Compétitivité : le fouet des barbares de la Finance

vendredi 19 mai 2023.
 

La compétitivité contre la coopérativité

Compétitivité : le fouet des barbares de la Finance

Le terme de compétitivité, depuis l’élection de François Hollande à la présence de la république, est répété en boucle par tous les médias. On ne peut y échapper !

Vous avez dit compétitivité ? titre les Échos en rappelant les mesures gouvernementales sur cette question : http://lecercle.lesechos.fr/economi...

"Le grand saut idéologique de la compétitivité" titre pour sa petite vidéo Jean-Michel Apahtie, journaliste à RTL

http://www.dailymotion.com/video/xu...

Ce journaliste est complètement éberlué par le tournant pris à 180° par François Hollande qui prétend qu’une baisse de la pression fiscale sur les sociétés, sans aucun contrôle et sans adaptation aux tailles de celle-ci, va pouvoir créer 300 000 emplois !

Et comme d’habitude, sur l’ensemble des chaînes de radio et de télévision, on invitera très majoritairement des économistes libéraux pour parler de compétitivité.

Même à France Culture, où l’on pourrait s’attendre à des débats pluralistes, que constate-t-on ? C’est Jean-Marie Colombani et Jean-Claude Casanova qui se penchent sur la question en compagnie de Christian de Boissieu, économiste et ancien président du Conseil d’analyse économique et de Michel Didier, Président de Coe-Rexecode. (http://www.franceculture.fr/emissio... )

Et cette même station continuera d’inviter toujours des libéraux et sociaux libéraux pour discuter de cette même thématique : http://www.franceculture.fr/tags/co... La culture en vase clos, en quelque sorte.

Bref après le "choc de croissance" prévu par Nicolas Sarkozy grâce au bouclier fiscal dont chacun a pu juger de l’inefficacité, voici maintenant un remake : "le choc de compétitivité" grâce notamment au relâchement de "l’insupportable pression fiscale" sur les entreprises et les pauvres petits pigeons qui les dirigent. Au pays bas de France, voici maintenant Sarkhollande, le grand compétiteur !

Heureusement, Internet permet tout de même une expression plus pluraliste. Ainsi, on peut visionner deux vidéos de Laurent Maffeïs, du Parti de gauche, concernant le matraquage médiatique de la compétitivité : http://zec.blogs.letelegramme.com/a... puis la vidéo : "François Hollande : le capital imposé comme le travail ?" http://www.dailymotion.com/video/xu... Laurent Maffeïs examine alors toutes les reculades et autres cadeaux faits au patronat.

Nous bâtirons ici notre dialogue didactique sur deux études dont nous citerons de larges extraits :
- L’une du Groupe Apex-Isast (qui rassemble des spécialistes en économie, finance, comptabilité, gestion, droit du travail et droit collectif), intitulée "Après les pigeons, voici les vautours" (notée doc.1) http://www.apex.fr/actualites/l-act...

- L’autre qui est une étude conjointe de l’association Attac et de la Fondation Copernicélaborée par des universitaires dont nous donnerons les références à la fin du texte, en annexe. Elle est intitulée : "En finir avec la compétitivité." (notée doc.2) http://www.fondation-copernic.org/I... On trouvera ainsi dans cette étude de 27 pages une réponse au rapport Gallois

- J’utiliserai aussi quelques données du numéro de novembre 2012 de la revue Alternatives économiques. Cette bonne revue a consacré un dossier de neuf pages sur la plupart des questions traitées ici. Il s’intitule : Compétitivité : le travail coûte-t-il trop cher ? Ce titre futur d’ailleurs sur la page couverture.

Je profite de cette occasion pour dire ici qu’il existe des universitaires, des économistes qui ont choisi de mettre à disposition gratuitement leur savoir au service des salariés et de leurs organisations contrairement à d’autres que le Monde diplomatique a appelé "les économistes à gage"au visage souvent dissimulé sous le masque d’une fausse neutralité, en charge de défendre le libéralisme économique au service des puissants.

Evidemment, les économistes cités ici, sont très rarement invités par les médias malgré leurs compétences.

Existe-t-il une définition scientifique de la compétitivité faisant consensus ?

Non. La définition donnée par le dictionnaire TLFI (trésor de la langue française informatisée) est : "capable de supporter la concurrence avec d’autres » Aptitude d’un individu ou d’un groupe à affronter la concurrence

L’encyclopédie en ligne Wikipédia remarque le caractère vague de la notion : "Ce terme est passé dans le langage courant avec une acception très large et quelque peu vague, pour évoquer la capacité à réussir économiquement dans un environnement concurrentiel, en innovant, en croissant, en réalisant du bénéfice, etc."

On constate donc d’emblée le caractère non neutre de cette notion qui s’inscrit dans une économie dite concurrentielle et qui considère que le moteur principal de l’économie – sous-entendu de marché – est la concurrence entre individus, acteurs divers, entreprises, régions, pays. Le moteur de l’action n’est donc pas fondamentalement la coopération, la coordination mais la compétition : on est au cœur même de l’idéologie libérale.

