Après Brétigny, plus que jamais je soutiens les grèves des cheminots

vendredi 12 juillet 2019.
 

Article original : http://robertmascarell.overblog.com...

A) Après Brétigny, plus que jamais je soutiens les grèves des cheminots

Les experts judiciaires désignés par la Justice pour enquêter sur la catastrophe ferroviaire à Brétigny-sur-Orge, survenue il y a un an, donnent raison dans leurs conclusions, et sans le vouloir, aux cheminots grévistes.

En effet, depuis des années, il n’est pas un seul de leurs mouvements de grève qui n’ait dénoncé les décisions de la direction de la SNCF, tendant, sous prétexte d’économies et de compétitivité, à sacrifier toujours plus l’entretien des infrastructures, à réduire les effectifs et, partant, à mettre en danger la sécurité des voyageurs.

Critiquant ces grèves, les gouvernements successifs, la plupart des médias, les économistes libéraux fustigent les grévistes. Les accusant de prendre les voyageurs en otage. Malheureusement, ces attaques aussi injustes que violentes, venant aussi bien de la droite que de la « gauche » gouvernementale, n’ont pas manqué de troubler l’opinion publique. Au point que beaucoup en sont à considérer que les cheminots sont des privilégiés et que leur droit de grève devrait être considérablement réduit.

Les choses sont claires maintenant, les cheminots grévistes et leurs organisations syndicales ne se battent pas que pour leur emploi. Ils se battent aussi pour les voyageurs.

B) Accident de Brétigny :des rapports accablants ! (CGT, juillet 2014)

Le procureur de la République d’Évry doit rendre publiques, cet après-midi, les conclusions des deux rapports d’expertise ferroviaire et métallurgique commandés par le juge chargé de l’instruction du dossier concernant l’accident ferroviaire survenu le 12 juillet 2013 en gare de de Brétigny sur Orge.

Comme à chaque fois dans ce genre de circonstances, la prudence est de rigueur quant au contenu exact des documents. Il n’en demeure pas moins que la presse juge accablants les premiers éléments mis en exergue.

En effet, le constat des experts évoque un « état de délabrement jamais vu par ailleurs ». Si les termes paraissent excessifs et tendent à généraliser un état de dégradation de l’infrastructure ferroviaire, nous sommes bien face à la réalité de certains choix exercés par les gouvernements successifs et relayés par la direction de la SNCF. Celle-ci vise une recherche effrénée d’économies à réaliser, au détriment du service public, de la sécurité des circulations des biens et des personnes.

Cette logique d’abaissement des coûts, se traduit par plus de productivité, des suppressions d’emplois, un abaissement de la qualité des formations dispensées et plus globalement une réduction des moyens financiers et matériels qui dégradent les conditions de travail des cheminots et la qualité du service public SNCF rendue aux usagers et à la Nation.

A contrario, la direction de la SNCF développe la sous-traitance pour réaliser la maintenance, multiplie les filiales ce qui génère une perte de savoir-faire des gestes métiers

La politique irresponsable du tout « business », menée depuis de trop nombreuses années et combattue par la CGT à tous les niveaux de l’entreprise, conduit inéluctablement à des dégradations. Au regard des exigences que requiert le transport ferré de voyageurs et de marchandises, cette stratégie remet en cause la sécurité des circulations.

La CGT a maintes fois interpellé les différentes directions sur l’état des infrastructures à Brétigny, d’ailleurs en Mai 2013, elle a fait réaliser par le CHSCT un rapport préventif dans lequel était préconisé de ne pas circuler à plus de 100 Km/h sur ces types d’infrastructures.

Pour rappel, les cheminots ont exigé par la grève pendant plus de 10 jours, une autre réforme ferroviaire. Ils ont dénoncé cette politique de l’emploi, de formation et la mauvaise organisation de la production. Lors d’une rencontre pendant le conflit, la direction leur avait répondu qu’ils étaient « hors sujet » !

La réforme ferroviaire écrite par Guillaume PEPY, portée par le gouvernement ne règle pas la question du financement du système. Le texte voté par une majorité de députés va exacerber le manque de cohésion entre tous les services de la SNCF ce qui va accentuer les dysfonctionnements qui pourraient impacter la sécurité des circulations.

Montreuil, le 07 Juillet 2014

C) Accident de Brétigny : « une centaine de défauts » sur l’aiguillage (Le Monde juillet 2014)

C’est un « état de délabrement jamais vu ailleurs » qu’ont constaté les experts mandatés par les magistrats enquêtant sur l’accident de train qui a fait sept morts à Brétigny-sur-Orge le 12 juillet 2013.

