Il faut augmenter les salaires !

samedi 8 juillet 2023.
 

- D) Augmentation des salaires : le mouvement de grève dont vous n’entendez pas parler (décembre 2021)

- C) Hausse du SMIC, Macron en panique (été 2021)

- B) Augmentez (vraiment) le SMIC !

- A) Pourquoi il faut augmenter les salaires ? (Hervé Debonrivage)

Sarkozy, Hollande, Macron : Salaires en baisse constante (INSEE) !

Augmenter les profits et baisser les salaires, voilà l’oeuvre des néolibéraux

F) « Augmentez les salaires, pas les actionnaires » : Matthias Tavel (LFI) démolit le gouvernement et le RN

E) Je vous explique pourquoi votre salaire n’augmente pas ! (François Ruffin juillet 2022)

D) Augmentation des salaires : le mouvement de grève dont vous n’entendez pas parler (décembre 2021)

Pour accéder à cet article, cliquer sur le titre D en bleu ci-dessus.

C) Hausse du SMIC, Macron en panique (été 2021)

Hadrien Toucel et Julie Garnier du Groupe thématique « Emploi et travail » vous présentent une nouvelle formation sur la hausse du SMIC.

Pour visionner cette video, cliquer sur l’adresse URL portée ci-dessous :

https://www.youtube.com/watch?v=YoS...

B) Augmentez (vraiment) le SMIC !

Stupeur ! Une députée macroniste dit devoir « manger plus souvent des pâtes » et même « ressortir des vêtements de la cave » depuis qu’elle a été élue ! Mais dans quel monde vivent-ils ?

Voyons le bon côté des choses, cette députée sera sans doute d’accord pour dire qu’il faut augmenter le SMIC ! Et pour dénoncer la hausse minimale et automatique de 1,24% annoncée pour le 1er janvier sans aucun coup de pouce du gouvernement ! Car si elle n’arrive pas à boucler son budget avec 5 782 euros net par mois, comment font les 3 millions de salariés au SMIC, touchant un salaire de 1150 euros net par mois à condition d’être à temps complet ? Cela concerne plus de 10% des salariés du privé en France, quasi exclusivement ouvriers et employés, souvent plus jeunes et davantage à temps partiel que les autres salariés. Sans oublier les intérimaires, les salariés agricoles, ceux du public. Et tous les salariés dont le salaire est directement ou indirectement soutenu par une hausse du SMIC via un effet « de diffusion » démontré à plusieurs reprises par des études économiques. S’attaquer au SMIC, c’est s’attaquer aux salariés déjà les plus précaires.

Le SMIC est pourtant la prochaine cible de M. Macron. Le plan est connu : on charge un idéologue déguisé en économiste pour rendre un rapport brutal et permettre au gouvernement de présenter un vrai recul comme un « moindre mal » par rapport au-dit rapport. Le rapport rendu début décembre par Gilbert Cette est fait pour créer une ambiance. Cet homme a été nommé dans ce but : ses positions anti-SMIC étaient connues de longue date. Il propose ni plus ni moins le refus de tout coup de pouce et, pire, la fin de toute revalorisation automatique SMIC : perte de pouvoir d’achat garantie. Le ministre Le Maire a beau jeu de dire qu’il ne veut pas remettre en cause l’indexation sur l’inflation. Elle est au plus bas. Et cela ne l’empêcherait pas de supprimer l’indexation sur le salaire ouvrier de base, plus dynamique. Au passage, le débat sur le SMIC a déjà effacé toute idée de coup de pouce alors que le dernier vrai coup de pouce remonte à plus de 10 ans. Et le gouvernement Macron a été obligé de mentir pour annoncer que la hausse automatique au 1er janvier 2018 représenterait 35 euros net par mois alors qu’elle ne représentera que 20 euros par mois jusqu’au 30 septembre 2018 soit pendant 9 des 12 prochains mois !

Augmenter le SMIC est une urgence. Urgence sociale pour permettre aux travailleurs de vivre dignement de leur travail. Comment peuvent s’y opposer ceux qui prétendent défendre « la valeur travail » mais sans payer le travail à sa juste valeur ? C’est une urgence féministe aussi quand une majorité de salariés au SMIC sont des femmes, souvent à temps partiel. C’est une urgence écologique. Consommer mieux, consommer une alimentation bio par exemple, coûte plus cher : les smicards n’aspirent pas à la mal-bouffe et au low-cost par plaisir !

