Résolution du Conseil National de PRS des 6 et 7 octobre 2007 : Gauche réveille-toi, le peuple a besoin de toi !

vendredi 12 octobre 2007.
 

La droite à l’offensive

Depuis plusieurs mois, les attaques contre les acquis sociaux et républicains de notre pays se succèdent sans discontinuer. Sur tous les sujets, le nouveau président fait adopter des lois ou prononce des « discours fondateurs » qui sont autant de ruptures avec ce qui fait le meilleur de notre histoire. Rupture avec la progressivité de l’impôt lorsqu’il met en place le bouclier fiscal. Rupture avec la vision laïque et universaliste des relations internationales lorsqu’il met au premier plan de notre politique étrangère le « choc entre le monde musulman et l’Occident ». Rupture avec l’ordre public social lorsqu’il promeut la supériorité du contrat de travail sur la négociation collective et sur la loi. Rupture avec le devoir social de l’Etat lorsqu’il veut lui enlever le pouvoir d’augmenter le SMIC. Rupture avec le service public lorsqu’il décide la privatisation de GDF. Rupture avec la sécurité sociale lorsqu’il veut instaurer le principe « malade payeur » à travers les franchises médicales. Rupture avec la conception politique du lien social issue des Lumières lorsqu’il convoque la génétique dans la procédure du regroupement familial.

Cette offensive sans précédent prend la forme d’une bataille culturelle de tous les instants. Selon le baromètre des journaux télévisés des chaînes hertziennes de l’Institut national de l’audiovisuel, Nicolas Sarkozy est apparu à l’écran 224 fois de mai à août 2007, quand Jacques Chirac n’était apparu que 94 fois durant la même période en 1995 et 75 fois en 2002. Cette avalanche médiatique submerge amis et ennemis sous un flot d’annonces de toutes sortes qu’il leur est impossible d’analyser sérieusement et de discuter de façon argumentée avant qu’arrive la vague suivante. Alors le premier objectif de Sarkozy est atteint : tout ce qu’il dit prend l’allure de l’évidence puisque personne n’a le temps de le décrypter.

Pour Sarkozy, la campagne présidentielle continue. Il sait que son arrivée au pouvoir est le fruit d’une guerre-éclair, que l’adhésion de l’opinion est fragile, que l’exaspération populaire reste forte. Il lui faut donc conforter la prise. C’est la raison d’être de son activisme médiatique : jour après jour, des dizaines de slogans sont déversées sur le plus grand nombre pour tenter d’arracher l’hégémonie culturelle dont il a besoin pour mener à bien sa politique.

De plus, son hyper présence lui permet de redonner une cohérence à son camp, sorti en lambeaux de l’ère Chirac. La parole présidentielle arbitre les désaccords, distribue les consignes, assure la promotion des dirigeants. Faute de cela, la force des milliers de militants UMP sur le terrain se perdrait dans le sable..

Sarkozy tente donc de réunir à nouveau les ingrédients qui ont permis son succès à la présidentielle. Son objectif est de construire une force durablement majoritaire au service d’une redéfinition libérale et antirépublicaine de l’identité du pays. Cette façon d’agir a son revers et la gauche serait bien inspirée d’en prendre la mesure pour saisir les opportunités qui en découleront. L’unification des droites sous la houlette de Sarkozy est une condition de son offensive. Il en maintient le cap au prix d’une radicalisation qui est ensuite le prétexte à des débordements qui approfondissent encore la droitisation de la droite comme on l’a vu à propos des tests Adn pour les immigrés où l’hébergement des SDF sans papier. De nouvelles tensions en résultent. A leur tour elles ne se résorbent que par l’hyper présence présidentielle. Dans ces conditions nous pouvons dire que la fragilité du système politique s’est aggravée à mesure que sa stabilité repose davantage sur une seule personne. La gauche a raison de dénoncer cette omniprésence qui bafoue la démocratie. Elle ne doit pas pour autant oublier que sa première tâche est de lui répondre. C’est-à-dire d’organiser la défense pied à pied des conquêtes sociales qu’il agresse.

