Réinventer un projet socialiste

samedi 28 juin 2014.
 

Par Éric Toussaint et Damien Millet, porte-parole et président pour la Belgique du Comité pour l’annulation de la dette du tiers-monde.

Les défenseurs du capitalisme, au premier rang desquels les dirigeants de l’Union européenne, ont perdu toute crédibilité. Depuis des années, ils piétinent les droits des peuples, mais n’ont pas hésité à prendre le contre-pied de leurs principes pour organiser le sauvetage des banques. Les partis au pouvoir en Europe pouvaient agir autrement en nationalisant celles-ci et en récupérant le coût de cette opération sur le patrimoine des grands actionnaires et des administrateurs. L’instrument public de crédit ainsi constitué pourrait financer des projets socialement utiles, respectueux de l’environnement, générateurs d’emplois, tout en garantissant l’épargne des particuliers. La crise remet à l’ordre du jour des propositions écartées durant la longue nuit néolibérale, comme la réduction radicale du temps de travail (avec embauche compensatoire et sans perte de salaire) ou l’indexation des salaires et des allocations sociales sur le coût de la vie. L’Europe a besoin d’une nouvelle discipline financière : il faut ouvrir les livres de comptes des entreprises à des audits internes (syndicats) et externes, réglementer tous les produits financiers et interdire aux entreprises d’avoir quelque actif dans un paradis fiscal.

Sur le plan politique, les citoyens européens doivent prendre le pouvoir politique qui leur est confisqué. Les peuples qui ont pu s’exprimer sur le traité constitutionnel ont manifesté leur refus, mais les dirigeants sont passés outre. Le Venezuela, l’Équateur et la Bolivie nous montrent l’exemple. Les citoyens y ont élu une assemblée constituante afin d’élaborer un projet de nouvelle constitution, discuté avec les mouvements sociaux et approuvé par référendum. Dans ces trois pays, les électeurs ont maintenant le droit de révoquer tous les élus politiques à mi-mandat, alors qu’aucune constitution européenne ne prévoit un tel mécanisme hautement démocratique. Les pays d’Europe doivent arrêter de piller les ressources naturelles du Sud, augmenter l’aide publique au développement (qu’il faut rebaptiser « contribution à la réparation ») et appliquer la Déclaration universelle des droits de l’homme, notamment en ce qui concerne le droit de libre circulation des personnes.

Le capitalisme a plongé l’humanité dans une profonde crise multidimensionnelle : financière, économique, climatique, alimentaire et énergétique, sans oublier les guerres et la course à l’armement. Le capitalisme ne disparaîtra pas de lui-même : seule l’action consciente des citoyens peut le remplacer par un autre système, qui aura pour objectifs la satisfaction des droits humains et la protection de la nature. En rupture avec la tragique caricature stalinienne, il s’agit d’en finir avec le capitalisme et de réinventer un projet socialiste, ancré dans la réalité du XXIe siècle.

(*) Auteurs de 60 Questions 60 réponses sur la dette, le FMI et la Banque mondiale. Éditions CADTM-Syllepse. Site : http://www.cadtm.org.


Signatures: 0
Répondre à cet article

Forum

Date Nom Message