Insensé au plan économique ? C’est le contraire. Augmenter le SMIC c’est relancer l’activité par des consommations de qualité et écologiquement soutenables. Que certaines petites entreprises aient besoin d’aide pour y faire face est vrai. Mais l’Avenir en commun propose des solutions solides : pôle public bancaire et escompte à taux zéro pour libérer les PME des banques, création d’un fonds de solidarité inter-entreprise pour mutualiser la contribution sociale et mettre à contribution les grandes entreprises, les groupes, les donneurs d’ordre.

La hausse du SMIC ne fera pas fuir les entreprises car le SMIC est d’abord versé dans des activités non délocalisables : restauration et notamment restauration rapide, nettoyage, aide à la personne. Personne n’ira manger son hamburger à Shanghai parce que le SMIC aura augmenté au Mac Do du coin de la rue ! Et pour les secteurs soumis à concurrence internationale, quel est l’horizon ? Baisser le SMIC en France pour être « compétitifs » avec l’Ukraine, la Turquie, le Bangladesh ? C’est une spirale sans fin qui épuisera les être humains et la planète. Le progrès social, le protectionnisme solidaire et la relocalisation écologique sont des voix plus sages et plus sûres.

par Matthias TAVEL, 19 décembre 2017

A) Pourquoi il faut augmenter les salaires ? (Hervé Debonrivage)

À écouter les libéraux, la stagnation des salaires et la neutralisation de l’inflation devaient conduire à des créations massives d’emplois qui juguleraient le chômage, conduire à une compétitivité accrue des entreprises permettant de dégager des marges favorables à l’investissement productif, etc. Or rien de tout cela ne s’est produit après 30 ans de "modération salariale". De facto, cette modération a profité aux rentiers et a permis d’ augmenter la part des dividendes dans le PIB. Il est plus que temps de remettre les pendules l’heure …de la vérité

Pourquoi donc, faut-il augmenter les salaires ?

1) Le plus évident : améliorer les conditions de vie des salariés.

2) Augmenter la consommation et donc indirectement la production de biens et services.

3) Ce qui implique une augmentation du chiffre d’affaires des entreprises

4) Et en conséquence une augmentation des profits et la création possible de nouveaux emplois dans certaines entreprises.

5) La création possible de nouvelles entreprises et de nouveaux services en raison de l’augmentation de la demande..

6) Et une possibilité d’augmenter encore les salaires, le chiffre d’affaires ayant augmenté.

7) Une augmentation de la productivité du travail par amélioration de la motivation de travailleurs mieux payés.

8) Une augmentation des recettes fiscales de l’État.

9) Une augmentation des cotisations sociales salariales et patronales.

10) Et en conséquence une amélioration des services publics.

11) Une augmentation de l’épargne.

12) Une diminution des emprunts et donc un moindre endettement des ménages.

13) Une diminution des achats de produits bas de gamme importés au moindre coût.

14) Une augmentation des achats de produits de qualité (issus de l’agriculture biologique par exemple) et une amélioration de la qualité des services rendus par un personnel qualifié et non sous qualifié.

15) Une diminution du recours aux aides sociales

16) Une amélioration de l’adéquation entre le niveau de qualification et le niveau de salaire évitant, entre autres, une "fuite des cerveaux".

17) Une amélioration des prises en charge des problèmes de santé physique et mentale.

18) Une amélioration des conditions d’habitat.

19) Une augmentation du taux de natalité.

Quelques mots sur le SMIC à 1750 euros.

Le salaire brut mensuel des ouvriers qualifiés s’élève en France à : 2000 € environ.(1563 € nets) et le montant brut du SMIC mensuel s’élève à 1394 euros en 2011. La mesure proposée par le Front de gauche de placer le SMIC à 1750 euros brut en début de législature revient donc à augmenter le SMIC de 25 % en valeur brute. Ce montant placerait le SMIC à un écart de 12,5 % au-dessous du salaire brut ouvrier moyen.

