En 2016, PCF et PG veulent tourner la page du Front de gauche (Le Figaro)

vendredi 4 mars 2016.
 

En crise depuis 2012, la dynamique du Front de gauche est au point mort. 2016 s’impose comme l’année du dépassement pour les partis que le composent.

« Il y a une bonne chose déjà pour 2016, c’est que sera une année sans élection », relève le porte-parole du Parti communiste (PCF) Olivier Dartigolles. Une aubaine pour le quadragénaire, qui mise sur l’accalmie pour « tout changer au Front de gauche, qui a les airs d’une maison où cohabite un couple divorcé. Il faut dire que l’année 2015 s’est achevée en point d’orgue d’une longue dégringolade électorale pour la coalition de gauche alternative, depuis les sommets atteints par Jean-Luc Mélenchon à la présidentielle de 2012. L’issue des régionales a été catastrophique, avec une offre illisible et à géométrie variable selon les régions, qui n’a recueilli que 4% des suffrages. Les communistes y ont laissé près de la moitié de leurs élus régionaux, et le Parti de gauche (PG) n’a pas validé dans les urnes la stratégie d’alliance avec EELV, qu’il avait arrachée au prix de fortes concessions, et au risque d’une fragilisation du Front de gauche.

Pierre Laurent a prévenu ce lundi : « La gauche risque fort de disparaître, si nous ne trouvons pas la force de redresser la barre ». Un constat d’échec largement partagé. « Le Front de gauche n’est pas arrivé à recomposer la gauche, malgré une dynamique positive jusqu’en 2012. Le PCF a pourtant mouillé la chemise, jusqu’à soutenir un candidat hors de ses rangs : Jean-Luc Mélenchon. Mais depuis, nous avons cherché à refaire le match. La stratégie du Front (de gauche) contre Front (national), notamment, est un échec. Elle nous a détournés de l’adresse au peuple de gauche. Nous sommes retombés dans les clivages et le débat est revenu à de la stratégie électoraliste », analyse pour le Scan Olivier Dartigolles. « Nous risquons un scénario à l’italienne », concède-t-il. Les communistes transalpins ont pratiquement disparu du champ politique tandis que les socialistes, devenus « démocrates », semblent avoir définitivement basculé du côté du social-libéralisme. « Là-bas, la gauche aujourd’hui, c’est Renzi ! », déplore l’élu des Pyrénées-Atlantiques.

Vers une recomposition, mais laquelle ?

« Nous sommes décidés à changer pour être à la hauteur », a promis Pierre Laurent pendant ses vœux. Comme annoncé au soir du premier tour des régionales, tout est donc à refaire. L’un des temps forts du chantier sera le congrès qui aura lieu des 2 au 5 juin, à Saint-Denis/Aubervilliers. « L’une des questions majeures qui seront abordées portera sur la nature et le rythme du changement des transformations au PCF », confirme Dartigolles. « Il faudra répondre à la crise de confiance qui touche les partis, à leur déconnexion avec la société, sans tout jeter de notre patrimoine. Il faudra tout explorer, sans tabou », explique-t-il. Même l’importante question de l’identité du parti pourra être abordée. « Communisme reste un joli mot. On y trouve le terme commun. Réfléchir autour de cette notion pourrait être l’un de nos grands défis, pour s’opposer aux divisions, aux inégalités », avance le porte-parole.

Le coordinateur du Parti de gauche Éric Coquerel et bras droit de Mélenchon partage le diagnostic du PCF : le Front de gauche est moribond. « C’est un cartel de partis qui ne correspond plus à la période politique ». Pour relancer la dynamique après les régionales, la présidentielle apparaît à ses yeux comme « une solution ». « C’est une séquence de mobilisation plus large de l’électorat, avec une seule étiquette, un seul candidat et donc plus de lisibilité », veut-il croire. Il prône une candidature unique à gauche du PS qu’il voudrait voir « appuyée sur nouveau mouvement », issu de « la refondation d’un espace commun ».

Mais pas question pour le PG de participer à la « primaire des gauches ». Une proposition qui vient de voir le jour cette semaine et qui a reçu le soutien du PCF. « La primaire convoque l’idée d’alternative de gauche, lui redonne ses lettres de noblesse. Elle permettrait de relancer un débat de contenu, de redéfinir des points d’accord », défend Olivier Dartigolles. Au risque de devoir se ranger derrière le PS s’il emportait la mise ? « Qu’Hollande essaie d’y participer, et il perdra si le peuple de gauche se mobilise », prédit le porte-parole, sans trop croire à cette hypothèse.

Une manière également de répondre aux limites de l’exercice, très vite pointées par Jean-Luc Mélenchon. « La primaire ne permettra pas de refonder la gauche si elle se résume à un concours Lépine du meilleur candidat », lance-t-il. Pour le candidat de 2012, prêt à l’être en 2017, la seule primaire qui vaille, « c’est le premier tour » de la présidentielle. « La primaire, c’est une rustine démocratique qui tend à conforter le bipartisme, à écraser le débat d’idée au profit des candidats. Je suis persuadé qu’au final le PCF n’ira pas. Et s’y on y allait, pour s’allier à EELV par exemple, il faudrait des lignes de programme commun », tranche Eric Coquerel.

Pour 2017, « Mélenchon est le seul à pouvoir prétendre à un score à deux chiffres »

Éric Coquerel, coordinateur du Front de gauche

« La candidature de Mélenchon a ses faiblesses, mais aussi plus de force que les autres. Souvenons-nous de nos derniers succès. Ils avaient été obtenus en 2012 avec Jean-Luc, les sondages montrent qu’il est le seul à pouvoir prétendre à un score à deux chiffres », plaide Eric Coquerel. Le PG, échaudé, ne veut plus dépendre de son partenaire communiste dans le choix de ses options. Certains au parti gardent le souvenir amer de la campagne des régionales en Ile-de-France, où les mélenchonistes avaient avalé de mauvais gré la couleuvre d’une candidature de Pierre Laurent. « Nous ne voulions pas être ceux qui signaient l’acte de décès du Front de gauche à un an de la présidentielle », concède un cadre du PG. Il semble donc ne demeurer qu’un bien commun dans la maison rouge, un constat : le Front de gauche est mort, mais personne n’ose l’enterrer.


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