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Au-delà de l’écume événementielle de la société du spectacle, nous examinons ici la dynamique historique des forces économiques, sociales et politiques qui ont fait émerger Donald Trump.
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1 - Qu’appelle-t-on néo conservateurs aux États-Unis ?
Définition et origines
Les néoconservateurs, souvent appelés « néocons » aux États-Unis, sont un courant politique et intellectuel qui a émergé de manière notable au cours du XXe siècle, bien que leur influence ait effectivement pris de l’ampleur dans les années 1990, notamment après la fin de la Guerre froide. Ce mouvement ne s’est pas strictement « constitué » en 1994, mais cette période correspond à un moment où leurs idées ont gagné en visibilité, en particulier avec la montée en puissance de think tanks et de publications influentes.
Les néoconservateurs sont généralement caractérisés par une vision interventionniste en politique étrangère, une croyance en la promotion de la "démocratie" à l’échelle mondiale (souvent par la force si nécessaire), et une défense vigoureuse des intérêts américains. À l’origine, beaucoup d’entre eux étaient des intellectuels de gauche, souvent issus du Parti démocrate, qui ont évolué vers des positions plus conservatrices dans les années 1960 et 1970, en réaction à ce qu’ils percevaient comme une faiblesse dans la politique étrangère américaine face au communisme. Leur nom, « néo-conservateurs », reflète cette transition : ils sont « nouveaux » dans le camp conservateur.
Dans les années 1990, les néoconservateurs ont critiqué ce qu’ils voyaient comme une politique étrangère hésitante sous Bill Clinton, notamment face aux crises en ex-Yougoslavie ou en Irak. Leur influence a pleinement éclaté après les attentats du 11 septembre 2001, lorsque leurs idées ont trouvé un écho dans l’administration Bush, menant à l’invasion de l’Irak et à une redéfinition de la stratégie américaine.
En résumé, les néoconservateurs sont un groupe qui confine à la foi dans la puissance militaire américaine avec une mission idéologique de diffusion de la démocratie. Leur montée en puissance dans les années 1990, bien qu’ancrée dans des décennies précédentes, a marqué un tournant dans la politique américaine, avec des figures comme Kristol, Wolfowitz et Perle en première ligne.
Le mouvement a des racines plus anciennes, remontant aux travaux d’intellectuels comme Irving Kristol (souvent considéré comme le « père du néoconservatisme ») dès les années 1970, mais il s’est cristallisé dans les années 1990 avec des débats sur le rôle des États-Unis comme superpuissance unique après l’effondrement de l’URSS. Le Project for the New American Century (PNAC), fondé en 1997, est un jalon clé dans cette période, incarnant leurs idées avec un appel à une Amérique assertive sur la scène mondiale.
D’abord largement dominé par les républicains, le groupe des néoconservateurs a perdu de son influence chez ces derniers. Depuis des années 2015 environ le nombre de néoconservateurs chez les républicains et de l’ordre de cinq à 10 % ce qui s’est traduit politiquement par l’émergence de Donald Trump incarnant un nationalisme moins interventionniste. En même temps, des démocrates se sont joints au groupe des néoconservateurs pour la politique étrangère.
Aux élections présidentielles de 2016, Concernant le soutien des néoconservateurs, plusieurs figures de ce courant ont soutenu Clinton en 2016. De nombreux néoconservateurs, traditionnellement associés au Parti républicain, étaient critiques envers Donald Trump, qu’ils considéraient comme imprévisible et trop isolationniste en politique étrangère. Des personnalités comme Robert Kagan, Max Boot, et des membres de groupes comme le Project for a New American Century (PNAC) ont exprimé leur préférence pour Clinton, estimant qu’elle avait une approche plus interventionniste et alignée avec leurs vues en matière de politique étrangère.
Cela dit, ce soutien était circonstanciel et non un ralliement global des néoconservateurs au Parti démocrate.
Voici quelques-unes des personnalités marquantes associées au néoconservatisme, particulièrement influentes dans les années 1990 et au début des années 2000 :
Irving Kristol : Intellectuel pionnier, il a posé les bases théoriques du mouvement dans les années 1970 avec des publications comme The Public Interest. Il plaidait pour un conservatisme pragmatique et interventionniste.
William Kristol : Fils d’Irving, il a été une figure centrale dans les années 1990, notamment via le PNAC et le magazine The Weekly Standard. Il a milité pour une politique étrangère musclée, notamment envers l’Irak.
Paul Wolfowitz : Haut fonctionnaire sous l’administration Bush fils, il a été un architecte clé de la guerre en Irak en 2003. En tant que sous-secrétaire à la Défense, il a incarné l’approche néoconservatrice au sein du gouvernement.
Voir rapport Wolfowitz dans Le Monde Diplomatique : Washington et la maîtrise du monde (avril 1992) https://www.monde-diplomatique.fr/1...
Richard Perle : Surnommé le « prince des ténèbres », il a été un faucon influent dans les cercles de défense et un membre actif du PNAC, poussant pour une posture agressive contre les « États voyous ».
Donald Rumsfeld : Bien qu’il ne soit pas un pur idéologue néocon, en tant que secrétaire à la Défense sous George W. Bush, il a collaboré étroitement avec ce groupe pour mettre en œuvre leurs idées.
Robert Kagan : Historien et commentateur, co-fondateur du PNAC, il a défendu l’idée d’une Amérique comme « empire bienveillant » dans des ouvrages comme Of Paradise and Power.
Dick Cheney : Vice-président sous Bush, il a été un allié des néocons, bien que son conservatisme ait des racines plus traditionnelles. Son soutien aux interventions militaires l’a rapproché de leurs positions.
On peut ajouter aussi :
Victoria Nuland
• Lien avec le néo-conservatisme : Elle est souvent associée aux néo-conservateurs. Diplomate de carrière, elle a occupé des postes clés (assistante au secrétaire d’État pour l’Europe et l’Eurasie sous Obama, sous-secrétaire d’État sous Biden). Son rôle dans la crise ukrainienne de 2014, où elle a soutenu le renversement du gouvernement pro-russe, et ses propos virulents contre l’UE (« Fuck the EU ») révèlent une posture interventionniste typique des néo-conservateurs. Son mari, Robert Kagan, est un penseur néo-conservateur majeur, co-fondateur du « Project for the New American Century » (PNAC), ce qui renforce cette association.
• Lien avec CIA/FBI : Elle a travaillé au Département d’État, pas dans ces agences, bien que ses politiques aient pu influencer leurs opérations via des directives gouvernementales.
Zbigniew Brzezinski
• Lien avec le néo-conservatisme : Pas exactement un néo-conservateur au sens strict, mais ses idées chevauchent parfois ce courant. Conseiller à la sécurité nationale sous Jimmy Carter (1977-1981), Brzezinski était un stratège de la Guerre froide, partisan d’une ligne dure contre l’URSS (soutien aux moudjahidines en Afghanistan, par exemple). Son livre Le Grand Échiquier (1997) prône la domination américaine sur l’Eurasie, une idée qui plaît aux néo-conservateurs.
