Science : outil indispensable de l’humanité en marche et du socialisme

mercredi 18 octobre 2023.
 

- A La gauche, le socialisme et les sciences
- B Le socialisme historique se définit comme scientifique
- C Affronter le débat politique sur la science
- D Ame sans science n’est que ruine de la conscience
- E La science, outil indispensable de l’humanité
- F Lien vers quelques articles et rubriques mis en ligne sur notre site
- G Conclusion : Socialiste, science et émancipation humaine

La science se définit comme une production de connaissance dans des domaines précis (mathématiques, physique, chimie, médecine, astronomie, agronomie, botanique, zoologie, biologie, informatique, géologie, climatologie, mécanique, optique...) et selon des méthodes rationnelles (expérimentation, observation, hypothèse, confirmation ou infirmation, modélisation...).

« La science a-t-elle promis le bonheur ? Non. Elle a seulement promis la vérité. La question est de savoir si l’on fera du bonheur avec la vérité » (Emile Zola)

A) Sciences, Progrès humain et socialisme

A1) Sciences et progrès humain

Les découvertes scientifiques ont largement participé à l’épopée d’émancipation humaine. Notons leur caractère :

- universaliste. Toute innovation, toute révélation émane d’un chercheur dans un territoire et se répand sur les cinq continents. De prétendus "humanistes" médiévaux puis de la Renaissance voulaient revenir aux "sources limpides" de la Grèce antique sans la "contamination" arabe ; leur théorie est risible aujourd’hui.

- cumulatif : Toute observation, toute intuition contribue à une nouvelle découverte qui elle-même en permettra d’autres. Pour suivre le même exemple, nous savons à quel point la science arabe a sauvé l’héritage grec, l’a fertilisé avant que d’autres poches de civilisation ne l’utilisent pour améliorer encore la compréhension de la réalité. De même, la découverte de la photographie (1839) a utilisé la découverte arabe médiévale de la chambre noire. De même, des premières ailes volantes aux premiers avions (1890) et aux premières fusées, toute amélioration profita des expériences précédentes.

- non marchand : La science a toujours présenté un caractère fondamental de bien partagé, de bien commun. Que serait devenue l’humanité si chaque grande découverte avait été accaparée par le brevet d’un profiteur selon les formules du capitalisme contemporain : la découverte du feu (vers -500000), de l’écriture ( vers -5000), de la roue (vers -3500), du zéro (vers - 2000), du moulin à eau (vers -200), des lunettes (1300), de l’imprimerie (1454), de la machine à vapeur (1712), de l’électricité (1800), du train (1804), du téléphone (1876), de la télévision (1926)...

- critique : La mise en place d’une commission Sciences debout dans le cadre de la Nuit Debout parisienne est intéressante à suivre. Un doctorant en physique quantique (Adrien Jeantet), travaillant sur « l’étude optique des nanotubes de carbone » au Laboratoire Pierre-Aigrain (Paris 7-Denis Diderot), brandit une pancarte : « Je suis physicien, posez-moi vos questions. » Il est rapidement rejoint par une biologiste, une historienne, par un puis deux autres physiciens, et enfin par un mathématicien. Quel questionnement les rassemble et groupe des personnes autour d’eux ? "Partager ses connaissances est un acte politique. Décloisonner est un acte politique... « Comment être sûr que nos recherches ne mèneront pas à des catastrophes ? L’une des solutions, c’est que les citoyens puissent décoder, décrypter les paroles des experts » « La vraie articulation entre nous et "Nuit Debout", c’est la volonté de remettre le citoyen au coeur de l’action politique. L’ADN de "Nuit Debout", c’est "se construire ensemble". »

A2) Pourquoi une rubrique SCIENCES dans un site du Parti de Gauche ? Parce que l’histoire de la gauche, du socialisme et l’histoire des sciences sont fortement imbriquées depuis deux siècles et demi

La naissance de la gauche comme courant politique est inséparable de son héritage des Lumières du 18ème siècle. L’ouvrage de Jacques Julliard publié le 26 septembre 2012 sur "Les gauches françaises" insiste sur cette époque où le combat en faveur de la liberté de conscience et celui pour la souveraineté populaire vont de pair avec la méthodologie matérialiste d’Helvétius, avec l’esprit critique rationaliste de Diderot, avec les recherches mathématiques de D’Alembert, avec les écrits de D’Holbach sur la chimie, métallurgie, géologie, minéralogie, avec les découvertes de Newton...