Rappelons qu’en 1968, le SMIC a été augmenté de 43,25 % (passant de 2,15 à 3,08 francs de l’heure. Lorsque la gauche est arrivée au pouvoir en 1981, le SMIC a été augmenté de 22,4 % (entre mai 1980 et juin 1981). (source : http://www.corby.fr/SMIC.html )

En 2009, le salaire médian brut mensuel moyen s’élevait à 1653 € (soit 1401 € nets). Le SMIC du Front de gauche se situerait donc à environ 5,5 % au-dessus de ce salaire médian et aurait évidemment pour effet d’augmenter la valeur de ce salaire médian. Des études statistiques passées montrent qu’une augmentation de 10 % du SMIC diffuse une augmentation de 2 % sur l’ensemble des salaires. La mesure du Front de gauche se traduirait donc, selon cette hypothèse, par une augmentation de 5 % de l’ensemble des salaires. Ceci pour relativiser cette mesure concernant le SMIC proposée par le Front de gauche.

Énumérons maintenant, à l’inverse, les dégâts provoqués par le blocage des salaires qui est pudiquement appelé "modération salariale",.

Ce freinage a provoqué :

1) La "nécessité" d’importer des produits à faible coût de production pour pouvoir être vendus à une population de faible pouvoir d’achat. D’où des délocalisations et le recours à une main-d’œuvre étrangère meilleure marché.

2) Le développement du crédit à la consommation avec une augmentation du taux d’endettement des ménages. Un allongement des durées des crédits pour les emprunts immobiliers.

3) Endettement massif qui a engendré une crise financière sans précédent. L’origine de la crise financière mondiale actuelle est non seulement la financiarisation de l’économie mais une crise du pouvoir d’achat des salaires ayant provoqué un recours massif à l’endettement des personnes privées qui s’est ensuite répercutée sur la dette publique.

4) La solvabilité des ménages étant insuffisante pour satisfaire leurs demandes de location ou d’achat immobilier induit une diminution de l’investissement des constructeurs de logements. L’offre devient insuffisante et les prix flambent.

5) Un freinage de la croissance économique se traduisant par une stagnation du chiffre d’affaires des entreprises productives de biens et services situées sur le territoire.

6) Cette demande insuffisante a provoqué la disparition de nombreuses petites entreprises et la disparition de commerces de proximité, les consommateurs à pouvoir d’achat bridé préférant alors acheter dans les grandes surfaces dont les prix sont moins élevés.

7) Une difficulté à embaucher des jeunes dans certains secteurs particulièrement mal payés (hôtellerie, restauration, assistants sociaux, etc.) récupérée par une droite réactionnaire qui proclame : "les jeunes maintenant, ils ne veulent pas se lever tôt , ils ne veulent pas travailler !".

8) Peu de motivation pour certains salariés au chômage pour reprendre le travail du fait que le montant de l’indemnité est proche du salaire qui leur est proposé pour un nouvel emploi.

9) La diminution des chiffres d’affaires induit des licenciements et donc une croissance du chômage. 10) Une diminution des recettes fiscales de l’État et des cotisations sociales provoquant un endettement public et un déficit des services sociaux. Cela conduit à une détérioration des services publics.

11) Une démotivation dans le travail et une altération de la conscience professionnelle provoquant une baisse de la productivité et des tensions entre producteurs de biens et services et les consommateurs.

12) Un stress psychologique permanent des ménages inquiets de ne pouvoir "terminer le mois" avec toutes les répercussions que cela peut avoir sur le couple et les enfants. Cette pénurie financière s’ajoute à une précarisation de l’emploi tout aussi stressante.

13) Cette pénurie salariale, à la source de frustrations diverses, provoque des tensions sociales entre catégories professionnelles ou autres : hostilité envers les immigrés, hostilité envers les "assistés", envers les fraudeurs sociaux, les "députés et les ministres qui s’en mettent plein dans les poches", ceux qui ont droit au 13e mois "et pas moi", etc. C’est sur ce terrain de frustrations multiples que se développe l’extrême droite.

14) Cette distorsion entre un pouvoir d’achat très réduit et une offre publicitaire tous azimuts est aussi cause de délinquance (vols, fraudes diverses).

15) Une détérioration de la prise en charge de la santé d’une frange de la population qui n’a plus les moyens de se soigner correctement.

16) L’insuffisance des salaires pour les emplois très qualifiés ou demandant des études longues provoque à la fois un sentiment de déclassement et une dévalorisation du savoir allant jusqu’au mépris du travail intellectuel d’une part, et une "fuite des cerveaux" à l’étranger d’autre part.

Il est bien évident que les mécanismes décrits précédemment dans la première partie n’ont rien d’automatique : Certains d’entre eux nécessitent pour se réaliser certes des décisions politiques radicales, mais aussi certaines conditions économiques.