La gauche tétanisée

L’offensive de Sarkozy prend appui sur un vide à gauche. Son objectif principal est d’ailleurs de l’aggraver. Il en va ainsi de « l’ouverture ». D’un côté, celle-ci met à profit l’existence au sein de la gauche d’une sensibilité qui cultive depuis plusieurs années des convergences idéologiques et politiques avec la droite. De l’autre, elle vise à couper les jambes de l’opposition de gauche en la décrédibilisant par avance.

Malheureusement, l’opposition à Sarkozy est inconsistante ou inexistante. La gauche ne s’est toujours pas remise de la défaite de la présidentielle. Celle-ci, en raison notamment du contenu de la campagne de Ségolène Royal, a profondément brouillé ses repères et désorienté son électorat. Cette orientation se paie aujourd’hui lourdement. Alors que le pouvoir n’a jamais été aussi à droite, il n’est plus évident pour une conscience de gauche de s’y opposer avec force et détermination.

Dans ce contexte, la relégation de la conscience républicaine organisée par le courant « démocrate » du Parti Socialiste et divers secteurs de l’autre gauche se paye au prix fort à présent. Le démantèlement des points d’appui fondamentaux de la forme républicaine de notre société n’est ni perçu ni combattu par eux. La compréhension de ce que vise la droite est rabougrie à une vaine protestation ponctuelle, au cas par cas, sans capacité à montrer la cohérence de la contre révolution libérale ni ses implications de long terme sur notre société. Il en résulte à nos yeux qu’il est urgent de renouveler la présence et la parole critique du républicanisme socialiste sur la scène publique de notre pays. Et il est urgent que ce soit de gauche que parte le retour de cette parole républicaine.

L’engourdissement de la gauche a donc des causes politiques. La ligne « démocrate » initialement élaborée par Clinton puis Blair, qui s’est instillée progressivement en son sein conduit à récuser l’opposition frontale entre gauche et droite, à mettre en péril la stratégie du rassemblement de la gauche au profit d’un rapprochement politique avec le « centre », à donner raison à Sarkozy sur plusieurs points essentiels de son idéologie. Force est de constater que cette ligne ne tient ni le choc de la campagne électorale ni celle de l’opposition. D’ores et déjà la paralysie gagne tout l’organisme de la gauche. Demain, si l’emportent les tentations du changement d’alliance, de la division, du sectarisme, tout peut même voler en éclats.

Faute de mots d’ordre de combat, faute d’organisation politique capable de porter la contre-offensive, beaucoup se laissent aller et laissent finalement faire. Le premier devoir d’une conscience de gauche n’est pourtant pas de commenter mais d’agir, de faire quelque chose.

Agir pour changer d’horizon

Dans les semaines qui viennent, PRS veut contribuer à la mobilisation contre la droite avec son apport spécifique dans le domaine de l’éducation populaire. Raisonnablement, nous pouvons être fiers de notre contribution à la réflexion collective de la gauche. Le concept central du Manifeste adopté l’an passé, l’Emancipation fait son chemin dans les débats de la gauche. Nos propositions pour l’avenir de la gauche ont été mises en mots dans le document « la gauche d’après » adopté lors de notre dernière Convention nationale et publié depuis lors par notre revue. Celles-ci font aussi leur chemin dans les organisations politiques de gauche qui ont lancé chacune de leur côté des processus de débat interne. Les militants de PRS sont plus que jamais disponibles pour y participer. En même temps, nous savons que la nécessaire recomposition de la gauche pour qu’émerge une force politique nouvelle a besoin du ferment de la lutte qui éduque. Aucune résolution politique ne remplacera l’action concrète pour construire des consciences de gauche éclairées. C’est en s’opposant à la droite que l’on reconstruira la gauche. C’est possible. Le pouvoir en place n’est pas intouchable. Cela se constate déjà.

On se souvient que la simple mise en cause du projet de TVA sociale avait modifié le rapport de forces entre gauche et droite entre les deux tours des élections législatives. Ceci montre qu’en se mobilisant sur quelques mesures emblématiques de la politique de Sarkozy, la gauche peut faire bouger les lignes.