La Révolution française renforce ce lien entre les sciences et la gauche républicaine révolutionnaire. A aucune autre époque les savants et grands intellectuels ne se sont autant mobilisés : Monge, Hassenfratz, Berthollet, Fourcroy, Méchain, Delambre, Chappe, Seguin, Guyton de Morveau, Vandermonde, Lakanal, Lamarck, Lagrange, Laplace, Lefèvre-Gineau, Pinel, Cassini, Blache, Corvisart, Le Gendre, Haüy, Daubenton, Cabanis, Desfontaine, Lacépède, les frères Romme, Lakanal, Pelletan, Arbogast, Hallé, Desault, Bichat, Thouret, Poyet, Faujas de Saint-Fond, Antoine-Laurent de Jussieu, Geoffroy Saint-Hilaire, Cuvier...

Uniformité des poids et mesures : Décret de la Convention montagnarde le 1er août 1793

Plusieurs dirigeants nationaux de la gauche entre 1815 et 1848 sont aussi de grands savants :

- C’est le cas par exemple de François Arago astronome et physicien, admis à l’Ecole polytechnique à 17 ans, directeur de l’Observatoire de Paris, professeur de géométrie analytique à l’École polytechnique en 1812, secrétaire perpétuel de l’Académie des sciences en1830. Il mesure la densité de divers gaz, la tension de la vapeur d’eau, étudie l’optique et la vitesse de la lumière, découvre les polarisations rotatoire et chromatique, l’aimantation du fer par un courant électrique, mesure un arc de méridien terrestre... Député de gauche après la Révolution de 1830, président de la Commission exécutive (chef de l’Etat) après celle de 1848...

- Citons aussi François-Vincent Raspail, scientifique rigoureux, grand médecin, gravement blessé sur une barricade lors de la révolution de 1830, candidat de la gauche républicaine et socialiste aux élections présidentielles de 1848...

Raspail, passeur de la révolution française au socialisme, candidat à la présidence de la république le 11 décembre 1848

31 mai 1832 Une balle de pistolet tue Évariste Galois, grand mathématicien et républicain socialiste

L’intérêt de Marx et Engels pour les sciences est connu. « L’étendue de leur information, leurs connaissances, souvent de première main, la fréquentation de savants éminents témoignent d’une inlassable curiosité en matière d’astronomie, de physiologie, de géologie, de paléontologie, de géographie, de zoologie, d’anatomie, de botanique, de chimie, de cosmologie ou de médecine, pour ne rien dire de la passion et du talent de Marx en mathématiques. » ( Dictionnaire critique du marxisme, Bensussan Labica, PUF).

B) Le socialisme historique se définit comme scientifique (émancipateur, démocratique...)

Une conception du monde ayant pour but de comprendre au mieux le passé, le présent et les hypothèses d’avenir doit se fonder nécessairement sur les faits et théories fournis par les sciences de la nature et l’histoire économique, sociale, culturelle... (y compris très récente) ; sa démarche et sa structure conceptuelle sont nécessairement les plus scientifiques possibles (rationnelles, critiques...).

Une théorie politique se fixant pour objectif l’intérêt général de l’humanité doit nécessairement se fonder sur une base de données scientifique (c’est à dire la plus vérifiable, la plus complète, la plus ouverte, la plus interconnectée... possible). Par ailleurs, ce savoir se voit nécessairement réactualisé par la complexité de l’évolution historique réelle.