Dans ce contexte, wikipédia donne la définition suivante : "La compétitivité économique est une notion économique qui s’applique à une entreprise, un secteur économique, ou un territoire (pays, bassin économique...). Elle désigne la capacité d’une telle entité à vendre et fournir durablement un ou plusieurs biens ou services marchands sur un marché donné en situation de concurrence"

Voici ce que l’on peut lire dans un document publié par le CAE ( conseil d’analyse économique .Compétitivité , rapport de Michèle Debonneuil et Lionel Fontagné, 2003, la Documentation française) "La définition généralement retenue de la compétitivité d’une nation est la capacité à améliorer durablement le niveau de vie de ses habitants et à leur procurer un haut niveau d’emploi et de cohésion sociale".Les auteurs ne cachent pas « les réserves méthodologiques que le concept suscite » et ils rapportent même le propos de Paul Krugman « contre la “dangereuse obsession” de compétitivité de l’administration Clinton et de l’Union européenne » car « la compétitivité est un mot vide de sens lorsqu’il est appliqué aux économies nationales »,(propos rapportés par notre texte de référence).

Ce mot de "compétitivité" est donc une coquille idéologique dans laquelle les libéraux placent, pour les besoins de la cause du moment, les ingrédients qu’ils jugent utiles pour la défense de leurs intérêts de classe. Mais quelque soient les variations du met, le fond de sauce patronale permanent et incontournable est sempiternellement le coût salarial. On pourrait lui opposer un concept comme coopérativité qui exprimerait le niveau de coopération et de coordination entre les entreprises et les économies, concept fondé sur un autre mode de développement que le capitalisme concurrentiel. Mais on observera ici la toute-puissance de la pensée unique libérale qui interdit l’usage d’un tel terme.

Remarquons que ce terme de compétitivité a même envahi les secteurs de la sphère non marchande et des administrations. Ainsi pourra-t-on parler de la compétitivité d’établissements scolaires en fonction du hit-parade des résultats au bac ou au brevet, de la compétitivité des centres de soins en fonction du nombre d’actes médicaux délivrés en un temps donné et un budget donné, de la compétitivité de tel ou tel service de police ou de tel ou tel tribunal en fonction du nombre de contraventions ou de jugements réalisés, de la compétitivité entre chercheurs en fonction du nombre de publications effectuées, etc.

Les chefs de service de ces différents secteurs ont progressivement intégré ce vocabulaire et cette manière de voir qui n’a pourtant rien de naturel.

La diminution des parts de marché prises par les entreprises françaises au niveau international s’explique-t-elle par une diminution de la compétitivité de l’économie française ?

La part de la France dans le commerce mondial a reculé de 42% de 2000 à 2011 et sa part dans les exportations européennes de 25% sur cette dizaine d’années. La France perd donc des parts de marché à l’international. En réalité, contrairement à ce qui est souvent affirmé, à l’intérieur de la zone euro, la compétitivité-prix de la France ne connaît aucune dégradation : l’indicateur publié par la indicateur, calculé cette fois sur un ensemble plus large de 46 pays, se dégrade nettement dans la première moitié des années 2000. cette dégradation est étroitement corrélée au taux de change de l’euro par rapportau dollar (voir graphique, doc.2 p.8) On estime ainsi que, entre 2002 et 2008, la hausse de l’euro aurait freiné les exportations françaises à hauteur de 0,3 point en moyenne par trimestre.

Oui, mais l’Allemagne est aussi dans la zone euro, et on ne constate pas pour autant une perte de parts de marché.

L’Allemagne est moins sensible que la France à la réévaluationde l’euro, et ce pour deux raisons. Tout d’abord, se situant sur des créneaux haut de gamme, la réaction de la demande à une variation des prix de ses produits est faible. De plus, si l’assemblage final des produits se fait en Allemagne, les unités de production se situent pour beaucoup dans les pays d’europe centrale et orientale, notamment dans des pays qui ne sont pas passés à la monnaie unique. L’Allemagne profite donc, dans ce cadre, de la surévaluation de l’euro. ainsi, en 2010, près de 56 % de l’excédent commercial allemand est généré dans la zone euro et près de 80% en Europe

Est considérée comme plus compétitive une entreprise réalisant des prix de production moins élevés. Ceci est-il cohérent ?

Tout dépend de quel point de vue l’on se place.
- Dans l’optique d’une politique de l’offre axée sur une minimisation des coûts de production, permettant de réaliser un maximum de vente et un maximum de profit, c’est cohérent. C’est cohérent avec une logique de classe fondée sur l’intérêt privé des détenteurs du capital.

- Dans l’optique d’une politique de la demande axée sur la défense de la qualité des conditions de travail des salariés, sur un bon niveau de qualification et de salaire, sur la protection de l’environnement, cette minimisation des prix de production est incohérente. Elle n’est pas cohérente avec une logique fondée sur la défense de l’intérêt général.

Mais une stratégie idéologique fondamentale de la domination de la classe dominante est de faire passer pour intérêt général ce qui n’est que son intérêt privé. On fera donc croire, par le biais du consumérisme, et en utilisant la théologie des économistes à gage, que la politique de l’offre défend l’intérêt de tous.

Il faut donc se poser la question : lorsque l’on dit que l’économie d’un pays A est plus compétitive que l’économie d’un pays B, qu’en est-il exactement des conditions de travail et de vie de ses habitants ? (stress au travail, durée du travail, espérance de vie en bonne santé, qualité des systèmes de soins et l’éducation, qualité des services publics et notamment de la justice, etc.).