• Lien avec CIA/FBI : Il a influencé les opérations de la CIA, notamment via le financement de groupes anti-soviétiques.
George Friedman
• Lien avec le néo-conservatisme : Friedman, fondateur de Stratfor (surnommée « CIA de l’ombre »), est un analyste géopolitique dont les vues flirtent avec le néo-conservatisme. Il défend une Amérique dominante et voit des conflits comme inévitables pour maintenir cette suprématie (par exemple, son discours sur l’Ukraine comme outil contre la Russie).
• Lien avec CIA/FBI : Aucun rôle officiel. Stratfor est une entité privée, bien qu’elle ait des connexions informelles avec les cercles du renseignement américain. Friedman n’a jamais dirigé une agence gouvernementale.
Elliott Abrams
Haut responsable sous Reagan puis Bush, Abrams a occupé des postes clés au Conseil de sécurité nationale et au Département d’État dans les années 2000. Soutien fervent d’Israël et de la promotion de la démocratie, il a influencé les politiques au Moyen-Orient. Sous Trump, il a été nommé envoyé spécial pour le Venezuela et l’Iran, montrant une continuité d’influence. Elliott Abrams n’occupe pas de poste officiel dans le nouveau gouvernement de Donald Trump.
2 – Les outils d’influence des néoconservateurs
Les néoconservateurs ont exercé une influence significative sur divers organismes, fondations et groupes aux États-Unis, en particulier dans les domaines de la politique étrangère et de la défense de leurs idéaux comme l’interventionnisme, la promotion de la démocratie et le renforcement de la puissance américaine. En dehors de l’USAID (Agence des États-Unis pour le développement international) et de la NED (National Endowment for Democracy), qui ont souvent été des outils alignés sur leurs objectifs géopolitiques, plusieurs autres entités ont été ou restent marquées par leur influence. Voici une liste détaillée et raisonnée :
American Enterprise Institute (AEI)
L’AEI est l’un des bastions historiques des néoconservateurs. Ce think tank a hébergé des figures comme Paul Wolfowitz, Richard Perle et John Bolton. Il promeut une politique étrangère interventionniste et un capitalisme de marché. Depuis les années 2000, l’AEI a été un moteur intellectuel pour justifier des actions comme la guerre en Irak, et reste influent dans les cercles républicains hawkish en 2025.
Project for the New American Century (PNAC)
Actif de 1997 à 2006, le PNAC a été un groupe clé fondé par William Kristol et Robert Kagan. Il a poussé pour une hégémonie américaine post-Guerre froide, notamment via une lettre célèbre en 1998 appelant à renverser Saddam Hussein. Bien que dissous, son héritage persiste dans les idées défendues par d’autres organisations néoconservatrices.
Heritage Foundation
Bien que plus large dans ses priorités conservatrices, la Heritage Foundation a souvent convergé avec les néocons sur la politique étrangère, notamment sous Bush avec le soutien à la « guerre contre le terrorisme ». Des néocons comme Edwin Feulner y ont joué des rôles majeurs, et elle reste un acteur influent en 2025, même si elle s’est partiellement alignée sur le trumpisme.
Hudson Institute
Ce think tank a accueilli des néoconservateurs comme Douglas Feith et Norman Podhoretz. Il se concentre sur la sécurité nationale et la promotion de la démocratie, aligné sur les priorités néoconservatrices. Son influence continue dans les débats sur la Chine et la Russie.
Foundation for Defense of Democracies (FDD)
Créée en 2001 après les attentats du 11 septembre, la FDD est un groupe néoconservateur focalisé sur la lutte contre le terrorisme et les régimes autoritaires (Iran, Corée du Nord). Dirigée par des figures comme Clifford May, elle reste active en 2025, plaidant pour des sanctions et des interventions.
International Republican Institute (IRI)
Financé en partie par la NED, l’IRI (lié au Parti républicain) a été un outil pour promouvoir la démocratie à la manière néoconservatrice, souvent en soutenant des mouvements pro-occidentaux dans des pays comme l’Ukraine ou la Géorgie. Des néocons comme John McCain y ont été influents.
Freedom House
Cette ONG, qui évalue la démocratie et les droits humains dans le monde, a souvent reflété les priorités néoconservatrices, notamment sous la présidence de James Woolsey (ex-directeur de la CIA). Elle critique les régimes adversaires des États-Unis et soutient des transitions démocratiques alignées sur les intérêts américains.
Committee on the Present Danger (CPD)
Relancé dans les années 2000 sous l’impulsion de néocons comme R. James Woolsey, le CPD s’est concentré sur les menaces perçues (islamisme radical, Chine). Historiquement anticommuniste, il a adapté son discours mais reste un vecteur d’influence néocon.
Fondations Philanthropiques avec des Liens
Open Society Foundations (OSF)
Bien que fondée par George Soros et souvent associée à des causes progressistes, l’OSF a parfois croisé les objectifs néocons en finançant des mouvements pro-démocratie dans l’ex-bloc soviétique (comme en Ukraine lors de la Révolution orange). Cependant, son alignement avec les néocons est plus circonstanciel que systématique.
Bradley Foundation
Cette fondation conservatrice a soutenu des initiatives néoconservatrices via des financements à des think tanks comme l’AEI ou des projets de politique étrangère musclée. Elle a été influente dans les années 2000 et reste active dans le paysage républicain.
Depuis les années 2000, l’influence des néoconservateurs a connu des hauts et des bas. Leur apogée sous George W. Bush (2001-2009) a vu ces groupes façonner la politique américaine, mais les échecs en Irak et en Afghanistan ont affaibli leur emprise. Sous Obama (2009-2017), leur voix s’est marginalisée, et l’ère Trump (2017-2021, puis 2025-) a privilégié un nationalisme isolationniste, réduisant leur poids direct au sein du gouvernement.
Cependant, en février 2025, ces entités conservent une influence dans les cercles intellectuels et médiatiques républicains, notamment sur des dossiers comme la confrontation avec la Chine ou le soutien à Israël.
Des groupes comme l’AEI, la FDD ou Freedom House continuent de produire des analyses et de lobbyiser, même si le trumpisme a réorienté certaines priorités vers un réalisme économique plutôt qu’un interventionnisme idéologique. Les néoconservateurs ont aussi adapté leur discours, insistant davantage sur les menaces technologiques et économiques (par exemple, Huawei ou TikTok) pour rester pertinents. Leur réseau reste solide, mais leur pouvoir dépend largement de l’évolution du Parti républicain et des prochaines élections.
Identifier les médias spécifiquement sous l’influence des néoconservateurs aux États-Unis nécessite de distinguer entre une affiliation idéologique explicite, une convergence occasionnelle d’intérêts et une influence indirecte via des réseaux de penseurs, de financements ou de contributeurs.
