Le climat c’est pas ça ! Obama non plus !

vendredi 4 décembre 2009.
 

L e climat n’est pas en danger. C’est nous qui le sommes du fait de son changement. Heureusement que les puissants s’y mettent. Tenez, voyez Obama ! Quelle merveille ! Il a pris des engagements chiffrés ! Fantastique, non ? Surtout si on n’y regarde pas de trop près ! Bon, comme avant le G20, les commentateurs soufflent le chaud et le froid sur l’issue envisageable du sommet de Copenhague. Le succès semble annoncé à présent. Le G 20 aussi a été un succès on s’en souvient. Un triomphe même ! Pourtant le directeur du FMI prétend que les banques dissimulent encore la moitié de leurs pertes réelles et le casino a redémarré à fond les bandits manchots ! Au rayon des efforts dérisoires, le parlement européen a passé de longues heures à adopter un texte de résolution sur cette fichue conférence de Copenhague. C’est mon devoir d’en rendre compte puisque j’y étais. A ma manière bien sûr. Tachons de faire un bilan raisonné de cette résolution. Et des bobards d’Obama.

LE TEXTE INITIAL DU PARLEMENT

Telle qu’elle est arrivée sur nos pupitres, la résolution comportait des mentions que je juge positives. Par exemple lorsqu’elle rappelle qu’une réduction des émissions de gaz à effet de serre de 40% par rapport à 1990 d’ici 2020 s’impose. Ce sont les conclusions du Groupe d’experts intergouvernemental sur l‘évolution du climat (GIEC) de mars 2009. Ou lorsqu’il reconnait à demi mots, « responsabilité historique » dit le texte, l’existence d’une dette écologique des pays du Nord envers les pays du Sud. Lisons. A l’article 35, le parlement européen « souligne la responsabilité historique des pays développés quant au caractère irréversible du changement climatique et rappelle que ceux-ci sont tenus d’assister les pays en développement et les pays les moins avancés pour leur permettre de s’adapter à ces changements ». Même note positive lorsque le texte « exhorte l’Union et les Etats membres à reconnaître la nécessité de préserver les forêts et d’inclure cet aspect dans un accord international ». Mais surtout, compte tenu du débat en cours qui a vu glisser l’idée de mesure juridiquement contraignante vers celle beaucoup moins engageante de « politiquement contraignante », il faut trouver que c’est plutôt bien de lire que sont demandées que des « mesures contraignantes » soient adoptées. Mais ça ne dit pas si c’est juridique ou purement moral. Pour autant je n’aurais pas adopté le texte tel quel. Car cela aurait voulu dire que j’approuvais l’idée de se féliciter du paquet « Energie climat » dont j’ai eu l’occasion de critiquer sur ce blog l’hypocrisie. Et pire encore ce serait d’approuver l’instauration d’un marché du carbone mondial qui doit, selon ce texte, « rester l’objectif à long terme de toute négociation ».

LES POINTS POSITIFS

Une fois amendé, le texte adopté mercredi 24 novembre a certes marqué des progrès. Je crois honnête de le souligner avant de montrer ce qu’il a d’inacceptable. Par exemple les deux premiers paragraphes indiquent désormais explicitement que les mesures décidées à Copenhague devront être « juridiquement contraignantes ». Plus même : les paragraphes 6 et 7 indiquent clairement qu’un système de sanctions doit être défini. L’accent mis sur la nécessité de boisement dans le cadre de la lutte contre la déforestation et la dégradation des ressources naturelles a été renforcé. Deux paragraphes ont en effet été ajoutés au texte initial. Je les cite intégralement pour les besoins de votre réflexion. A l’article 54, le parlement « souligne que la sauvegarde des puits de carbone naturels représente le moyen le plus efficace et le plus effectif d’atténuer le changement climatique sans effets secondaires défavorables ou imprévus ; est d’avis, par ailleurs, que le développement d’une vaste politique de boisement est capital pour lutter contre le changement climatique » A l’article 55, il « invite l’Union à se joindre aux efforts internationaux de financement pour lutter contre la déforestation et promouvoir un boisement non commercial à l’échelle mondiale ». Autre note positive encore, la réaffirmation de la prise en compte de l’empreinte écologique de l’aviation. N’oublions pas en lisant ces lignes que l’Union européenne ne fait rien pour lutter contre la multiplication des compagnies aériennes et la concurrence dans ce secteur. Au contraire elle a largement contribué à libéraliser et à dérationaliser. Humour de contexte, le même jour se votait une résolution pour protéger les passagers des compagnies qui les abandonnent en route ou s’avèrent incapables de les transporter ! Certes le fond reste purement déclamatoire mais l’intention ne pouvait pas être oubliée dans un bilan comme celui que j’entreprends. A l’article 63 le parlement européen « rappelle que les incidences de l’aviation, en dehors des émissions de CO2 , sont multiples, et doublent approximativement son potentiel de réchauffement global ; demande à l’Union de veiller à ce que ces incidences soient prises en compte dans l’accord de Copenhague ». Elle veillera, c’est sûr !

UN TRAITEMENT AMBIGU

Je finis ce passage en revue des aspects positifs par un point traité de façon beaucoup plus ambigu. Ainsi le texte précise que les réductions des gaz à effets de serre doivent être comprises entre 25 et 40% par rapport à 1990. Cette fourchette est bien sur un leurre. Mais il peut être utilisé autrement par nous. Car tout ceci, le moment venu pourra être cité comme relevant d’un consensus européen, avant de préciser cela va de soi à quel point de la fourchette nous nous situons. Autre point positif, deux paragraphes précisant des montants minimaux de financement de la lutte contre le changement climatique par l’Union européenne ont été inclus. Evidemment dans ces deux cas on peut souligner limites et insuffisances. Mais si ce n’était que cela ce pourrait être un point de départ acceptable, peut-être. Mais il y a le reste.

