Trump : Bataille sur son décret anti-immigration

vendredi 10 février 2017.
 

- E) Trump fait appel du blocage du décret anti-immigration par un juge
- D) Un juge fédéral bloque le décret du président des Etats-Unis
- C) Les interprètes de l’armée américaine en Irak s’estiment trahis
- B) Plusieurs milliers de manifestants à Londres, Berlin et Paris
- A) La presse américaine dénonce la « cruauté » de Donald Trump

E) Trump fait appel du blocage du décret anti-immigration par un juge

Avec ce blocage, un juge fédéral de l’Etat de Washington impose un premier sérieux revers à la nouvelle administration américaine

La justice américaine a gâché le début du premier week-end du président Donald Trump dans son complexe de Mar-A-Lago (Floride), vendredi 3 février. En début de soirée, un juge fédéral de l’Etat de Washington a en effet bloqué le décret anti-immigration signé le 27 janvier par le milliardaire, au grand dam de la Maison Blanche. Samedi soir, le ministère de la justice a annoncé qu’il faisait appel de la décision.

Une décision de justice jugée « ridicule » par le président américain, samedi, dans une salve de tweets matinaux

« L’opinion de ce soi-disant juge, qui en gros prive notre pays de sa police, est ridicule et sera cassée ! »

« Où va notre pays quand un juge peut arrêter une interdiction de voyager faite pour des raisons de sécurité intérieure et quand n’importe qui, même avec des mauvaises intentions, peut entrer aux Etats-Unis », a-t-il à nouveau tweeté samedi soir, avant d’ajouter : « Le juge ouvre notre pays à des terroristes potentiels et à d’autres qui ne partagent pas nos meilleurs intérêts. Les méchants sont très contents ! »

Ce décret a pour objectif de geler provisoirement l’accès au territoire américain pour les ressortissants de six pays d’Afrique et du Moyen-Orient (Iran, Irak, Libye, Somalie, Soudan et Yémen), et durablement pour ceux de Syrie. L’administration souhaite profiter de cette période pour mettre en place des procédures de contrôle accrues pour les demandeurs de visa de ces pays considérés comme dangereux. Ce décret a également suspendu l’arrivée de réfugiés.

La décision du président américain et la soudaineté de son application ont suscité une vague de manifestations aux Etats-Unis. Parmi les dernières en date, le Musée d’art moderne de New York, le MoMA, a protesté à sa manière en exposant des œuvres d’artistes soudanais, irakiens ou iraniens. Le décret a aussi entraîné des condamnations internationales, et alimenté l’accusation de mesures visant les musulmans, en dépit des vigoureuses dénégations de la Maison Blanche.

Exaspération à la Maison Blanche

Le juge James Robart, nommé par un président républicain, George W. Bush, a pris sa décision, qui s’étend à l’ensemble du territoire américain, pour permettre l’examen de la plainte déposée le 30 janvier par l’attorney general (ministre de la justice) de l’Etat de Washington, Bob Ferguson, un démocrate. Ce dernier estime en effet, à rebours de l’administration, que la mesure cible spécifiquement les ressortissants de confession musulmane et qu’elle est donc contraire à la Constitution qui interdit ce type de discrimination.

La réaction de la Maison Blanche a donné la mesure de l’exaspération suscitée par ce premier revers. Le service de presse de la présidence a publié un premier communiqué à 23 h 09 vendredi (5 h 09 samedi en France) dénonçant une décision « scandaleuse ». Il a renvoyé une version amendée du texte sept minutes plus tard, dans laquelle ce qualificatif avait été retiré, tout en assurant que le ministère de la justice allait intervenir au plus vite pour défendre une décision « juste et appropriée ».

Comme elle n’a cessé de le faire depuis une semaine, la Maison Blanche a rappelé que le décret controversé visait à assurer la sécurité des citoyens américains, même si les derniers attentats perpétrés aux Etats-Unis ont été commis par des personnes sans liens avec les pays visés. Cette justification est contestée par les détracteurs de la décision, qui estiment au contraire qu’elle donne des arguments aux groupes extrémistes, qui tentent de dépeindre les Etats-Unis comme étant en guerre contre l’islam.