Les néoconservateurs, avec leur accent sur l’interventionnisme, la promotion de la démocratie par la force et un soutien marqué à la puissance américaine, ont historiquement trouvé des relais dans certains médias, souvent conservateurs ou alignés sur des priorités géopolitiques spécifiques. Voici une analyse des médias et agences potentiellement concernés, basée sur leur historique et leurs orientations :
The Weekly Standard (1995-2018)
Fondé par William Kristol et Fred Barnes, ce magazine était une tribune centrale pour les idées néoconservatrices dans les années 2000. Il a vigoureusement soutenu la guerre en Irak et critiqué les politiques isolationnistes ou pacifistes. Bien qu’il ait cessé de paraître en 2018, son influence a marqué une époque et ses contributeurs restent actifs ailleurs.
National Review
Ce magazine conservateur, dirigé historiquement par William F. Buckley Jr., n’est pas exclusivement néoconservateur mais a souvent accueilli leurs voix, notamment sur les questions de politique étrangère. Des figures comme Norman Podhoretz ou David Frum y ont contribué, alignant parfois ses éditoriaux sur des positions interventionnistes, surtout post-11 septembre.
Commentary Magazine
Publié par l’American Jewish Committee, ce mensuel est considéré comme le berceau intellectuel du néoconservatisme depuis les années 1970 sous Norman Podhoretz. Il défend des positions pro-israéliennes et interventionnistes, restant une référence pour les néocons en 2025, même si son audience est plus restreinte.
The Wall Street Journal (section éditoriale)
Le WSJ, surtout via sa page éditoriale dirigée par Paul Gigot dans les années 2000, a souvent reflété des vues néoconservatrices, plaidant pour une politique étrangère musclée et un libéralisme économique. Des chroniqueurs comme Bret Stephens (désormais au New York Times) y ont porté ces idées, bien que le journal reste plus large dans son spectre.
Fox News
Bien que principalement populiste et conservatrice sous l’ère Trump, Fox News a été un relais pour les néoconservateurs dans les années Bush, avec des commentateurs comme Charles Krauthammer ou Bill Kristol. En 2025, son orientation dépend davantage de figures comme Sean Hannity, mais des invités néocons y apparaissent encore pour défendre des interventions contre la Chine ou l’Iran.
The Washington Examiner
Ce journal conservateur, propriété de Philip Anschutz, soutient souvent des positions hawkish alignées sur les néocons, notamment sur Israël et la Russie. Il a évolué vers un soutien à Trump, mais ses racines idéologiques croisent parfois les priorités néoconservatrices.
Agences de presse et influence indirecte
Les grandes agences de presse américaines comme Associated Press (AP), Reuters (bien que britannique à l’origine, très implantée aux États-Unis), ou Bloomberg ne sont pas intrinsèquement néoconservatrices. Elles adoptent une approche factuelle et commerciale, couvrant les événements sans parti pris idéologique clair. Cependant :
Influence via les sources : Les néoconservateurs, via des think tanks comme l’American Enterprise Institute ou la Foundation for Defense of Democracies, fournissent souvent des experts et des analyses repris par ces agences. Par exemple, un rapport de l’AEI sur les menaces iraniennes peut être cité dans un article AP, amplifiant indirectement leur voix.
Pas d’agences spécifiquement néocons : Il n’existe pas d’agence de presse explicitement dédiée à cette idéologie, contrairement aux médias d’opinion. Les agences restent des vecteurs neutres, mais leur contenu peut être orienté par les commentateurs ou les données qu’elles relaient.
Depuis l’ère Trump, l’influence médiatique des néoconservateurs a diminué face au populisme et à l’isolationnisme. Des outlets comme Breitbart ou Newsmax, dominants dans le paysage conservateur actuel, privilégient une ligne nationaliste qui rejette souvent l’interventionnisme néocon. Cependant, des médias plus élitistes ou intellectuels (Commentary, National Review) continuent de porter leurs idées, même s’ils sont moins grand public. Sur les réseaux sociaux, des figures comme Kristol ou Kagan maintiennent une présence via X, influençant le débat sans contrôler un média spécifique. nuance importante
Dire qu’un média est « sous influence » ne signifie pas un contrôle total. Les néoconservateurs opèrent davantage par réseaux (think tanks, chroniqueurs, financements) que par une mainmise directe. Leur impact dépend aussi du contexte : ils gagnent en audience lors de crises internationales (comme l’Ukraine ou Taïwan), où leur rhétorique sur la « défense de la liberté » trouve un écho.
En résumé, des médias comme Commentary, The Weekly Standard (historiquement), ou certaines sections du WSJ et de Fox News ont été ou restent des relais clés. Pour les agences, leur rôle est plus passif, amplifiant les idées néocons via des sources externes plutôt que par une ligne éditoriale propre.
3 – l’influence de l’idéologie néo conservatrice américaine sur les dirigeants européens.
Dans le passé, notamment durant les années 1990 et 2000, période de l’apogée du néoconservatisme sous les administrations Reagan et Bush, plusieurs responsables européens ont partagé des objectifs ou des postures alignées sur cette idéologie, souvent dans le cadre de l’OTAN ou de la lutte contre le communisme puis le terrorisme.
Tony Blair (Royaume-Uni, Premier ministre 1997-2007)
Bien que le Royaume-Uni ait quitté l’UE en 2020, il était un acteur clé à l’époque. Blair, leader travailliste, a soutenu activement l’intervention en Irak aux côtés des États-Unis, reflétant des idées néoconservatrices comme l’exportation de la démocratie par la force. Son discours sur "l’intervention humanitaire" (ex. Kosovo en 1999) et son alignement avec Bush en font un relais évident.
José María Aznar (Espagne, Premier ministre 1996-2004)
Conservateur du Parti populaire, il a également soutenu l’invasion de l’Irak et adopté une ligne atlantiste dure, proche des néoconservateurs américains. Son engagement dans la "guerre contre le terrorisme" et son soutien à l’axe Washington-Londres-Madrid témoignent de cette proximité.
Les pays d’Europe de l’Est (ex. Pologne sous Lech Kaczyński)
Après leur adhésion à l’UE en 2004, des pays comme la Pologne ont souvent adopté des positions atlantistes marquées, soutenant les États-Unis dans des initiatives néoconservatrices. Lech Kaczyński (président 2005-2010) et le parti Droit et Justice (PiS) ont vu en l’OTAN et en Washington des garants de leur sécurité face à la Russie, s’alignant ainsi sur des priorités néoconservatrices comme la confrontation avec les "États voyous".