Il serait trop long de développer ici les fondements théoriques du socialisme. Globalement, dans les modes de production précédents les richesses sont accaparées par une classe sociale privilégiée. Dans le cadre de la société capitaliste, le socialisme se place aux côtés des salariés, du prolétariat pour abolir cet état de choses en vue d’une société maîtresse de ses choix grâce à l’émancipation humaine par les humains eux-mêmes dont la propriété collective démocratiquement gérée des grands moyens de production, d’échange et de financement.

Pourquoi cet objectif serait-il trop ambitieux à l’heure où l’humanité perce de plus en plus les secrets de la matière et de l’univers lointain ?

Pourquoi cet objectif n’aurait-il rien à voir avec la science. En ce début de 3ème millénaire, l’épistémologie (étude du savoir) donne la définition suivante de l’objectivité scientifique : l’adéquation d’une hypothèse à l’expérience, la preuve étant faite qu’aucune autre hypothèse ne peut en rendre compte. Voilà exactement la méthode dont se réclame le socialisme.

Dans les années 1980 et 1990, la déferlante idéologique "libérale" a amené par exemple L’Encyclopedia Universalis à envoyer le matérialisme historique aux poubelles de l’histoire. Nous ne raisonnons pas ainsi et avons ouvert sur notre site une petite rubrique modeste sur ce sujet :

http://www.gauchemip.org/spip.php?r...

Il est vrai que le socialisme naît au sein de courants culturels et politiques marqués par le positivisme hérité des Lumières du 18ème. Le positivisme (Auguste Comte...) met en avant les mathématiques comme méthode, pour développer les autres grandes sciences (astronomie, physique, chimie, biologie, sociologie) et déboucher sur une morale ainsi qu’un programme politique de réorganisation sociale. Dans cette démarche, il surestime la possibilité de traiter ce qui touche à l’humain par une démarche essentiellement mathématique.

Le socialisme a connu des déformations dogmatiques (le stalinisme en étant le principal avatar), scientistes... dues en partie à cette filiation positiviste. Ceci dit, la tradition intellectuelle socialiste a toujours été bien plus pragmatique, plus réaliste, plus dialectique, plus scientifique en un mot que le positivisme.

Pour Blanqui « l’engrenage des choses humaines n’est point fatal comme celui de l’univers, il est modifiable à toute minute. »

Engels se démarquait des classifications statiques et de la méthode mécaniste positivistes « De même qu’une forme de mouvement se développe à partir d’une autre, de même leurs reflets, les diverses sciences, doivent découler l’une de l’autre d’une manière nécessaire. »

En 1938, Paul Langevin (scientifique et socialiste, directeur de l’École supérieure de physique et de chimie industrielles..., ami de Marie Curie, incarcéré ensuite par la gestapo...) critique dans La Pensée et l’Action l’attitude positiviste « essentiellement critique, analytique et statique ; elle est plus propre à dresser un bilan des connaissances acquises, à formuler clairement la structure et le contenu de ces connaissances, qu’à montrer la voie pour les étendre ou les renouveler, plus propre à signaler les difficultés qu’à les résoudre. Elle permet l’élimination des notions ou des théories, la dénonciation des problèmes et affirmations vides de sens, mais elle ne permet pas de formuler des indications pour la construction de notions ou de théories nouvelles. »

En 1997, Daniel Bensaïd définissait l’action émancipatrice comme « un travail pour l’incertain » (affirmation reprise du philosophe Blaise Pascal, 17ème).

