Nous avons perdu ce soir... ( article du 6 mai)

mardi 8 mai 2007.
 

Voilà, c’est fait. On le sentait bien venir, mais tout de même, cette ampleur... Mal au cœur, mal à l’âme, même si on s’y attendait un peu beaucoup. Mais quoi, toute cette haine déployée, ces discours de rejet, ce positionnement clairement de droite, une « droite décomplexée », comme il l’a définie lui-même, tous ces vieux relents lepénistes assumés ont donc séduit plus de 53% de nos compatriotes ?

C’est bizarre de vivre ça, ici et maintenant. Cette défaite, et quelle défaite, après toutes ces victoires accumulées. Faut-il vraiment les rappeler ? Dès 2003, la résistance aux projets scélérats de Fillon, ensuite, dans l’ordre : les régionales, les cantonales, les européennes, le Non au TCE, le refus du CPE...

Tout ça pour ça. C’est complètement surréaliste. Ils étaient où, tous ceux qui avaient dit NON haut et fort, il y a deux ans ? Ils étaient où ? Ce soir, ce n’est pas de la colère, ni du dépit, ce soir c’est une vraie tristesse, doublée de la peur dont on a déjà parlé ici. Ce soir, la Bastille ne sera pas en fête, la fête, c’est une idée de gauche. J’entends des jeunes ce soir, des jeunes gens de 18 ans, qui revendiquent leur appartenance à cette droite dure et sans complexe, qui réclament l’ordre et la discipline, qui veulent que « ça tourne ».

Il n’aura même pas besoin de tuer l’esprit de 68 le nouveau président, c’est déjà fait. La jeunesse, c’est rebelle, ou on se trompe ? Rebelles, les jeunes « populaires » ? Rebelles, les petits de Neuilly ? Rebelles, les écouteurs de Barbelivien ? Modèle Bigard réformé Steevy. On peut dormir tranquilles.

Le rejet de Sarkozy n’a pas été assez fort pour gagner. Il aurait fallu lui ajouter une véritable dynamique de gauche, des propositions capables de mobiliser. Il fallait être ENSEMBLE. Vous vous souvenez, Firmi ? Tous ensemble, tous ensemble ! C’est comme ça qu’on gagne. Pas en morceaux. Une gauche qui gagne, c’est une gauche de gauche, qui ne mégotte pas avec les principes. Qui parle fort de ses valeurs. Qui ne cache pas ses intentions. Qui dit aux travailleurs, on est avec vous, on pense à vous, c’est pour vous qu’on est là.

Aussi longtemps que nos discours seront tièdes et pencheront au centre, alors les élections se perdront, les unes après les autres. A commencer par celles qui se pointent là, dans trois semaines. Craindre le pire, à présent. Ce soir, ce n’est pas la victoire de n’importe quelle droite. Ce n’est plus Giscard, ce n’est plus Chirac, celui qui se faisait passer pour un mec sympa. Ce soir, c’est un type éminemment antipathique qui a gagné. Vous avez entendu ses premiers mots ? Toute sa litanie est revenue, au grand jour, sans faux-nez, encore une fois. Ce soir, dans notre pays, une majorité de Français a dit Oui à ces mots-là. Quelque chose s’est cassé entre la gauche et le pays. Ca c’est insupportable.

Ce soir, nous n’avons pas seulement perdu l’élection présidentielle, nous avons aussi perdu, et pour un bout de temps, tout espoir de voir la vie s’améliorer pour des millions de gens qui en auraient tellement besoin. Demain, il fera jour. On y verra peut-être plus clair. Mais c’est loin d’être sûr.

brigitte blang


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