Quels sont les liens entre le RN et les groupuscules d’extrême droite ?

mardi 25 juillet 2023.
 

Nous abordons ici une thématique qui est peu traitée par les médias et les forces politiques de gauche : les liens possibles entre le RN et les groupuscules d’extrême droite dont certains peuvent se révéler violents.

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D’une part on relate des manifestations d’extrême droite dont certaines peuvent être violentes, des menaces de mort, des actions coup de poing contre des militants de gauche et d’autre part on relate les impostures sociales et économiques du RN comme le fait par exemple « L’observatoire de l’extrême droite » sur le site de l’Insoumission :

https://linsoumission.fr/category/t...

Mais existe t-il un lien organique entre ces groupuscules et le RN ?

Dénoncer des actions violentes des groupuscules d’extrême droite a-t-il un impact sur l’électorat RN ? Comment le RN réagit-t-il aux manifestations de ces groupuscules d’extrême droite et quelle image veut renvoyer à la population ce dernier ?

Nous avons sélectionné quelques textes pour répondre à ces questions. Mais avant toute chose, il faut savoir que d’extrême droite n’est pas un bloc idéologique homogène et qu’elle est constituée de différentes mouvances d’évolutions historiques spécifiques comme le montre l’article rédigé par Jean Yves Camus dans l’Encyclopedia universalis et dans l’article « Extrême droite » figurant dans Wikipédia. Cette diversité n’empêche pas l’existence d’une communauté de « valeurs » attachement à l’ordre, culte du chef, conception organiciste de la société, nationalisme, etc. Le nazisme et le fascisme sont deux composantes de l’extrême droite mais celle-ci ne se réduit pas à ces deux composantes dont le poids historique a été très important.

Remarquons que les articles qui suivent se développent dans un contexte où les agents médiatiques et politiques de la classe dominante veulent renvoyer l’image d’un RN non-violent et républicain et au contraire image d’un mouvement violent suscitant la violence pour la France Insoumise.

Comme l’a montré avec éclat l’élection législative partielle de l’Ariège, il existe en France non pas trois blocs : le bloc bourgeois, le bloc d’extrême droite et le bloc de la nouvelle union populaire mais seulement 2 blocs : un bloc au service du Capital LR, les « dissidents » du PS les macroniens, le RN) et le bloc de rupture avec le capitalisme : la NUPES, le NPA, LO.

Toutes les composantes du bloc procapitaliste utilisent les mêmes termes pour diaboliser les composantes du second bloc notamment LFI

Nous analyserons dans un article ultérieur comment les ultralibéraux en France mais aussi en Europe parfaitement conscients de leur future destruction électorale préparent leur relève en propulsant l’extrême droite. Les stratégies utilisées à cet effet sont redoutables et pour l’une d’entre elles d’une incroyable perfidie.

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Premier article. Ultradroite  : "Marine Le Pen se démarque de la radicalité violente, qui est un poison électoral".

Dédiabolisation bis

Source : le magazine Marianne

https://www.marianne.net/politique/...

Propos recueillis par Paul Conge

Publié le 23/12/2022 à 6:00

Dans un courrier à Matignon, Marine Le Pen, cheffe des députés du Rassemblement national (RN), demande la dissolution des « groupuscules extrémistes », quelques jours après les violences perpétrées par des bandes d’ultradroite à la suite de la demi-finale France-Maroc. Nicolas Lebourg, spécialiste de l’extrême droite, déchiffre cette tentative de « déradicaliser » le RN.

Moins d’une semaine après des agressions de supporters du Maroc par des militants d’extrême droite, Marine Le Pen fait une nette tentative de se dissocier de ces groupuscules violents. Dans un courrier adressé le 20 décembre à la Première ministre, Élisabeth Borne, la patronne des députés du Rassemblement national (RN) réclame la dissolution des « groupuscules extrémistes » et ce « quel que soit leur profil politique », déplorant leurs « multiples violences ». Jamais la députée du Pas-de-Calais n’avait émis un appel aussi clair contre les organisations d’ultradroite, où elle puisait des militants il n’y a pas si longtemps encore. Déchiffrage par Nicolas Lebourg, chercheur et spécialiste de l’extrême droite.

Marianne  : Qui Marine Le Pen a-t-elle dans le collimateur avec sa demande de dissoudre les « groupuscules extrémistes »  ?

Nicolas Lebourg  : Jusqu’ici, Marine Le Pen et le RN demandaient régulièrement la dissolution des groupes antifas et des Black blocs, sachant que ces derniers ne sont pas une structure, mais une tactique violente de convergence de militants d’ultra-gauche. Il s’agissait donc d’une adaptation du discours du Front national (FN) des années 1970 qui, lui, demandait la dissolution des mouvements d’extrême gauche. Néanmoins, Marine Le Pen ajoute là les groupes d’ultradroite en se positionnant donc comme hostile à toutes formes de radicalités violentes. Cette position a pour elle le mérite de la présenter comme défenseuse de l’État de droit contre les groupes violents. Mais c’est politique, et non juridique.

