Syndicalisme ( 2 ) LE DIALOGUE SOCIAL EN FRANCE

lundi 19 février 2007.
 

Le 23 octobre 2006, le MEDEF invite les 5 syndicats représentatifs à une rencontre pour parler des sujets suivants : le contrat de travail, la sécurisation des parcours professionnels, l’assurance-chômage.

L’objectif est d’arriver à des constats : un état des lieux commun, un diagnostic partagé.

Cette invitation est étonnante car depuis un an se déroule en catimini des discussions sur les accidents de travail et la pénibilité, et elles ont été bloquées par le patronat. Il semble paradoxal que ce soit le MEDEF qui rassemble les syndicats. Pourquoi ?

Parce que pour le principal syndicat patronal, cette démarche vise surtout à préparer le terrain pour les prochaines échéances électorales de 2007, comme futurs adversaires ou partenaires du pouvoir. Cela entre dans leur logique de la REFONDATION SOCIALE. La CGT a refusé de s’associer à ces commissions de travail.

Les lois Aubry en 1998 (35 heures) avaient provoqué une vraie révolution dans le syndicalisme patronal, et entraîné la démission de Jean Gandoy qui avait déclaré : « un tueur doit me remplacer... » Ce fût le baron Seillières.

La refondation sociale s’enlise alors, mais en 2002, elle est à nouveau à l’ordre du jour avec la réélection de Chirac à la présidence de la République qui satisfait pleinement le MEDEF.

En 2005, le premier ministre Villepin qui a succédé à J.P. Raffarin instaure le CNE*, puis le CPE* qui provoquent la colère des syndicats. Elle aboutit à un puissant mouvement unitaire des organisations étudiantes, d’enseignants et ouvrières en février 2006, qui oblige le gouvernement à retirer le CPE de la loi sur l’égalité des chances.

Ces textes votées sans concertation remettaient profondément en cause le droit du travail. Ils donnaient satisfaction au MEDEF au mépris de la loi sur le dialogue social adoptée deux ans plus tôt. Après cet échec gouvernemental réapparaît le serpent de mer du dialogue social.

Deux rapports importants sont publiés :

1)- Le rapport Chertier : il faut rendre obligatoire une période de concertation de 3 mois avant toute réforme sociale pour associer le patronat et les syndicats à la loi.

Il prévoit un renforcement du rôle du Conseil Economique et Social.

2)- le rapport Raphaël Hadas-Lebel : sur la représentativité et le financement des organisations syndicales.

Les organisations syndicales doivent-être financées par des fonds publics. Ex : le chèque syndical (AXA)distribué aux salariés pour adhérer au syndicat de leur choix.

L’électeur salarié est l’élément désigné de la représentativité.

En fait, derrière cette idée de dialogue se cache un enjeu fondamental :

l’ordre social public 

La loi ou la convention

C’est le fondement du droit du travail qui est interpellé : le principe de faveur : la loi (actuellement) prime sur l’accord de branche ou d’entreprise.

Un accord d’un niveau inférieur ne doit pas déroger à un accord de niveau supérieur.

Ce principe avait déjà été écorné par les Lois Auroux en 1981, par des dérogations.

L’enjeu est de savoir si c’est le suffrage, la loi, qui doit prévaloir ou si c’est la négociation entre partenaires. Cela renvoie à des rapports de force, à des relations inégales - selon les entreprises - entre le Medef et les syndicats de salariés. Le suffrage universel est une garantie que la loi s’applique également pour chaque citoyen en tout lieu, sur tout le territoire. Le contrat d’entreprise ou de branche, signé par un syndicat dit représentatif permettrait de passer outre à la loi. Il accorde la priorité à une négociation en fait faussée par les rapports inégaux ou l’absence de représentativité réelle. Le pouvoir législatif et son exécutif, l’Etat, garantissent l’égalité de tous devant la loi républicaine.

Ainsi Laurence Parisot, Présidente du Medef, a déclaré qu’il fallait réviser la Constitution (article 34).

Remettre ainsi en cause le pouvoir législatif du parlement en matière de droit social et du travail, serait se mettre à la merci du patronat.

L’autre enjeu c’est la représentativité.

Pour asseoir la légitimité, il faudrait que les partenaires sociaux soient légitimement représentatifs.

Or qu’est-ce qui organise ce principe ? Il est fondé sur la loi de 1966 qui reconnaît cinq organisations syndicales comme irréfragables . Elle permet à une seule organisation « représentative » de signer des accords sans le moindre élément d’implantation dans l’entreprise.

La représentativité : elle se mesure certes par le nombre de syndiqués, mais aussi par l’influence auprès des travailleurs dans les élections de leurs représentants. La capacité d’action est plus difficilement mesurable et relève de traditions historiques et de formes de luttes ou de négociations différentes.

Certaines organisations sont peu signifiantes aujourd’hui, comme la CFTC qui ne dépasse pas 50 000 membres, la CGC ( 100 000 ), pour 25 millions de salariés.

Les cinq organisations reconnues et nombre d’adhérents : CFDT (808 581) ; CGT (700 926 en 2005), CGT-FO ( 300 000), CGC,( 100 )000 CFTC ( 80 000).

Alors que sont apparues de nouvelles centrales, comme SOLIDAIRES (93 000), l’UNSA ( 360 000 - 7 % des syndiqués), la FSU ( 1° syndicats de la Fonction publique et de l’enseignement)

Représentativité dans la fonction Publique( 2002-2004) : FSU : 18,94 % ; UNSA : 15,51 % ; CGT : 16,34 % ; FO : 13,70 % ; CFDT : 12,75 % ; CGC : 3,31% ; CFTC : 2,18 %, *(Les enseignants du syndicat autonome unitaire de la FEN, se sont divisés entre les nouvelles centrales de l’UNSA et de la FSU)

Les chiffres des élections prud’homales de 2002 : CGT : 32,1 % ; CFDT : 25 % ; FO : 18 % ; UNSA : 5,01%. Les élections de délégués du personnel en 2004 : CGT : 24,5 % ; CFDT : 22,4 % ; FO : 12,6 % ; CFTC et CGC ensembles : 6,1 %.

Les accords : la loi Fillon permet à un accord d’être majoritaire en fonction du nombre de syndicats représentatifs signataires ; ce qui est aussi contestable. Evidemment, la proposition de faire reposer la représentativité sur le vote rencontre l’opposition de FO, de la CFTC, de la CGC, à l’inverse de la CGT et de la CFDT et des organisations non reconnues encore.

Une proposition pour mesurer la représentativité.

Ce serait de procéder à des élections professionnelles de délégués du personnel, ou des représentants des salariés à la CPAM (Sécurité sociale), le même jour dans toutes les entreprises.

Les accords d’entreprise ou de branches ne pourraient être légalisées que par une majorité désignée par les élections. La loi républicaine resterait prioritaire sur les accords inférieurs, d’entreprise ou de branche.

Le Conseil Economique et Social vient de se saisir de ces importantes questions qui devront trouver une solution conforme aux principes démocratiques si on veut redonner de la légitimité au syndicalisme en France.


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