![]() |
Ceux qu’ont le pognon, ceux-là reviendront
Car c’est pour eux qu’on crève
Mais c’est bien fini, car les troufions
Vont tous se mettre en grève...
https://www.youtube.com/watch?v=z-y...
De toutes les chansons ramenées des tranchées par les soldats de la Première guerre mondiale, celle-ci fut la plus chantée par eux et reste la plus connue aujourd’hui.
A) Origine et nature de La Chanson de Craonne
B) Paroles de la Chanson de Craonne
C) Interprétation (vidéo) de La Chanson de Craonne
D) Que s’est-il passé à Craonne ? par le général Bach
Inspiré d’un air populaire intitulé Bonsoir m’amour (1911), la Chanson de Craonne a émergé des tranchées ignobles et des attaques suicidaires en 1915, 1916, 1917, 1918.
Causes de la Première Guerre Mondiale : capitalisme, nationalisme et responsabilité des Etats
Reflet du climat psychologique régnant parmi une partie significative des poilus, cette chanson n’a pas d’auteur mais une dizaine de versions contenant des variantes plus ou moins importantes.
La première version connue s’intitulait La chanson de Lorette et faisait référence au plateau de Lorette Vimy où s’étaient déroulés en mai juin 1915 de violents combats durant l’offensive d’Artois de la 10ème armée. Les unités françaises avaient progressé en certains endroits de quelques centaines de mètres et certains chefs y avaient acquis une popularité (dont le général Pétain, chef du 33ème corps) au prix de pertes effroyables : 2260 officiers et 100240 soldats (dont 16194 tués, 30417 disparus, 63619 blessés). La plupart des vers de La Chanson de Lorette et de la Chanson de Craonne sont identiques ; cependant, la menace de grève aux armées n’apparaît pas encore.
En 1916, une version légèrement différente naît durant la terrible bataille de Verdun.
La Chanson intitulée, depuis longtemps, de Craonne connaît un temps fort autour de la bataille du Chemin des Dames (dont combats de Craonne) et des mutineries du printemps 1917.
16 au 21 avril 1917, Bataille du Chemin des dames
Une nouvelle histoire des mutineries de 1917
A ce moment-là, L’Internationale reste le chant identitaire essentiel des opposants à la guerre (au moins à la guerre telle qu’elle se mène). Cependant, les diverses versions issues de La Chanson de Lorette (appelée aussi Le plateau de Lorette) sont de plus en plus chantées.
La Revue de l’Association des Professeurs d’Histoire et de géographie n° 422 sous-titre "Un texte postérieur à la guerre" semant le doute sur l’origine de la chanson. Il est vrai que la version entonnée par Mouloudji comme Utgé-Royo et d’autres se base sur le texte publié en 1934 par l’Association des Ecrivains et Artistes révolutionnaires. Ceci dit, dans mon village d’Entraygues, elle fut surtout reprise publiquement entre 1918 et 1925. Je suis persuadé que cela correspond au cas général.
Diverses sources, y compris émanant d’historiens, cataloguent la Chanson de Craonne comme chant révolutionnaire "d’extrême gauche" diffusée essentiellement après guerre, en particulier par le Parti Communiste Français. C’est bien trop limitatif.
Premièrement, beaucoup d’anciens combattants de 14-18 étaient à la fois patriotes, fiers de leur participation à la défense de la France (de leur légion d’honneur, médaille militaire ou croix de guerre) et chanteurs occasionnels de la Chanson de Craonne par souvenir des souffrances endurées, par esprit de groupe des anciens poilus. Ainsi, ces paroles étaient reprises par presque tous les Anciens combattants de mon village lors de leurs banquets annuels entre 1918 et 1939. Quant à moi, je l’ai entendue chanter des dizaines de fois entre 1949 et 1965 par d’anciens combattants de 14-18 dont beaucoup ne peuvent pas être classés à l’extrême gauche. Elle se chantait aussi lors de fêtes familiales ; mon frère a ainsi enregistré mon grand père lors de ses noces de vermeil.