C) Anticapitalisme et défense du rôle non marchand de la science

La crise actuelle du capitalisme n’a pas seulement des conséquences monétaires, économiques et sociales. Elle pèse inévitablement dans le sens d’une crise de la société avec par exemple des incertitudes, des peurs et même des rejets vis à vis des sciences. Il est vrai que la gestion mensongère de désastres comme Tchernobyl ou Fukushima justifie des appréhensions à l’encontre des technologies de pointe et de leurs "experts". Il est vrai que l’implication d’institutions policières pour contrôler l’informatique et la communication ne prédispose pas à croire en une neutralité de la science (par exemple la CIA dans facebook). Il est vrai que la finance capitaliste oriente ses investissements vers les travaux scientifiques qui peuvent lui rapporter le plus d’argent d’où la commercialisation du vivant (brevets), d’où les OGM, d’où l’orientation de la recherche médicale vers les maladies qui peuvent être "rentables"... Oui, la science est devenue un outil de valorisation du capital. Mais, est-ce une raison pour que nous l’excluions de nos préoccupations politiques ? NON.

Nous devons pointer l’énorme contradiction de ce début du troisième millénaire entre des sciences de plus en plus performantes et leur appropriation privée pour des intérêts essentiellement à court terme. C’est ce qui rend biaisés des débats essentiels comme ceux de bioéthique ou de priorité en recherche médicale. Une grande partie des budgets de recherche aux USA, pays le plus puissant de la planète, est orientée vers la recherche militaire pour mieux asservir les peuples aux intérêts de ses multinationales. Depuis les bombes d’Hiroshima et de Nagasaki, nous savons que cet impérialisme est capable des pires ignominies dans l’utilisation des découvertes scientifiques (agent orange au Vietnam...) ; si les missiles V1 et V2 d’Hitler avaient été prêts à temps, les moyens nazis d’extermination auraient engendré des souffrances pires encore.

Cette contradiction entre sciences de plus en plus performantes et appropriation privée des grands moyens de production est clairement apparue lors du prétendu "débat national sur les nanotechnologies" en 2010. Oui, il existe un besoin d’information et de débat citoyen sur ce sujet des nouvelles particules industrielles « intelligentes ». Mais, dans cette affaire comme pour le nucléaire ou les OGM, l’objectif des pouvoirs publics (et en particulier de François Fillon) était seulement d’aider les industriels à convaincre le public de l’utilité de leurs découvertes ; c’était une « campagne d’acceptabilité sociale ». D’ailleurs les deux millions d’euros de crédits publics alloués à cet objectif ont simplement été répartis entre deux entreprises de communication : I&E Consultants et S’Cape.

D) Ame sans science n’est que ruine de la conscience

Que le lecteur me permette cet humble complément à l’affirmation célèbre de Rabelais "Science sans conscience n’est que ruine de l’âme".

Qui peut aujourd’hui nier l’ellipse de la Terre autour du Soleil, la circulation sanguine ou le rôle de la sexualité dans la procréation ? un individu dont la conscience est en ruine.

Qui peut aujourd’hui se revendiquer d’une conception du monde pré-scientifique ? Ceux qui l’ont fait au 20ème siècle, d’Hitler aux taliban, du Ku Klux Khan à Idi Amin Dada n’ont pas laissé un souvenir heureux.

Les idées a-scientifiques peuvent aussi se développer aujourd’hui parmi des courants marqués à gauche, s’affirmant par exemple écologistes, mettant dans le même sac la science et le capitalisme. Nous avons constaté cela par exemple durant la campagne des élections présidentielles 2007 au sein du collectif soutenant José Bové. Dans le texte ""108 propositions pour une République Française laïque, écologique et sociale", nous pouvions lire " A la Renaissance... émerge la foi en la raison comme idéal et comme moyen pour comprendre la nature"... aujourd’hui, l’humanité serait en danger à cause "de la science de ces trois derniers siècles."

Ce discours rompt avec la tradition progressiste et socialiste.

Premièrement, sur ce point de méthode, il est important de défendre le matérialisme pour lequel la matière construit toute réalité. Les bovétistes boudhistes cités plus haut considèrent, eux, que la transcendance domine la matière puisqu’ils croient en un autre moyen que la science "pour comprendre la nature".

