zones polluées, le contribuable achète de l’eau en bouteille parce que l’eau du robinet est impropre à la consommation.

Un grand service public de l’eau, enjeu de demain, doit être mis en place sur tous les territoires. Une taxation contre l’utilisation abusive des produits phytopharmaceutiques, selon le principe pollueur payeur doit être instaurée. Des zones de protection des captages doivent être préconisées au bassin versant et non plus au périmètre rapproché. Les fonctions d’accueil et d’entretien de l’espace par les ruraux doivent permettre le maintien des ressources naturelles mais également une diversité paysagère propre à faire venir (ou revenir) les citadins à la campagne.

En conclusion, pour que l’agriculture soit paysanne et durable, il faut : - amplifier la modulation des aides agricoles, - refuser les CTE au delà d’un revenu à fixer par actif, - renforcer les aides aux régions et aux exploitations les plus fragiles, - soutenir une agriculture vivrière, innovante et peuplante fondée sur des productions de qualité et la préservation de l’environnement".

Maurice Frey pour les débats du congrès socialiste de Grenoble


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