Le PCF et l’Europe

jeudi 29 juin 2017.
 

L’avenir de l’Europe en commun ?

Introduction

Après cette élection législative de 2017, les différents groupes de députés se sont constitués à l’Assemblée nationale.

Un groupe de communistes

André Chassaigne, président sortant des députés du Front de gauche, a annoncé que les élus PCF auront leur propre groupe au Palais-Bourbon. Dans le détail, il compte 11 députés communistes et 4 ultramarins, qui ont été réélus. La création de ce groupe signifie qu’ils ne rejoindront pas celui de La France insoumise de Jean-Luc Mélenchon. Mais les communistes "n’opposent pas ce groupe aux ’insoumis’", a souligné le député du Puy-de-Dôme.

Alors que les relations entre les communistes et La France insoumise sont extrêmement tendues, André Chassaigne a affiché « une volonté farouche » de travailler avec les « insoumis ». Il a assuré que « deux groupes avec des espaces communs auront plus d’efficacité ». Une rencontre avec les députés de La France insoumise est prévue jeudi pour "discuter des moyens de travailler ensemble", selon lui."

Source : France TV info "Quels sont les groupes parlementaires à l’Assemblée nationale ?" Article complet ici.

Nous avons sur ce site déjà présenté sous forme de vidéos notamment les positions de France insoumise concernant l’Europe. Nous présentons ici la position du PCF en puisant à sa source. Travailler ensemble nécessite une connaissance approfondie des positions de chacun.

Le PCF et l’Europe

Source : PCF http://www.pcf.fr/42836

Notre projet pour une refondation de l’Union européenne

Il faut partir des questions de la crise de la construction européenne et les traiter en liaison avec les préoccupations relatives aux échéances électorales à venir et, donc, avec le type de rassemblement que nous voulons construire en France et en Europe. La construction actuelle de l’euro débouche sur un formidable fiasco. En écho aux terribles difficultés sociales, économiques et politiques engendrées par la mise en œuvre des politiques d’austérité monte une critique forte de la construction actuelle, mais souvent sur un mode essentiellement négatif, protestataire et, donc, sans avancer aucune vision positive alternative. Nous devons articuler à l’exigence nécessaire de refondation le réalisme d’un combat quotidien efficace pour réorienter cette construction en visant sa refondation. D’où l’importance décisive de propositions concrètes, cohérentes et mobilisatrices donnant à voir, à l’appui des luttes et du débat politique, la possibilité d’une alternative crédible.

Réorienter l’Europe pour la refonder

Il est vrai que, en écho aux difficultés sociales et politiques engendrées par la mise en œuvre d’orientations visant des enjeux financiers nationaux et européens, monte une critique de la construction actuelle, mais sur un mode essentiellement négatif, protestataire et, donc, sans avancer aucune vision positive alternative.

Une telle critique ne permet pas de faire bouger les rapports de force et d’avancer vers un nouveau rassemblement transformateur en France.

La mondialisation est vécue aujourd’hui – à bon droit – comme très hostile. La France est ressentie comme vulnérable dans l’espace mondial et le besoin d’une construction européenne, permettant d’avoir prise sur le devenir du monde, de compter dans cet espace «  dérégulé  », demeure très puissant.

C’est en ce sens que, s’il y a crise de l’idée européenne, il n’y a pas abandon, comme l’a confirmé, à sa façon, Syriza qui s’est prononcé contre la sortie de la Grèce de l’euro et pour que celui-ci devienne solidaire pour les peuples.

Dans ces conditions, de même qu’il s’agit de montrer, ici en France, qu’il y a une autre politique possible à gauche et une majorité de gauche possible pour la mettre en œuvre, il s’agit de montrer, inséparablement, qu’il y a une autre construction européenne possible qui soit conforme aux idéaux sociaux, économiques, démocratiques et éthiques de la gauche.

Dans cette optique, il est juste de mettre en avant désormais l’objectif de refondation de l’Europe qui souligne l’exigence de transformations très radicales. Mais, pour autant, gardons-nous de donner à penser que cet objectif pourrait être atteint au terme d’un «  grand soir  » qui permettrait de faire en quelque sorte «  table rase  ». Ne réactivons pas, à propos de l’Europe, l’opposition que nous avons décidé de dépasser entre réformes et révolution. Nous devons articuler à l’exigence nécessaire de refondation le réalisme d’un combat quotidien efficace pour réorienter cette construction en visant sa refondation. D’où l’importance décisive de propositions concrètes, cohérentes et mobilisatrices donnant à voir, à l’appui des luttes et du débat politique, la possibilité d’une alternative crédible.