Les socialistes français devraient plus réfléchir à leur échec aux élections présidentielles de 2002 où Lionel Jospin avait été battu par Jean-Marie Le Pen : à cette époque, le Financial Time avait considéré que la politique économique du gouvernement français était bonne et avait un excellent niveau de compétitivité. Effectivement, bon nombre d’indicateurs économiques étaient satisfaisants ce qui n’a pas empêché l’échec électoral. Pourquoi ? La qualité de la vie des gens ne se mesure pas uniquement à l’aune d’indicateurs économiques et encore moins avec des coquilles idéologiques comme compétitivité, croissance, etc.

L’économie française serait-elle moins compétitive du fait de coûts salariaux plus élevés ?

Même en se plaçant dans ce questionnement idéologiquement libéral, la réponse est non. Examinons par exemple la comparaison avec l’économie allemande en nous soumettant aux injections médiatiques qui font de cette comparaison un argument de vente de la soupe libérale.

Le coût de la main d’œuvre (salaire brut plus cotisations sociales des employeurs) global apparaît plus élevé en France (35,3 € de l’heure) qu’en Allemagne (32 €), mais c’est parce qu’une partie des cotisations sociales jadis versées par les employeurs y ont été transférées aux salariés sous formes d’impôts et taxes divers, voire d’assurances privées (le rêve des grands patrons français !). Mais dans l’industrie manufacturière, celle qui exporte, les coûts sont voisins (36,8 contre 36,2 €) et la microscopique différence (6 centimes !) ne peut rien expliquer Par heure travaillée, la productivité est plus élevée en France : 45,4 € de richesse produite (valeur ajoutée) par heure, contre 42,3 € en Allemagne.

Remarquons, par ailleurs, que les données de référence d’Eurostat posent problème tant sur la comptabilisation des heures de travail qui sous-estime la durée du travail en France, que sur le calcul de la masse salariale qui surestime le poids, en France, de la formation professionnelle dans le coût du travail.

De plus, ce débat est en général biaisé. D’une part, il ne prend que rarement en compte la productivité du travail, c’est-à-dire le coût salarial unitaire. or les écarts de productivité entre pays sont plus grands que les écarts de coût horaire.

D’autre part, il mêle allégrement coût du travail dans l’industrie et dans les services marchands. Or la productivité augmente plus faiblement dans les services que dans l’industrie. le coût salarial unitaire baisse en moyenne dans la zone euro sauf pour le Royaume-Uni, le Danemark, l’Italie, l’Espagne et la Grèce. En France, il baisse de 0,5 % par an de 1996 à 2008, en Allemagne de 0,7 %. Globalement, on constate une tendance à la convergence des coûts salariaux unitaires dans la zone euro, avec une baisse dans l’industrie et une hausse dans les services. Ces constats, combinés au caractère biaisé de certaines données statistiques, démentent l’affirmation selon laquelle il y a eu en France une dérive du coût du travail qui plomberait la compétitivité des entreprises.

Si l’on se tourne vers le Bureau of Labor Statistics américain qui fournit des données sur le monde entier, on retrouve le constat général précédent : le coût horaire du travail dans l’industrie manufacturière était en 2010 de 40,4 dollars dans la zone euro, 40,6 dollars en France, et 43,8 dollars en Allemagne. Le coût français est donc à peine supérieur de 0,5 % à la moyenne de la zone euro et inférieur de 7,3 % à celui de l’Allemagne (doc.2, p 12 - 13)

On peut faire par ailleurs les remarques suivantes :
- Selon les secteurs industriels, les coûts de main d’œuvre représentent entre 20 et 40% du coût final du produit – lequel incorpore en plus le profit de la firme fabricante. Ainsi une augmentation de 10 % du coût salarial ne représente qu’une augmentation de 2% à 4 % du prix..

- D’autre part, comme nous le faisions remarquer dans une étude précédente, le coût salarial parfois très élevé du personnel de direction n’est pas distingué du coût salarial des ouvriers ou des employé. Par exemple, dans certains grands groupes de presses, les personnels du directoire peuvent percevoir 400 000 euros par an de salaire. Ce point n’est jamais abordé par les médias et rarement par les économistes.

- Une étude réalisée par Camille Landais intitulée les hauts revenus en France (1998 – 2006). Une explosion des inégalités ? à Paris School of économics montre comment les très hauts salaires ont augmenté beaucoup plus vite que ceux qui concernent 90 % des salariés.

http://www.inegalites.fr/IMG/pdf/ha...

C’est plutôt de ce côté-là qu’il faut chercher où se trouvent les coûts salariaux élevés grèvant la productivité et l’investissement productif plutôt que du coût salarial ouvrier.

- Il n’y a pas de corrélation automatique entre le coût salarial et le chiffre d’affaires ou la compétitivité – prix diraient certains économistes. Ainsi, comme l’indique la revue Alternatives économiques (novembre 2012 ; p. 10), en 2008 un ouvrier allemand de l’industrie automobile "coûtait" en moyenne 62 700 € et un ouvrier français 52 100 €. Pourtant, dans le même temps, le chiffre d’affaires moyen pour chaque véhicule produit de l’industrie automobile allemande était de 49 400 € contre 26 900 € en France, soit 83 % de plus !

Oui, mais certains affirment que la durée du travail est plus longue en Allemagne qu’en France, améliorant ainsi sa compétitivité.