Cela va donc permettre aux libéraux de développer un argumentaire, toujours la même depuis 150 ans, pour s’opposer à la hausse des salaires. (L’Histoire montre que, quel que soit le contexte économique – favorables ou défavorable – les augmentations substantielles de salaires ont été arrachées par des luttes sociales, mais ce n’est évidemment pas le cas pour les dividendes et les stocks options).

Il serait d’ailleurs intéressant de connaître les revenus de tous ces bons apôtres de la modération salariale pour mesurer leur crédibilité à l’aune de leur train de vie personnel. Dans la quasi-totalité des cas, ces donneurs de leçons ont des revenus beaucoup plus élevés, souvent plus de 10 000 euros mensuels, que les salariés à qui ils refusent la moindre augmentation.

Voici donc quelques objections habituelles.
- Concernant les points 2) et 3) : si le pouvoir d’achat augmente, rien ne dit que cela augmenterait la vente des produits des entreprises françaises : les marchandises achetées peuvent être des produits importés. C’est d’ailleurs ce qui s’est produit au début des années 1980. Cette objection n’est pas sans fondement : en effet, il faut parallèlement développer l’appareil productif et relocaliser nombreuses activités en utilisant des stratégies économiques adéquates. Mais ces mêmes champions de l’austérité salariale oublient que leurs amis libéraux n’ont pas fait grand-chose pour développer les entreprises industrielles et de services : ils ont plutôt favorisé les activités financières spéculatives et un libre échangisme sans limite destructeurs du tissu industriel national.

- Concernant le point 4) : augmenter les salaires empêche d’augmenter les profits est donc nuisibles à ’investissement. Ceci est vrai à prix et à volume constants pour une fabrication de biens et services donnés. Or si la masse produite augmente, la masse salariale augmente mais aussi la somme totale des profits. D’autre part, malgré une augmentation des profits, les investissements stagnent comme en témoignent différentes études statistiques. Il n’y a pas corrélation entre les deux facteurs.

- Les libéraux invoquent aussi éternellement le coût trop élevé du travail qui ferait perdre aux entreprises françaises leur compétitivité internationale. Les ouvriers français seraient trop chers. Cette affirmation générale masque une réalité concrète plus complexe qui dément ce genre de déclaration.

Nous aborderons dans un prochain article intitulé : "Nuit et brouillard sur les coûts salariaux" cette question du coût salarial qui pose aussi la question de la nature du salaire.

2 – Les causes de la modération salariale.

Par quels procédés ce freinage permanent sur la hausse des salaires a-t-il été possible ?

- D’abord par une mesure de désindexation des salaires sur les prix à partir de 1982, mesure politique prise par le gouvernement Mitterrand en France (et plus généralement pas les gouvernements libéraux et sociaux libéraux en Europe occidentale).

- Par l’internationalisation du marché du travail mettant ainsi en concurrence des travailleurs du monde entier.

- La pression du chômage sur les revendications salariales. Ce chômage s’explique en grande partie par une diminution de l’investissement productif au profit de la spéculation financière.

.Outre les conséquences énumérées ci-dessus, cela a permis :
- une augmentation du taux de profit de la classe capitaliste. Cela se traduit par une augmentation considérable des très hauts revenus (notamment pour le dernier centile)

- Une diminution de la part des salaires par rapport aux profits dans le PIB. On n’évalue à environ 8,6 % à 10 % le transfert des salaires vers les profits, ce qui correspond à un manque à gagner de 180 à 195 milliards par an pour les salariés,les caisses de l’État et des services sociaux. Le Front de gauche, par la voix de Jean-Luc Mélenchon, est le seul parti à s’engager à récupérer cette somme suite à ce que certains appellent le hold-up du siècle.

Ces affirmations s’appuient et sont illustrées par différents tableaux et graphiques figurant dans les études suivantes : Le taux de profit : et pourtant il monte ! http://hussonet.free.fr/h9tprof.pdf

La modération salariale en France http://www.insee.fr/fr/ffc/docs_ffc...

Les hauts revenus en France : une explosion des inégalités http://www.inegalites.fr/IMG/pdf/ha...

Partage de la valeur ajoutée et inégalité de revenus. http://hussonet.free.fr/psalirsw.pdf

3- Les enseignants : la catégorie sociale la plus déclassée. La bête noire des libéraux.