« La violence de droite est souvent motivée par le racisme, qui est un incroyable accélérateur de radicalisation violente »

Les dissolutions doivent être argumentées et circonstanciées pour passer le cap du recours auprès du conseil d’État. Ce dernier avait ainsi invalidé les dissolutions de groupes gauchistes après mai 1968 car l’État était incapable de démontrer leur rôle factuel dans les violences. L’idée d’une grande vague de dissolution de tout ce qui serait radical ne passerait ainsi pas  : c’est une tentation illibérale de croire que l’État peut interdire tout ce qu’il veut en le désignant comme radical, ce n’est pas faisable dans notre État de droit où il existe des garde-fous juridiques.

Cette demande de dissolution intervient quelques jours après la demi-finale France-Maroc, après laquelle des militants d’extrême droite ont été aperçus en nombre dans les rues, certains attaquant, comme à Lyon, des supporters étrangers. Comment interpréter ce geste très politique de la part de la cheffe de file du RN  ?

Des actions violentes organisées avec des dizaines de personnes en plusieurs points du territoire, c’est une montée en puissance notable de l’activisme de droite. En outre, nous en sommes, depuis 2017, à dix actions d’ultradroite de type terroriste empêchées par le travail des services de police. C’est un risque contre lequel déjà Louis Aliot s’était élevé il y a quelques semaines, en soulignant que c’était la thématique dite du « grand remplacement » qui mobilisait ces militants violents. A son tour, Marine Le Pen prend acte qu’il faut se démarquer de la radicalité violente, qui est un poison électoral. Elle le fait en revanche pour sa part sans désigner le lien avec l’argumentaire idéologique, en noyant le tout dans une égalité entre radicalités de droite et de gauche – bref une synthèse entre Aliot et Bardella, un peu à l’image des synthèses que faisait François Hollande.

Est-ce inédit que le RN prenne aussi clairement position contre les marges violentes de sa propre famille politique  ?

Non, pas vraiment  : Marine Le Pen avait été très habile lors des dissolutions de groupes radicaux après la mort du jeune militant antifa Clément Méric en 2013. Elle les avait dénoncés en cherchant à dire que c’étaient eux l’extrême droite. Et que donc elle n’aurait rien à voir avec ce camp et cette étiquette politique. C’est l’argument d’ailleurs encore utilisé  : le RN brandit la haine de certains radicaux de droite à son encontre, par exemple celle de l’hebdomadaire Rivarol, pour dire « ils nous haïssent, nous les combattons ». Il demeure néanmoins bien des ambiguïtés, y compris dans l’analyse  : en 2019, le groupe des eurodéputés RN avait ainsi produit un rapport sur les radicalités de gauche où il présentait la mort de Clément Méric comme relevant d’une responsabilité partagée entre antifas et nationalistes, thèse qui avait été invalidée par le procès sur des bases matérielles.

Il y a peu de temps, les marges de l’extrême droite parfois violentes – du GUD aux identitaires – étaient encore des courroies de recrutement pour le parti de Marine Le Pen. Que reste-t-il aujourd’hui des liens entre le RN et cette extrême droite radicale  ?

Les radicaux ont massivement choisi Éric Zemmour contre Marine Le Pen, comme il y a plus de vingt ans ils avaient choisi Bruno Mégret contre Jean-Marie Le Pen. Idéologiquement, c’est rationnel puisque Eric Zemmour défend une conception ethniciste de la nationalité, comme eux. Ensuite, Reconquête ! est, comme le FN avant la scission mégretiste, un compromis nationaliste. C’est-à-dire que toutes les tendances des extrêmes droites peuvent y cohabiter. Au FN, cette règle a été abandonnée après la scission au bénéfice d’une allégeance à la présidence. Les radicaux sont donc plus à l’aise chez Zemmour qu’au RN. Ceci dit, les prestations des campagnes numériques de la campagne des européennes de Jordan Bardella et de la campagne présidentielle de Marine Le Pen en 2022 ont encore été confiés à des membres de la « GUD Connexion », ce qu’il y a de plus radical.

Dans sa requête à Matignon, Marine Le Pen vise aussi bien l’extrême droite violente que les groupes écologistes et antifascistes qui, eux, prônent des actions allant de la désobéissance civile à la violence militante. Cela a-t-il du sens de les renvoyer dos à dos  ?

L’ultra gauche a été en capacité d’exercer des violences de rue massives par exemple dans le cadre de la loi Travail en 2016, mais il n’y a pas eu de tentation terroriste comme à l’ultra droite avec des projets d’attentats meurtriers. Entre 1986 et 2016, nous avions relevé, avec la chercheuse Isabelle Sommier, 1305 actions violentes de droite pour 933 de gauche. La violence de droite s’avérait plus inter-personnelle  : il y avait par exemple 299 agressions commises par la droite contre 40 par la gauche. Une ligne de fracture comportementale oppose les deux bords, avec une priorité donnée aux cibles matérielles ou d’État, à gauche, et contre les personnes civiles, à droite. En forçant le trait  : la droite pose des problèmes judiciaires individuels quand la gauche constitue un problème de maintien de l’ordre public. Si on pense en termes de létalité, les choses sont nettes  : depuis 1986, quand la radicalité de gauche fait un mort, la radicalité de droite en fait dix. La raison en est simple  : la violence de droite est souvent motivée par le racisme, qui est un incroyable accélérateur de radicalisation violente. Comparer est donc utile et nécessaire, mais l’assimilation des phénomènes est un non-sens statistique, intellectuel, et en termes de politique de maintien de l’ordre.

