La nouvelle réforme territoriale : Une soumission au diktat européen

lundi 19 mai 2014.
 

En 2013 la Commission européenne exigeait de « prendre des mesures destinées à améliorer les synergies et les économies entre les différents niveaux de l’administration, central, régional et local ». François Hollande a décidé de passer à l’acte. Après avoir abrogé la loi Sarkozy supprimant les conseils généraux et rétabli la clause de compétence générale pour les régions et départements, après avoir fait voter une loi sur la réforme territoriale entraînant un redécoupage des cantons et affirmé en janvier qu’il n’était pas question de supprimer les départements, le président de la République vient de décider qu’il fallait de nouveau tout modifier. Le diktat de Bruxelles et la soumission à l’idéologie de la concurrence sont plus forts que tout. Le gouvernement a donc entonné le refrain de la dénonciation du “millefeuille” territorial, argument utilisé dans tous les pays de l’Union européenne pour camoufler les politiques d’austérité. Que ce soit la loi de 2010 ou celle de Marylise Lebranchu sur la métropolisation, dans les deux cas le remède est pire que l’existant quant à la lisibilité territoriale. Mais à chaque fois la concurrence entre territoires et l’austérité ont été renforcés. L’argument des économies d’échelle manque quelque peu de sérieux lorsqu’on entend André Vallini, ministre chargé de cette réforme, donner une estimation du simple au double puis finir par affirmer que cela ne donnera pas de résultats avant plusieurs années.

La suppression des départements remettrait en cause l’organisation républicaine issue de la Révolution et reviendrait à poursuivre le démantèlement des services publics, à éloigner un peu plus les citoyens des lieux de décision et à aggraver les inégalités entre territoires. Problème : ils sont prévus par l’article 72-1 de la Constitution. Pourquoi ne pas les vider de leur contenu ou les maintenir en supprimant les conseils généraux élus ? ont alors imaginé d’inventifs juristes amateurs. Hélas pour eux, le Conseil constitutionnel, saisi d’une prémonition le 9 mai 1991, a indiqué que « toute collectivité territoriale doit disposer d’une assemblée délibérante élue dotée d’attributions effectives ». Impossible donc d’y toucher sans modifier la Constitution. Mais avec quelle majorité au Congrès ? F. Hollande compterait-il sur les centristes pour venir à son secours ? Le nombre de régions devrait être divisé par deux. Déjà la Bourgogne et la Franche-Comté se sont portées volontaires pour fusionner, d’autres veulent rétablir les duchés du passé. Ceux qui veulent réduire l’État à sa portion congrue, s’engouffrent avec frénésie dans ce démantèlement qu’ils espèrent porteur de l’ultralibéralisme dont ils rêvent.

Nous n’avons aucun attachement fétichiste à un découpage régional produit d’un décret du 8 novembre 1956 modifié par la loi du 2 mars 1982 qui créa les assemblées élues des conseils régionaux. Mais notre critère pour juger du bon niveau des régions n’est ni l’Ancien Régime ni la concurrence économique, mais la nécessité de la planification écologique. La démocratie locale et la République méritent mieux qu’une nouvelle réforme territoriale bricolée à la va vite. C’est au peuple de décider par référendum des éventuelles modifications. Plus globalement, c’est d’une Assemblée constituante et d’une 6e République pour refonder nos institutions sur la base de l’égalité des territoires et des citoyens, dont la France a besoin.

Martine Billard co-présidente du Parti de Gauche


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