Votation citoyenne sur La Poste : Quel bilan ? Quatre points de vue Front de Gauche, Convergence, Comité national Poste, Altermonde

mercredi 14 octobre 2009.
 

1) Communiqué du Front de Gauche

(Parti Communiste Français - Parti de Gauche - Gauche Unitaire)

Ce samedi 3 octobre se situe à la fin d’une longue semaine de mobilisation partout en France pour la défense du service public postal et la mise en échec de l’objectif gouvernemental de transformer la Poste en société anonyme afin de permettre sa privatisation.

La transformation de l’établissement public industriel et commercial « La Poste » en société anonyme prévue par le gouvernement déboucherait de fait sur une privatisation. Quoi qu’en dise le ministre de l’Industrie, l’ouverture annoncée du capital qui suivrait immédiatement la création de la société anonyme « La Poste » se traduirait par l’entrée de fonds privés dans l’entreprise.

La promesse non tenue de Sarkozy qui avait déclaré qu’EDF GDF resterait 100% public, éclaire la fiabilité des promesses de la droite. Et la situation dramatique des salariés de France Télécom montre les conséquences inhumaines des politiques libérales qui soumettent les êtres humains au rouleau compresseur de la course au profit. D’autres secteurs publics sont menacés, c’est pourquoi défendre aujourd’hui La Poste, c’est défendre le service public tout entier.

Le changement de statut de La Poste n’a pourtant rien d’obligatoire : c’est le résultat du zèle du gouvernement qui souhaite anticiper la libéralisation totale des services postaux en cohérence avec les négociations relatives à l’Accord général sur le commerce et les services, les directives européennes de libéralisations et le traité de Lisbonne promu par Nicolas Sarkozy. Comme nous nous y sommes engagés dans la récente campagne européenne, nous combattons ces directives libérales et plus généralement le traité de Lisbonne qui les renforce. Ce traité antidémocratique contrevient à l’intérêt général et nous n’aurons de cesse de combattre sa ratification et son application éventuelle.

Pour les organisations du Front de Gauche, l’avenir de La Poste appartient aux citoyens. La Poste est à eux, c’est à eux de décider de son avenir et de son fonctionnement en liaison avec les élu-e-s et les salarié-e-s. C’est pourquoi, aux côtés des syndicats, partis de gauche, associations et citoyens, le Front de Gauche a mené campagne depuis de longues semaines pour permettre la réussite populaire, citoyenne et militante de la « votation citoyenne ».

Fort de cette réussite et de l’action populaire contre cette « privatisation », nous continuerons à soutenir les mobilisations des salariés de la poste et des usagers et à exiger un référendum sur cette question.

2) Communiqué de la Convergence Nationale pour les services publics (par Bernard Defaix)

Les Collectifs locaux ( départements , communes ) qui composent la Convergence et qui étaient pleinement partie prenante de l’organisation de la consultation nationale sur l’avenir du service public postal se félicitent de l’énorme succès qu’a rencontré cette initiative auprès de la population .

Plus de 90% de deux millions 100000 votants ont exprimé leur attachement au caractère public de ce service et refusé le changement de statut auquel veulent procéder arbitrairement la Direction de La Poste et le Gouvernement ! Aujourd’hui celui-ci a le devoir démocratique d’en tirer les conclusions politiques qui s’imposent : retirer le projet et enclencher officiellement un processus de référendum comme l’ont réclamé à plusieurs reprises ces derniers mois les organisations syndicales, politiques, associatives regroupées dans le Comité National contre la Privatisation de La Poste, pour un débat public et pour un référendum.

Cette demande est confortée par l’appui populaire qui vient de se manifester.

Nous allons continuer, au sein du Comité, à travailler pour amplifier cette dynamique citoyenne et en faire une exigence politique telle qu’aucune dérobade ne soit plus permise !!!

Nous l’avons vérifié tous les jours aussi bien en milieu rural que dans les quartiers, l’activité postale dans toute la diversité de ses missions est vécue comme un élément essentiel de la qualité de vie et du lien social .

Pour une grande majorité, il revient à la puissance publique d’en assurer et garantir le bon fonctionnement et la pérennité. Elle est emblématique d’un service public considéré comme constitutif de la République, de sa devise de liberté, d’égalité et de fraternité, de son ambition de construire une société juste et solidaire.