« PLUS DE DEUX CENTS ANOMALIES »

Dans un rapport très attendu, remis le 25 juin, que Le Monde et Le Figaro se sont procuré, Michel Dubernard et Pierre Henquenet détaillent les raisons qui ont conduit au drame. La charge, très lourde contre la SNCF et sa politique de maintenance, pèsera sur l’issue de l’instruction.

Les deux experts ferroviaires notent que « le processus ayant abouti à la désagrégation complète de l’assemblage s’est étalé sur plusieurs mois et a concerné l’ensemble de l’appareil de voie incriminé, sur lequel ont été relevées plus de deux cents anomalies de divers degrés de criticité ». Des anomalies qui, notent-ils, « étaient connues de la SNCF ou de ses agents, sans pour autant qu’il y soit remédié de façon adéquate ».

LA SNCF SE REFUSE À COMMENTER

Cette mise en cause de la SNCF a obligé le président de l’entreprise, Guillaume Pepy, à réagir lors d’une conférence de presse lundi après-midi. Le PDG s’est refusé à commenter ces rapports dont il n’a pas obtenu une copie car la SNCF ne s’est pas constituée partie civile dans l’instruction judiciaire en cours : « La nature des responsabilité est du domaine de l’instruction judiciaire. Nous n’avons pas été destinataires de ces rapports in extenso. Quant aux extraits de ces rapports, nous les avons obtenu par voie de presse. (...) Nous souhaitons avoir le plus rapidement possible ces rapport pour pouvoir nous expliquer. »

« DÉFICIT DE LA QUALITÉ DE MAINTENANCE »

Plus tôt lundi, le procureur d’Evry a confirmé lundi à la presse que l’examen de l’aiguillage « fai[sai]t apparaître 211 “faits remarquables” dont une centaine de défauts qui ne sont pas la conséquence de l’accident ». S’appuyant sur le rapport des experts, Eric Lallement a affirmé que tout acte de malveillance était écarté et que la cause principale de l’accident mortel de Brétigny était un « déficit de la qualité de maintenance ».

« Dès 2008, les TJD [traversées-jonction double, autrement dit les aiguillages] de Brétigny-sur-Orge préoccupaient manifestement les ingénieurs de la SNCF », ajoutent-ils. Or, le passage de Brétigny-sur-Orge « est connu des services techniques de la SNCF comme une zone à risque et de ce fait classée en zone d’évolution rapide nécessitant le traitement rapide des anomalies ».

Autant de particularités locales négligées par l’entreprise de transport public. Pour les experts, cela « aurait logiquement dû conduire la SNCF à une surveillance accrue, et surtout adaptée ».

« RUINE LATENTE »

Le défaut de maintenance apparaît donc évident et a conduit à l’accident, selon MM. Dubernard et Henquenet. Ils expliquent que l’accumulation de négligences a fini par fragiliser une structure extrêmement sollicitée par le passage des trains « pour aboutir à une situation de ruine latente de l’ensemble » .

D’autres endroits de la voie présentaient des dégradations avancées. La maintenance est ainsi mise en cause à la fois dans son cadre et dans son application, les principes qui encadrent son organisation étant, selon le rapport, « volumineux, surabondants, parfois inadaptés, voire contradictoires, donc contre-productifs ».

Atténuant la responsabilité des agents de contrôle, les experts soulignent que les règles de leur travail « sont de toute évidence impossibles à assimiler complètement, et de ce fait à mettre en œuvre sur le terrain de façon cohérente ».

La formation des agents techniques serait par conséquent inadaptée :

« Le personnel SNCF chargé de la mise en œuvre de la maintenance des voies et appareils devrait être choisi tout d’abord selon des critères de solide formation à la construction mécanique et, de surcroît, avoir reçu une formation spécialisée approfondie. Le risque de non-signalement de faits impactant la sécurité, dans une routine de travail est bien réel : la dérive s’installe progressivement, et le personnel en vient à perdre toute capacité d’initiative ou de jugement en se retranchant derrière les référentiels procédures et autres normes. »

UN RÉSEAU « EXTRÊMEMENT DÉGRADÉ », SELON CUVILLIER

« De nombreuses observations faites au cours des tournées de surveillance se sont trouvées reportées d’une opération à l’autre, pour finir parfois par disparaître sans pour autant qu’on ait eu la certitude qu’elles aient été traîtées », écrivent les deux spécialistes, qui ont eu accès aux comptes rendus de maintenance de ces dernières années ainsi qu’aux auditions des personnels concernés.