Faux. : Malgré les 35 heures tant honnies par le patronat, les Français travaillent plus que les Allemands : en moyenne 1 476 heures par an, contre 1 413 en Allemagne. La durée de travail hebdomadaire effective, en moyenne pour les actifs, est de 38 heures (les 35 heures ont été effacées depuis longtemps) en France contre 35,7 heures pour les actifs allemands, en raison des nombreux emplois à temps partiel et petits boulots qui fleurissement outre-Rhin. (source : Insee, Eurostat et OCDE, données 2011. Voir doc1)

La compétitivité des coûts salariaux est-elle corrélée avec le niveau des exportations ?

- Entre 1995 et 2001, la compétitivité-salaires s’améliore de 15 points environ. Malgré cela la performance à l’exportation n’augmente pas.
- Entre 2001 et 2005, la perte de compétitivité-salaires entraîne une baisse de performance à l’exportation, partiellement en raison de la hausse du cours de l’euro durant cette période, qui renchérit les productions françaises hors de la zone euro.
- À partir de 2004, le décrochage à l’export est continu. Pourtant la compétitivité-coût de la France est restée stable. On ne peut donc lui imputer les pertes de parts de marché export. Conclusion : la perte de parts de marché de la France n’est pas mécaniquement liée à des coûts salariaux "excessifs". (voir graphique doc.1)

Le redéploiement des processus productifs a pour conséquence une différence croissante, et variable selon les pays, entre la compétitivité d’un espace national et celle des firmes « nationales ». La contribution des grands groupes aux performances de leur pays de rattachement peut se dégrader à partir du moment où elles réalisent une partie croissante de leur chiffre d’affaires à l’étranger . Les performances relatives des pays européens sont aussi faussées par les différences dans les stratégies d’externalisation (outsourcing) de leurs firmes.

Les grands groupes allemands ont ainsi développé une pratique consistant à délocaliser la production de biens intermédiaires dans les pays à bas salaires, notamment les PECO, puis à les réimporter pour réaliser l’assemblage sur le territoire allemand. La partie exportée apparaît alors comme exportations allemandes. Ce phénomène peut être repéré par le recours plus important en Allemagne aux consommations intermédiaires industrielles importées, et par la baisse de leur prix.

Le résultat est une évolution très différente, en France et en Allemagne, du prix relatif de l’industrie, quand on le mesure au niveau de la valeur ajoutée. Une étude récente montre que la part des réexportations directes dans le total des exportations allemandes vers l’Union européenne est en augmentation constante et atteint 22,8 % en 2006.

Dans le cas de la France, le taux de réexport stagne à un niveau bien inférieur. les auteurs de l’étude notent que « sur les 1,2 point de parts de marché intra-UE gagnés par l’Allemagne entre 2000 et 2006, les deux tiers (0,8 point) reflètent une hausse des réexports directs vers l’UE, ce qui n’a pas grand-chose à voir avec la compétitivité coûts du travail » (voir doc.2)

Les charges sociales payées par les employeurs constitue-t-elles un frein à la compétitivité ?

Le mot "charges" on dit déjà long sur l’état d’esprit de ceux qui l’utilisent. Cette terminologie libérale considère les cotisations sociales comme des charges et non comme des dépenses sociales positives. Ce sont pourtant avec ces cotisations que l’on assure, entre autres, le financement de la sécurité sociale. Nous ne reviendrons pas ici en détail sur la structure des cotisations sociales que nous avons exposées d’une manière détaillée dans un article précédent intitulé : les coûts salariaux

http://www.gauchemip.org/spip.php?a...

Rappelons que la part des cotisations sociales payées par les salariés a augmenté ces dernières années et que dans les recettes de la sécurité sociale, la part des cotisations sociales a considérablement diminué au profit des ressources en impôts (97,9 % en 1980 ; 96,4 % en en 1990 ; 72,5 % en 2000 ; 69,6 % en 2010 En revanche, les impôts représentaient 2,1 % des ressources en 1980 et représentent 30,4 % en 2010)

Dans la rapport d’information du député Yves BUR, à l’assemblée nationale, on pouvait lire : "Avec 28,7 milliards d’euros consacrés en 2007 aux allégements généraux, et plus de 41 milliards d’euros d’exemptions d’assiette, les politiques d’exonérations sociales représentent un total annuel de près de 70 milliards d’euros, hors allégements ciblés."

Il n’y a aucune corrélation statistique significative entre cette politique d’exonération depuis ces 20 dernières années, le niveau de l’emploi et la compétitivité. Les quelques créations d’emplois induites sont sans commune mesure avec le coût du montant global des exonérations.

En 2012, ces exonérations représentaient au total 30,7 milliards d’euros, soit 12,5 % du total des cotisations. Ce cadeau aux entreprises équivaut à 3 % de leur masse salariale et pèse pour l’essentiel sur le budget de l’État, puisque ce dernier compense (avec des retards défavorables à la trésorerie de la Sécurité sociale) le plus gros (95 % en 2012) du manque à gagner des régimes sociaux C’est donc un facteur aggravant de la dette de l’État.

La Suède reste l’économie la plus compétitive de l’Union européenne suivie par la Finlande, le Danemark et les Pays-Bas, selon le World Economic Forum basé à Genève. Pourtant la Suède est le pays où les prélèvements sociaux sont les plus élevés.

Remarquons que la rigueur salariale exigée actuellement par le Medef et les libéraux pour obtenir une meilleure compétitivité tombe à plat puisque cette rigueur existe depuis au moins 20 ans : comme nous l’indiquions dans notre article précédent, pour avoir une vision plus objective de l’évolution des salaires, il faut plutôt retenir l’évolution du salaire médian que celle du salaire net moyen. Ainsi, de 1996 à 2006, le premier a augmenté de seulement 4 % alors que le second de 12 % environ. Cette hausse plus rapide du salaire moyen s’explique par l’existence de très hauts salaires dont la croissance a été beaucoup plus rapide que le salaire médian.