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Commentaire HD

L’utilisation du terme « ultra gauche » est floue et ne permet pas d’identifier le courant politique dont on parle. D’autre part, assimiler la totalité des Black blocks à des militants de « ultra gauche » est pour le moins abusif car l’identité exacte de ces éléments n’est jamais révélée au public pour des raisons qu’il est facile d’imaginer.

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Deuxième article. Manifestation d’extrême droite : quatre questions sur le Comité du 9 mai, autorisé à défiler dans les rues de Paris ce week-end

Source : France Info

https://www.francetvinfo.fr/politiq... jacobelli_5815778.html

Laurent Jacobelli, député de la Moselle et porte parole du Rassemblement national. (RN).

C’était gênant, dérangeant et même contraire à nos principes de voir des gens cagoulés défiler : la loi l’interdit et la loi doit être respectée", réagit mardi 9 mai sur franceinfo Laurent Jacobelli, député de Moselle et porte-parole du Rassemblement national (RN). Face à la polémique provoquée par un défilé de plusieurs centaines de militants d’ultradroite samedi 6 mai, le gouvernement va désormais interdire toutes les manifestations de cette mouvance. "Toute manifestation qui pourrait amener de la violence est interdite en France", poursuit Laurent Jacobelli, "les préfets prendront leurs responsabilités. Il faut respecter la liberté de manifester mais aussi condamner des mouvements qui pourraient être violents".

Laurent Jacobelli réfute par ailleurs toute proximité entre le RN et ces militants : "Est-ce que vous croyez qu’il y a quelque chose de commun entre les gens qui ont défilé et les parlementaires, les maires du RN ? (...) Si vous voulez trouver des connexions, regardez du côté de La France insoumise et des blacks blocs (...) vous ne trouverez pas ça de notre côté", répond le député. "Nous sommes des gens raisonnables, le RN est un parti de gouvernement et il n’y a aucune comparaison à faire entre les mouvements que nous avons vus dans les rues et le travail que nous faisons".

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Commentaire HD :

Assimiler des Black blocks à des militants de LFI ne repose sur aucun fait. On voit d’ailleurs très mal des militants insoumis caillasser des véhicules de la CGT comme on a pu le voir avec les Black blocks.

Comme nous nous ne cessons de le répéter : le flou est une arme de la manipulation de masse. Réciproquement, le flou ou l’imprécision non volontaire d’un militant ou d’un responsable insoumis dans son jugement sera exploitée par ses adversaires politiques.

Un militant insoumis de haut niveau associe à sa radicalité politique une grande précision de sa pensée.

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Troisième article « Le RN n’a rien à perdre politiquement en demandant la dissolution des groupuscules d’extrême droite » (Jean-Yves Camus)

Source : Le Figaro. 27/12/2022

https://www.lefigaro.fr/vox/politiq...

ENTRETIEN - Dans un courrier, Marine Le Pen a demandé à Elisabeth Borne de « dissoudre » les « groupuscules extrémistes », « quel que soit leur profil politique ».

Pour le chercheur associé à l’Iris Jean-Yves Camus, en ciblant notamment l’ultra-droite, le RN poursuit sa stratégie de normalisation.

Chercheur associé à l’Iris, Jean-Yves Camus dirige l’Observatoire des radicalités politiques de la Fondation Jean-Jaurès (think-tank).

LE FIGARO. - Dans un courrier adressé le 18 décembre à la première ministre, Marine Le Pen réclame la dissolution de « groupuscules extrémistes », de droite comme de gauche. Comment interpréter cette stratégie ?

Jean-Yves CAMUS. - Cette stratégie répond à la demande de constitution d’une commission parlementaire d’enquête sur les groupuscules d’extrême-droite, formulée récemment par certains députés Nupes. Marine Le Pen dit, en creux, qu’il ne s’agit pas d’enquêter, comme les députés l’ont déjà fait en 2019, mais d’agir, ce qui incombe au gouvernement. Et pas seulement contre l’extrême droite comme le voudrait une partie de la Nupes : contre toutes les radicalités politiques qui peuvent être dans le champ d’application de l’article L.212-1 du Code de la sécurité intérieure soit, pour faire court : l’ultra-gauche, l’ultra-droite et l’islam radical, lorsqu’ils utilisent la violence, veulent renverser les institutions ou incitent à la haine et la discrimination sur la base du genre, de l’orientation sexuelle, de l’appartenance ethnique ou religieuse. C’est d’ailleurs ce que le gouvernement fait depuis 2017, puisqu’il a dissous 15 associations islamistes radicales ; 5 appartenant à l’extrême ou l’ultra-droite et 2 appartenant à l’ultra gauche, dont une a obtenu la suspension de la mesure par la justice administrative. Alors, pourquoi lui demander d’agir ? D’une part pour tenter de tracer, dans l’opinion publique, une ligne de séparation claire entre le RN et l’extrême droite. D’autre part pour accréditer l’idée que si on traque l’extrémisme, il ne faut pas se focaliser sur l’extrême droite, dont parlent beaucoup les médias et la gauche, mais faire davantage encore contre l’islam radical et beaucoup plus contre l’extrême gauche.

Pointer du doigt les groupuscules d’extrême droite, est-ce l’aboutissement de la stratégie de dédiabolisation du RN ?

