22 ans de CDD… (par Gérard Filoche)

mardi 23 janvier 2018.
 

On retiendra cette semaine, l’incroyable nouvelle : un facteur corrézien, Jean-Claude Vialle, a vécu 22 ans de contrats à durée déterminée à la Poste. Et il a fallu qu’il aille en justice pour obtenir du Conseil de prud’hommes de Tulle la condamnation de La Poste pour « comportement fautif », une requalification de ses contrats précaires en CDI à temps complet de 1976 à 2001 et recevoir une réparation tardive et bien limitée pour un total de 36.577 euros

« Un nombre très important » de ces CDD « présentaient des irrégularités », il lui avait aussi été imposé, pendant 3 ans, un « contrat à durée indéterminée à temps partiel » qui « présentait les mêmes désagréments » selon le jugement des prud’hommes. Toute une vie de travail suspendue au court terme, hachée d’incertitude, avec un lourd préjudice financier. Il s’agit « d’une discrimination évidente à l’emploi » inacceptable de la part de la Poste, dont les « résultats financiers sont toujours positifs depuis 2005 ».

« La Poste, malgré une direction des ressources humaines disposant de tous les moyens juridiques et humains, a un comportement fautif en ignorant, volontairement ou pas, de nombreux éléments du droit social ».

Comment une telle infraction au droit peut-elle exister ? Comment des DRH et employeurs peuvent-ils être cyniques et irresponsables vis-à-vis de leurs salariés à ce point ? D’autant que à la Poste ce n’est pas la première fois. Une autre affaire de CDD est en cours devant le conseil des Prud’hommes de Cahors : deux factrices et une guichetière lotoises ont cumulé des centaines de contrats sans être embauchées en CDI. Les syndicats estiment que « des dizaines de milliers de postières et postiers pourraient légitimement obtenir la même régularisation pour leurs années de précarité totalement illégales ».

Il s’agit d’une grave délinquance patronale. Et cela fait partie des cas où il faut militer pour que la répression soit infiniment plus sévère, car seules les sanctions lourdes peuvent décourager le patronat d’agir ainsi. Trop facile de diffuser la précarité artificiellement comme moyen de chantage, de pression, et de s’en sortir au cas par cas avec une petite réparation financière.

De façon plus générale, la précarité, c’est comme les termites, ça ronge les pieds du meuble du CDI, mais il y a encore 85 % de contrats en CDI, il reste un meuble à défendre ! Dans un programme commun dont la gauche aurait tant besoin pour gagner, il faut instaurer une limitation stricte des contrats précaires, par le nombre et dans le temps, par exemple pas plus de 5 % dans les entreprises de plus de 20 salariés – sauf circonstances exceptionnelles et autorisation préalable de l’inspection du travail – pour faire face aux seules et strictes exigences temporaires de surcroît de travail et de remplacement de salariés absents.

Gérard Filoche


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