Cohérence des combats pour changer en France, Europe et monde

Il est absolument indispensable de changer le monde, ce que ressentent confusément, sans trop y croire, tous ceux qui critiquent ou craignent la mondialisation actuelle. L’idée selon laquelle la France, à elle toute seule, pourrait y arriver a perdu totalement de sa crédibilité, ce qui ne veut pas dire qu’elle ne peut rien faire. En réalité, il y a besoin d’une construction européenne pour pouvoir changer le monde.

Simultanément, donc, il faut changer l’Europe. Pourquoi  ?

Mais parce que les efforts de construction de celle-ci depuis la dernière guerre ont développé une très grande interdépendance entre les pays qui la composent et, plus encore, depuis le début des années 1990 avec la marche à l’euro et, à partir de 2000, avec l’euro lui-même.

C’est le contenu et les moyens institutionnels, matériels et financiers de maîtrise de cette interdépendance qui posent problème et pas l’interdépendance en soi. Celle-ci est construite, aujourd’hui, surtout sur la base de solidarités pour la domination des marchés financiers et des capitaux allemands. Il faut prendre l’étendard de la construction d’une solidarité nouvelle pour les salariés et les peuples, contre la tutelle des marchés financiers et toute forme d’hégémonie économique et politique en Europe.

Un besoin et une opportunité de clarification sur les buts et les moyens de l’Union

La construction actuelle de l’euro débouche sur un formidable fiasco. Et cela, parce qu’il n’a pas été conçu pour répondre aux besoins de développement des peuples européens mais pour tenter d’attirer massivement les multinationales et les capitaux financiers mondiaux et, ainsi, par la promotion d’un grand marché financier européen unique très attractif, d’arriver à rivaliser avec le leadership de Wall-Street. D’où, la promotion d’un «  euro fort  », c’est-à-dire capable, en, toutes circonstances, d’offrir aux détenteurs de capitaux le rapport rentabilité/risque le plus attrayant.

Dans ce but, la BCE ne doit se préoccuper que de maintenir l’inflation des prix en zone euro sous la barre des 2 % et veiller à ce que les taux d’intérêt offerts par les placements en euro soient en permanence supérieurs à ceux offerts par les placements en dollars. C’est pour cela qu’elle a été fondée «  indépendante  » de toute autorité politique et que l’article 125 du traité de Maastricht lui a interdit formellement de créer de la monnaie pour soutenir la dépense publique et sociale où que ce soit dans la zone euro.

L’objectif stratégique des promoteurs de cette Europe-là était et demeure d’arriver à obtenir des États-Unis qu’ils finissent par accepter de partager leur domination financière sur le monde, du fait de l’affaiblissement du dollar et d’un endettement extérieur devenu insoutenable (pour les créanciers chinois notamment).

Pour rassembler les Européens, cette tentative de construction a cherché à mobiliser des idéaux et des buts généreux (paix, «  plein-emploi  », modèle social européen porté au niveau allemand, prospérité partagée, rééquilibrage des rapports de force dans le monde…). Mais le cœur de cette tentative est bien cette ambition dominatrice pour la finance, pour les multinationales à base européenne, pour les grands capitaux allemands. D’où une ambiguïté fondatrice essentielle qui a accompagné la construction européenne dès ses origines. C’est cette tentative qui échoue gravement aujourd’hui.

Aussi, cette période de crise aggravée de l’Europe peut-elle être propice à une clarification sur les exigences de cohérence entre les buts sociaux et sociétaux, les valeurs mises en avant pour justifier la construction européenne et les moyens financiers et les pouvoirs nécessaires pour les atteindre.

Le fédéralisme vise l’éloignement des structures de décision des salariés et des citoyens, des élus de terrain, pour pouvoir mieux concilier les exigences de gouvernance de l’ensemble européen avec la domination des marchés financiers et de ceux qui sont hégémoniques dans les rapports de force intra-européens, à commencer par l’Allemagne.

Pour les dirigeants français, il s’agirait d’effectuer un «  bond en avant  » dans le fédéralisme dont ils pensent qu’il leur permettrait de partager tout de suite, avec les dirigeants allemands, les pouvoirs d’orientation des marchés, au profit des multinationales à base française. Pour les dirigeants allemands, qui ont besoin eux aussi d’une construction européenne pour leur domination dans le monde, il s’agit d’abord de «  faire converger  » les structures nationales sous la pression des marchés et de «  couronner  » ce processus d’adaptation structurelle aux normes allemandes par l’adoption d’institutions fédérales.