La Commission européenne sous José Manuel Barroso (2004-2014)
Barroso, ancien Premier ministre portugais de centre-droit, a dirigé la Commission durant une période où l’UE cherchait à renforcer ses liens transatlantiques, notamment via l’OTAN. Bien que la Commission ne soit pas monolithique, son mandat a coïncidé avec un soutien implicite à des politiques sécuritaires et libérales compatibles avec les vues néoconservatrices, comme l’élargissement à l’Est vu comme une extension de l’influence occidentale.
Cependant, l’UE dans son ensemble était divisée : la France de Jacques Chirac et l’Allemagne de Gerhard Schröder s’opposaient fermement à l’intervention en Irak, révélant une fracture entre une "vieille Europe" réticente et une "nouvelle Europe" plus atlantiste.
Aujourd’hu" : relais actuels et rôle de la Commission
En 2025, le néoconservatisme américain a évolué, et son influence directe est moins évidente, supplantée par des courants comme le national-conservatisme. Cependant, certains responsables et dynamiques en Europe peuvent encore refléter des échos de cette idéologie, notamment dans une posture anti-russe ou pro-OTAN.
Ursula von der Leyen (Présidente de la Commission européenne depuis 2019)
Issue de la CDU allemande (conservateurs), von der Leyen incarne une ligne atlantiste et sécuritaire. Son soutien ferme à l’Ukraine face à la Russie, sa défense de l’OTAN et sa promotion d’une "Europe géopolitique" musclée (ex. sanctions contre la Russie, militarisation accrue) rappellent certains accents néoconservateurs, comme l’idée d’un Occident uni contre des menaces autocratiques. Toutefois, son approche reste plus multilatérale que celle des néocons purs, centrée sur l’UE plutôt que sur un leadership unilatéral.
Giorgia Meloni (Italie, Première ministre depuis 2022)
Leader des Frères d’Italie et figure du groupe Conservateurs et Réformistes européens (CRE), Meloni combine nationalisme et atlantisme. Son soutien à l’OTAN et à l’Ukraine, malgré son euroscepticisme, la rapproche d’une vision néoconservatrice modernisée, où la défense des valeurs occidentales prime, même si elle rejette l’interventionnisme global.
Pologne sous le PiS (Droit et Justice)
Bien que le PiS ait perdu le pouvoir en 2023 au profit d’une coalition dirigée par Donald Tusk, son influence reste forte. Historiquement, ce parti a soutenu des positions pro-américaines et anti-russes, incarnant une forme de relais des priorités néoconservatrices (sécurité, confrontation avec Moscou). Tusk, bien que plus modéré, maintient une ligne pro-OTAN.
La Commission européenne : une harmonie partielle avec les néoconservateurs ?
Sous von der Leyen, la Commission a adopté une posture plus assertive (ex. soutien militaire à l’Ukraine, rivalité avec la Chine), qui peut rappeler le ton martial des néocons. Cependant, l’UE privilégie le multilatéralisme, le droit international et les institutions comme l’ONU, en opposition à l’unilatéralisme néoconservateur. L’harmonie serait plutôt conjoncturelle, liée à des intérêts communs (ex. contenir la Russie) qu’à une convergence idéologique profonde.
Analyse critique
L’idée d’un "relais" systématique des néoconservateurs américains en Europe est limitée par les divergences structurelles entre les deux continents. L’UE, même sous des leaders conservateurs, reste attachée à une gouvernance supranationale et à une diplomatie moins belliqueuse que celle prônée par les néocons. Hier, des figures comme Blair ou Aznar étaient des exceptions plus qu’une norme européenne. Aujourd’hui, von der Leyen ou Meloni partagent des priorités sécuritaires avec les États-Unis, mais leurs agendas sont aussi façonnés par des dynamiques internes (ex. souveraineté nationale pour Meloni, intégration européenne pour von der Leyen).
En conclusion, les relais néoconservateurs dans l’UE existent, mais ils sont partiels et contextuels. Historiquement, Blair, Aznar et certains leaders d’Europe de l’Est ont joué ce rôle. Aujourd’hui, von der Leyen et des figures comme Meloni ou le PiS peuvent refléter des échos de cette idéologie, notamment via l’atlantisme et l’anti-autoritarisme. La Commission, sans être un pur vecteur néoconservateur, s’aligne parfois sur des objectifs américains par pragmatisme plus que par conviction idéologique.
4 – les sources de financement des néoconservateurs.
Les néoconservateurs aux États-Unis, qui prônent une politique extérieure interventionniste, une défense robuste des intérêts américains et une promotion active de la démocratie à travers le monde, ont été soutenus par divers groupes économiques, financiers, fondations et milliardaires au fil des décennies. Leur influence a été particulièrement notable sous des administrations comme celles de George W. Bush et, dans une certaine mesure, sous Donald Trump, bien que ce dernier ait intégré des éléments plus populistes. Voici une analyse basée sur des tendances historiques et des informations disponibles jusqu’à février 2025 :
Sheldon Adelson (décédé en 2021)
Ancien magnat des casinos (Las Vegas Sands), Adelson était un donateur majeur du Parti républicain et a soutenu des candidats alignés sur les idées néoconservatrices, notamment via son appui à des faucons pro-Israël comme John Bolton. Il a injecté des millions dans les campagnes de Donald Trump et d’autres républicains, souvent en synergie avec des objectifs néoconservateurs comme le soutien indéfectible à Israël.
Les frères Koch (Charles et David, ce dernier décédé en 2019)
Via leur entreprise Koch Industries, les frères Koch ont financé des think tanks et organisations libertariennes, comme la John Birch Society (historiquement liée à l’extrême droite), qui partagent certaines convergences avec les néoconservateurs sur des questions comme la dérégulation et une posture anti-communiste. Bien qu’ils se soient parfois distancés de Trump, leur réseau a soutenu des figures néoconservatrices dans le passé, notamment sous l’ère Bush.
Paul Singer
Milliardaire et gestionnaire de fonds spéculatifs (Elliott Management), Singer est connu pour financer des causes républicaines et des think tanks néoconservateurs. Il a soutenu des candidats comme Marco Rubio, qui incarne une ligne dure en politique étrangère, et a contribué à des groupes pro-Israël alignés sur les priorités néoconservatrices.
Miriam Adelson
Héritière de la fortune de Sheldon Adelson, elle a poursuivi son engagement financier envers les républicains et les causes pro-Israël, restant une figure clé dans le soutien aux politiques néoconservatrices après 2021.
American Enterprise Institute (AEI)
Ce think tank conservateur a été un bastion intellectuel du néoconservatisme, abritant des figures comme Richard Perle et Danielle Pletka. Financé par des dons de grandes entreprises et de milliardaires comme les Koch, l’AEI promeut des politiques interventionnistes et une défense agressive des intérêts américains.
Heritage Foundation
Bien que plus large dans son spectre idéologique, cette fondation a soutenu des idées néoconservatrices, notamment sous Trump, en plaidant pour une augmentation des budgets militaires et une posture dure face à la Chine et à l’Iran. Elle reçoit des fonds de donateurs conservateurs et de grandes entreprises.
