Macron, gouvernement, LREM et médias : dénigrement anti-fonctionnaires

jeudi 30 juillet 2020.
 

He ! Crétin ! Les fonctionnaires te disent... ?

La semaine passée a été l’occasion d’une incroyable séquence de dénigrement anti-fonctionnaires de la part du gouvernement, de la majorité et de leurs médias. Le jour où le gouvernement présentait en conseil des ministres un projet de loi sur la fonction publique, « Le Figaro » faisait opportunément fuiter un rapport de l’inspection générale des finances destiné à traiter ses agents de feignants. D’après ce rapport, ou ce qu’en raconte Le Figaro, 190 000 fonctionnaires travailleraient moins de 35 heures par semaine pour des raisons injustifiées. Un chiffre à comparer avec les 2,4 millions de fonctionnaires de l’État, seuls concernés par ce rapport. Soit 8% des effectifs. Les auteurs du rapport s’enthousiasment : augmenter la charge de travail de ces 190 000 personnes permettrait de supprimer 30 000 postes !

Encore faut-il regarder qui sont ces fonctionnaires pointés du doigt pour leur paresse par toute la bonne société. Et pourquoi ils ne réalisent pas, sur un an, 35 heures par semaine. Il s’agit par exemple des policiers et des CRS. Ceux-ci bénéficient d’un système de jours de repos compensateurs en raison du nombre d’heures de suite qu’ils sont parfois amenés à réaliser. Ce système les conduit à travailler, pour certains d’entre eux, moins de 35 heures par semaine une fois que leur temps de travail est ramené sur l’année. « Le Figaro » pense que les policiers et les CRS sont des tires au flanc ? De même, il y a aussi les 15 000 surveillants de prison travaillant le week-end, la nuit, dans des horaires décalés. Ils ont un régime dérogatoire de temps de travail. La technocratie de Bercy promet-elle de ne venir au boulot que pour bosser pour le pays, comme un flic ou un maton épuisé ?

On ne compare jamais la charge de travail des fonctionnaires avec celle des salariés du privé. On se rendrait pourtant compte que les premiers sont loin d’être les tire-au-flanc décrits dans les médias de l’officialité. 16% des agents de l’État effectuent des astreintes, deux fois plus que dans le secteur privé. Les travailleurs du public sont davantage concernés par le travail du dimanche et le travail de nuit : 36,7% des salariés de la fonction publique travaillent le dimanche contre 25,8% dans le privé. 17,5% travaillent régulièrement de nuit dans le public contre 14,9% dans le privé. 42,8% des fonctionnaires vivent des situations de tension vis-à-vis de leur public, contre 26% des salariés du privé. Les fonctionnaires sont 2 fois plus à avoir été victimes d’une agression verbale ou physique.

Une question n’est pas du tout abordée dans le rapport et les bavardages qu’il a produits. Celle de savoir où il manque des fonctionnaires. C’est pourtant, après une décennie continue d’austérité, la situation dominante dans le pays. Le rapport rendu l’an dernier par Caroline Fiat sur les EHPAD a révélé que pour atteindre un taux d’encadrement suffisant du point de vue de la dignité humaine, il manquait 210 000 soignants. Depuis 2010, 3100 contrôleurs fiscaux ont été supprimés alors que 100 milliards d’euros d’évasion fiscale nous échappent chaque année. Si nous avions plus d’agents pour traquer les voleurs, nous n’aurions plus du tout de déficit public. Mais l’opération de communication organisée conjointement par la haute fonction publique et la presse n’avait pas pour objectif l’amélioration du service public. Elle était destinée à servir les intérêts du gouvernement. Macron lançait officiellement cette semaine sa saignée de 120 000 fonctionnaires. L’accompagnement propagandiste l’a bien entouré.

