À quand un débat citoyen sur l’engagement de la France en Afghanistan ? (article national PG)

jeudi 13 janvier 2011.
 

Les révélations du Canard enchaîné viennent de le confirmer : le gouvernement cherche à éradiquer toute tentative de débat sur l’engagement de l’armée française en Afghanistan. C’est ainsi que l’Elysée a donné son feu vert à la mise sur écoute du général Vincent Desportes soupçonné d’appartenir au groupe « Surcouf » qui avait critiqué le Livre Blanc de la Défense de 2008. À la tête du Centre de doctrine et d’emploi des forces et du Collège interarmées de défense, le général Desportes s’était, par ailleurs, illustré comme fer de lance d’une réflexion soucieuse d’articuler les doctrines avec les réalités.

En juillet dernier, dans Le Monde, il écrivait ce que beaucoup pensent en rappelant l’inefficacité totale des choix stratégiques opérés jusqu’à présent en Afghanistan. Il confirmait dans le même élan que l’armée française y est totalement subordonnée aux choix opérés par le seul commandement états-unien, contrairement à ce qu’avaient promis les thuriféraires de la réintégration complète de l’OTAN.

Les Desportes et autres « Surcouf » ne sont pas des factieux qu’il faudrait traquer sans relâche. Ils sont les porteurs d’un discours lucide au sein de notre appareil de défense. Ils défient les égarements de l’idéologie belliciste de l’OTAN.

La révélation de ces écoutes intervient au moment où les observations de Desportes, ainsi que de nombres de spécialistes civils de l’Afghanistan, ne cessent d’être confirmées. L’emprise des Talibans sur une large part du territoire s’est encore renforcée durant l’année 2010, la plus meurtrière depuis le début de la guerre, et ils ne seront jamais vaincus militairement. La « légitimité » du gouvernement Karzaï n’en finit plus de s’étioler au sein de la population. Il est empêtré dans les réseaux clientélistes et criminels. Le recours systématique aux organismes de sécurité privés ou et la constitution de milices locales, favorisés par les USA, témoignent du contournement des institutions. La culture du pavot est en constante augmentation depuis l’arrivée des troupes otaniennes. Les droits des citoyens et plus encore des citoyennes sont toujours méprisés.

Au final, comme le rappelle Gilles Dorronsoro (auteur de Afghanistan : en quête d’un accord politique) « la coalition recrée exactement les conditions qui ont favorisé l’ascension des Taliban dans les années 1990 ». Ils devaient leur popularité initiale au fait d’avoir débarrassé la population des multiples milices qui mettaient alors le pays à feu et à sang. Au bout de 9 ans de guerre, l’exploit est donc d’avoir à nouveau rendu les talibans populaires, et que cela plaise ou non il faudra désormais compter avec eux.

Le Parti de Gauche estime que la présence étrangère en Afghanistan est un facteur de guerre, et exige le retrait de l’armée française d’une coalition impérialiste et belligène au sein de laquelle elle n’aurait jamais dû entrer.


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