Et dans la foulée de cette décision de justice, la diplomatie américaine a décidé samedi de réinstaurer les 60 000 visas pour les Etats-Unis qui avaient été révoqués à la suite du décret pris par M. Trump. « Les personnes munies de visas qui n’ont pas été physiquement annulés peuvent désormais voyager si le visa est valide », a précisé une porte-parole du département d’Etat dans un communiqué.

« La Constitution a vaincu »

Au lendemain de l’attentat de San Bernardino (Californie), le 2 décembre 2015, perpétré par des citoyens américains d’origine pakistanaise, M. Trump, alors candidat à l’investiture républicaine pour la présidentielle, avait souhaité interdire l’accès du territoire aux musulmans. Devant le tollé suscité par sa proposition, que de nombreux républicains avaient jugée précisément inconstitutionnelle, il avait alors évoqué une interdiction visant des pays touchés par le terrorisme djihadiste.

Vendredi soir, M. Ferguson s’est félicité de la décision du juge Robart. « La Constitution a vaincu aujourd’hui. Personne n’est au-dessus de la loi, pas même le président », a-t-il estimé, tout en disant s’attendre à une farouche bataille juridique qui pourrait s’achever devant la Cour suprême. Dans la même journée, un juge fédéral de Boston (Massachusetts) avait pris une décision inverse. Le juge Nathaniel Gorton, également nommé par George W. Bush, avait fait valoir notamment que le décret signé par Donald Trump ne mentionne nulle part des « pays musulmans », refusant de prendre en compte les déclarations passées de M. Trump.

Depuis le 27 janvier, des juges fédéraux se sont attaqués avec succès à certaines conséquences du décret, en obtenant notamment que des personnes retenues dans des aéroports américains en dépit de titres de séjour légaux puissent finalement entrer aux États-Unis. Après avoir multiplié les signaux contradictoires, l’administration a exclu du champ d’application du décret les personnes disposant d’un titre de séjour permanent, ainsi que certains binationaux. Aucune décision n’a été rendue jusqu’à présent sur le fond.

Bataille de chiffres

Selon un sondage publié par CNN quelques heures avant la décision du juge de l’Etat de Washington, une majorité des personnes interrogées (53 %) s’opposent à la mesure. Une majorité comparable (55 %) considère par ailleurs cette mesure comme une interdiction visant les musulmans.

Au lendemain des premières manifestations, la Maison Blanche avait jugé les réactions exagérées en estimant que seules 109 personnes avaient été temporairement retenues dans des aéroports américains. Cette affirmation a entraîné une bataille de chiffres. Au cours de l’instruction d’une plainte déposée par deux Yéménites bloqués par le décret, un fonctionnaire du ministère de la justice interrogé par un tribunal d’Alexandria (Virginie) a indiqué que 100 000 visas avaient été révoqués dans le cadre de cette procédure. Le département d’Etat a contesté cette estimation en avançant le chiffre de 60 000 permis de séjour annulés, selon le Washington Post.

M. Trump a multiplié les décrets présidentiels (executive orders et presidential memoranda) depuis son arrivée à la Maison Blanche. Cette expression du pouvoir exécutif peut cependant être contrecarrée par le pouvoir judiciaire. En 2015, un juge fédéral du Texas, saisi par des Etats contrôlés par le Parti républicain, avait ainsi bloqué une décision du président Barack Obama de régulariser temporairement des millions de sans-papiers présents de longue date aux Etats-Unis. Ce gel s’était prolongé un an plus tard, la Cour suprême s’étant montrée incapable de trancher.

Gilles Paris (Washington, correspondant) Journaliste au Monde

* Source : http://www.lemonde.fr/donald-trump/...

