Les bourses dans leur bulle

vendredi 23 février 2018.
 

« J’y pense et puis j’oublie, c’est la vie c’est la vie ». La rengaine du protagoniste de la chanson de Dutronc va décidément comme un gant aux agents du capitalisme. Les crises succèdent aux bulles à un rythme toujours plus effréné, signe que dans le nouvel âge du capitalisme l’économie financière s’est inexorablement détachée de l’économie réelle. Pourtant rien n’y fait. A force prendre le contre-pied du réel, voilà que déjà la nouvelle crise menace.

La semaine passée, les bourses du monde entier ont tangué. Crise ou pas crise ? Le fait de se poser la question est déjà un révélateur en soi. Lundi 5 février, le Dow Jones perdait 4,6%, entraînant à sa suite et durant toute la semaine les différents indices à travers le monde. La raison de cet ébranlement ? Les chiffres de l’emploi aux Etats-Unis, qui se révélaient…particulièrement bons. Car dans ce monde virtuel qui marche sur la tête, tout se fait à l’envers du bon sens : lorsque le chômage diminue, les cours de bourse s’effondrent. Les investisseurs, ces nouveaux oracles des temps modernes qui distillent leurs prophéties auto-réalisatrices, n’ont pas manqué de s’inquiéter de cette amélioration sur le front de l’emploi pouvant conduire, diantre, à des revendications salariales, et qui sait, à un retour de l’inflation.

Ah, l’inflation ! Cet épouvantail que la Caste agite pour maintenir les taux bas et l’argent bon marché. La spéculation a remplacé la rente et le loyer de l’argent ne rapporte guère par rapport aux gains potentiels des cours artificiels de bourse. Au point que la lutte contre l’inflation est même institutionnalisée au sein de l’Union européenne via son bras armé la Banque centrale européenne.

Alors bien sûr la garde prétorienne de la finance est toujours là pour minimiser et travestir les faits. Christine Lagarde, directrice du Fonds monétaire international (FMI), assurait ainsi la semaine dernière depuis le World Government Summit (tout un programme…) de Dubaï que le décrochage des bourses ne correspondait qu’à de simples « corrections ». Mercredi 7 février, le ministre de l’Économie et des Finances Bruno Le Maire affirmait quant à lui qu’il s’agissait « d’un retour au réel » des marchés financiers, quand bien même le dévissage traduisait tout l’inverse. Avant d’en profiter pour renchérir sur le deuxième hochet des financiers : le poids de la deeeeeeeeeeeeette.

Un retour au réél ? Mais de quelle réalité est-il question lorsqu’après les « plans sociaux » (lire les licenciements) se traduisant immanquablement par une hausse des cours de l’action, on découvre désormais que cela fonctionne aussi malheureusement dans l’autre sens, les statistiques favorables à l’emploi suggèrant la crise. Absurde !

Le réel, c’est que malgré tous les efforts des chantres de la finance, l’inflation revient aux Etats-Unis, avec une hausse sur un an de 2,1% annoncée le 14 février. Dès lors, au moindre signal qu’elles jugeraient défavorables sur les prix ou les salaires, les bourses pourraient bien à nouveau dévisser. Et entraîner avec elles dans la crise l’ensemble de l’économie. La finance n’est plus simplement déconnectée de l’économie réelle, elle impose aux peuples sa propre réalité. Preuve qu’il est plus que temps de définanciariser l’économie.

François Cocq


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