Licenciement abusif : une deuxième ordonnance phare de Macron invalidée par un tribunal

jeudi 10 janvier 2019.
 

Macron fait régresser la France au regard du droit international

Les prud’hommes d’Amiens ont jugé le plafonnement des indemnités pour un salarié licencié abusivement contraire au droit international. Cette mesure avait été mise en place par Emmanuel Macron au début de son quinquennat par ordonnance.

La France a-t-elle désormais un droit du travail moins progressiste que le droit international ? Le conseil de prud’hommes d’Amiens a en tout cas estimé que le plafonnement des indemnités prud’homales versées à un salarié licencié « sans cause réelle et sérieuse », introduit au début du quinquennat d’Emmanuel Macron, était « contraire » au droit international, dans une décision que l’AFP a consultée le 6 janvier.

L’une des ordonnances Macron les plus emblématiques invalidée par un tribunal

Les dispositions de l’article L1235-3 du Code du travail, qui fixe les plafonds des indemnités versées pour licenciement abusif en fonction de l’ancienneté du salarié, sont « contraires à la convention 158 de l’Organisation internationale du travail (OIT) car elles ne fixent pas une indemnité adéquate ou toute autre forme de réparation considérée comme appropriée », peut-on ainsi lire dans le jugement rendu le 19 décembre.

Dans sa décision, repérée par le site du quotidien Actuel RH et Le Monde, le conseil de prud’hommes d’Amiens rappelle que la France a ratifié en 1989 cette convention. Celle-ci indique que les juridictions nationales doivent être habilitées à « ordonner le versement d’une indemnité adéquate ou toute autre forme de réparation considérée comme appropriée » en cas de licenciement injustifié.

« Le salarié [licencié] subit irrémédiablement un dommage [...] d’ordre psychique mais également d’ordre financier », car l’indemnité versée par Pôle emploi ne maintient pas ses revenus au niveau antérieur, estime le conseil, composé de deux conseillers salariés et deux conseillers employeurs.

Dans cette affaire, les prud’hommes avaient été saisis en février 2018 par le salarié d’un commerce d’alimentation générale. Ils ont jugé abusif son licenciement et, à ce titre, condamné l’entreprise à lui verser 2 000 euros de dommages et intérêts, soit plus que le demi-mois de salaire que le barème prévu par le Code du travail lui aurait accordé.

Une nouvelle brèche dans la réforme du Code du travail voulue par Emmanuel Macron ?

Le barème des indemnités prud’homales en cas de licenciement abusif, une des principales mesures des ordonnances réformant le droit du travail, est entré en vigueur fin septembre 2017.

Le conseil de prud’hommes de Troyes avait rendu une série de décisions allant dans le même sens le 13 décembre. Le tribunal avait en effet estimé, dans ses jugements obtenus par Mediapart : « Ces barèmes ne permettent pas d’être dissuasifs pour les employeurs qui souhaiteraient licencier sans cause réelle et sérieuse un salarié ; ces barèmes sécurisent davantage les fautifs que les victimes et sont donc inéquitables » ; [La barémisation des indemnités prud’homales] viole la Charte sociale européenne et la Convention n°158 de l’OIT [Organisation internationale du travail] ».

Ces décisions ne rendraient toutefois caduque la mesure macronienne qu’après les jugements en appel et la décision définitive éventuelle de la Cour de cassation.

Lire aussi : Ordonnances Pénicaud : les patrons n’ont-ils retenu que la liberté de licencier plus facilement ?

Fin de l’article

HD


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