D) Un juge fédéral bloque le décret du président des Etats-Unis

Les compagnies Air France et Qatar Airways ont annoncé, samedi 4 février, qu’elles embarquaient de nouveau sur leurs vols à destination des Etats-Unis des ressortissants de sept pays à majorité musulmane (Yémen, Iran, Libye, Somalie, Soudan, Syrie et Irak) visés par un décret de Donald Trump, après sa suspension par la justice américaine.

Le juge fédéral de Seattle a bloqué vendredi le décret du nouveau président des Etats-Unis qui avait suscité de vives protestations internationales et la condamnation des organisations de défense des droits de l’homme.

« En conséquence, et sous réserve de satisfaire aux conditions d’entrée aux Etats-Unis, Air France accepte dès aujourd’hui sur ses vols les passagers des nationalités concernées », a déclaré la compagnie française dans un communiqué.

Sur son site, Qatar Airways, qui s’était dans un premier temps conformée à l’interdiction, indique qu’elle va se conformer aux nouvelles directives, du moment que les passagers possèdent un visa en règle. La compagnie ajoute :

« Les ressortissants des sept pays, ainsi que tous les réfugiés en possession d’un visa en règle ou d’une résidence permanente seront autorisés à se rendre aux Etats-Unis. »

« A tous ceux qui ont un visa »

De nombreux ressortissants des sept pays visés ont été retenus ces derniers jours dans les aéroports américains à leur arrivée ou empêchés d’embarquer au départ d’autres pays.

A Téhéran, une agence de voyage a conseillé aux Iraniens qui souhaitaient se rendre aux Etats-Unis de le faire le plus vite possible. « A tous ceux qui ont un visa, d’immigration ou autre, (…) prenez un avion pour n’importe quelle ville [des Etats-Unis] ce soir », a affirmé le conseiller de cette agence sous le couvert de l’anonymat. La décision du juge fédéral peut « être rejetée en appel », a-t-il prévenu, conseillant aux Iraniens de ne signer aucun document s’ils étaient empêchés d’entrer sur le sol américain à leur arrivée à l’aéroport.

La Maison Blanche a promis de répliquer au blocage en affirmant que le ministre de la justice entendait « déposer une injonction d’urgence pour » faire appliquer le décret et annuler la décision du juge fédéral.

Mais dans la foulée de cette décision de justice, la diplomatie américaine a décidé de réinstaurer les 60 000 visas pour les Etats-Unis qui avait été révoqués à la suite du décret pris par Donald Trump. « Les personnes munies de visas qui n’ont pas été physiquement annulés peuvent désormais voyager si le visa est valide », a précisé une porte-parole du département d’Etat dans un communiqué.

Source : http://www.lemonde.fr/donald-trump/...

C) Les interprètes de l’armée américaine en Irak s’estiment trahis par le « Muslim Ban »

Depuis 2008, les Etats-Unis ont accueilli plus de 50 000 Irakiens associés à leurs forces.

Nadia (le prénom a été modifié) est amère. Lundi 30 janvier, cette Irakienne yézidie de 24 ans devait s’envoler avec un aller simple pour le Nebraska, dans le Midwest américain, avec son mari, sa mère et ses trois sœurs, pour y rejoindre son frère aîné. Quelques heures avant le vol, l’Organisation internationale pour les migrations leur a annoncé par téléphone que leur départ était reporté sine die.

Les efforts déployés depuis cinq ans par son frère, ancien interprète de l’armée américaine en Irak de 2004 à 2011, pour obtenir leur réinstallation aux Etats-Unis ont été anéantis par la signature par le président Donald Trump, le 27 janvier, du « Muslim Ban », le décret anti-immigration interdisant aux ressortissants de sept pays à majorité musulmane, dont l’Irak, et aux réfugiés, l’entrée sur le territoire américain pendant 90 jours.

Aucune exception n’a été prévue, pas même pour ceux qui ont mis leur vie en danger en travaillant pour l’armée américaine après l’occupation de l’Irak en 2003. La décision est vécue comme une trahison dans un pays où les forces américaines sont le principal partenaire des troupes engagées depuis 2014 contre l’organisation Etat islamique (EI). Le premier ministre, Haïder Al-Abadi, n’entend pourtant pas entériner la mesure de réciprocité votée, lundi, par le Parlement à Bagdad.