La semaine dernière, on a beaucoup parlé du financement de la dépendance. Lors du meeting commun que nous avons tenu à Saint-Brieuc, Manon Aubry en a fait un des thèmes centraux de son discours. Notamment pour rappeler que la perte d’autonomie des personnes âgées était devenue pour certain une marchandise très lucrative. Ainsi, le groupe Korian, premier propriétaire de maisons de retraites médicalisées en France, fait une marge de 14%. L’an dernier, il a reversé 48 millions d’euros à ses actionnaires. Bien sûr, cela a un prix. Les EHPAD privés sont en moyenne 50% plus chers que les EHPAD publics. Mais même pour ces derniers, il faut débourser une somme mensuelle souvent supérieure à la retraite du pensionnaire. D’où un reste à charge élevé pour les familles. Si on prend en compte ce reste à charge, les places d’EHPAD qu’il va falloir créer étant donné le vieillissement de la population, les besoins de financement sont considérables.

C’est pourquoi Agnès Buzyn se faisait remettre un rapport sur le sujet, jeudi 28 mars. Mais peu importe son contenu, le gouvernement a déjà décidé que le partage des richesses ne faisait pas partie des options sur la table. Les pauvres paieront pour les pauvres. On s’en souvient, la première proposition de la majorité est celle qui vient de Stanislas Guérini, le délégué général de LREM. Il s’agit de faire travailler les Français gratuitement un jour férié. Cela équivaut à une taxe de 100 euros par an et par travailleur. On sait combien rapporte une journée de travail gratuit puisqu’il y en a déjà une depuis 2004. Elle ramène dans les caisses 2,4 milliards d’euros chaque année. Le rapport rendu à Agnès Buzyn s’efforce de trouver 10 milliards d’euros en plus. Supprimer un jour férié pour en faire de travail gratuit n’est donc même pas une solution miracle sur le plan budgétaire. Il faudrait non pas un mais quatre jours de travail gratuit pour que le compte y soit.

La ministre des Solidarités et de la Santé a proposé une autre méthode, tout aussi injuste et anti-sociale. Lors de la remise du rapport, elle s’est adressé aux Français pour leur dire qu’il « faudra travailler un peu plus ». Elle parle ici d’allonger la durée de cotisations nécessaire pour partir à la retraite. Dans l’année qui vient, on peut donc prévoir que le droit à la retraite va être frappé deux fois. D’abord, la mise en place d’une retraite par points va fragiliser le niveau des pensions et obliger à travailler plus longtemps pour conserver un niveau de vie acceptable. Ensuite, la réforme du financement de la dépendance va passer par un recul de l’âge de départ en retraite, quel qu’en soit la méthode – âge légal ou cotisations. Mais c’est une politique de gribouille qui ne fera que boucher un trou à un endroit en en creusant un à un autre. Car la principale conséquence observée du recul du droit à la retraite est l’augmentation du chômage des séniors. Et donc une aggravation des comptes de l’assurance chômage.

Pour financer des conditions de vie décentes pour les personnes concernées, la solution consiste, comme toujours, à partager. Ainsi nous avons proposé à l’Assemblée nationale de mettre le capital à contribution. Par exemple en taxant les retraites par capitalisation à 2% ou en créant une cotisation sur l’ensemble des dividendes à hauteur de 0,5%. Une telle contribution permettrait à elle seule de créer 10 000 places d’EHPAD supplémentaires par an. Une autre piste de financement pour la dépendance et, plus généralement, pour la Sécurité sociale est la lutte contre la fraude aux cotisations patronales. Aujourd’hui, les contrôles sont très insuffisants. En mettant les moyens, il devrait être possible de récupérer rapidement 5 milliards d’euros.

Il faut assumer une augmentation de la dépense sociale pour les EPHAD. On connait aujourd’hui les conditions déplorables de travail pour le personnel et de vie pour les pensionnaires. Caroline Fiat, qui a été aide-soignante en EHPAD avant d’être élue députée a produit un rapport référence sur le sujet. Dans celui-ci, elle estime à 210 000 personnes le nombre de recrutements nécessaires à terme. Un tel recrutement serait évidemment un coup de fouet sans pareil pour la relance de la consommation populaire responsable. Donc pour les carnets de commande. Il serait donc générateurs d’autres milliers d’emplois. Tel est notre cercle vertueux. Le soin des autres ameliore la vie de tous.


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