L’habileté de MLP consiste à ne pas pointer du doigt l’extrême droite et elle seule : ses militants et nombre de ses électeurs ne le comprendraient pas. Elle demande aussi, en creux, au ministre d’agir contre l’extrême gauche et les antifascistes radicaux, ce qui est un thème assez populaire chez la base militante du RN. Mais c’est vrai, sa demande est une étape du processus de normalisation qu’elle fait suivre à son parti. Et le RN comme elle-même, personnellement, étant vilipendés depuis 2011, avec une acrimonie croissante, par tous ceux qui se situent à leur droite, elle pense sans doute avec raison que perdre les voix des militants ultras, c’est bien peu au regard de ce qui lui importe vraiment : gagner des voix qui consolident le vote du « bloc populaire » pour 2027.

C’est aussi une manière d’inviter son concurrent, Reconquête, à prendre les mêmes distances ou à passer pour le point de chute logique des radicaux.

Sur le plan politique, qu’a-t-elle à y gagner ou y perdre ? Ces groupes ne représentent pas grand-chose…

Le ministère de l’Intérieur estime à 3500 le nombre de militants d’ultra-droite. Même en y ajoutant la frange la plus radicale des militants du RN qui n’est pas partie vers des scissions comme le Parti de la France, la perte éventuelle des voix est infime, elle ne fait pas bouger un scrutin. La perte électorale est nulle et le gain d’image est fort. MLP ne demande pas l’interdiction de groupes d’extrême droite parce qu’ils représentent du monde mais pour montrer que son parti appartient à une famille idéologique radicalement, c’est le cas de le dire, différente deux, que le tronc commun qui existait de la naissance du FN en 1972 jusqu’à son arrivée en 2011, est définitivement coupé. C’est aussi une manière d’inviter son concurrent, Reconquête, à prendre les mêmes distances ou à passer pour le point de chute logique des radicaux.

Le RN peut-il ainsi espérer couper l’herbe sous le pied à LREM ou à des mouvements comme le Printemps républicain pour qui « les extrêmes de gauche et de droite se « rejoignent » ?

Laurent Bouvet, trop tôt disparu, ne disait pas exactement cela. Il avait inventé le concept de « tenaille identitaire » pour décrire la situation où l’universalisme et la laïcité, attaqués par l’islam radical, doivent aussi faire face, par une sorte de choc de retour, à la crispation d’une certaine droite sur une définition ethnoculturelle de l’identité française. Cette forme de fausse réponse à la menace islamiste existe. Pour autant, le Printemps républicain, auquel je n’appartiens pas, parle dans son Manifeste « d’attaques convergentes » contre la République, pas d’identité de nature entre les extrémismes, même si certaines individualités ont à tort utilisé les concepts polémiques d’islamo-fascisme et d’islamo-gauchisme, qui sont des pièges tendus à ceux qui veulent saisir les spécificités historiques et philosophiques du totalitarisme que constitue l’islamisme politique. Sans compter qu’évoquer une identité de nature entre les extrémistes implique souvent la mise en en équivalence tous les « fondamentalismes » religieux, comme si les disciples de feu Mgr. Lefebvre avaient commis, ou même projeté, des attentats sur le sol français !

Marine Le Pen n’a pas pour objectif de couper l’herbe sous le pied du Printemps républicain, qui n’est pas un parti politique et est peu connu du grand public. Elle peut par contre vouloir montrer que le gouvernement n’en fait pas assez contre l’islamisme et l’extrême gauche mais ce faisant, c’est la frange droite de LR qu’elle veut attirer. En fait, elle veut faire passer le message que Jérôme Sainte-Marie délivre dans le dernier numéro du magazine Causeur : « Le RN n’est ni extrême, ni de droite ».

Jean-Yves Camus : « Le vote RN possède une dimension de classe qui rend peu audible l’union des droites »

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Quatrième article. L’extrême-droite et la violence politique

Retour sur la période 1962-2010

Stéphane François

Dans Humanisme 2016/4 (N° 313), pages 51 à 56¬

Sources Internet : Cairne info

https://www.cairn.info/revue-humani...

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Cinquième document : rapport d’enquête parlementaire sur les groupuscules d’extrême droite en France. Remis le 6 juin 2019

Nous présentons ici un extrait du rapport d’enquête parlementaire sur les groupuscules d’extrême droite concernant les liens entre ces groupuscules et le RN.

En annexe, nous reproduisons un plus large extrait du rapport concernant les actions de ces groupes d’extrêmes droites.

https://www.assemblee-nationale.fr/...

4. Des liens avec le Rassemblement national

Les auditions de la commission d’enquête ont confirmé que les groupuscules d’extrême droite ont bien des liens avec le Rassemblement national.

Lors de son audition M. Nicolas Lebourg, historien, chercheur à l’université de Montpellier, a évoqué le fait qu’« aujourd’hui, les radicaux ne sont pas dans le parti : ils sont prestataires de services ». Ces actions vont passer par l’aide à l’organisation d’événements, notamment par des actions de communication, de soutien logistique ou en assurant le service d’ordre.

Il est donc possible de caractériser ces liens : si la stratégie de « dédiabolisation » voulue par Marine Le Pen à partir de son accession à la présidence du parti en 2011 a conduit à l’écartement de nombreux radicaux, ils restent en gravitation autour du Rassemblement national.