De toutes façons, ces chiffres montrent bien la grande modération de l’augmentation des salaires : 0,4 % pour le salaire médian et 1,2 % pour le salaire moyen en moyenne par an.

Or cette politique réclamée sans cesse par les libéraux n’a eu aucun effet positif sur la compétitivité et la croissance économiques. Bien au contraire. en réalité, cela a permis l’augmentation des salaires des cadres de direction notamment de la finance et la croissance des dividendes versés aux actionnaires. Aucune corrélation ne peut être scientifiquement montrée entre cette modération salariale, le taux de chômage, les parts de marché, etc.

La compétitivité est-elle synonyme de productivité ?

Non, mais elle peut en constituer un facteur. Autant la productivité admet des définitions précises, qui font d’ailleurs l’objet d’un volume de la collection Que sais ? (PUF), autant la compétitivité peut englober des facteurs fort divers comme nous l’avons vu plus haut.

Un certain nombre d’économistes distinguent la compétitivité–prix (ou-coût) et la compétitivité hors prix. Dans cette deuxième catégorie, on peut faire intervenir : la productivité du travail (qui agit d’ailleurs sur le niveau du prix), l’innovation, la qualité des produits, la flexibilité, l’organisation du travail. Certains ajoutent à cela le poids des contraintes juridiques définies par le code du travail, le code de la santé publique, le code de l’environnement.

Dans ce cadre la productivité est considérée comme un facteur de compétitivité. Evidemment, la productivité est liée au niveau de mécanisation des tâches et à l’organisation du travail. Ce sont des variables dépendantes.

- L’industrie a raté le virage de la robotisation et de l’automatisation. Elle compte moins de 35 000 robots en France, contre plus de 62 000 en Italie et 150 000 en Allemagne. Un peu plus de 3 000 nouveaux robots ont été installés en France en 2011, en Allemagne près de 20 000. Ce parc réduit est complètement dépassé. Un robot dure plus d’une vingtaine d’années en France, contre une dizaine ailleurs.

- En matière d’informatisation professionnelle lourde, la France compte à peine plus de 23 000 serveurs sécurisés. Rapporté au nombre d’habitants pour corriger de l’effet taille des pays, la France compte 4 serveurs informatiques sécurisés pour 10 000 habitants, le Japon 7, l’Allemagne 10, le Royaume-Uni et les États-Unis 16. Soit un rapport de 1 à 4.

- Vu l’âge et la saturation de ces systèmes, 14 millions d’heures de travail sont perdues dans les entreprises françaises de plus de 50 salariés, en raison des pannes informatiques (enquête CA Technologies, 2011). Rapporté au parc d’entreprises c’est plus de 1 000 heures par entreprise, soit 20% de plus qu’en Espagne et 2 fois plus qu’en Allemagne, en Angleterre ou en Italie. Pendant ces pannes, la productivité évidemment chute ; selon la même enquête elle est alors à 57% de son niveau normal, avec tous les coûts induits. En conclusion, on constate ici un net avantage de l’Allemagne.

Alors, l’innovation , la recherche-développement sont des facteurs de compétitivité ?

Oui, et là encore, la France accuse un retard dans le domaine de la recherche et développement. Elle est désormais au 12e rang mondial, selon le dernier classement de l’OCDE, loin derrière les grands pays développés (USA, Allemagne, Japon) et en dessous de la moyenne de l’ensemble. Pour la seule recherche des entreprises privées, l’effort allemand est supérieur de 70% au français.

L’industrie concentre plus des 4/5 de cet effort privé, mais en Allemagne elle représente 21% de la production de richesse (le PIB), en France à peine 11%. Comment s’étonner, dans ces conditions, du manque d’innovation et par conséquent de compétitivité ?

En 2009,les dépenses totales (publiques et privées) de R&D représentaient 2,8 % du PIB en Allemagne contre 2,1 % en France. Ce différentiel entre la France et l’Allemagne ne date pas d’aujourd’hui. Il existait déjà dès les années 2000 et s’est creusé dans le temps. Il est très marqué aussi si l’on considère uniquement les dépenses en R&D du secteur privé : en 2008 elles sont de 19 milliards de dollars en France contre 40 milliards en Allemagne.

L’évolution de la productivité globale des facteurs, c’est à- dire la combinaison productive du capital et du travail, permet de mesurer l’impact de l’évolution du niveau technologique. À partir d’une référence de 100 en 1999, la France a reculé pour être aujourd’hui à l’indice 98 alors que l’Allemagne est à 108.

Le nombre de brevets déposés est un autre indicateur des performances technologiques des pays. Si la France fait nettement mieux que l’Espagne ou l’Italie, elle est néanmoins nettement distancée par l’Allemagne : en 2010, cette dernière a déposé 69,5 brevets triadiques par million d’habitants contre 39 pour la France et entre 2001 et 2010, l’Allemagne a déposé trois fois plus de brevets que la France.