Le secrétaire d’Etat aux transports, Frédéric Cuvillier, a reconnu lundi sur France Inter la situation « extrêmement dégradée » du réseau ferré français. Tout en appelant à « laisser la procédure judiciaire se tenir à son rythme », le ministre a indiqué que depuis l’accident de Brétigny, un « plan Vigirail » avait « amené à vérifier l’ensemble du réseau, cinq mille aiguillages et cent mille éclisses ».

D) Accident de Brétigny (Sud Rail, janvier 2014)

L’enquête judiciaire le confirme : le déraillement de Brétigny le 12 juillet 2013 fut une conséquence prévisible de la désorganisation du système ferroviaire français orchestrée par la réforme de 1997. Il est grand temps d’en tirer les leçons !

Les médias se sont fait l’écho hier de résultats issus de l’enquête judiciaire en cours depuis le déraillement qui a provoqué 7 décès et de nombreux blessés à Brétigny-sur-Orge, le 12 juillet dernier. Il semble que les enquêteurs insistent sur les dysfonctionnements provoqués par la double gestion du système ferroviaire par RFF et la SNCF qui a induit une dilution et une confusion des responsabilités, dues notamment à la multiplication des délégations et prestations en tous genres. Conséquences : de nombreuses négligences dans une maintenance du réseau que les enquêteurs qualifient à la fois d’« aléatoire » et de « légère ».

Ce constat n’étonne pas SUD-Rail qui, depuis 1997, dénonce la non-qualité, les risques et les coûts croissants de la gestion séparée des infrastructures ferroviaires, par RFF, et des services ferroviaires, par la SNCF, ainsi que tous les usagers du train peuvent le constater chaque jour. Par exemple, la longueur cumulée des ralentissements dus au manque d’entretien du réseau ferroviaire atteint à présent environ 3 500 km (près de quatre fois plus que fin 2002 !), d’où une dégradation des temps de parcours et des retards de trains toujours plus nombreux, quand il ne s’agit pas de leur suppression pure et simple. La séparation infrastructures/services a instauré, comme SUD-Rail l’avait prévu, l’irresponsabilité du gestionnaire d’infrastructures quant à la qualité, à la fiabilité et à la disponibilité des services ferroviaires. Uniquement préoccupé d’économies sur l’entretien des lignes, RFF a privilégié la sous-traitance, multipliant les interfaces entre intervenants sur le réseau qui sont autant de points de faiblesse. Sans réduire en rien les coûts, bien au contraire, cette politique a fragilisé la sécurité alors même que, pour faire rouler ses trains, la SNCF voyait les péages qu’elle verse à RFF passer de 900 millions d’euros en 1997 à 3,4 milliards d’euros en 2013, ce qui a accru les prix du train.

Malgré les analyses de SUD-Rail, fondées sur une longue expérience technique, étayées par la réalité vécue par les cheminot-e-s et les usagers, confirmées dès 2001 par le Rapport d’évaluation de la réforme ferroviaire du Conseil supérieur du service public ferroviaire, les directions de la SNCF et tous les gouvernements successifs depuis 1997 ont défendu bec et ongles la séparation et la fragmentation du système ferroviaire. L’actuel président de la SNCF, M. Pépy, a même renforcé cette dernière en instaurant dogmatiquement une organisation par activités au sein de la SNCF, au détriment d’une mutualisation des moyens qui aurait été le gage de plus d’efficacité et de réactivité, notamment lors des incidents.

La réforme ferroviaire qui sera présentée au Parlement en 2014 prévoit-elle de corriger toutes ces erreurs : NON ! Elle prétend confier le système ferroviaire à trois établissements distincts et renforcer sa fragmentation. Elle envisage un super-RFF aux pouvoirs accrus, dominant une SNCF très affaiblie, composée de « branches » (Voyages grandes lignes, TER, Transilien, Fret, Gares) encore plus autonomisées, le tout placé sous la tutelle d’un établissement de tête qui sera un ectoplasme à l’existence précaire et provisoire !

Le système ferroviaire public, abîmé par 18 ans de dogmatisme, pourrait cependant être reconstruit : SUD-Rail propose une véritable réintégration sous forme d’un établissement public unique gérant à la fois les services et l’infrastructure ferroviaires. La compatibilité de cette organisation avec les directives européennes actuelles serait assurée par la séparation comptable stricte entre les missions et par le placement hors de cet établissement unique des deux seules « fonctions essentielles » (décisions quant à l’allocation des sillons et à la tarification des infrastructures) dans des services de l’Etat.

Combien de Brétigny faudra-t-il pour que nos « élites » comprennent enfin que le chemin de fer est un mode de transport guidé dont la qualité et la sécurité imposent que la gestion de l’infrastructure et celle des services ferroviaires soit placées sous une responsabilité unique ?


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