Certains anciens membres de Génération identitaire sont même devenus des collaborateurs de personnalités du parti : Damien Lefèvre, plus connu sur les réseaux sociaux sous son pseudonyme de Damien Rieu, est devenu le collaborateur parlementaire de Gilbert Collard. Il comparaîtra le 11 juillet devant un tribunal pour « activités exercées dans des conditions de nature à créer dans l’esprit du public une confusion avec l’exercice d’une fonction publique », suite à l’affaire de la fermeture de la frontière franco-italienne au col de l’Échelle en avril 2018 ([32]).

Les liens interpersonnels entre certains des militants des groupuscules d’extrême droite et des responsables RN ont été montrés par le documentaire « Generation Hate » de la chaîne Al Jazeera. On y voit notamment des membres de la section de Lille de Génération identitaire converser avec des députées européennes affiliées au RN dans le bar associatif identitaire de La Citadelle.

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Sixième article. Marine Le Pen est-elle d’extrême droite ? Voici 30 de ses prises de position qui ne laissent aucun doute.

Source : Radio France

https://www.radiofrance.fr/francein...

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Conclusion et commentaires HD

La direction du RN dans sa politique de « normalisation » dénonce et réprouve les actions violentes et légales extrêmes droites et affirme n’avoir aucun lien avec eux.

S’il est bien évident que le RN n’a aucun intérêt pour son image électorale à conserver en son sein des éléments violents il n’en reste pas moins vrai que ce parti a conservé et conserve des liens organiques avec un certain nombre de ces groupuscules.

Il reste silencieux sur la nature de l’idéologie véhiculée par ces groupuscules dont il partage en grande partie les positions idéologiques.

Le RN se défend d’être un parti d’extrême droite pour tracer une ligne rouge entre lui et ses groupuscules qualifiés d’ultradroite ou d’extrême droite.

Le sixième article précédent rappelle bien que les positions du RN sont bien celles d’un parti d’extrême droite

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Mais que se passerait-il si le RN arrivait au pouvoir ?

Il n’est pas irréaliste de penser que ces groupuscules satellites et qui lui sont liés pourraient prendre plus d’importance et être une arme de répression violente contre des organisations contestataires et notamment de gauche.

Quelques-uns de ces groupuscules s’attellent à identifier les opinions politiques d’un certain nombre de citoyens et de les localiser par leur adresse comme l’a signalé le site Insoumission.

Mais Macron et le conseil d’État ont préparé le travail par les décrets du 2 décembre 2020 élargissant les possibilités de fichage des Français à partir de leurs opinions politiques et religieuses.

Voir la question posée au Sénat sur ce décret :

https://www.senat.fr/questions/base...

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Annexe

Rapport de la commission d’enquête sur la lutte contre contre les groupuscules d’extrême droite. Extrait.

https://www2.assemblee-nationale.fr...)/55210

https://www2.assemblee-nationale.fr...)/RapEnquete

https://www.vie-publique.fr/rapport...

https://asus.com/FR/supportonly/ET2...

I. LES GROUPUSCULES D’EXTRÊME DROITE REPRÉSENTENT UNE MENACE RÉELLE POUR LA RÉPUBLIQUE QU’IL NE FAUT PAS SOUS-ESTIMER

A. LA MENACE DES GROUPUSCULES D’EXTRÊME DROITE EST À CONSIDÉRER SUR UN TRIPLE PLAN : LE RISQUE TERRORISTE, LE RISQUE DE VIOLENCES, LE RISQUE POUR LA PAIX SOCIALE […]

1. Le risque terroriste

La menace terroriste ne concerne à l’heure actuelle qu’une petite fraction des militants des groupuscules d’extrême droite. Elle ne doit toutefois pas être prise à la légère. Des projets d’attentat sont parfois déjoués : ainsi un groupuscule violent avait-il ciblé Jean-Luc Mélenchon et Christophe Castaner ([3]).

Le risque terroriste existe sous deux aspects.

La première possibilité est celle de groupes aux effectifs très réduits (environ une dizaine de personnes), de type survivaliste. Le passage à l’acte potentiel s’inscrit dans une vision de la société belliciste : ces groupes se considèrent en guerre contre le péril étranger, et comptent riposter. Ils se positionnent notamment en réaction aux attentats islamistes que la France a connus ces dernières années.

Le deuxième risque consiste dans la figure de celui qu’on nomme « loup solitaire », sans qu’il le soit véritablement. La capacité d’un individu seul à passer à l’acte réside dans les contacts qu’il a entretenus précédemment avec des groupes. C’est par exemple le cas de Maxime Brunerie qui a fréquenté les milieux d’ultra-droite (en particulier le groupuscule Unité radicale) avant de commettre sa tentative d’assassinat contre le président de la République Jacques Chirac le 14 juillet 2002. Plus récemment, un habitant d’Aix-en-Provence, néo-nazi, a été interpellé le 29 mai 2019 : il avait déclaré sur les réseaux sociaux envisager de faire « un carnage » au cours du dîner du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF) à Marseille le 3 juin ([4]).

2. Le risque de violences

On s’attardera dans cette section spécifiquement sur les violences physiques et les violences contre les biens.