« Mon frère est furieux, raconte Nadia. Il a pris d’énormes risques pour eux. Il a mis toute la famille en danger avec ce travail. Je me souviens encore très bien des tensions qu’il y avait à la maison, de ma mère qui pleurait à cause des menaces que l’on nous déposait sous la porte, à Sinjar ». Ecœuré, son grand frère envisage même de revenir vivre en Irak, malgré les risques, si l’interdiction est reconduite. En 2012, à 25 ans, lui seul avait pu bénéficier automatiquement du programme – unique en son genre – de réinstallation aux Etats-Unis des Irakiens ayant travaillé pour l’armée américaine et leurs proches.

Ils sont plus de 50 000 à avoir ainsi obtenu le visa d’immigration spécial depuis 2008. Réfugiée à Dohuk depuis la prise de Sinjar par l’EI en août 2014, la famille de Nadia fait partie des 251 Irakiens dont la réinstallation était en cours. « On n’a plus rien ici. J’ai même arrêté l’université et je ne pourrai pas être réintégrée cette année », dit l’étudiante en troisième année de chimie.

« On s’est tellement sacrifié pour ce travail, et maintenant ils nous lâchent !, abonde Mizar, un interprète yézidi de 50 ans. Je comprends qu’il y a des extrémistes qui essaient de rejoindre les Etats-Unis, mais le gouvernement américain doit faire la différence entre ceux-là et ceux qui, comme moi, les ont aidés à réaliser leur mission en Irak. »

« La situation était désastreuse »

Interprète pour la Civilian and Military Assistance Training de 2005 à 2010 sur une base américaine située entre Mossoul et Tal Afar, Mizar a accepté tous les risques inhérents à la mission. « La situation était désastreuse, surtout en 2005-2006. C’était tellement dangereux de sortir de la base, qui était surveillée par les extrémistes d’Al-Qaida, que je ne suis pas rentré chez moi pendant les trois premiers mois. Les Arabes accusaient les yézidis de collaborer avec les infidèles venus occuper l’Irak. Mon compagnon de chambrée a été tué avec son père dans une embuscade sur une route près de Mossoul », se souvient-il. Les demandes de réinstallation se sont multipliées au fil de l’expansion de l’Etat islamique en Irak, en 2014. « A l’époque, on portait des masques et on avait des pseudonymes, mais je pense qu’ils [les djihadistes] ont les noms de ceux qui ont travaillé avec la coalition américano-britannique. »

Jusqu’au 3 août 2014, Mizar n’avait pas envisagé de quitter son pays. L’attaque de l’EI contre Sinjar, pendant laquelle plusieurs milliers de yézidis ont été tués ou faits prisonniers selon les Nations unies, a tout changé. « Je ne vois plus d’avenir pour les yézidis en Irak. La situation ne fait qu’empirer à Sinjar. On veut partir à tout prix. C’est doublement dangereux pour moi », raconte ce père de trois enfants, installé à Dohuk après avoir vécu deux ans et demi dans un camp de réfugiés. Son dossier finalement complet, après d’interminables démarches administratives, Mizar ne sait plus comment se projeter. Seule petite lueur d’espoir, selon la presse américaine, le Pentagone a été chargé d’établir une liste d’Irakiens ayant travaillé avec l’armée américaine auxquels l’interdiction ne sera pas appliquée.

Hélène Sallon (Dohuk (Kurdistan irakien), envoyée spéciale) Moyen-Orient

* Source http://www.lemonde.fr/moyen-orient-...

B) Plusieurs milliers de manifestants à Londres, Berlin et Paris contre le décret anti-immigration de Donald Trump

Dans la capitale française, environ un millier de personnes se sont réunies sur la place du Trocadéro, avant de se disperser au bout du Champ-de-Mars

Plusieurs milliers de personnes ont manifesté samedi 4 février à Londres, Berlin et Paris pour protester contre le décret anti-immigration pris par Donald Trump, bloqué vendredi par un juge fédéral de Seattle. Dans la capitale française, environ un millier de personnes se sont réunies sur la place du Trocadéro (16e arrondissement), avant de disperser au bout du Champ-de-Mars.