Project for the New American Century (PNAC)
Bien que dissous en 2006, ce groupe a été central dans la formulation des idées néoconservatrices sous Bush (guerre en Irak, doctrine de la "guerre préventive"). Il était soutenu par des donateurs privés et des entreprises de défense, illustrant le lien entre intérêts économiques et idéologie.
Open Society Foundations (George Soros)
Bien que Soros soit souvent associé aux causes progressistes, certains observateurs notent que son soutien à la démocratie libérale dans les pays autoritaires peut croiser les objectifs néoconservateurs d’exportation de la démocratie, même si ses méthodes et priorités diffèrent.
Industrie de la défense (Lockheed Martin, Raytheon, Boeing)
Ces entreprises ont un intérêt direct dans les politiques néoconservatrices qui favorisent les interventions militaires et l’augmentation des budgets de défense. Elles financent des campagnes politiques et des think tanks alignés sur ces idées via des dons et des lobbies.
Secteur énergétique (Koch Industries, ExxonMobil)
Les néoconservateurs, en soutenant des interventions au Moyen-Orient, ont souvent servi les intérêts des compagnies pétrolières et gazières. Sous Bush, des figures comme Dick Cheney (lié à Halliburton) ont illustré cette connexion.
Wall Street et fonds spéculatifs
Des gestionnaires comme Paul Singer ou Stephen Schwarzman (Blackstone) ont soutenu des candidats et des causes néoconservatrices, souvent motivés par des politiques économiques favorables aux marchés et une posture géopolitique stable pour les investissements.
Sous Donald Trump, le néoconservatisme a coexisté avec un populisme isolationniste, créant une tension idéologique. Cependant, des figures comme Mike Pompeo et John Bolton, intégrées à son administration, ont maintenu une influence néoconservatrice. Les milliardaires soutenant Trump (Adelson, Peter Thiel, etc.) ont parfois financé ces courants parallèlement à leurs propres agendas, notamment le libertarianisme ou le sionisme.
Remarques
Les données précises sur les financements sont souvent opaques en raison des lois américaines sur les "dark money" (argent non traçable via des Super PACs ou des organisations comme les c4s).
Les néoconservateurs ne forment pas un bloc monolithique ; leur soutien varie selon les priorités (pro-Israël, anti-Chine, militarisme).
En résumé, les néoconservateurs bénéficient d’un écosystème complexe mêlant milliardaires (Adelson, Koch, Singer), fondations influentes (AEI, Heritage) et intérêts économiques (défense, énergie), souvent unis par une vision d’une Amérique dominante sur la scène mondiale.
5 – les néoconservateurs et les lobbys pro – israéliens
Aux États-Unis, il existe des groupes de pression, ou lobbys, pro-israéliens et sionistes qui soutiennent les néoconservateurs, et certains d’entre eux apportent effectivement un soutien financier important, notamment à travers des contributions politiques. Voici une analyse basée sur les informations disponibles :
Le lobby pro-israélien le plus connu et influent est l’American Israel Public Affairs Committee (AIPAC).
Fondé en 1951, l’AIPAC est une organisation bipartisane qui travaille à renforcer les relations entre les États-Unis et Israël. Elle est composée principalement de citoyens américains, majoritairement juifs (environ 90 % de ses donateurs), mais inclut également des chrétiens sionistes, notamment des évangéliques, qui soutiennent Israël pour des raisons théologiques et idéologiques. L’AIPAC ne représente pas directement le gouvernement israélien, mais ses actions visent à promouvoir des politiques favorables à Israël au Congrès américain.
Un autre groupe notable est Christians United for Israel (CUFI), dirigé par le pasteur John Hagee. Avec plus de 10 millions de membres revendiqués, cette organisation chrétienne sioniste est la plus grande de ce type aux États-Unis. Elle soutient Israël en s’appuyant sur une lecture littérale de la Bible, voyant l’État hébreu comme une étape vers des prophéties eschatologiques. Bien que son influence soit davantage grassroots (mobilisation populaire), elle joue un rôle complémentaire aux efforts de l’AIPAC.
D’autres organisations, comme le Jewish Institute for National Security Affairs (JINSA), créé en 1976, rassemblent des personnalités néoconservatrices et des responsables militaires. Le JINSA promeut une alliance stratégique entre les États-Unis et Israël, souvent en alignement avec les idées néoconservatrices de politique étrangère musclée et interventionniste.
Soutien aux néoconservateurs
Les néoconservateurs, un courant idéologique influent dans les cercles républicains, notamment sous les administrations de George W. Bush et Donald Trump, partagent souvent des objectifs communs avec ces lobbys pro-israéliens. Ils prônent une politique étrangère interventionniste, une forte présence militaire américaine au Moyen-Orient et un soutien indéfectible à Israël comme allié stratégique. Des figures néoconservatrices comme Paul Wolfowitz, Richard Perle ou Elliott Abrams ont été associées à des positions favorables à Israël, et leurs idées ont trouvé un écho dans les activités de groupes comme l’AIPAC ou le JINSA.
L’AIPAC, par exemple, a soutenu des sénateurs républicains conservateurs, souvent proches des néoconservateurs, lorsqu’ils adoptaient des positions alignées sur celles d’Israël, même si cela signifiait parfois ne pas appuyer des candidats démocrates pourtant pro-israéliens. Le CUFI, quant à lui, a été particulièrement actif sous l’administration Trump, soutenant des décisions comme le déplacement de l’ambassade américaine à Jérusalem, une mesure réclamée par les néoconservateurs et la droite évangélique.
Soutien financier
Ces lobbys apportent un soutien financier substantiel, notamment via des contributions aux campagnes électorales. L’AIPAC, bien qu’elle ne fasse pas de dons directs en tant qu’organisation (pour respecter les lois sur le lobbying), mobilise un réseau de donateurs individuels et d’organisations affiliées qui versent des sommes importantes aux candidats pro-israéliens. Par exemple : Selon des analyses de la Commission électorale fédérale, les membres du Congrès soutenant Israël reçoivent en moyenne des dons significativement plus élevés de la part de donateurs pro-israéliens que leurs collègues pro-palestiniens. En 2023, le président de la Chambre, Mike Johnson, aurait reçu 95 000 dollars de l’AIPAC.
En 1988, l’AIPAC était déjà l’un des groupes d’intérêt les mieux financés, avec un budget de 6,9 millions de dollars, alimenté par ses 55 000 membres donateurs.
Le CUFI, bien que moins axé sur les dons directs, organise des levées de fonds massives. Après l’attaque du Hamas le 7 octobre 2023, il a par exemple collecté 3 millions de dollars pour des aides médicales en Israël, démontrant sa capacité à mobiliser des ressources financières.