Les violences commises par les groupuscules d’extrême droite ont atteint un degré d’intensité préoccupant. Plusieurs personnalités politiques, du groupe parlementaire La France insoumise et d’autres groupes, sont visées régulièrement par des menaces de mort et de viol. Ainsi qu’il a été rappelé dans l’exposé des motifs précédant la proposition de résolution qui a été à l’origine de cette commission d’enquête, pour les seules années 2017 et 2018, on a pu constater les faits suivants :

– le 30 juin 2017, dégradation du local de l’association réseau accueil insertion Hérault (RAIH) à Montpellier par des membres de la Ligue du Midi ([5]) ;

– le 16 mars 2018, attaque du lycée autogéré de Paris par des individus armés de barres de fer se réclamant du Groupe union défense (GUD), faisant des saluts nazis et proférant des insultes homophobes, et blessant deux élèves ([6]) ;

– le 22 mars 2018, à la faculté de droit de Montpellier, un commando extrémiste d’une dizaine de personnes cagoulées et armées de matraques et de bâtons ont frappé des étudiantes et des étudiants qui occupaient un amphithéâtre pour protester contre la loi relative à l’orientation et à la réussite des étudiants ([7]) ;

– le 26 mars 2018 à Lille, agression d’étudiants en marge d’une assemblée générale par un groupe de militants d’extrême droite ([8]) ;

– le 28 mars 2018, attaque de six étudiantes et étudiants sur le campus universitaire de Strasbourg par un groupe d’individus agissant au nom du Bastion social ([9]) ;

– le 6 avril 2018, plusieurs personnes cagoulées, habillées de noir, casquées, armées de bâtons et de barres de fer ont tenté de s’introduire dans l’université de Tolbiac à Paris pour passer à tabac les jeunes qui occupaient le bâtiment ([10]) ;

– le 10 mai 2018, agression d’étudiantes et d’étudiants mobilisés du site Malesherbes de l’université Paris-Sorbonne par un groupe d’une vingtaine de personnes afin de tenter de lever le blocage ([11]) ;

– le 8 septembre 2018, devant le bar « L’Opiddum » ouvert par le Bastion social à Clermont-Ferrand, agression violente de quatre passants par des militants et sympathisants ; ils ont notamment infligé 60 jours d’interruption temporaire de travail à l’une de leurs victimes ([12]).

Du recensement de ces différentes agressions, on peut retenir qu’elles concernent l’ensemble du spectre des groupuscules d’extrême droite, aussi bien les petites organisations que les structures plus grosses telles que Génération identitaire ou la Ligue du Midi. Cette violence se caractérise aussi bien par des agressions physiques que par des destructions de biens (comme dans le cas de la dégradation du local de l’association RAIH).

À l’aune de ces menaces, la présidente ne peut que se féliciter de la dissolution du Bastion social, décidée par le président de la République par décret en conseil des ministres le 24 avril 2019.

Par leur violence, les membres des groupuscules sont susceptibles de nuire gravement à l’ordre public, comme en témoigne l’investissement de certains membres de groupuscules dans les événements du 1er décembre 2018 à Paris, particulièrement autour de l’Arc de Triomphe. A été confirmée la présence dans les parages d’Yvan Benedetti, porte-parole du Parti nationaliste français, et qui se considère comme président de l’Œuvre française, groupe pourtant dissous en 2013 notamment suite à l’assassinat du militant Clément Méric ([13]). Le groupe des Zouaves Paris s’est également rendu responsable de violences ce jour-là ([14]).

3. Le risque pour la paix sociale

On examinera successivement la contestation des institutions de la République et la commission d’actes et de discours à caractère haineux.

Les groupuscules d’extrême droite ont en commun, ainsi qu’il a été indiqué, une détestation des institutions républicaines, notamment dans ses dimensions de laïcité et d’intégration. Ce faisant, certains groupuscules n’hésitent pas à usurper les fonctions régaliennes, prérogatives de l’État. Génération identitaire en est le parfait exemple : au col de l’Échelle en avril 2018, ils ont fermé symboliquement la frontière franco-italienne, en dissuadant les migrants venus d’Italie de pénétrer sur le territoire ([15]). Ils portaient dans cette opération des blousons bleus dont la couleur est proche de celle de l’uniforme des forces de l’ordre. Un autre exemple significatif est leur action en Méditerranée avec le bateau C-Star en juillet 2017, au cours de laquelle ils ont repéré des embarcations de migrants, et une fois que ceux-ci avaient été interpellés, ont coulé les navires ([16]). Enfin, ils se sont également rendus responsables de patrouilles dans les métros de certaines grandes villes, en particulier à Lille, contre les délinquants. Cette usurpation de fonctions publiques est aux yeux de la présidente inadmissible et à condamner avec fermeté.

L’autre aspect, la commission d’actes et de discours à caractère haineux, est également l’autre point de rassemblement des idéologies de cette mouvance. Sur ce sujet, les groupuscules empruntent des théories à relent xénophobe, telles que le grand remplacement auquel ils adhèrent tous, soit pour le constater, soit pour l’ériger en programme politique. Leurs idéologues ont été plusieurs fois condamnés par la justice pour des motifs de discrimination raciale ou antisémite, tels Alain Soral ou Renaud Camus. Ensuite et surtout, à l’intérieur de ces groupes, à la tête comme à la base, on retrouve chez nombre d’adhérents un racisme et un antisémitisme à peine voilés. Les exemples sont multiples : Steven Bissuel, président du Bastion social, a ainsi été condamné pour une caricature antisémite qu’il avait diffusée sur son compte Twitter ([17]). Un reportage intitulé « Generation Hate » diffusé en décembre 2018 par la chaîne Al Jazeera laisse voir certains militants de Génération identitaire présents dans le bar identitaire La Citadelle à Lille évoquer leur haine islamophobe, jusqu’à imaginer aller faire un carnage dans une mosquée ([18]).