L’une des catégories sociales les plus méprisées par les libéraux et une bonne partie des sociaux libéraux est celle des enseignants. En voici la démonstration chiffrée.

Rappelons tout d’abord que le salaire net moyen mensuel des cadres s’élevait à 3967 euros pour le secteur privé et semi-public en 2008.

En effet, si le salaire net moyen s’élevait en 2008 à 2367 euros pour l’ensemble de tous les enseignants, cette moyenne voile une disparité :
- Si l’on considère les enseignants de l’enseignement supérieur, du secondaire titulaires d’un doctorat, une agrégation ou d’un CAPES le salaire moyen s’élève à : 2423 € ,
- et si l’on considère l’ensemble des enseignants du premier degré dont les professeurs des écoles, on constate que le salaire net moyen mensuel est de 1574 €. Cela constitue l’un des salaires les plus faibles avec le secteur de la restauration – hôtellerie (salaire moyen net de 1558 € en 2005 ). Au regard de leur diplôme, les enseignants, même du supérieur, sont beaucoup moins bien payés que les cadres du privé ayant un niveau de diplôme semblable.

Mais ce qui est encore le plus surprenant, c’est qu’à l’intérieur même de la fonction publique, les enseignants font encore partie des catégories les moins bien rétribuées. Ainsi un cadre administratif a un salaire net moyen de 3743 € soit 1320 € de plus par mois que le salaire moyen d’un enseignant de niveau d’étude semblable. De même pour un cadre de la police qui perçoit en moyenne nette 3357 € par mois, soit 924 € de plus qu’un enseignant de niveau équivalent. Concernant les salaires moyens des officiers de l’armée, voici quelques éléments sur les salaires moyens nets mensuels en 2005 : Officiers généraux : 7163 euros ; Officiers supérieurs : 4600 euros ; Officiers subalternes : 2913 euros ;Sous-officiers supérieurs : 2544 euros. (Source : http://secretdefense.blogs.liberati... )

Mais ce déclassement est encore plus grand pour les enseignants du premier degré . Le salaire net moyen des ouvriers et employés de la fonction publique s’élève à : 1685 €. Soit 111 € de plus par mois qu’un enseignant du premier degré, alors que celui-ci est au minimum titulaire d’une formation de niveau bac +4.

Compte tenu de la dégradation sans précédent de leurs conditions de travail (suppression de plusieurs milliers de postes, enfants et adolescents de plus en plus difficiles à gérer), de leur niveau de diplôme, de leurs responsabilités considérables, de leurs tâches toujours plus complexes), on peut considérer que c’est la catégorie professionnelle la plus déclassée de notre pays si l’on fait abstraction, pour rester objectif, de la stabilité de l’emploi des enseignants titulaires. (Ce qui n’est évidemment pas le cas des vacataires et auxiliaires).

Comment expliquer un tel déclassement ?

On invoque la durée des vacances, sans faire d’études comparatives sérieuses avec le temps de travail réel annuel d’autres catégories professionnelles.(cadres supérieurs de l’armée, pilote de ligne, etc.) On invoque aussi habituellement la volonté des libéraux de restreindre les dépenses publiques. Mais de telles explications économistes ne suffisent pas d’autant que nombre de libéraux sont conscients de la nécessité d’investir dans l’enseignement et la recherche pour permettre à l’appareil productif et financier de fonctionner.

Non, il y a une autre explication : la haine ou le mépris ! La haine des enseignants , la haine du savoir, la haine de l’esprit critique, la haine de ceux qui permettent au peuple de réfléchir et donc de s’affranchir de l’emprise de leur pouvoir. "Le peuple, malheureusement, est encore très ignorant, et maintenu dans cette ignorance par les efforts systématiques de tous les gouvernements, qui la considèrent, non sans beaucoup de raison, comme l’une des conditions les plus essentielles de leur propre puissance." (Mikhaïl Bakounine / 1814-1876 / Dieu et l’Etat / 1882) Le réactionnaire Thiers répondait à Victor Hugo : "un peuple instruit est un peuple ingouvernable."

Et il y a encore une autre raison : le corps enseignant est la catégorie professionnelle dont le taux de syndicalisation est le plus élevé. Pire encore, la majorité d’entre eux adhèrent à un syndicat critique qui n’est pas réformiste. La FSU est en effet largement majoritaire, y compris lors des élections professionnelles. Or les conflits passés entre le gouvernement Jospin et la FSU montrent aussi que pour le PS, les enseignants ne sont pas les "enfants choyés de la république" même s’il a proclamé "royalement" que l’enfant devait être au centre du système éducatif.