En alternative, il faudrait mettre en avant l’ambition d’ un con-fédéralisme européen d’un nouveau type. Il ne renverrait pas seulement aux pouvoirs d’États nationaux, largement amputés aujourd’hui par la pression des marchés. Mais il serait construit aussi sur des institutions de partage des informations, des pouvoirs et des moyens financiers, de l’entreprise aux collectivités territoriales, des régions aux nations, des nations à l’Europe. Ceci serait susceptible de maîtriser les marchés à tous les niveaux pour faire prévaloir des progrès sociaux, environnementaux et démocratiques de partout.

Précisément, de partout, grandissent des luttes de protestation contre des politiques tendant, en pratique, à avancer d’une façon ou d’une autre vers une construction européenne de type fédéral, avec de très graves atteintes à la souveraineté populaire et à la démocratie parlementaire.

Ces luttes devraient pouvoir converger, en visant à progresser vers une cohérence nouvelle réclamant des changements institutionnels et de pratiques politiques profonds, à partir des aspirations à la sécurisation de l’emploi et de la formation, à un progrès des revenus salariaux et de remplacement, des protections sociales, à l’expansion de tous les services publics.

Il s’agirait, alors, de contrer l’hyper-fédéralisme de la BCE et les tentatives d’y formater les pratiques institutionnelles nationales – notamment en matière de politique budgétaire avec le TSCG et les two et six packs. Il s’agirait de faire avancer, en pratique, un nouveau type de con-fédéralisme de maîtrise sociale décentralisée et démocratique des marchés pour une double sécurisation- promotion commune de l’emploi et de la formation et des services publics.

L’enjeu fondamental des rapports France-Allemagne/Europe du Sud

L’Allemagne est devenue le grand créancier des pays d’Europe du Sud, France comprise. Elle réalise sur eux une part considérable de ses énormes excédents commerciaux et leur consent un certain recyclage de ces surplus en contrepartie de sacrifices sociaux et salariaux, d’adaptations structurelles qui, en réalité, conduisent à approfondir la crise européenne.

L’Allemagne cherche à imposer à la zone euro des spécialisations qui puissent conforter la domination de son propre système productif national afin de rivaliser dans la recherche d’une hégémonie mondiale avec les autres grandes puissances économiques, financières et commerciales. Alors même que l’ordre du monde est en train de bouger (tendance à l’affaiblissement du leadership américain, montée irréversible des grands pays émergents, Chine en tête...

C’est ainsi qu’elle entend faire accepter par ses «  partenaires  » d’Europe du Sud une nouvelle spécialisation de leur système productif à bas «  coût du travail  ». Comme elle a réussi, après la «  chute du mur  », à imposer aux PECO une spécialisation conforme aux exigences de ses grands groupes. Celle-ci a permis aux multinationales à base allemande de relever des défis de la mondialisation (segmentation du processus de production) sans, pour autant, mettre radicalement en cause le «  site allemand de production  », à la différence de ce qu’ont fait les grands groupes à base française. Et les bas «  coûts salariaux  » des mains d’œuvres qualifiées des PECO ont joué ici un rôle déterminant.

Cette tentative renvoie aussi à l’absolu besoin pour l’Allemagne – ou plus précisément ses capitalistes – que le reste de l’Europe qualifiée travaille pour elle ou chez elle, y compris pour faire reculer les revendications salariales outre-Rhin.

On sait, en effet, que la démographie y est crépusculaire avec un faible taux de fécondité et un ratio de dépendance (nombre d’individus sans emploi/nombre d’individus avec emploi) de plus en plus dégradé du fait de l’érosion de la population active, du chômage et du vieillissement.

Il est possible de voir comment, face à ces défis, les dirigeants allemands cherchent à utiliser l’euro, ses contradictions, sa crise et, simultanément, les besoins exacerbés de solidarité des pays en difficulté, pour leur imposer un chantage permanent à l’ajustement structurel. Celui-ci se traduit, alors, au final, soit par des prises de contrôle par des capitaux allemands de débouchés et/ou d’entreprises d’Europe du Sud en difficulté, y compris des entreprises publiques privatisables, soit par la migration grandissante de populations juvéniles et formées d’Europe du Sud vers le marché du travail allemand.

Dans un contexte où les pays d’Europe du Sud sont contraints, avec les politiques d’austérité, d’accepter une très faible croissance de leur marché intérieur, cela se traduit, inséparablement, chez eux par la baisse du coût du travail. Car ils sont mis en concurrence pour accéder au marché intérieur allemand seul à présenter une perspective de relance. Au final, c’est le coût des importations par l’Allemagne des produits que lui vendent ces pays qui tend à diminuer, ce qui accroît ses propres excédents commerciaux.

