Faites mieux : Un livre de Jean-Luc Mélenchon pour oser

mercredi 11 octobre 2023.
 

Je suis l’auteur d’un livre qui vient de paraitre le 28 septembre. Je le dis dans le cas où vous auriez échappé à mes annonces sur le sujet…

Au départ c’est une commande de mes proches pour l’école de formation du Mouvement Insoumis, quand je suis devenu le co-président de l’Institut la Boétie. Il s’agissait de présenter la « théorie de l’ère du peuple et de la révolution citoyenne ». Car après des dizaines de conférences sur le thème en France et en Amérique du sud, son contenu s’est profondément précisé, notamment depuis sa première formulation il y a plus de dix ans. Surtout grâce à l’observation des cas concrets où elle se vérifiait. L’ambition depuis dix ans n’a pas changé. La mise en panne de la pensée politique de la gauche à propos du changement nécessaire pour la société nous laisse sans moyen d’action claire. Depuis l’effondrement de l’URSS et de la social-démocratie, les politiques de gauche se limitent à être une collection de pansements écologiques ou sociaux. Dans les meilleurs des cas. Peut-on faire mieux ? Ce livre le propose.

De quoi parle-t-il ? Une ère politique entièrement nouvelle s’ouvre. Le changement climatique est désormais irréversible. La catastrophe finale est en vue. Si rien ne change, et rien ne change, « l’effondrement est commencé » a déjà déclaré le secrétaire général de l’ONU. Je le pense aussi. Comment en est-on arrivé là, comment peut-on surmonter cette épreuve ?

Ce livre formule une théorie, c’est-à-dire une façon de comprendre ce qui se passe sous nos yeux et que souvent nous ne voyons pas parce que nous y sommes totalement immergés. Pour cela, il met en relation les faits nouveaux structurant de notre époque en commençant par les exposer. Son parti pris intellectuel : sans théorie claire l’action est aveugle. Sans compréhension des causes on ne peut combattre les effets ni changer le cours catastrophique des évènements en cours.

Le raisonnement part de l’augmentation extraordinaire de la population au vingtième siècle. Il explique de cette façon une modification radicale de la condition humaine, devenue désormais urbaine. Le nombre fait les villes. Les villes ont formé des réseaux collectifs dont dépendent désormais la production et reproduction de la vie matérielle de chacun. Ces réseaux font émerger un acteur social et politique nouveau : le peuple. Et celui-ci s’auto-détermine spontanément. Le peuple, nouvel acteur politique permet de définir un « peuplisme ». La théorie explique la nouvelle définition du peuple par la dépendance envers les réseaux collectifs urbains. Il analyse cette dépendance et les nouvelles conflictualités qu’elle crée. En étendant l’analyse, le livre s’intéresse à la mutation du capitalisme contemporain réorganisant ses réseaux de production dans la toile numérique globale et transformant toute activité en flux et monnayant tous les droits d’accès. Au fil de l’analyse, le livre étudie le mécanisme de production d’un espace-temps capitaliste provoquant une « collision des rythmes » dans tous les aspects de la société, des individus, du vivant. Mais il montre aussi comment tout savoir et toute prévision deviennent incertains dans le contexte du changement climatique. Cela modifie radicalement les conditions dans lesquelles doivent être prises les décisions politiques. Alors, ce nouveau contexte humain constitue le terreau propice d’où surgissent les « révolutions citoyennes ». Ce livre en décrit des exemples contemporains pris dans quinze pays du monde entier. Il en met à nu les formes et les étapes, les signes avant-coureurs et les étapes de déroulement.

Au fil des pages, c’est aussi un livre à propos de notre époque et des comportements qui s’y manifestent. Les nouvelles composantes de la réalité politique sont là. L’hyperconnexion des individus, l’individuation, la « poly-présence », la grande bascule du monde dans l’ère de la numérisation générale de l’activité humaine et la mutation du capitalisme contemporain sont identifiés comme les bases nouvelles de la condition humaine dans la « noosphère » concept emprunté à un chimiste soviétique et à un religieux français. Elles produisent de nouvelles conflictualités organisatrices de la vie en société. La critique ici vise le libéralisme comme obscurantisme quand il s’approprie les savoirs humains et marchandise leur droit d’accès. Dans le même ordre d’esprit, la théorie propose un dépassement de l’opposition humain et nature en identifiant des droits biologiques fondamentaux de l’espèce animale humaine. Le silence, la nuit, l’air, l’eau sont pris en exemple de cette approche. Ce livre pense les humains sans les séparer de leur écosystème global.

Ce livre est un livre de théorie politique. Il démontre l’obsolescence des pensées traditionnelles de la politique quand ils n’ont pas su abandonner l’impératif du productivisme. Leur espoir d’une croissance sans fin, en pleine hallucination consumériste en fait des logiciels périmés. Libéraux, sociaux-démocrates ou écologiste « d’accompagnement » sont également dépassés et dangereux. Ici l’écologie politique est nécessairement incompatible avec le capitalisme. La civilisation humaine butte sur le capitalisme comme sur une limite imprévue par les théories politiques du passé, inclues celles du socialisme. Mais elle est incontournable. Le livre reformule entièrement donc la « théorie de l’ère du peuple et de la révolution citoyenne » dont les fondements avaient été élaborés il y a plus de dix ans, en donnant à ces concepts leur contenu dans le contexte particulier de l’effondrement de l’écosystème.

C’est enfin et surtout un outil pour l’action. Le titre « Faites mieux ! » s’adresse à tous ceux qui ne se résignent pas au gâchis laissé par la génération d’après la guerre mondiale et veulent changer le monde. Il veut parler à tous ceux intéressés par la rencontre avec une vision globale du moment. Le livre formule une théorie politique et analyse une époque. Il dessine un nouveau collectivisme comme politique de l’entraide, une morale de la responsabilité et de la Vertu sans attente d’aucune récompense sinon le succès collectif qui en dépend. Pour finir, il étudie les conditions de la nouvelle géopolitique dans laquelle l’Humanité va devoir affronter le défi du changement écologique. Il plaide pour le renoncement à la volonté de puissance. Avec la fin de la domination des États-Unis sur le monde, il formule un plaidoyer documenté sur la façon de faire naître une diplomatie altermondialiste non alignée. L’ambition est d’aider à l’émergence d’un peuple humain. Il s’agit de le faire notamment par la stratégie des « causes communes ». Notamment à propos des nouveaux espaces d’expansion de l’humanité : la Mer et l’Espace. Ainsi le livre est clos par une réflexion sur les normes morales motivant l’action quand celle-ci semble devenue vaine. Il donne les conditions d’émergence d’un nouvel humanisme.

Je destine ce travail à la jeune génération en recherche d’un cadre global de pensée pour agir dans son temps. Mais aussi à tous ceux qui ont envie de partager une expérience intellectuelle revigorante : comprendre à partir d’un point de vue et confronter celui-ci à l’épreuve des faits. Soit pour corriger la théorie, la compléter soit pour la démentir.


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