« Nous sommes là pour dire que nous n’acceptons pas la haine », a expliqué Michael Jacobs, un Américain de 20 ans, co-organisateur de la marche. A Londres, près de 10 000 manifestants, selon le Guardian, se sont rassemblés en fin de matinée devant l’ambassade des Etats-Unis à l’appel de plusieurs organisations antiracistes, pacifistes ou opposées aux mesures d’austérité.

Ils ont ensuite pris le chemin de Trafalgar Square, brandissant des pancartes sur lesquelles on pouvait notamment lire : « Non au racisme ! », « Non à Trump ! » ou encore « Il ment ! », a constaté sur place un journaliste de l’Agence France-Presse. Les organisateurs dénonçaient également la « collusion » entre la première ministre britannique Theresa May et M. Trump, qu’elle a invité à effectuer une visite d’Etat au Royaume-Uni dans le courant de l’année.

« Combattez l’ignorance, pas les immigrés »

« Si Theresa May persiste à vouloir inviter Trump, nous finirons par paralyser cette capitale », a menacé Chris Nineham, vice-président de l’organisation « Stop the war coalition ». Une pétition en ligne réclamant notamment que la visite d’Etat de M. Trump soit ramenée au rang de simple visite, afin d’éviter une rencontre protocolaire entre la reine d’Angleterre et le président américain a réuni près de deux millions de signatures.

Du côté de Berlin, environ 1 200 personnes, selon la police, se sont réunies samedi après-midi devant la Porte de Brandebourg pour protester également contre le décret anti-immigration. Arborant des affiches sur lesquelles on pouvait notamment lire « Combattez l’ignorance, pas les immigrés », les manifestants se sont rendus jusque devant l’ambassade des Etats-Unis.

A Washington, plusieurs centaines de personnes, portant souvent le bonnet rose devenu l’un des symboles de l’opposition au nouveau président américain, ont également manifesté dans une ambiance bon enfant, marchant depuis la Maison Blanche jusqu’au Congrès.

A New York, samedi a été marqué par des manifestations. Près de 3 000 personnes se sont rassemblées autour de Stonewall Park à l’appel de la communauté gay pour témoigner sa « solidarité » envers les musulmans notamment. La foule a repris en chœur des slogans devenus des refrains des manifestations anti-Trump : « Résistez », « Ne restons pas silencieux » ou encore « Pas de haine ! Pas de peur ! Les réfugiés sont les bienvenus ! »

A West Palm Beach, en Floride, où M. Trump passe le week-end avec sa famille, deux mille personnes ont défilé samedi soir à proximité de sa résidence de Mar-a-Lagore.

Vendredi, un juge fédéral de Seattle, James Robert, a bloqué l’application du décret signé le 27 janvier par le président américain et qui interdisait l’entrée pendant 90 jours aux ressortissants de sept pays à majorité musulmane (Iran, Irak, Libye, Somalie, Soudan Syrie, Yémen), que l’administration de M. Trump décrit comme des viviers terroristes. Cette injonction temporaire est valable le temps qu’une plainte déposée lundi par le ministre de justice de l’Etat de Washington soit examinée sur le fond.

Source : http://abonnes.lemonde.fr/europe/ar...

A) Décret anti-immigration : la presse américaine dénonce la « cruauté » de Donald Trump

Le président des Etats-Unis a signé, vendredi, une interdiction temporaire d’entrée sur le territoire américain pour les ressortissants de sept pays musulmans. Une bonne partie de la presse s’inquiète d’une mesure « fanatique et dangereuse ».