Les paroles ont-elles été radicalisées politiquement après guerre par l’extrême gauche ? Je ne le crois pas. Beaucoup d’anciens poilus non marqués politiquement étaient mus par une haine infinie contre les profiteurs qui avaient fait tuer leurs camarades de tranchées. J’ai entendu des paroles bien plus violentes contre ces "embrusqués" que celles de la version officielle depuis 1934.
Parmi les variantes des deux derniers vers du dernier couplet, notons celles-ci :
Tous nos compagnons sont étendus-là
Pour défendre les biens de ces feignants-là.
ou
Tous nos pauvres frères sont étendus là bas
Pour garder le bien de ces fumiers là.
En fait, le débat d’historiens sur la Chanson de Craonne touche à deux questions fondamentales :
A-t-il existé un bolchévisme des tranchées françaises durant les années 1917 et 1918 ? Ma réponse est oui, en particulier sur la base des discussions que j’ai menées avec plusieurs anciens combattants de l’époque.
A-t-il existé un antimilitarisme de masse dans les années 1905 à 1914, trahi en 1914 par les dirigeants de la SFIO ? Ma réponse est encore OUI !
Août 1914 : La trahison militariste et nationaliste de la 2ème Internationale
Jacques Serieys
Quand au bout d’huit jours le r’pos terminé
On va reprendre les tranchées,
Notre place est si utile
Que sans nous on prend la pile
Mais c’est bien fini, on en a assez
Personne ne veut plus marcher
Et le cœur bien gros, comm’ dans un sanglot
On dit adieu aux civ’lots
Même sans tambours, même sans trompettes
On s’en va là-haut en baissant la tête
Refrain
Adieu la vie, adieu l’amour,
Adieu toutes les femmes
C’est bien fini, c’est pour toujours
De cette guerre infâme
C’est à Craonne sur le plateau
Qu’on doit laisser sa peau
Car nous sommes tous des condamnés
Nous sommes les sacrifiés
2ème couplet
Huit jours de tranchée, huit jours de souffrance
Pourtant on a l’espérance
Que ce soir viendra la r’lève
Que nous attendons sans trêve
Soudain dans la nuit et le silence
On voit quelqu’un qui s’avance
C’est un officier de chasseurs à pied
Qui vient pour nous remplacer
Doucement dans l’ombre sous la pluie qui tombe
Les petits chasseurs vont chercher leurs tombes
Refrain
3ème couplet
C’est malheureux d’voir sur les grands boulevards
Tous ces gros qui font la foire
Si pour eux la vie est rose
Pour nous c’est pas la même chose
Au lieu d’se cacher tous ces embusqués
Feraient mieux d’monter aux tranchées
Pour défendre leur bien, car nous n’avons rien
Nous autres les pauv’ purotins
Tous les camarades sont enterrés là
Pour défendre les biens de ces messieurs là
Refrain
4ème couplet
Ceux qu’ont le pognon, ceux-là reviendront
Car c’est pour eux qu’on crève
Mais c’est bien fini, car les trouffions
Vont tous se mettre en grève
Ce s’ra vot’ tour messieurs les gros
D’monter sur le plateau
Et si vous voulez faire la guerre
Payez-la de votre peau
Cliquer sur une adresse URL ci-dessous :
https://www.youtube.com/watch?v=z-y...
http://www.youtube.com/watch?v=UM7b...
Le Général Bach, ancien responsable du service historique de l’Armée de Terre, explique sur les lieux mêmes où se déroulèrent ces évènements, à Craonne en 1917, comment des soldats exténués en arrivèrent à se mutiner et à refuser de monter à l’assaut. La répression politico-militaire qui s’en suivit, déclencha une vague de "fusillés pour l’exemple".
Date | Nom | Message |