B. CES ORGANISATIONS SONT STRUCTURÉES, PRÉPARÉES À SE DÉFENDRE PAR TOUS LES MOYENS LÉGAUX, ET ONT DES LIENS AVEC DES PARTIS POLITIQUES TRADITIONNELS

1. Des groupes organisés et préparés

La galaxie des groupuscules d’extrême droite est faite de structures plus ou moins élaborées. Nombre d’entre elles sont d’une dimension réduite, tout au plus une dizaine de personnes. Toutefois les plus importantes, telles que Génération identitaire, disposent d’une force de frappe certaine qui va se matérialiser ponctuellement par des opérations de grande envergure. À preuve, pour l’opération du col de l’Échelle en avril 2018, Génération identitaire a disposé de deux hélicoptères, de drones, de renforts venus de l’étranger (Allemagne, Italie, Hongrie, Danemark, Autriche), tout en communiquant massivement sur les réseaux sociaux. Pour leur opération en Méditerranée avec le bateau C-Star, ils ont été capables de lever plus de 150 000 euros via la plateforme de financement participatif WeSearch, utilisés pour la location du navire.

Par ailleurs, l’organisation des groupuscules d’extrême droite se donne à voir dans la maîtrise d’internet, et ce à plusieurs niveaux. Tout d’abord, les sites d’information de la fachosphère donnent une caisse de résonnance très importance à leurs idées. Ainsi que l’a déclaré au cours de son audition M. Tristan Mendès France, enseignant au Celsa, maître de conférences associé à Paris Diderot, Égalité et Réconciliation est le premier blog politique français, avec une audience comprise entre 5 et 7 millions de visiteurs par mois. Plusieurs autres ont une influence décisive dans le milieu de l’ultra-droite : Riposte laïque, Boulevard Voltaire, Polémia, Fdesouche ou encore Novopress. Les groupuscules d’extrême droite trouvent dans ces sites parfois une tribune pour leurs dirigeants et à tout le moins une plateforme où leurs idées délictueuses sont exprimées.

Plus encore, de nombreux groupes utilisent les réseaux sociaux pour leur propagande. Leur action peut très bien être ouverte au grand public, comme les pages Facebook de Génération identitaire (aujourd’hui fermées) ou de la Ligue du Midi. Cependant, ils peuvent avoir envie d’évoluer sur les réseaux de manière semi-clandestine, en formant des groupes fermés sur des réseaux alternatifs, tels que VKontakte, réseau social russe. On trouve sur cette plateforme de nombreuses mouvances de la galaxie de l’ultra-droite : Égalite et Réconciliation, la communauté de Démocratie participative, mais également des organisations comme Blood & Honour avec ses différentes branches nationales, et même des groupes se revendiquant de Combat 18, organisation néo-nazie armée dont le président de la République vient récemment d’annoncer la procédure de dissolution le 20 février 2019 lors du dîner du CRIF.

Enfin, les groupuscules d’extrême droite ont déjà manifesté à plusieurs reprises la volonté de se coordonner. En audition, le ministre de l’intérieur M. Christophe Castaner a ainsi rappelé que durant l’automne dernier, M. Yvan Benedetti a tenté de constituer un rassemblement de diverses tendances de l’ultra-droite, « une nationale de la lutte », dans le contexte du mouvement social des Gilets jaunes. Un autre exemple peut être fourni par la rencontre l’été dernier à Montpellier entre la Ligue du Midi, Génération identitaire et le Bastion social, aujourd’hui dissous. Par ailleurs, cette volonté de coordination existe également à l’échelle continentale : l’opération du col de l’Échelle a ainsi été menée par de nombreux militants venus de l’Europe entière. Il est à noter d’ailleurs que l’auteur de l’attentat de Christchurch en Nouvelle-Zélande a payé sa cotisation et fait un virement de 1 000 euros à Génération identitaire.

Dans ces conditions, la présidente ne peut souscrire aux propos du rapporteur selon lesquels « le paysage de l’ultra-droite est caractérisé par une grande fragmentation et des reconfigurations permanentes qui ne permettent pas de valider la thèse de groupes de plus en plus organisés ».

2. Une volonté de paraître respectable

Une particularité récente des mouvements d’ultra-droite réside dans leur volonté de paraître respectables dans le champ politique et militant traditionnel. De manière significative, Génération identitaire se considère elle-même comme un lanceur d’alerte, sorte d’équivalent de Greenpeace à l’opposé du spectre politique, ce malgré toutes les actions répréhensibles et les affaires en cours qui la concernent.