C’est dire l’importance des rapports France-Allemagne dans cette partie de bras de fer historique si contradictoire. Ils sont fondateurs de la communauté européenne et, plus encore, de la zone euro. Chacun de ces deux pays a, pour l’heure, l’autre pour principal partenaire commercial.

Si la France avançait sur une autre option de construction, mettant en avant la nécessité fondamentale de solidarités nouvelles pour un co-développement des peuples de la zone et de mise en cause de la domination des marchés financiers, en s’appuyant sur les aspirations et les luttes montant en Europe du Sud, le cours de l’Europe pourrait commencer à bifurquer.

La France, pilier fondateur de l’euro, a un statut particulier dans cette zone.

Elle y est, à la fois, dominante sur l’Europe du Sud, comme l’Allemagne, et dominée par l’Allemagne, comme les autres pays d’Europe du Sud. Elle occupe donc une place absolument stratégique. D’autant plus que l’Allemagne elle-même, malgré les oppositions qui se font jour en son sein et que les dirigeants allemands utilisent volontiers comme argument de chantage sur leurs partenaires, a absolument besoin de l’euro pour développer sa propre domination au plan mondial.

Si F. Hollande, au lieu de trahir sa promesse de renégocier le TSCG et de combattre son ennemi «  la finance  », était allé jusqu’à imposer une renégociation en écho aux attentes sociales et démocratiques des peuples français et d’Europe du Sud, l’histoire aurait sans doute bougé. Mais le jeu français ne visant qu’à défendre les intérêts européens des multinationales à base française, à essayer de partager avec l’Allemagne la domination sur l’Europe, le bras de fer a, vite, tourné court.

Le défi d’un marché transatlantique

Il faut, à ce propos, mesurer le défi que constitue le projet d’un grand marché transatlantique unissant l’Europe et les pays d’Amérique du Nord. Cela pourrait conduire à rendre encore plus difficiles et contradictoires, pour les Français et l’Europe du Sud, les rapports avec l’Allemagne.

En effet, la France et les États-Unis, certes avec des échelles différentes, présentent des spécialisations productives analogues et, donc, concurrentes, alors que l’Allemagne présente un type de spécialisation plutôt complémentaire de celui des États-Unis.

L’ouverture d’un grand marché transatlantique pourrait alors accentuer la concurrence avec les productions américaines sur des atouts productifs essentiels de la France comme l’aéronautique, l’automobile, l’énergie, les télécommunications, les transports, la chimie-pharmacie, l’agriculture, la culture et l’audio-visuel… une concurrence qui serait d’autant plus difficile à soutenir pour la France avec «  l’euro fort  » face au dollar.

Cela pourrait alors conduire à de nouveaux affaiblissements relatifs de la France face à l’Allemagne en Europe dont pâtiraient aussi tous les autres pays d’Europe du Sud.

L’euro et la BCE

Ils sont au cœur de la construction actuelle et leur mise en place, comme leur fonctionnement, ont développé de très importantes interdépendances non solidaires entre pays membres de la zone euro. Prétendre que l’issue à la crise actuelle passerait par une sortie de l’euro et, en fait, par la disparition de celui-ci, est illusoire, voire purement démagogique.

L’enjeu est, au contraire, de rassembler, à l’appui des luttes, sur des propositions permettant de changer l’utilisation de l’euro. Et, donc, de changer le rôle, la politique monétaire, les missions et le contrôle de la BCE (1). Il s’agirait de les articuler à des propositions pour changer l’utilisation du crédit et le rôle des banques en France (pôle financier public, nouveau crédit sélectif). Tout en mettant en avant les possibilités de s’arracher à la domination du dollar et des États-Unis avec une réforme profonde du FMI et de la Banque mondiale pour une véritable monnaie commune mondiale alternative au Billet vert. Celle-ci, comme le réclament désormais les Chinois, les Russes et des Latino-Américains, pourrait être construite à partir des droits de tirage spéciaux (DTS) du FMI. 

(1) Financement par création monétaire d’une grande expansion des services publics via un Fonds social, solidaire et écologique de développement européen  ; monétisation d’une partie des dettes publiques  ; sélectivité nouvelle de la politique monétaire pour encourager d’autant plus le crédit bancaire qu’il sert à financer des investissements programmant plus d’emplois et de formations et pour pénaliser les crédits à la spécialisation

Fin du texte du PCF

Hervé Debonrivage


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