Deuxièmement, la focalisation sur les scientifiques de la Renaissance marquait jusqu’à présent le discours de l’extrême droite catholique qui datait le début de la "décadence européenne" du schisme protestant. Pour des progressistes rationnels, il est clair que les débuts de la recherche et de la connaissance scientifique empirique remontent à des civilisations bien plus anciennes (Egyptiens, Sumériens, Babyloniens, Chinois...). Jean-Pierre Vernant argumente bien l’importance décisive de la Grèce antique pour "rendre compte de l’ordonnance de l’univers d’une façon purement positive et rationnelle" (Mythe et pensée chez les Grecs). La science arabo-musulmane est ensuite l’héritière des Grecs, bénéficiant également des apports d’Alexandrie, d’Inde, de la Perse...

Troisièmement, il est vrai que la Renaissance marque pour l’Europe une rupture avec la nuit scientifique du Moyen Age. Jean Jaurès analyse cela parfaitement ; à partir de cette époque, l’homme " a organisé la science méthodique, expérimentale et inductive ... la puissance de la science organisée qui, par l’hypothèse vérifiée et vérifiable, par l’observation, l’expérimentation et le calcul, interroge la nature et nous transmet ses réponses, sans les mutiler ou les déformer à la convenance d’une autorité, d’un dogme ou d’un livre". Jaurès lie cette conquête à une conception du monde "affirmant le droit de la personne humaine, indépendant de toute croyance, supérieur à toute formule. Oui, le droit de la personne humaine à choisir et à affirmer librement sa croyance, quelle qu’elle soit, l’autonomie inviolable de la conscience et de l’esprit."

Quatrièmement, les auteurs de ce texte mis en exergue sur le site de campagne bovétiste ne basent pas leur théorie de la connaissance sur la raison, la logique, l’expérience, la connaissance vérifiée ; leur monde n’est pas celui de la réalité mais celui du mental. Aussi, ils analysent le capitalisme comme né de la science économique. " C’est à partir de la Renaissance que l’économie politique devint une discipline de pensée, détachée de la philosophie et préoccupée exclusivement de la création et de la circulation des biens matériels. L’économie politique se transformera en sciences économiques ; cette mutation fut favorisée par le recours de plus en plus fréquent à l’arsenal mathématique - essentiellement l’analyse et la statistique." Avec une telle méthode de raisonnement, on comprend que ces mêmes philosophes font porter aux sciences la responsabilité des dangers générés par le capitalisme et considèrent que l’humanité est aujourd’hui en danger à cause "de la science de ces trois derniers siècles."

D) La science, outil indispensable de l’humanité

Depuis la nuit des temps l’homme s’est distingué des espèces animales par son aptitude :

- à comprendre peu à peu la réalité (plantes, saisons, corps humain...) pour améliorer sa propre vie

- à élaborer des méthodes et connaissances (mathématique, physique, chimie, technologie...) permettant de pousser toujours plus loin les limites des sciences pures et appliquées (astronomie, biologie, mécanique...)

D1) Philosophie et sciences de la nature

Dans le texte cité précédemment de bouddhistes bovétistes, la perte par la théologie puis la philosophie métaphysique de leur rôle axial pour toute la connaissance est notée comme catastrophique. Or, l’autonomie acquise par les mathématiques, la médecine, la technologie, la physique, la chimie, la géodésie, la biologie, l’astronomie, la géologie... représente évidemment un grand progrès pour l’humanité après des siècles de mythes archaïques tentant de compenser les questions d’antiques civilisations (comment ont été créés la Terre, l’Homme, le Chat...).

L’éclosion puis la maturité modeste des sciences de la nature vis à vis de cette tutelle confuse de cette philosophie a permis l’épanouissement d’une conception du monde fondée sur le vrai démontré, d’une méthode scientifique de raisonnement et d’expérimentation, d’une connaissance collective contrôlable par la vérification des faits et des concepts.