Il en est de même pour la Ligue du Midi. Ses responsables, la famille Roudier, s’attachent à asseoir leur légitimité dans le débat public, en se posant en lanceurs d’alerte contre les dangers de l’immigration et pour la défense de l’identité locale et nationale. Pourtant, il convient de rappeler que Martial Roudier a été condamné à quatre ans de prison en juin 2013, dont deux ans avec sursis, pour avoir poignardé un jeune militant de la mouvance « antifasciste » ([19]). Le même Martial Roudier présidait également, la même année, le comité de soutien à Esteban Morillo, l’auteur du coup fatal porté au militant Clément Méric. Olivier Roudier a été condamné en décembre 2017 à un mois de prison ferme en première instance par le tribunal correctionnel de Montpellier pour dégradations de biens publics en réunion, ainsi qu’à 1 500 euros de préjudice matériel et à 500 euros de préjudice moral à payer à l’association RAIH, pour la dégradation de leurs locaux ([20]).

La présidente tient ici à rectifier la chose suivante : contrairement à ce qui a été dit en audition, ce n’est pas Richard Roudier mais son fils Olivier qui a été condamné en 2012 à de la prison ferme pour avoir réalisé des saluts nazis et proféré des insultes racistes ([21]).

Par ailleurs, la Ligue du Midi, comme d’autres groupuscules comme Génération identitaire, vérifient l’assertion du ministre de l’intérieur M. Christophe Castaner lors de son audition, qui expliquait que les groupuscules aujourd’hui ont une particularité : « ils sont bien accompagnés juridiquement et ils n’hésitent pas à multiplier les procédures, devant la justice et avec un avocat, mais aussi par des changements d’adresses et de présidents ».

3. Une faculté inquiétante à agir

Au cours des investigations de la commission d’enquête, un certain nombre d’interrogations ont émergé vis-à-vis de l’efficacité de la lutte contre les groupuscules d’extrême droite, notamment au vu des faibles condamnations de certains membres coupables d’exactions ainsi que de la faculté à agir dont ils disposent.

Le cas d’Yvan Benedetti est ainsi éclairant. De tous les auditionnés devant la commission d’enquête, il est celui qui a le passé judiciaire le plus fourni. Il a ainsi été condamné à 5 000 euros d’amende avec sursis par le tribunal correctionnel de Paris pour avoir participé le 29 septembre 2012 à une manifestation interdite à Paris ([22]). Le 17 avril 2013, lui et huit autres militants sont interpellés et placés en garde à vue pour avoir tenté de forcer la permanence lyonnaise du Parti socialiste (à l’époque du Mariage pour tous) ; M. Benedetti sera mis en examen pour rébellion et violence volontaire sur personnes détentrices de l’autorité publique, ainsi que pour provocation à la discrimination ([23]). Il a également été poursuivi en février 2015 pour apologie de terrorisme et antisémitisme à la suite de plusieurs tweets faits après les attentats de Paris ([24]). Il a également été condamné en décembre 2015 à 5 000 euros d’amende et 2 500 euros de dommages et intérêts pour avoir traité l’ancien préfet du Rhône, Jean-François Carenco, d’« agent officiel de l’anti-France à Lyon » ([25]). Le président auto-proclamé du groupe dissous l’Œuvre française a été condamné en juillet 2018 en première instance par le tribunal correctionnel de Lyon pour « maintien et reconstitution de ligue dissoute » à 80 jours amende à 50 euros ([26]). Dans cette affaire, le ministère public a requis en appel le 7 mai 2019 6 mois de prison avec sursis et la privation des droits civiques, civils et de famille ([27]).

Il est également à rappeler que devant la commission d’enquête lors de son audition, M. Benedetti a tenu sous serment des propos négationnistes. La commission d’enquête, par l’intermédiaire du rapporteur et de la présidente, a décidé de communiquer au procureur ces propos en vertu de l’article 40 du code de procédure pénale.

Il en est de même pour le groupe Génération identitaire. En octobre 2012, des militants ont occupé le chantier d’une mosquée à Poitiers ([28]). Ils ont notamment déployé sur le toit des banderoles indiquant « Souviens-toi de Charles Martel ! » et « Gaulois, réveille-toi, pas de mosquée chez toi ! ». En juillet 2017, à bord du bateau C-Star, des militants patrouillent en Méditerranée pour repérer des embarcations de migrants, les dénoncer aux autorités puis les couler une fois vides. Au col de l’Échelle en avril 2018, ils ferment symboliquement la frontière franco-italienne en dissuadant des migrants venus d’Italie de venir en France. En octobre 2018, des membres de Génération identitaire prennent d’assaut le siège de SOS Méditerranée ([29]). En mars 2019, ils occupent la caisse d’allocations familiales à Bobigny ([30]).

Par sa manière d’exploiter les zones grises du droit, par sa volonté de court-circuiter la République et par ses messages incitant à la xénophobie, le groupe Génération identitaire semble répondre, aux yeux de la présidente, au critère de dissolution mentionné dans le 6° de l’article L. 212-1 du code de la sécurité intérieure ([31]).

Un dernier exemple concerne la Ligue du Midi dans l’affaire RAIH, dans laquelle la provocation à la haine raciale n’a pas été retenue comme circonstance aggravante. Or la mission d’aide aux jeunes migrants isolés dont s’occupait l’association RAIH n’est pas étrangère aux dégradations dont leur local a fait l’objet.

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Cartographie des groupuscules d’extrême droite en France.

Source : linsoumission 2022

https://linsoumission.fr/2022/05/10...


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