Ainsi, les socialistes français ont commis une erreur majeure en nommant Claude Allègre en 1997 comme ministre de l’éducation nationale. " Entre les profs et le Parti socialiste, la méfiance s’est installée depuis 1997 et la nomination de Claude Allègre à l’Education nationale. Le ministre de Lionel Jospin est accusé d’avoir attisé la haine des enseignants, d’en avoir fait des boucs émissaires, responsables des dysfonctionnements du « mammouth ». (http://desirsdavenir09.over-blog.co... ).

Des dizaines de milliers d’enseignants n’ont pas voté pour Jospin en 2002 suite à la politique calamiteuse de son gouvernement envers eux. Cela a largement contribué à sa défaite électorale. Les propos récents de Martine Aubry, lors de sa première intervention aux primaires du PS, concernant les enseignants du premier degré qui devraient, selon elle, travailler plus pour gagner plus, témoigne d’une méconnaissance et d’un mépris de cette corporation : les responsables du PS devraient faire un tour dans les écoles primaires notamment du 93 ou du 13 pour se rendre compte dans quelles conditions extrêmement difficiles travaillent ces enseignants, aux limites du supportable, souvent au détriment de leur santé.

Au stress du travail en classe et de diverses tâches complémentaires, de multiples pressions qui s’exercent sur lui (exigences multiples de l’administration, des inspections, des parents,) s’ajoute le stress de ne pouvoir terminer financièrement les mois, surtout pour les enseignants célibataires qui ne peuvent compter que sur un seul salaire.

L’action syndicale des enseignants est extrêmement difficile car une grève provoque une gêne considérable pour les parents des jeunes enfants (problème de garde). En outre, leur arrêt de travail ne gêne pas la production et la circulation de capital contrairement à une grève dans l’industrie et la finance. Les gouvernements aiment alors laisser s’essouffler les mouvements et à monter l’opinion publique contre les enseignants "qui prennent leurs enfants en otages"…

Les syndicats obtiennent des avancées à certaines périodes : revalorisation salariale, freinage dans les suppressions de postes et au quotidien, défense des intérêts des enseignants dans les différentes commissions paritaires, etc., mais force est de constater, avec le recul de l’Histoire, que leur action consiste surtout à limiter les dégâts provoqués par les politiques libérales.

Sans leur présence, il y a déjà longtemps que les établissements scolaires seraient transformés en petites entreprises gérées par une DRH locale ayant tous les pouvoirs, se livrant une concurrence entre elles en termes de résultats et de recrutement, etc, pour ne citer qu’un exemple.

Le mode d’action qui serait pour eux le plus efficace pour la défense de leurs intérêts et ceux des élèves ou étudiants dont ils ont la charge est de voter pour les représentants d’un mouvement politique qui se donne les moyens financiers pour défendre le monde de l’éducation et de la recherche : quel est ce mouvement politique ? Devinez, ou plutôt réfléchissez … (la réponse est en annexe !)

Cette signature de la haine a été manifeste lors de la suppression de la gratuité pour les enseignants de l’accès aux musées nationaux il y a quelques années. L’économie réalisée était minime au regard des recettes réalisées notamment par le tourisme. Des petites têtes haineuses et comptables n’ont pas compris ceci : les enseignants, quel que soit leur discipline, ce sont ces Homo sapiens qui transmettent le patrimoine culturel (artistique, scientifique, technologique, etc.) de l’humanité et qui font que notre espèce s’humanise et progresse en civilisation. Mais comment faire comprendre cette fonction anthropologique à des barbares fussent-ils habillés d’un smoking et munis d’un attaché-case ou autre smartphone.

Le lecteur pourra contrôler nos chiffres en se munissant d’une calculatrice et en divisant par 12 les salaires annuels mentionnés dans les études de l’INSEE suivantes.

http://sgencfdt.picardie.free.fr/IM... http://www.insee.fr/fr/themes/table... À suivre : Nuit et brouillard sur les coûts salariaux.

Annexe : le Front de gauche. Voir notamment : les 12 mesures du Front de gauche pour l’école de l’égalité http://www.gauchemip.org/spip.php?a...

Hervé Debonrivage


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