Influence et limites
Ces groupes exercent une influence notable sur la politique américaine, notamment en garantissant une aide annuelle à Israël (environ 3 à 4 milliards de dollars ces dernières années, avec une demande de 14 milliards supplémentaires en 2023). Cependant, leur pouvoir n’est pas absolu. Ils opèrent dans un système bipartisan et doivent composer avec des oppositions croissantes, notamment de la part de progressistes démocrates critiques d’Israël et du mouvement BDS (Boycott, Désinvestissement, Sanctions). En résumé, des lobbys pro-israéliens sionistes comme l’AIPAC, le CUFI et le JINSA soutiennent les néoconservateurs aux États-Unis, tant idéologiquement que financièrement, à travers des dons aux campagnes et une mobilisation stratégique. Leur influence est réelle, mais elle s’inscrit dans un paysage politique complexe où d’autres facteurs (convictions morales, intérêts stratégiques) jouent également un rôle dans le soutien américain à Israël.
6 – les néoconservateurs, la NED et l’USAID
Compte tenu de la grande puissance de ces deux organisations pour promouvoir une influence idéologique et politique des États-Unis à l’étranger, il nous a paru intéressant d’y apporter une attention spéciale.
On peut remarquer que l’ensemble des médias Atlantistes de droite comme de gauche passe sous silence leur existence ou au mieux ne révèle qu’une part de leur nature.
Les néoconservateurs américains, en tant que courant idéologique influent, notamment sous l’administration de George W. Bush, ont promu une vision de la politique étrangère mêlant interventionnisme militaire et promotion de la démocratie, souvent à travers des outils de "soft power" et des institutions comme la National Endowment for Democracy (NED) et l’USAID (United States Agency for International Development). Leur objectif dépassait fréquemment l’aide au développement purement humanitaire, intégrant des stratégies visant à influencer ou déstabiliser des régimes jugés hostiles aux intérêts américains, tout en mobilisant des leviers comme les médias pour façonner les récits et soutenir ces efforts.
La NED, créée en 1983 sous Ronald Reagan, a été conçue comme un outil pour promouvoir la démocratie à l’étranger, mais elle a souvent été accusée de servir des objectifs géopolitiques plus larges, notamment par des critiques qui y voient une façade pour des opérations d’ingérence. Les néoconservateurs, qui ont gagné en influence dans les années 1990 et 2000, ont vu dans la NED un moyen d’appuyer des mouvements d’opposition ou des médias indépendants dans des pays ciblés, comme en Europe de l’Est post-soviétique ou au Moyen-Orient. Par exemple, des financements de la NED ont soutenu des groupes et des publications opposés aux gouvernements en place en Irak avant 2003 ou en Ukraine dans les années 2000, alignés avec la vision néoconservatrice d’un "effet domino" démocratique.
L’USAID, officiellement une agence d’aide au développement, a également été utilisée au-delà de son mandat humanitaire sous l’impulsion de cette idéologie. Dans les années 1980, sous l’influence néoconservatrice croissante, elle a financé des projets en Amérique centrale, comme le soutien aux Contras au Nicaragua, qui visaient à contrer l’influence soviétique mais ont contribué à des décennies d’instabilité. Plus récemment, des documents ont révélé son implication dans des opérations comme celle au Chili dans les années 1970, où elle a soutenu des médias locaux pour déstabiliser Salvador Allende avant le coup d’État de 1973, ou à Cuba avec le projet ZunZuneo dans les années 2010, un réseau social destiné à encourager la dissidence.
Concernant les médias, les néoconservateurs ont compris leur rôle clé dans le "soft power". La NED et l’USAID ont financé des organes de presse et des journalistes dans des pays stratégiques pour diffuser des narratifs pro-occidentaux ou anti-régime. En Europe centrale et orientale, par exemple, des médias progressistes hostiles aux gouvernements conservateurs ont bénéficié de subventions importantes, souvent sous l’égide de programmes visant à "renforcer la démocratie". Ces efforts s’inscrivent dans une stratégie plus large de déstabilisation subtile, où l’aide au développement sert de levier pour imposer une influence idéologique et politique.
Cela dit, ces pratiques ne sont pas exclusives aux néoconservateurs – elles s’inscrivent dans une continuité de la politique étrangère américaine – mais leur vision interventionniste et leur foi dans la transformation des sociétés par la force ou l’influence les ont amplifiées. Les critiques, notamment de pays comme la Russie ou la Hongrie, dénoncent ces institutions comme des outils d’impérialisme déguisé, tandis que leurs défenseurs insistent sur leur rôle dans la promotion de la liberté. La réalité semble mêler les deux : aide réelle et agenda stratégique coexistent, souvent au service d’une vision néoconservatrice du monde.
7 –Donald Trump est-il un néoconservateur ?
C’est une question complexe car d’un côté, depuis 2016 notamment, il se déclare et est perçu comme non interventionniste mais d’autre part il est aussi influencé par le lobby sioniste qui, lui, est interventionniste.
Rappelons brièvement pour le lecteur qui n’aurait pas lu la totalité des paragraphes précédents ce qu’est le néo conservatisme américain.
Qu’est-ce que le néoconservatisme ?
Le néoconservatisme est une idéologie politique qui prône une politique étrangère interventionniste, souvent motivée par la promotion de la démocratie et des valeurs américaines à l’étranger. Les néoconservateurs, comme ceux qui ont influencé l’administration de George W. Bush, soutiennent l’utilisation de la force militaire pour renverser des régimes hostiles et remodeler des régions comme le Moyen-Orient. Cette vision est idéaliste : elle voit la puissance américaine comme un outil pour transformer le monde, souvent via des opérations de "nation-building" (construction de nations). Trump en 2016 : une rhétorique non interventionniste
Pendant sa campagne de 2016, Donald Trump s’est clairement positionné comme un non-interventionniste. Il a critiqué les guerres en Irak et en Libye, les qualifiant d’erreurs coûteuses en termes de vies et d’argent.
La réduction des engagements militaires à l’étranger.
La protection des intérêts économiques américains.
Une renégociation des alliances (comme l’OTAN) pour réduire le fardeau financier des États-Unis.
Cette posture semblait en rupture avec le néoconservatisme, qui privilégie les interventions prolongées et idéologiques. À ce titre, avant et pendant 2016, rien dans son discours ou son passé (en tant qu’homme d’affaires sans expérience politique significative) ne suggère qu’il ait été néoconservateur.
Trump au pouvoir : des actions parfois interventionnistes
Une fois président, Trump a pris des décisions qui pourraient sembler s’aligner avec une politique interventionniste :
Frappes aériennes en Syrie (2017 et 2018)
Assassinat de Qasem Soleimani (2020), un général iranien, vu comme une action audacieuse contre l’Iran.
Cependant, ces actions ne reflètent pas une stratégie cohérente de transformation régionale ou de promotion de la démocratie, comme le feraient les néoconservateurs. Elles étaient plutôt ponctuelles et motivées par des calculs pragmatiques (montrer de la fermeté, répondre à des provocations) plutôt que par une vision idéologique.