L’engagement citoyen pour conserver à La Poste son statut de service public CRISTALLISE la colère d’avoir vu brader à des intérêts privés cette richesse nationale que constituaient les secteurs des télécommunications et de l’énergie pour ne citer qu’eux. Il CRISTALLISE également la colère et le désarroi devant les reculs organisés du service public et de la fonction publique dans le cadre de la RGPP . Il CRISTALLISE enfin une volonté de participation démocratique à la définition des choix qui déterminent sur le fond l’organisation du « vivre ensemble » de façon durable et solidaire.

OUI ! TOUTES ET TOUS ENSEMBLE, salariés, usagers, organisations syndicales, associatives et politiques, chacun dans son rôle et rassemblés, NOUS ALLONS POURSUIVRE ce mouvement POUR GAGNER , AVEC LA POSTE, SUR L’EXIGENCE DE SERVICE PUBLIC, sur l’atout social, économique, qu’ il représente face à la crise, sur l’absolue nécessité de disposer d’outils publics au service de l’intérêt général afin de répondre aux besoins essentiels des populations en matière de santé, d’éducation, de recherche, de logement, de transports , d’accés à l’eau , à l’énergie.

Pour Convergence : Bernard Defaix

3) Déclaration du 5 octobre 2009 du Comité national contre la privatisation de la Poste

Consultation citoyenne sur l’avenir de la Poste : La privatisation c’est NON !

Ce qui vient d’avoir lieu avec cette consultation est énorme.

A cette heure 2 123 717 personnes, résultats comptabilisés et validés pas les comités locaux et départementaux se sont rendues aux urnes pour donner leur avis dans une dizaine de milliers de points de vote.

Le résultat du vote est sans appel. Plus de 90% des électeurs disent NON au changement de statut de la Poste et à l’ouverture de son capital et donc à sa privatisation.

Cette initiative inédite, à l’échelle du pays, témoigne de l’attachement profond de la population au service public de la Poste qui au-delà de son rôle économique joue un rôle de lien social indispensable et irremplaçable.

Le comité national remercie les 2 millions de votants et tient à saluer les milliers de bénévoles qui se sont mobilisés pour assurer l’immense succès de cette votation. Ils ont réalisé quelque chose d’incroyable.

Ce succès est aussi le résultat de l’unité des 62 organisations syndicales, politiques et associatives. Ce rassemblement historique réalisé autour de la défense du service public a démontré sa force et sa légitimité.

Cette unité au sein du comité national et des comités locaux doit se poursuivre. La mobilisation conjuguée des postiers, des usagers et des élus conditionne la mise en échec du projet gouvernemental. Le président de la République et son gouvernement doivent entendre ce verdict sans appel et renoncer définitivement à cette loi.

La Poste appartient à toutes et à tous, aucune modification du statut de la poste ne peut se faire sans l’organisation d’un référendum. Forte de ce succès, la mobilisation se poursuit pour l’organisation d’un véritable débat public pour l’amélioration et le développement du service public.

Le comité national appelle les comités locaux à :

Rencontrer immédiatement les sénateurs et les députés de leur département et circonscription pour exiger du gouvernement le retrait du projet de loi, prendre des initiatives en direction des préfectures pour communiquer les résultats de la votation.

Le comité national demande à être reçu par le Président de la République ainsi que par les présidents du Sénat et de l’Assemblée nationale.

Le comité national met immédiatement en débat dans les comités locaux avec la population les suites à donner à la votation : forum citoyen, journée nationale de manifestations, nouvelle votation et il fera connaître dans les jours qui viennent les initiatives nationales qu’il compte prendre contre la privatisation et pour la défense du service public.

4) La "votation" ou l’illusion démocratique (par Patrick Mignard)

Pourtant tout y est, la juste cause, (défense du service public), la mobilisation du ban et de l’arrière ban de la « gauche » (autrement dit la fameuse Union) - même celle qui, une fois au pouvoir privatise sans états d’âme- les urnes, la propagande, une participation, pas ridicule dans le contexte actuel et avec les moyens à disposition.

Pourtant, malgré tout cela, ce sera à n’en pas douter, un « coup d’épée dans l’eau ».

CONFLIT DE « LÉGITIMITES »

Organiser un vote, une consultation, un référendum, en dehors du cadre de la loi, en marge des institutions officielles est incontestablement un défi lancé au Pouvoir en place.

Alors, de deux choses l’une : ou bien le Pouvoir est illégitime, et dans ce cas cette « votation » prend tout son sens et peut se draper d’une légitimité qui manque à celui-ci ; ou bien, ce Pouvoir est légitime et dans ce cas c’est cette « votation » qui est marquée du sceau de l’illégitimité.