Les filières de formation techniques sont dévalorisées en France et ne produisent chaque année qu’un filet réduit de techniciens et ingénieurs. Cette dévalorisation se perpétue sur le marché du travail, en termes de rémunération des ingénieurs, techniciens et ouvriers qualifiés dont l’industrie a besoin. Ce n’est pas le cas en Allemagne ou même en Italie. (doc.1) Comme le rappelle à juste titre Jean-Luc Mélenchon dans son meeting très documenté, à Paris le 16 novembre 2012, un ingénieur en France est en moyenne payé 2,5 fois moins qu’aux Etats-Unis. (À bas l’austérité : http://www.jean-luc-melenchon.fr/20... )

Une conclusion s’impose : comparée à son principal concurrent, la France souffre d’un déficit d’innovation important qui se traduit par un niveau moyen de gamme des produits, donc plus sensible aux variations de prix contrairement aux produits allemands qui, positionnés sur des segments hauts de gamme, peuvent, par leur qualité, soutenir plus facilement une augmentation des prix à l’exportation. l’argument patronal consiste à expliquer que c’est l’existence d’un taux de marge insuffisant qui empêcherait les entre prises d’investir dans l’innovation.

Les entreprises n’investissent pas suffisamment dans l’innovation et en R&D, car leur taux de marge est insuffisants. Vrai ou faux ?

Faux. Dans un article précédent intitulé "Les profits" : http://www.gauchemip.org/spip.php?a... nous avons passé en revue tous les indicateurs économiques et comptables pouvant définir le profit (excédent brut d’exportation EBE, etc.). Rappelons que le taux de marge peut être défini comme le quotient entre l’excédent brut d’exploitation et la valeur ajoutée créée. Nous avons étudié l’évolution du taux de marge au paragraphe 4.2a-b

L’argument patronal consiste à expliquer que c’est l’existence d’un taux de marge insuffisant qui empêcherait les entre prises d’investir dans l’innovation. S’il est vrai que cette dernière décennie a été marquée par un mouvement à la baisse du taux de marge, ce n’était pas le cas lors de la décennie précédente qui a vu ce dernier augmenter dans l’industrie française. Pourtant, à l’époque, l’effort en R&D est resté globalement stable. Par contre, on peut remarquer que, malgré la baisse du taux de marge, la rémunération des actionnaires a continué à connaître une augmentation prodigieuse dans les années 2000, La récession de 2009 n’entraînant qu’une baisse momentanée et limitée. La part des revenus nets distribués par les sociétés non financières en 2011 a ainsi atteint 9 % de leur valeur ajoutée, point le plus haut depuis la Seconde Guerre mondiale. Le choix des entreprises a donc été de continuer à augmenter les dividendes plutôt que d’investir dans l’innovation. Ainsi, les dépenses en R&D qui représentaient 44 % des dividendes en 1992, n’en représentent plus qu’environ 25 %. (doc.2,p.7).

À partir de 2004, on assiste à une explosion du nombre de personnes riches selon une étude très informative de l’INSEE (Les très hauts revenus : des différences de plus en plus marquées http://www.insee.fr/fr/ffc/docs_ffc... ) environ un tiers des ménages les plus aisés ont 80 % de leurs revenus issu du capital et non de l’activité.

Le coût du capital en France est-il un frein à la compétitivité ?

Oui. En l’espace de douze ans, la part des revenus distribués par les sociétés non financières a pratiquement doublé par rapport à leur EBE, et presque doublé par rapport à leur valeur ajoutée brute (VAB), déjouant donc la coupure avant/ après la crise, au point d’absorber plus des 4/5 de leur EBE. Autrement dit, la complainte patronale faisant de la baisse du taux de marge la raison profonde des faibles investissements et du moindre effort en matière de recherche et développement, passe sous silence le fait que, crise ou pas crise, la part de plus en plus lourde que les entreprises choisissent de distribuer aux propriétaires du capital affaiblit leur capacité à faire face à tous les aspects de la compétitivité. Si l’on rapporte enfin les revenus nets distribués (emplois-ressources) par les sociétés non financières à leur VAB, on voit que, hormis les années 2009 et 2010, la part dévolue aux actionnaires a crû dans des proportions considérables. Dans son avis rendu en 2011, le conseil économique, social et environnemental notait : « Des dividendes plus élevés que la moyenne européenne. pour la période 2006-2009, si le résultat après impôt de nos sociétés non financières se trouve – avec 37,5 % de l’excédent brut d’exploitation (EBE) en 2009 – sensiblement dans la moyenne des autres pays européens, les « dividendes et autres revenus distribués » (24,7% en 2009) sont parmi les plus élevés de l’Union européenne. L’autofinancement disponible pour les investissements en est réduit d’autant et se situe, avec 12,8 % de l’EBE en 2009, parmi les plus bas d’Europe. Selon le rapport Cotis, les politiques de versement de dividendes sont très différentes selon la taille des entreprises. De fait, seules 16 % des pme distribuent des dividendes ; cette proportion est trois fois plus importante pour les grandes entreprises. Celles dont la valeur ajoutée est la plus élevée versent le plus de dividendes. » (doc.2)

Ce n’est donc pas par hasard si les patrons français sont les mieux payés d’Europe, et ce, sans rapport avec les performances de leurs entreprises. (Voir article du Monde : http://www.lemonde.fr/economie/arti... )

Ajoutons que, selon l’INSEE, les revenus de la propriété n’ont pas cessé d’augmenter sur la période et ils n’ont pas fléchi en 2008, au plus fort de la crise financière (22,4 milliards d’euros après 22,3 milliards d’euros en 2007). En particulier, les dividendes reçus et les produits assimilés ont été multipliés par plus de quatre entre 1995 et 2006. (Voir : L’activité bancaire mesurée par les banques et la comptabilité nationale http://www.insee.fr/fr/themes/docum... ) Le fait qu’une part croissante des profits dans ce contexte de capitalisme financiarisée, soit versée sous forme de dividendes et non dans l’investissement productif conduit à la désindustrialisation.