Par ailleurs, Trump a aussi cherché à réduire la présence militaire américaine :
Retrait partiel des troupes de Syrie.
Négociations pour mettre fin à la guerre en Afghanistan, aboutissant à un accord avec les Talibans en 2020 (bien que le retrait complet ait eu lieu sous Biden).
Ces choix montrent une réticence à s’engager dans des conflits prolongés, contrairement aux néoconservateurs qui soutiennent des interventions durables.
L’influence du lobby sioniste
: l’influence du lobby sioniste, souvent perçu comme interventionniste, notamment en faveur d’Israël et contre l’Iran. Trump a effectivement pris des mesures pro-israéliennes :
Déplacement de l’ambassade américaine à Jérusalem (2018).
Reconnaissance de la souveraineté israélienne sur le plateau du Golan (2019).
Soutien aux accords d’Abraham (2020), normalisant les relations entre Israël et certains pays arabes.
Ces décisions ont été influencées par des figures comme Sheldon Adelson, un donateur républicain pro-israélien, ou John Bolton, un néoconservateur qui fut brièvement conseiller à la sécurité nationale. Bolton, par exemple, prônait une ligne dure contre l’Iran, mais Trump l’a congédié en 2019 en raison de désaccords, montrant qu’il n’adhérait pas pleinement à cette vision.
Cependant, le lobby sioniste n’est pas monolithique, et ses objectifs (soutenir Israël) ne coïncident pas forcément avec le néoconservatisme dans son ensemble, qui vise une transformation globale et pas seulement régionale. Les actions de Trump envers Israël relèvent davantage d’une approche transactionnelle (satisfaire une base électorale, renforcer des alliances) que d’un interventionnisme idéologique.
Une politique étrangère transactionnelle, pas néoconservatrice
En somme, Trump n’est pas un néoconservateur, ni à partir de 2016, ni auparavant. Sa politique étrangère est marquée par :
Une incohérence apparente : des frappes ponctuelles coexistent avec des retraits de troupes.
Un pragmatisme nationaliste : il privilégie les intérêts immédiats des États-Unis (économie, sécurité) sur une vision idéologique.
Une aversion pour le "nation-building", clé de voûte du néoconservatisme.
L’influence du lobby sioniste a orienté certaines de ses décisions, mais elle ne suffit pas à faire de lui un néoconservateur. Ses initiatives diplomatiques, comme les pourparlers avec la Corée du Nord ou les accords d’Abraham, montrent une préférence pour la diplomatie personnelle et les accords bilatéraux plutôt que pour des interventions militaires prolongées.
Conclusion
Non, Donald Trump ne peut pas être considéré comme un néoconservateur à partir de 2016, pas plus qu’il ne l’a été auparavant. Malgré des actions qui peuvent sembler interventionnistes sous l’influence du lobby sioniste, sa politique étrangère reste ancrée dans une logique non idéologique, centrée sur "America First" et éloignée des un ambitions globales et idéalistes du néoconservatisme. Cette tension reflète surtout l’écart entre sa rhétorique isolationniste et les pressions extérieures auxquelles il a parfois cédé, sans jamais adopter pleinement une doctrine cohérente d’interventionnisme.
Mais dans son attaque contre l’USAID, ce n’est pas seulement pour limiter un interventionnisme impérial mais c’est surtout pour réaliser des économies budgétaires c’est l’enfant à plusieurs dizaines de milliards de dollars.
Voici à ce propos une utilisation de l’intelligence artificielle Grok pour éclaircir cette question.
Ma question :
Dans sa coupe sombre de l’USAId, Donald Trump a-t-il préservé les organisations d’aide humanitaire sans mission d’ingérence ?
Réponse de Grok
Non, pas précisément. Dans le cadre de la révision de l’USAID mise en œuvre par l’administration de Donald Trump lors de son second mandat, il n’y a pas eu de distinction claire et systématique entre les organisations d’aide humanitaire "sans mission d’ingérence" et celles qui pourraient être perçues comme ayant une telle mission. Au contraire, les actions entreprises ont été marquées par une approche globale et radicale, notamment via un gel de 90 jours de l’aide étrangère (annoncé par un décret exécutif le 20 janvier 2025) et une réorganisation profonde de l’agence, visant à aligner les programmes sur la politique "America First".
Selon les informations disponibles, le gel initial a touché presque toutes les formes d’aide étrangère, y compris les programmes humanitaires, avec des exemptions limitées et souvent mal définies. Par exemple, le secrétaire d’État Marco Rubio a introduit une dérogation temporaire pour les "activités humanitaires vitales" (comme les médicaments, les services médicaux, la nourriture et le logement), mais les critères d’application sont restés flous, provoquant une paralysie dans la distribution de l’aide. Des rapports indiquent que même des programmes clairement humanitaires, comme ceux fournissant des traitements contre le VIH/SIDA via PEPFAR ou des secours d’urgence en Ukraine, ont été suspendus ou retardés en raison de la confusion administrative et des arrêts de travail imposés.
L’objectif affiché par Trump et ses alliés, comme Elon Musk, était de démanteler ce qu’ils percevaient comme une bureaucratie inefficace et idéologiquement biaisée, sans distinction explicite pour préserver les organisations humanitaires non interventionnistes. En pratique, cela a conduit à des interruptions massives, affectant des millions de personnes dans le monde, indépendamment de la nature exacte des missions des organisations financées par l’USAID. Par exemple, des groupes en Haïti, au Soudan et en Afghanistan ont signalé des arrêts de services essentiels, même lorsque ceux-ci étaient purement humanitaires, en raison de l’absence de clarté sur les dérogations et de la réduction drastique des capacités opérationnelles de l’agence.
Ainsi, bien que l’administration ait prétendu préserver certaines aides "vitales", les faits montrent que la coupe sombre n’a pas épargné de manière systématique les organisations humanitaires sans mission d’ingérence, et le chaos organisationnel a amplifié les impacts sur le terrain.
8 – Les deux fractions de la grande bourgeoisie américaine : l’élection de D.Trump
L’élection de Donald Trump constitue une déflagration politique puisqu’elle place au pouvoir aux États-Unis un président républicain qui n’est pas néoconservateur, c’est-à-dire qui soit favorable à une politique interventionniste, y compris militaire, tous azimuts.
On connaît les raisons économiques et sociales de son élection, sur lesquelles nous ne reviendrons pas ici.
La question qui se pose est la suivante : quelles stratégies politiques de la grande bourgeoisie économique et financière se cachent derrière l’élection de ce président qui ne relève pas du courant néoconservateur ?
Pour répondre à cette question, plusieurs paramètres doivent être pris en compte.