Or, à ce que l’on sache, toutes les forces politiques et syndicales à l’initiative de cette « votation », ne tiennent pas pour illégitime le pouvoir en place. Sans partager ses conceptions, ses méthodes sa philosophie, elles le reconnaissent comme légitime, représentant la « volonté du peuple ».

Le Pouvoir a donc beau jeu de tourner en dérision cette action et de la qualifier d’illégitime, illégale et même anti démocratique… Et il a formellement raison. Doit-il tenir compte de cette consultation ? Rien ne l’y oblige… il peut la considérer – ce qui est d’ailleurs le cas - comme nulle et non avenue, et ce d’autant plus que perfidement, il nie, contre toute évidence, que son objet n’a pas de sens : « loin de lui l’idée de privatiser ».

Il ment bien sûr, comme il a menti pour les autres services publics, mais il a les moyens du mensonge, il a le pouvoir légitime. Notons au passage l’attitude non moins faux-cul du Parti Socialiste qui s’est « opportunistement » associé à cette opération. Quelle aurait été son attitude si, quand il était au pouvoir et qu’il privatisait (sans le dire comme le gouvernement actuel), une telle action avait été entreprise ? Y aurait-il participé ?

LE « RÉFÉRENDUM BOOMERANG »

Le référendum, souhaité par les organisateurs de la « votation » est en apparence une consultation tout ce qu’il y a de simple et de démocratique. C’est d’ailleurs au nom de ces qualités qu’ils ont agi. Et pourtant ! Imaginons un instant que les partisans du « rétablissement de la peine de mort » organisent une « votation » pour que la guillotine reprenne du service.

Formellement, les tenants de la « votation » pour La Poste n’ont rien à dire contre cette procédure… et pour cause ! Imaginons alors que la consultation donne une majorité « pour le rétablissement »,… ce qui, reconnaissons le, est loin d’être irréaliste… surtout si un fait divers sordide précède la consultation.

Question : ceux là même qui organisent la "votation sur la Poste" auront-ils le même enthousiasme pour qu’un vrai référendum sur le « rétablissement de la peine de mort » soit officiellement organisé ? Le réponse ne fait évidemment aucun doute.

Alors ? Le procédé de la « votation » serait correct ou non correct en fonction du contenu de la question posée ? Si oui, curieuse conception de ce que l’on entend par « volonté populaire » ! On voit là qu’il y a quelque chose de gênant qui relativise largement le recours à une telle pratique.

CONCLUSION

Même fondée sur les meilleures intentions du monde, dans le cadre d’un système qui se dit démocratique – et qui est reconnu comme tel par la majorité – la « votation » est un acte de désespérance militante (un de plus !) qui donne l’illusion de la force et de l’unité… Stratégiquement et tactiquement nulle, elle traîne des contradictions difficilement surpassables. Elle est une démonstration militante d’organisations qui ne savent plus quoi inventer pour exister et montrer qu’elles ont encore prise sur la réalité.

Que restera-t-il finalement de cette opération dans quelques semaines… rien, ou plutôt si, une nouvelle vague d’amertume et de déception. Quant au référendum espéré, il est en fait une arme à double tranchant dans le cadre d’un système politique pervers, pseudo démocratique et fondé sur le mensonge et la manipulation de masse. Il peut aboutir au meilleur comme au pire.

Ce n’est pas avec de tels moyens, stratégiquement et même tactiquement dérisoires que l’on va mettre à mal le système marchand. De plus, mobiliser sur de telles actions, c’est faire preuve d’impuissance au regard du pouvoir et entretenir, une fois encore, l’illusion de l’efficacité politique... C’est du même acabit que les « grandes manifestations » qui battent vainement le pavé.

Devait-on finalement procéder à cette « votation » ? Oui, pourquoi pas ! Si c’est un moyen de doper le moral des militants... Mais là n’est pas la vrai question. La vrai question est : quelle est la valeur stratégique d’une telle opération ? Et la réponse est claire et nous sera fournie par la suite : elle est nulle. S’il s’agit de faire du marketing politique pour certaines organisations politiques et syndicales, alors, c’est certainement réussi.

Si c’est une opération à vocation de déstabilisation du gouvernement, voire du système, alors c’est raté. En effet, qui peut croire sérieusement que ce gouvernement va obtempérer et organiser la consultation demandée. Le croire c’est de la naïveté, le faire croire, de la manipulation.

Patrick MIGNARD

Octobre 2009

Source : http://www.altermonde-sans-frontier...


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