La revue Alternatives économiques de novembre 2012, publie un tableau intitulé : "la France, championne de la désindustrialisation."(p.8). Il indique la part de l’industrie manufacturière dans le PIB, en pourcentages. Sur 31 pays de l’OCDE recensés dans l’article, et classés du plus industriel ou moins industriel, la France occupe le 28e rang sur 31 ! Désormais, l’industrie manufacturière ne représente que 10 % du PIB. À titre de comparaison, cette part représente 20,9 % pour l’Allemagne (c’est-à-dire le double), classée ainsi au septième rang, 17,6 % pour le Japon, 14,5 % en moyenne pour les pays de la zone euro, 12,7 % pour les Etats-Unis dont le capitalisme est pourtant particulièrement financiarisé. Pour faire passer cette pilule amère, les libéraux diront angéliquement : " on a trop misé sur les services, on s’est un peu trompé !". De qui se moquent-t-ils ? La vraie raison, c’est l’avidité actionnariale ! Ce que certains économistes nomment moins subjectivement : le passage du capitalisme managérial au capitalisme actionnarial aux alentours des années 1980 en France.

Le "matraquage fiscal" n’est-il pas la cause du manque de compétitivité ?

- Ce soi-disant "matraquage fiscal" selon les libéraux et repris par le FN sous le vocable de fiscalisme relève de la fable pour enfants, sauf évidemment pour quelques cas particuliers pour les PME – TPE.. . En moyenne, les grandes entreprises françaises, en 2011 elles payaient environ 8% d’impôt sur les bénéfices, quand le taux nominal était de 33% et alors que la majorité des entreprises petites ou moyennes payaient 20 à 30%. Selon une commission du Sénat (rapport de juillet 2012), parmi les 12 000 entreprises de plus de 2 000 salariés, moins de 500 acquittaient l’impôt sur les bénéfices, soit moins de 5%. Il est vrai que la majorité fait partie des grands groupes, qui savent ce qu’optimisation fiscale veut dire. Ces grands groupes justement se retrouvent dans l’Afep et derrière son appel.
- L’optimisation fiscale utilisée par les grands groupes par manipulation des prix de transfert ( voir notre étude sur les prix : http://www.gauchemip.org/spip.php?a... et aussi doc.2), les conduit à échapper ainsi, pour une bonne part, la fiscalité. Nous ne parlerons pas encore ici des paradis fiscaux qui eux aussi, grèvent les budgets des états.
- L’étude de l’INSEE précédente sur le revenu des ménages aisés indique que le taux d’imposition moyen des ménages les plus riches de France est en moyenne de 20 %.

Le termes de compétitivité a-t-il un contenu social ?

On aura compris que ce terme de compétitivité est principalement de nature comptable et mercantile et s’exprime essentiellement par des colonnes de chiffres sur des écrans d’ordinateurs. La réalité des existences humaines des salariés n’est pas prise en compte. Que les salariés soient moins payés, moins protégés socialement, qu’importe ! Donc, du point de vue du salarié, cette compétitivité n’a pas de contenu social positif.

Illustrons cette affirmation. Considérer deux entreprises A et B .On suppose que ces deux entreprises réalisent des niveaux de production analogues pour les mêmes produits et des prix de production équivalents. on considère que les salariés de l’entreprise A ont de très bonnes conditions de travail, ont un emploi stable et sont bien payés, mais qu’en revanche, il n’en est pas de même pour l’entreprise B dont la quasi-totalité des salariés ont un contrat précaire et ont des salaires moins élevés. Que diront les libéraux ? C’est l’entreprise B la plus compétitive ! Et pourquoi donc ? Les prix de production sont les mêmes, la productivité du travail est sensiblement la même ! Leurs capacités d’exportation sont semblables ! La raison en est simple : le profit réalisé pour les actionnaires est supérieur pour l’entreprise B ! Les libéraux dissimuleront cette véritable raison par un argument démenti par les faits sur une longue période : l’entreprise B réalise une marge bénéficiaire plus importante qui lui permettra d’investir dans la production ou l’innovation ! Mais cela suppose que le surcroît de profits réalisés sera réinvesti et non distribué en dividendes, ce qui s’avère être démenti par les faits si l’on examine les statistiques nationales. Les libéraux se gardent bien de parler du coût de la rémunération des actionnaires et donc du capital. Ils se garde bien aussi de parler du coût salarial du personnel de direction qui pourtant entre dans la détermination du coût unitaire des biens et services produits. Alors, du point de vue des propriétaires des moyens de production oui, le terme de compétitivité a un contenu social : celui de l’amélioration des conditions de vie et de luxe des détenteurs du capital et de leurs familles.

Le manque de flexibilité des salariés est-il un handicap pour la compétitivité ?