Sans cet épanouissement des sciences pures, nous serions aujourd’hui bien incapables de comprendre :

- la tectonique des plaques et les risques sismiques

- les évolutions météorologiques

- le réchauffement planétaire et ses conséquences

- les microbes et les vaccins, le lien entre alimentation, activité physique et santé

- la composition de la matière et ses nombreuses implications ...

Sans les découvertes scientifiques, nous serions encore impuissants à démonter les bêtises racistes que la droite et l’extrême droite revendiquaient encore durant la deuxième moitié du 19ème et le début du 20ème siècle (caractéristiques morales et physiques des races allemande, anglaise, française, japonaise...).

Le lien entre investisseurs, chercheurs et brevets constitue évidemment aujourd’hui un risque d’utilisation mercantile ou même guerrière des nouvelles découvertes. Cependant, la science en tant que telle, n’est pas responsable de l’appropriation privée actuelle des grands moyens de production et de la finance.

D2) Science et sciences

Au dix-neuvième puis au vingtième siècle, la technologie a réalisé des progrès fulgurants ; l’histoire, la sociologie, la psychologie, l’économie... se sont émancipées à leur tour de la philosophie.

En ce début de 21ème siècle, quelles disciplines pouvons-nous compter parmi les sciences et comment les classer ?

Probablement par influence de ma formation professionnelle en bibliothéconomie, je raisonne toujours en trois types de sciences :

- les sciences pures (qui reposent sur des mécanismes de déduction) et sciences de la nature (étude de la nature) hors toute application concrète : Mathématiques, Astronomie, Astrophysique, Géodésie, Physique, Chimie, Minéralogie, Cristallographie, Science de la Terre, Géologie, Météorologie, Paléontologie, Fossiles, Biologie, Botanique, Zoologie

L’article ci-dessus ne porte que sur ces sciences pures et sciences de la nature.

- les sciences appliquées (orientées vers l’application pratique des connaissances) : Biotechnologie, Médecine, Technologie, Sciences et techniques relatives à l’agriculture, Robotique par exemple en économie domestique, Transport, Communication, Comptabilité, Gestion, Construction...

- les sciences humaines et sociales : Sociologie, Histoire, Logique, Psychologie, Philosophie, Statistique, Économie, Géographie, Ethique, Droit, Sciences politiques, Sciences de l’éducation, Ethnologie, Anthropologie, Démographie, Archéologie, Linguistique, Sciences de la religion, Théorie de la littérature, Histoire et Théorie de l’art.

Le socialisme a souvent fait l’objet de critiques dans sa volonté de prendre en compte l’ensemble de ces disciplines ; pourquoi cette démarche totalisante conduirait-elle au totalitarisme ? Si l’objectivité scientifique repose sur l’adéquation d’une hypothèse à l’expérience, la preuve étant faite qu’aucune autre hypothèse ne peut en rendre compte, toute méthode scientifique doit nécessairement prendre en compte le maximum de faits, d’approches et d’hypothèses.

Le socialisme a fait aussi l’objet de critiques dans l’intégration de ces disciplines à son corpus théorique. Il est vrai que leur statut comme sciences présente de grandes différences avec les sciences exactes car la preuve de la vérité par la déduction, l’observation et l’expérimentation est bien plus complexe, sujette à caution... Cependant, leur méthode doit être scientifique. Quant à leur objet, il est évidemment décisif pour comprendre les sociétés humaines, collectivement et individuellement ; que vaut l’Histoire sans les apports de l’histoire économique, de la sociologie historique, de l’histoire du droit, de la philosophie, de la littérature...

E) Lien vers quelques articles concernant les sciences déjà mis en ligne sur notre site

L’atome, de Dalton à ITER (Au cœur de la matière 1)

Linné, "Génie de la science" ou Raciste créationniste fixiste fantaisiste fanfaron

La Science, un enjeu politique pour aujourd’hui et pour demain

Forum Mondial Science et démocratie (4 articles)

La science, une croyance comme une autre ?