« Une mesure fanatique, lâche, trompeuse. » C’est par ces mots que le New York Times qualifie le décret présidentiel signé par Donald Trump vendredi 27 janvier, qui suspend temporairement toute entrée sur le territoire américain pour les ressortissants de sept pays majoritairement musulmans (Somalie, Soudan, Syrie, Irak, Iran, Libye, Yémen).

Les « premières victimes » sont, regrette le quotidien américain, ceux qui « avaient toutes les raisons de croire qu’ils avaient échappé au carnage et au despotisme dans leurs pays d’origine pour rejoindre une nation de l’espoir ».

Ce décret « ridicule » est « dénué de logique », rappelle le New York Times, puisqu’il invoque comme justification l’attaque du 11 septembre 2001, tout en n’incluant pas dans la liste les ressortissants de l’Arabie saoudite, du Liban, de l’Egypte ou des Emirats arabes unis – pays d’où provenaient les kamikazes du 11-Septembre.

Plus grave encore, selon l’éditorial du quotidien américain, les groupes extrémistes vont s’empresser de clamer que les Etats-Unis ont déclaré la guerre à l’islam. Il craint aussi que les alliés des Etats-Unis au Proche-Orient puissent également remettre en cause leur coopération avec un pays qui « diffame leur foi. »

Décret signé le jour de la mémoire de l’Holocauste

Le New York Times n’a pas manqué de relever une ultime ironie : le décret a été signé le 27 janvier, jour de la mémoire de l’Holocauste. De nombreux juifs européens ont en effet fui vers les Etats-Unis pour échapper aux persécutions des nazis, de même que des rescapés, après la guerre. « Monsieur le président, je vous présente ma famille », dit ainsi l’un des éditorialistes du quotidien, Nicholas Kristof, qui évoque l’histoire de son père qui s’était réfugié aux Etats-Unis après avoir échappé à la Gestapo.

Choisissant également la démonstration par l’exemple, le site Vox évoque le parcours de la politologue Judith Shklar, immigrée juive originaire de Riga (Lettonie) j qui a théorisé la cruauté pratiquée par le pouvoir.

La cruauté, « l’infliction délibérée d’une souffrance physique puis émotionnelle sur une personne ou un groupe plus faible dans un but défini », est plus facile à mettre en place pour un dépositaire du pouvoir public car il se représente sa victime comme une abstraction. D’où le fait, selon Vox, que l’administration Trump puisse infliger cette mesure aux ressortissants concernés, semble-t-il en dépit de toute logique.

Un « modèle » qui s’effondre

Le Washington Post donne pour sa part la parole à un journaliste palestinien immigré dans le New Jersey à l’adolescence. Daoud Kuttab déplore que, après avoir enseigné pendant des années les « avantages de la vie aux Etats-Unis et des valeurs américaines », son « modèle », celui du « pays de la liberté d’expression », soit en train de s’effondrer sous ses yeux. « Donald Trump n’est pas à la hauteur de cette exemplarité brillante », ajoute-t-il.

Dans le New Yorker, la journaliste Laura Secor raconte, elle aussi, son expérience de l’immigration aux Etats-Unis à travers celle de ses amis. Reporteure en Iran alors que son mari couvrait la guerre en Irak, elle raconte ses dîners, de retour aux Etats-Unis en 2007, rassemblant les amitiés formées au cours de leurs reportages.

Des traducteurs, des médecins, des journalistes, fuyant leur pays parfois avec son aide : « Ils pensaient – nous pensions – qu’ils trouveraient la sécurité et la liberté sur ce rivage, et que les Etats-Unis ne seraient que plus riches de les avoir accueillis. Nous n’avions pas de plus beau cadeau à leur offrir, et il n’y avait rien en quoi nous croyions plus profondément. »

L’Iran et l’Irak font aujourd’hui partie des sept pays dont les ressortissants sont temporairement interdits d’entrée sur le territoire américain. « Jour après jour, nous ressemblons plus à ces pays que nos réfugiés ont fuis. »

Big Browser Journaliste au Monde

Source : http://www.lemonde.fr/big-browser/a...


Signatures: 0
Répondre à cet article

Forum

Date Nom Message