Mode de production des chasseurs cueilleurs de la Préhistoire : un communisme primitif ?

mardi 5 octobre 2021.
 

A) Importance de la préhistoire comme connaissance scientifique

A1) Débuts de la recherche préhistorique

L’existence d’une préhistoire fait partie aujourd’hui du fonds commun de connaissances validé par les humains de tous pays. Avant d’en arriver là, il a fallu d’innombrables recherches archéologiques, des milliers d’écrits essayant de les interpréter. Merci à tous ces éclaireurs qui permettent aujourd’hui de commencer à comprendre nos origines hors des mythes.

A2) Préhistoire : Des mythes à la connaissance rationnelle

Le préhistorien belge Marc Groenen a bien résumé l’importance de ce tournant dans la compréhension du monde Vers le milieu du 19ème siècle, un nouveau domaine entre dans l’espace de la connaissance scientifique. Il touche le plus loin passé de l’homme, celui qui dépasse le cadre immédiat de l’histoire, celui qui remonte avant le Déluge. Pour la première fois dans l’histoire humaine, la naissance de l’humanité va devoir être envisagée non à la lumière des mythes mais au départ de principes scientifiques.

Avant les découvertes et études de grottes (2ème moitié du 19ème siècle), religions et intellectuels conservateurs n’en démordaient pas d’une création de l’homme moderne par Dieu ; nous avons déjà signalé cette théorie dans un livre d’histoire utilisé par l’enseignement catholique français.

Quelques ilôts de fous continuent à défendre le créationnisme, par exemple aux Etats Unis, mais leur cas relève plus de la psychiatrie que du débat argumenté.

A3) Qu’est-ce que la Préhistoire ?

La préhistoire est définie dans les manuels scolaires comme la période située entre la naissance de l’humanité et l’apparition de l’écriture dans un pays donné.

Or, la datation de la naissance de l’humanité est largement sujette à débats et évolutions. En effet,

https://books.google.fr/books?id=rX...

B) Préhistoire : les communautés communistes primitives

Pour accéder à cette partie, cliquer sur le titre B en bleu ci-dessus.

C) Chasseurs cueilleurs et agriculteurs du néolithique

http://www.alaintestart.com/chasseu...

Le livre d’Alain Testart sur les "chasseurs-cueilleurs" constitue une remise en question systématique de la pertinence de la vieille et très classique opposition entre chasseurs-cueilleurs et agriculteurs (ou horticulteurs). Par « chasseurs-cueilleurs », on entend des peuples qui ne pratiquaient au moment de la colonisation aucune forme d’agriculture ni d’élevage (Aborigènes australiens, San, Amérindiens de l’arctique et du subarctique, Pygmées, etc.). L’opposition était considérée comme valide tant en anthropologie sociale (surtout américaine) qu’en archéologie préhistorique, avec la notion de « révolution néolithique » avancée jadis par Gordon Childe, transformation radicale des structures économiques et sociales qui marquerait le passage entre une économie de chasse-cueillette et une autre fondée sur la domestication des plantes et des végétaux. Selon ces idées, seuls les agriculteurs auraient eu la possibilité 1° d’être sédentaires, 2° de produire des quantités alimentaires suffisantes pour avoir un niveau de population élevé et 3° de développer des inégalités économiques. Les chasseurs-cueilleurs seraient condamnés à rester de « pauvres » chasseurs-cueilleurs, à populations clairsemées et, par force, égalitaires.

Procédant à une revue systématique des connaissances sur les chasseurs-cueilleurs, le livre commence par recenser les cas considérés jusqu’ici comme « exceptionnels » – et écartés des théories courantes pour cette raison : sédentarité qui implique la vie en village ; densité démographique élevée (souvent plus que chez les agriculteurs voisins) ; hiérarchies importantes, y compris l’esclavage et la différenciation en strates telles que nobles et roturiers. Ce sont typiquement les Amérindiens de la Côte Pacifique, ceux de Californie et les peuples du Sud-est de la Sibérie. Ajoutés à quelques autres cas moins connus, ces chasseurs-cueilleurs qui ne se conforment pas à la théorie constituent une bonne moitié des chasseurs-cueilleurs connus en ethnologie. Quelques cas archéologiques sont tout aussi énigmatiques (Natoufien, Jomon). Ces peuples, tout en n’exploitant que des ressources sauvages (non domestiquées), comme les saumons, les glands, etc., les récoltent en masse pendant la saison de leur abondance, et les préservent en une quantité telle qu’elle suffise à assurer l’alimentation pendant le reste de l’année. Ces chasseurs-cueilleurs vivent ainsi sur leurs stocks alimentaires, tout comme les cultivateurs de céréales sur les grains conservés dans leurs greniers ou leurs silos. C’est ce stockage important qui permet la sédentarité, la grande densité démographique (en supprimant le goulot d’étranglement constitué par la saison de pénurie), et permet de comprendre le développement des inégalités (les subsistances conservées peuvent être manipulées, accaparées, etc.).

Ce constat conduit à remplacer l’opposition domestique/sauvage par stockage/non stockage. Une grande partie du livre vise à préciser les conditions écologiques dans lesquelles peut se mettre en place, sur une base de chasse-cueillette une telle « structure techno-économique » fondée sur ces deux techniques : récolte en masse d’une ressource saisonnière mais abondante, conservation de cette ressource. L’analogie avec les céréaliculteurs est encore plus flagrante lorsque l’on dispose de photographies ou d’aquarelles – toujours rares – où l’on voit ces chasseurs-cueilleurs oubliés par la théorie construire des greniers analogues à ceux du monde agricole.

Au niveau synchronique (anthropologie), il est clair que l’opposition classique chasseurs-cueilleurs/cultivateurs doit être remplacée par une autre plus générale qui oppose les économies selon qu’elles reposent ou non sur un stockage à grande échelle d’une ressource alimentaire fondamentale et de nature saisonnière. Au niveau diachronique, les implications évolutionnistes de ce remaniement sont tout aussi claires. On ne peut en aucun cas s’en tenir à une conception unilinéaire de l’évolution (selon laquelle toutes les sociétés passeraient par les mêmes stades). On doit plutôt imaginer une évolution divergente qui aboutit, selon des lignes évolutives différentes, à des chasseurs-cueilleurs stockeurs qui restent tels jusqu’au XIXe siècle (comme les Aïnous ou les populations de la Côte nord-ouest américaine), d’autres qui, après être passés par ce stade de chasseurs-cueilleurs sédentaires-stockeurs, deviennent progressivement cultivateurs (comme les Natoufiens et les peuples du Jomon), d’autres enfin qui n’ont jamais connu de phase de chasse-cueillette sédentaire stockeuse mais sont passés directement au mode de vie agraire.


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