C’est notamment le cas sur la mise en place des franchises médicales. Une mobilisation significative s’organise contre cette mesure. Elle rassemble un front très large au plan social, organisationnel et politique. Elle est éminemment pédagogique dans son contenu, en montrant comment la « responsabilisation » des personnes contredit le droit à la santé et ce qu’implique la privatisation rampante du secteur de la protection sociale solidaire contre la maîtrise collective incarnée par la Sécurité sociale. Les rassemblements organisés samedi 29 septembre dans plusieurs villes de France, notamment à Paris au gymnase Japy, ont été un succès. De nouveaux rendez-vous sont d’ores et déjà fixés, notamment à l’occasion de la manifestation du 13 octobre prochain. PRS se met au service de cette mobilisation. Celle-ci ne doit pas s’arrêter avec le vote du projet de loi de financement de la sécurité sociale par le Parlement. Beaucoup de nos concitoyens découvriront les franchises quand elles commenceront à s’appliquer. De plus, on sait que la droite entend faire des franchises le principal levier de remise en cause de l’assurance-maladie, par le biais d’une augmentation importante et régulière de leur montant. A terme, l’objectif du gouvernement est d’offrir aux groupes privés d’assurance un marché dont le montant pourrait s’élever à plusieurs centaines de milliards d’euros (équivalent au budget de l’Etat). C’est donc un combat de longue haleine qui commence autour de la défense de la sécurité sociale, convergeant avec la défense du droit à la retraite et posant à terme la question d’un nouveau partage des richesses dans notre pays.

Autre rendez-vous d’ampleur avec le pouvoir, les réformes de la Constitution prévues par Nicolas Sarkozy. Celui-ci prépare deux révisions décisives de la Constitution. L’une peut déboucher sur un changement de régime. L’autre sur la ratification d’un traité européen reprenant presque mot pour mot le projet de Constitution européenne rejeté par les Français. Dans leur contenu comme dans la méthode parlementaire prévue pour leur adoption, ces deux projets priveraient le peuple du droit de décider les règles selon lesquelles se prendront à l’avenir la quasi totalité des décisions le concernant. Il ne faut pas en effet se laisser abuser par les habillages du chef de l’Etat. Le pseudo « mini-traité », appellation qui n’est utilisée qu’en France, aurait rigoureusement la même portée que l’ancienne Constitution. Quant à la réforme prétendument « technique » de la Ve République, il suffit d’écouter Edouard Balladur parler ouvertement du passage au régime présidentiel, contribuant ainsi à mettre toujours davantage le pouvoir à l’abri des citoyens. Ces deux révisions doteraient notre pays des deux fondements de nature constitutionnelle qui organiseraient demain notre « démocratie ». Les principes démocratiques minimaux exigent que des décisions de cette ampleur soient prises par le peuple.

Or la gauche a les moyens d’obliger le pouvoir à recourir au referendum. La révision constitutionnelle se décide en effet à la majorité des 3/5 des députés et sénateurs. La gauche est à 8 voix du seuil du veto. On sait déjà que Nicolas Sarkozy devra compter avec plusieurs défections dans son camp. Si la gauche respecte la synthèse politique nouée au moment de la présidentielle lorsque Ségolène Royal a annoncé avoir réconcilié le « oui » et le « non » en exigeant un nouveau referendum sur tout nouveau traité, elle pourra mettre Sarkozy dans les cordes. C’est pourquoi PRS lancera une campagne pour informer les Français du contenu du nouveau traité et exiger un referendum populaire dès que celui-ci sera publié.

La gauche doit se réveiller. Elle peut changer le cours des choses. Pour l’heure Sarkozy se nourrit des faiblesses de la gauche. Mais la politique du pouvoir affronte les intérêts de la majorité salariée du pays. Elle heurte nombre de nos concitoyens attachés à nos conquêtes sociales et républicaines. Elle soulève d’ores et déjà des résistances et des mobilisations : contre les franchises médicales, pour la défense de la retraite et des régimes spéciaux, contre les fermetures de poste dans l’Education nationale, contre les conditions de travail à Goodyear... Celles-ci doivent être encouragées, fortifiées, organisées, unifiées, éclairées politiquement. C’est le rôle des organisations de gauche. PRS y contribuera par la présence de ses militants, son travail politique d’éducation populaire et un esprit unitaire sans faille.


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