G8 Les Attila du climat à l’Aquila (article national Parti de Gauche)

lundi 13 juillet 2009.
 

Tout fiers, les pays membres du G8 se targuent d’être parvenus à l’Aquila à un accord de réduction des émissions de gaz à effet de serre de 50% en 2050, et même 80 % pour les pays dits « développés », en clair les États-Unis et l’Union Européenne.

Nicolas Sarkozy - aka Géant Vert, et Angela Merkel - aka Chancelière Du Climat, revendiquent tous les deux cette décision historique. Il faut dire que le score d’Europe Ecologie en France et l’arrivée des législatives en Allemagne boostent nos deux champions du capitalisme vert.

A 6 mois du sommet de Copenhague, ça devrait être une bonne nouvelle. Alors, pourquoi ne saute-t-on pas de joie ? On sent confusément qu’il doit y avoir quelque chose qui cloche. Jamais contents ?...

Des déclarations incantatoires qui n’engagent personne

D’abord, l’absence d’organisation mondiale disposant d’un véritable pouvoir coercitif rend quasi impossible le suivi sérieux de cet objectif. Les engagements des gouvernements restent soumis à leur bonne volonté. Il n’y a aucune raison pour que cette fois encore le diktat de la croissance économique et de la compétitivité industrielle ne prenne le pas sur les belles déclarations en faveur du climat.

Ensuite, le G8 n’est pas suivi. Argument principal : la responsabilité historique des pays « développés », qu’on estime responsables de 77% des émissions cumulées depuis le 18e siècle. La Chine, qui représente tout de même 21% des émissions mondiales actuelles de GES, refuse ce qui selon elle entraverait sa croissance économique et déclare qu’elle ne s’estime pas liée par l’accord du G8. Avec l’Inde et le Brésil, elle attend du G8 un engagement ferme sur les financements et les transferts technologiques pour aider les pays du Sud à tenir des mesures ambitieuses contre le dérèglement climatique. Engagement sans cesse repoussé, de sommet en sommet. La Russie, le Japon et le Canada trainent eux aussi des pieds.

Résultat, on en reste sobrement à un objectif tout théorique de contenir le réchauffement à moins de 2°C, conformément aux recommandations du GIEC. Comment ? On verra plus tard...

L’absence d’objectifs intermédiaires

Prévoir des objectifs ambitieux pour 2050, c’est bien... Mais ce n’est pas en 2049 qu’il faudra se réveiller ! Alors que fait-on de manière urgente, d’ici 2015 ou 2020 ?

En matière de réduction des émissions de GES, le Japon propose un tout petit -7 % en 2020, l’Union Européenne -20 %, la Russie -10/15 % en 2030. C’est pourtant entre 25 et 40% d’ici 2020 qu’il faudrait. On est loin du compte. Et résultat, on ne fixe aucun objectif intermédiaire d’ici à 2050. Or sans jalons intermédiaires, les objectifs à horizon 2050 resteront incantatoires. Seule une véritable planification écologique, se fixant des objectifs intermédiaires et les indicateurs qui vont avec, permettrait d’atteindre les ambitieux -50 % en 2050.

Comme le dit Jacques le Cacheux, de l’OFCE : c’est un automobiliste qui roule à 170 km/h et vous explique droit dans les yeux qu’il sait très bien que la limite est à 130 km/h En attendant, il roule à 170 km/h... L’emballement climatique, lui, n’attend pas. Les 230 millions d’Africains subsahariens déjà touchés en savent quelque chose. Ce n’est pas après-demain, ni demain, mais dès aujourd’hui qu’il faut engager la mutation.

Au Sommet de la Terre en 2002, Jacques Chirac déclarait la main sur le cœur : « la maison brûle et nous regardons ailleurs ». Une fois n’est pas coutume, et 7 ans après, on ne peut que lui donner raison.

Des préconisations libérales incohérentes et irresponsables

D’un côté, le G8 se targue d’être le bon élève de la réduction des émissions de GES. De l’autre, il poursuit son action de dérégulation du commerce mondial en réclamant toujours plus d’ouverture des marchés et la conclusion des négociations du cycle de Doha. Quelle aberration, quel cynisme !

Comment osent-ils prétendre limiter les émissions de GES tout en favorisant les échanges marchands d’un bout à l’autre de la planète, source majeure de pollution ?

Comment osent-ils demander aux Pays du Sud de favoriser une autre modèle de développement respectueux de l’environnement, alors que leurs bras armés (Banque Mondiale, OMC, FMI) privent ces pays de tout mécanisme de protection, en organisant la dérégulation systématique de leurs marchés ?

Alors qu’ils obligent les paysans à passer d’une agriculture paysanne et vivrière, respectueuse de l’environnement, à des monocultures intensives, destinées à l’exportation !

Cette libéralisation à outrance est évidemment totalement incompatible avec l’impératif de maîtrise des émissions de GES et de réduction de l’empreinte écologique. Disons le tout net, le G8 est un ramassis d’hypocrites.

Le vrai débat confisqué

Les bisbilles et les discussions sans fin autour d’objectifs techniques chiffrés permettent d’occulter les autres débats sur le dérèglement climatique. Ceux qui fâchent vraiment...

Le débat public est organisé comme un feuilleton à suspense : à Copenhague, est-ce qu’ils vont enfin réussir à se mettre d’accord ? A 15 % ? Ou 40 % ? Ou peut-être 28,97 % ? Que dira Barack ? Que fera Angela ? Comment réagira Nicolas ? Intenable...

Mais jamais on n’explique aux citoyens ce que ces pourcentages impliquent, ce qu’ils signifient en terme de mesures concrètes. Jamais on n’indique à quels choix de société majeurs correspondent ces x % de réduction. On reste soigneusement dans un débat d’experts, présenté comme bien trop technique pour le commun des mortels. Qui lui a juste le droit de prendre les paris sur les chiffres.

Pendant ce temps, on ne parle pas du nucléaire, de l’après-pétrole, de la sobriété énergétique. On ne réfléchit pas au nouveau projet de société que la révolution écologique impose. On ne fâche personne avec l’indispensable remise en cause du productivisme. On passe sous silence la nécessaire décroissance de certains secteurs.

Et si on prenait les choses dans l’autre sens ?

En misant sur la démocratie et l’implication populaire, en commençant par demander aux peuples comment ils souhaitent vivre, ce que veut dire pour eux le progrès social et humain...

... Et si on revisitait la notion du « vivre bien » à l’aune de l’écologie ?


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