Là encore, les mots ne sont pas innocents, et le terme de flexibilité et une sous coquille idéologique de la coquille compétitivité. Ce terme recouvre en effet plusieurs réalités économiques distinctes.
- D’abord celle de l’organisation du travail interne à l’entreprise : par exemple une organisation optimisant la gestion des stocks, ajustant en temps réel la production à la demande. On assiste à une sorte de combinaison entre des techniques de gestion autoritaire traditionnelles avec des contrats d’objectifs et de moyens pouvant favoriser l’initiative.
- Mais ce peut être, la flexibilité des horaires de travail, la flexibilité des contrats en développant le plus possible les contrats précaires (CDD plutôt que CDI), la flexibilité de la compétence en favorisant la polyvalence et le multitâche, la flexibilité des effectifs en fonction de la demande et des contraintes budgétaires, le développement de l’intérim et du temps partiel, la substitution de contrats individuels ou d’entreprises à des réglementations légales collectives, flexibilité du salaire, etc. Il s’agit en fait de faire intégrer aux salariés la précarité sous ses différentes formes. Le chantage à la compétitivité (et à ’emploi) est brandi comme un fouet. Cette précarisation multidimensionnelle constitue une forme moderne de barbarie. C’est en ce sens que l’on peut dire que plus encore que des vautours ou des requins, les ultralibéraux sont les véritables barbares de notre temps.

La compétitivité est-il un "concept" opérationnel ?

Pendant 30 ans d’ultralibéralisme, la compétitivité a été brandie, d’une manière récurrente, pour justifier toutes sortes de régressions sociales au nom d’une meilleure performance économique et au nom d’un sauvetage permanent de notre système social en danger : toujours la même stratégie du pompier – pyromane. (voir le livre de Jacques Généreux : La grande régression. Éditions du Seuil)

À ce pseudo concept de compétitivité lié à la compétition il faut en opposer deux autres : celui de coopérativité lié la coopération et celui de prédativité lié à celui de prédation. Le capitaliste financier de notre époque est une figure particulière de l’Homo sapiens prédateur – prédateur vis-à-vis de son semblable et prédateur de l’environnement. Ses capacités de prédation caractérisent la prédativité C’est un barbare en complet – cravate des temps modernes qui manie la cravache ou le fouet constitués des outils de cette prédativité : la compétitivité en fait partie.

C’est un pseudo concept qui n’est pas opérationnel au sens économique mais qui l’est comme opérateur de conditionnement idéologique. il remplace symboliquement le gourdin et le sifflet, ou si vous préférez le fouet, pour faire avancer le troupeau au pas de galop et toujours plus vite, jusqu’à épuisement, dans un contexte de guerre. Cette compétitivité implique une guerre économique permanente dont les salariés sont toujours les premières victimes et les vainqueurs les actionnaires. Elle s’accompagne aussi d’une guerre idéologique dont nous avons eu l’occasion de parler dans d’autres articles. La compétitivité fait partie de l’armement idéologique de cette guerre.

Hervé Debonrivage

Annexe sur le document 2 En finir avec la compétitivité

http://hussonet.free.fr/finicomp.pdf

Le document ne donnant pas d’informations sur les auteurs, je donne ici quelques informations (non exhaustive) sur leurs compétences.

Thomas Coutrot est un économiste et un statisticien français. Chef du département « conditions de travail et santé » à la DARES au Ministère du Travail et de l’Emploi, il est également un des animateurs du Réseau d’alerte sur les inégalités. Militant altermondialiste, il est coprésident de l’association Attac depuis décembre 2009 et membre de son conseil scientifique. Il participe en outre à la Fondation Copernic. Il est membre de l’association les économistes atterrés.

Jean-Marie Harribey est un économiste français, maître de conférences à l’université Montesquieu - Bordeaux, où il enseigne notamment l’économie et l’analyse des problèmes sociaux. Il intervient également à l’IEP de Bordeaux dans le cadre de la préparation au CAPES et à l’agrégation de sciences économiques et sociales. Il a également été co-président d’Attac France avec Aurélie Trouvé, de 2006 à 2009. Ses deux derniers ouvrages : Sortir de la crise globale, Vers un monde solidaire et écologique (co-direction avec Dominique Plihon pour Attac), La Découverte, Paris, 2009. Raconte-moi la crise, Éditions du Bord de de l’eau, Lormont, 2009.

Norbert Holcblat est sous-directeur des salaires, du travail et des relations professionnelles à la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques à l’administration centrale du ministère des Affaires sociales, du Travail A publié : L’industrie française éditions la découverte .Stratégie européenne et politique française de l’emploi 1997 – 2001 aux éditions de la Documentation française

Michel Husson est un statisticien et économiste français travaillant depuis 1990 à l’Institut de recherches économiques et sociales (IRES) comme Chef du groupe « Emploi ».et connu pour ses travaux sur la politique de l’emploi Entre 1987 et 1989, il a travaillé au Ministère de l’Industrie, dans le Service de Statistiques Industrielles (SESSI) en tant que chef du Bureau Analyse Statistique. Ses deux derniers ouvrages : Un pur capitalisme aux éditions Page Deux, 2008. Travail flexible, salariés jetables, à La Découverte, 2006

Pierre Khalfa est membre du conseil économique, social et environnemental représentant des salariés, désigné par Union solidaire. Il est coauteur du livre Changer vraiment ! : Quelles politiques économiques de gauche ?

Jacques Rigaudiat est magistrat à la Cour des comptes. Il a écrit Le nouvel ordre prolétaire : Le modèle social français face à l’insécurité économique

Stéphanie Treillet est Maître de conférences en économie à l’IUFM de Créteil Elle a écrit : L’économie du développement, de Bandoeng à la mondialisation aux éditions A. Colin


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