Paramètre historique
Schématiquement, la grande bourgeoisie se divise idéologiquement en deux grandes tendances :
L’une, mondialiste et libre-échangiste, héritière du colonialisme maritime britannique.
L’autre, étatiste, davantage axée sur la souveraineté des nations.
Cependant, ces deux fractions ont conjointement contribué à la mondialisation des échanges et à la financiarisation de l’économie. Toutes deux ont favorisé les délocalisations et l’immigration afin de minimiser le coût du travail et ainsi accroître le taux de profit.
Paramètre de la stratégie de puissance
La première tendance affirme sa domination par une politique expansionniste et interventionniste, reposant sur l’ingérence et la déstabilisation de régimes politiques dans de nombreux pays. L’objectif est d’acquérir de nouvelles ressources naturelles et d’éliminer des concurrents gênants.
Les moyens employés sont :
Le soft power,
La violence armée,
La stratégie des révolutions colorées,
L’infiltration des mouvements d’opposition,
La propagande téléguidée,
Et, si nécessaire, l’organisation de coups d’État militaires.
Les services de renseignement, les agences d’influence, les médias et le complexe militaro-industriel collaborent pour mettre en œuvre cette stratégie.
Toutefois, celle-ci présente des inconvénients majeurs :
Son coût financier est exorbitant, nécessitant d’importants moyens humains.
Sur le long terme, elle engendre un rejet moral, idéologique et politique croissant dans le monde non occidental, favorisant l’émergence des BRICS et l’affaiblissement des organisations internationales.
Le risque majeur pour l’oligarchie financière nord-américaine réside dans la remise en cause de l’hégémonie du dollar sur le plan monétaire mondial.
Cette politique, largement financée par l’impôt, limite les investissements dans le social, la santé et l’entretien des infrastructures publiques.
Voir l’article du site Elucid. Médias : le véritable sens de la victoire de Trump : https://elucid.media/analyse-graphi...
À l’opposé, la seconde tendance estime que la puissance des États-Unis doit se développer de l’intérieur, grâce à un essor industriel, énergétique et technologique, nécessitant également des investissements dans la formation professionnelle et universitaire.
Paramètre de la stratégie politique
Jusqu’à récemment, la première tendance a utilisé une partie des démocrates et les néoconservateurs pour appliquer sa politique interventionniste. Son idéologie repose sur trois piliers :
Les droits de l’homme,La démocratie libérale,Le libre marché. L’ennemi désigné est alors : les autocraties. Deux camps se dessinent :
D’un côté, le « monde libre » représentant le Bien, De l’autre, les régimes autoritaires ou dictatoriaux, autrefois incarnés par le communisme, aujourd’hui par certaines puissances émergentes ou ayant terminé leur émergence. Le manichéisme devient la règle.
La seconde tendance s’appuie plutôt sur les républicains non-néoconservateurs, à quelques exceptions près. Elle véhicule une idéologie nationaliste, qui se décline sous deux formes :
Le nationalisme civique,
Le nationalisme ethno-culturel.
Cette tendance affirme également défendre la démocratie, mais sans chercher à l’exporter par la force. Cela ne signifie pas pour autant qu’elle renonce à la puissance des États-Unis, qui peut s’exprimer par :
Le droit extraterritorial,
Les sanctions économiques,
Le protectionnisme via des droits de douane élevés.
Sur le plan sociétal :
La première tendance, plus mondialiste, défend des valeurs dites progressistes.
La seconde tendance prône des valeurs traditionnelles et conservatrices.
Paramètre de la stratégie médiatique
Les médias sont fortement polarisés :
La première tendance contrôle la majorité des médias favorables aux démocrates et aux néoconservateurs.
La seconde tendance s’appuie sur des médias conservateurs, allant de la droite modérée à la droite populiste.
Ces deux courants sont financés par des milliardaires, majoritairement présents dans le premier camp, ce qui explique l’omniprésence médiatique de leurs idées. En réaction, la seconde tendance utilise massivement les réseaux sociaux pour contrebalancer cet avantage. L’implication d’Elon Musk dans ce domaine a joué un rôle clé dans la victoire de Trump.
Paramètre électoral
Pour asseoir son pouvoir, la grande bourgeoisie a besoin d’un relais politique disposant d’une base électorale solide.
Malgré une mobilisation médiatique massive en faveur des démocrates et des néoconservateurs, ceux-ci n’ont pas réussi à imposer leur candidate.
La campagne de 2024 a ainsi opposé deux récits médiatiques :
Contre Trump : "Trump = fascisme = Hitler", une diabolisation relayée par les médias atlantistes en Europe particulièrement en France.
En opposition : Contre l’establishment d’une élite hors-sol corrompue, mépris des petites gens", un discours porté par les soutiens de Trump.
Comme l’explique le site Elucid, la politique néolibérale menée par les démocrates a détérioré les conditions de vie des classes populaires et le fonctionnement des services publics, favorisant l’élection de Trump avec un solide score électoral.
Face à ce basculement, la fraction conservatrice de la grande bourgeoisie retrouve une base politique majoritaire. La première fraction, initialement opposée à Trump, se rallie alors à lui par opportunisme, consciente de l’impasse économique engendrée par sa stratégie interventionniste trop coûteuse et de son impact négatif sur l’industrie américaine.
Restructuration du capital et remise en cause de l’État profond
Pour assurer sa pérennité, la grande bourgeoisie doit réorienter son capital vers l’industrie, en réduisant l’empreinte militaire excessive (plus de 900 bases militaires et un budget avoisinant 900 milliards de dollars).
Le complexe militaro-industriel, du renseignement et des agences d’influence constitue une structure bureaucratique lourde et coûteuse, nécessitant une rationalisation.
En outre, les délocalisations massives vers la Chine ont rendu l’économie américaine dépendante de Pékin. Or, depuis 2017, la Chine est devenue la première puissance économique mondiale en parité de pouvoir d’achat, et joue, avec la Russie, un rôle clé au sein des BRICS.
La mission du gouvernement Trump consiste donc à :
Restructurer le capital vers un modèle productif,
Réduire l’influence d’un appareil administratif jugé parasitaire,
Modifier les directions de la CIA, du FBI et liquider certaines agences comme l’USAID et la NED.
Conclusion
En proclamant America First, Trump affirme que le peuple américain doit être prioritaire – un slogan aux accents national-populistes. Mais sera-t-il capable d’améliorer réellement les conditions de vie des travailleurs américains ?
Un autre obstacle de taille réside dans l’influence du lobby sioniste aux États-Unis, qui pourrait compliquer toute solution de paix au Moyen-Orient.
Pendant ce temps, en Europe, les dirigeants, souvent issus des Young Global Leaders, restent inféodés aux démocrates et aux néoconservateurs américains. L’Union européenne, en stagnation économique, risque d’être contrainte de se soumettre à ce nouveau rapport de force.
https://elucid.media/analyse-graphi...
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Hervé Debonrivage
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