APOLOGIE DU NUCLEAIRE

L’inacceptable c’est ce paragraphe supplémentaire que le parlement a adopté, indiquant le « rôle important » de l’énergie nucléaire dans la lutte contre le réchauffement climatique ! Voici le texte exact : « 36. souligne que le passage, à l’échelle internationale, à une économie à faible intensité de carbone confèrera à l’énergie nucléaire un rôle important dans le bouquet énergétique à moyen terme ; souligne toutefois que les questions relatives à la sureté et à la sécurité du cycle du combustible » nucléaire doivent être abordées de façon adéquate à l’échelle internationale afin de garantir un niveau de sureté aussi élevé que possible ; » Je suppose que chacun est en mesure d’apprécier comment les questions que soulève le recours au nucléaire sont réduites à la sécurité du cycle et celle-ci renvoyée à un improbable traitement intellectuel « adéquat » !

LE CURSEUR DE LA FOURCHETTE

Je reviens à présent sur la fourchette des réductions de gaz à effet de serre fixée par cette résolution du parlement européen. Comme vous avez pu le lire, le texte situe l’effort à fournir entre 25 et 40 %. Ce n’est pas une petite marge dans un tel domaine. Le texte initial, comprenait une précision essentielle nichée dans un avant dernier paragraphe de la partie intitulée « Energie et efficacité énergétique ». Il mentionnait en effet un objectif général ambitieux. Il affirmait que l’Union devrait indiquer « les conditions dans lesquelles elle pourrait s’engager à réduire encore ses émissions, en tenant compte du fait que les recommandations scientifiques les plus récentes préconisent un engagement en faveur de la réduction des émissions de l’ordre de 40%, l’opinion publique dans les pays en développement comme dans les pays développés se montrant par ailleurs disposée à souscrire à cet objectif ». Ce paragraphe a été retiré ! C’est un choix politique que ce retrait ! Les efforts consentis n’iront donc pas plus loin que les « 25% à 40% » indiqués à plusieurs reprises dans le texte. Au fil du texte, l’accent est mis davantage sur l’objectif de dépassement des 25% que sur le défi pourtant nécessaire d’essayer d’atteindre les 40% comme le préconise le Groupe d’experts intergouvernemental sur l‘évolution du climat (GIEC). Notons, d’ailleurs, qu’il n’est nulle part fait référence préconisation de ce même GIEC de réduire de 85% à 95% les émissions de gaz à effet de serre, par rapport à 1990, d’ici 2050…

LE PARLEMENT MENDIE SON RÔLE

Bon. Donc il y a une résolution du parlement. Et alors ? Qu’est ce que ça produit ? Rien, bien sur. Absolument rien. Le parlement n’est pas protagoniste de la réunion de Copenhague. Au point qu’il ne semble pas s’émouvoir des conditions dans lesquelles sa délégation sera amenée à travailler sur place. Il a en effet lui-même retiré le paragraphe demandant à avoir « en tant que colégislateur » des conditions de travail appropriées ! Pourtant ce n’était pas grand-chose ! De la à penser qu’il s’accommoderait de conditions inappropriées… C’est à peine une plaisanterie de le supposer. Surtout quand on lit la pitoyable demande formulée dans le texte ! En effet a été maintenue (scrogneugneu !) la demande de participation de la délégation aux réunions de Copenhague « au moins au titre d’observateurs, avec ou sans droit de parole » !! Avec ou sans droit à la parole ! Quelle audace ! Dès lors que valent les pleurnicheries qui précédent cette revendication de potiche ? Lisez : « 68. estime que la délégation de l’Union joue un rôle important dans ces négociations sur les changements climatiques et juge, de ce fait, inacceptable que les députés au Parlement européen faisant partie de cette délégation n’aient pu participer aux réunions de coordination de l’Union lors de la précédente Conférence des Parties ; espère que les participants du Parlement européen auront accès à de telles réunions à Copenhague, au moins à titre d’observateurs, avec ou sans droit de parole »

MISTER OBAMA SE MOQUE DE NOUS, JE CROIS

Barack Obama s’engage à réduire les émissions de gaz à effet de serre des Etats-Unis de 17% d’ici à 2020…C’est déjà bien loin des objectifs de 40% nécessaires selon le GIEC. Donc c’est comme si c’était rien. On n’est pas a moitié guéris par une moitié de traitement ! Mais surtout c’est l’arnaque cachée qui est inacceptable ! Elle porte sur la date de départ du calcul. Obama part de 2005. Le GIEC et le protocole de Kyoto partent de 1990. Réduire les émissions de gaz à effet de serre de 17% en 2020 par rapport à 2005, cela revient à une diminution de 4% par rapport à 1990 ! Et pour mieux fixer l’ampleur de l’escroquerie sachons que c’est moins que l’objectif de Kyoto pour 2012 !! Ce petit calcul peut être appliqué a toutes les échéances fixées par monsieur Obama. Ainsi quand il s’engage à réduire les émissions de gaz à effet de serre des Etats-Unis de 42% en 2030…Là encore, on est loin du compte ! Cela revient à diminuer de 22% seulement par rapport à 1990, c’est-à-dire presque moitié moins de ce qui est préconisé pour 2020 par le GIEC ! Bilan ? Les Etats unis qui n’ont pas signé Kyoto annoncent maintenant pour 2020 des engagements inférieurs à ceux pris à Kyoto ! Et cela alors que la conférence de Copenhague avait pour objectif un saut quantitatif ! Et monsieur Borloo se félicite des déclarations de Monsieur Obama qu’il juge « extrêmement encourageantes » ! Il voit double ?


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