Monsieur le Président, vous ne mesurez peut-être pas la défiance..., par Wendelin Werner (mathématicien de renommée internationale)

Manifeste : La raison, la recherche scientifique et l’avenir de la planète

Les nanotechnologies sont au cœur de la bataille idéologique

Sous rubrique Anthropologie : http://www.gauchemip.org/spip.php?r...

Sous rubrique Astronomie : http://www.gauchemip.org/spip.php?r...

Sous rubrique Bioéthique : http://www.gauchemip.org/spip.php?r...

Sous rubrique Biologie : http://www.gauchemip.org/spip.php?r...

Sous rubrique Evolution Darwin : http://www.gauchemip.org/spip.php?r...

Sous rubrique Génétique : http://www.gauchemip.org/spip.php?r...

Sous rubrique Physique : http://www.gauchemip.org/spip.php?r...

Sous rubrique Scientifiques : http://www.gauchemip.org/spip.php?r...

Complément) Le Parti socialiste, la science et l’émancipation humaine (1978)

En discutant de cet éditorial pour notre sous-rubrique Sciences, un camarade m’a signalé cet extrait de la motion miterrandiste au congrès socialiste de Metz (1978) « Pas de socialisme sans la Science. Le refus du progrès technique, la peur de l’acte créateur sont le propre des sociétés perdues ; le danger pour l’Humanité n’est pas que l’Homme invente mais qu’il ne maîtrise pas ce qu’il a créé... Les socialistes savent que la Science n’est pas neutre. Ou bien la liberté y gagnera ou bien ce seront les forces d’oppression. »

Le Projet socialiste pour la France des années 80 ajoutait :

« Le Parti socialiste, bien loin de disqualifier le "Savoir" parce qu’il serait le masque du "Pouvoir", entend lier plus que jamais et de manière indissociable, son combat pour la connaissance et son combat pour la démocratie : c’est en particulier le rôle des "luttes pour le contrôle" qui doivent permettre aux travailleurs de concevoir leur action dans une perspective plus large.

Plus généralement le développement de la science ne peut être conçu indépendamment du développement historique. La science d’aujourd’hui joue un rôle dans les rapports de production et dans la lutte des classes (qui ne voit que la "compétence" est devenue un principe de hiérarchisation sociale , qui ne voit que la connaissance scientifique est devenue pour les nations impérialistes, et tout d’abord les Etats-Unis d’Amérique, une arme non seulement technologique mais idéologique ?)... C’est pourquoi il est important de lier les problèmes du développement scientifique et ceux de la transition au socialisme...

L’organisation d’un débat démocratique sur les enjeux scientifiques implique en fait l’existence d’une opinion informée disposant d’un esprit critique et d’un minimum de culture scientifique de base, ce qui suppose un effort d’éducation et d’information scientifique considérable...

Inventer l’avenir est notre responsabilité. Comment le faire sans mettre au premier plan de notre Projet les valeurs de la connaissance, c’est à dire à la fois l’esprit critique, le sens de la rigueur et le goût de l’effort intellectuel et sans jamais dissocier l’intérêt pour la Science du sens de la responsabilité scientifique. »

CONCLUSION

Analyser pourquoi ce texte de 1980 est devenu un voeu a-scientifique en 1982 relève d’un bilan à la fois politique, historique, économique, scientifique, sociologique, culturel, éducatif. Il prouve même la centralité de la lutte des classes ; à partir du moment où le gouvernement a reculé sur les "luttes pour le contrôle" et sur la démocratisation des médias, tout projet avait moins d’effet que l’air sortant d’une flûte.

Oui, l’action politique socialiste lie nécessairement passé, présent et programme pour l’avenir. Oui, elle ne peut être séparée d’une méthode scientifique de raisonnement, séparée de l’ensemble des disciplines, séparée surtout de la volonté politique et du rapport de force à construire pour lui donner sens.

Jacques Serieys le 10 novembre 2007, complété en octobre 2012


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