14 juillet 1790 : Fête de la fédération

samedi 22 juillet 2023.
 

Pour célébrer l’anniversaire de la prise de la Bastille, la garde nationale parisienne décide d’organiser un grand rassemblement le 14 juillet 1790.

Tous les acteurs politiques décidés à stopper la Révolution par un compromis entre le Roi et l’Assemblée contribuent à en faire une initiative nationale d’ampleur.

Ainsi, le Champ de Mars doit accueillir plusieurs dizaines de milliers de personnes ; des milliers de volontaires aident 1200 ouvriers à terminer les travaux.

Peu à peu, 60000 délégués des 83 départements français arrivent dans la capitale, aident aux travaux et sont logés chez l’habitant. D’après les témoins, il règne une ambiance survoltée sans cesse agrémentée par les chants révolutionnaires, en particulier le ça ira.

Ah ! ça ira, ça ira, ça ira

Le 14 juillet 1790, les spectateurs parisiens (une " foule immense") prennent place sur un talus installé tout autour du Champ de Mars. Ils peuvent ainsi assister au défilé grandiose de 100000 fédérés (en comptant la garde nationale de la capitale), drapeaux déployés et tambours battant.

Sur l’estrade montée au centre du Champ de Mars, Louis XVI prête serment à la Nation et à la loi, la multitude le répéte.

Au même moment, d’autres fêtes célèbrent le même évènement. Parmi les villes hors de France à connaître ce même engouement, la cérémonie de Hambourg a connu une certaine renommée.

Les historiens et orateurs républicains ont donné une description enthousiaste de ce 14 juillet 1790 à Paris.

MICHELET, décrivant les participants à la Fête : « ils ne savent plus ce jour-là de quelle province ils étaient... Enfants isolés, perdus jusqu’ici, ils ont trouvé une mère ; ils sont bien plus qu’ils ne croyaient : ils avaient l’humilité de se croire Bretons, Provençaux... Non, enfants, sachez le bien, vous étiez les fils de la France, c’est elle qui vous le dit, les fils de la grande mère, de celle qui doit, dans l’égalité, enfanter les nations... Tout a disparu, la géographie est tuée. Plus de montagnes, plus de fleuves, plus d’obstacles entre les hommes... Les voix sont diverses encore, mais elles s’accordent si bien, qu’elles ont l’air de partir d’un même lieu, d’une même poitrine... Tout a gravité vers un point et c’est ce point qui résonne, tout part à la fois du cœur de la France... Personne ne pouvait manquer à la Fête ; personne n’était simple témoin ; tous étaient acteurs... »

Histoire de la Révolution française, Livre III, chapitre XI, p. 402-406

Jean Jaurès

"C’est naturellement au 14 juillet 1790 que fut fixée la fête de la Fédération... car c’est le 14 juillet qui avait créé la liberté et qui avait suscité le mouvement des communes révolutionnaires. Elles retournaient pour ainsi dire à ce grand événement comme à leur origine même et à leur centre... Si les ennemis de la liberté et de la Nation continuaient ou étendaient leurs intrigues, une commune isolée ne pourrait rien ; ou elle serait écrasée ou elle serait suspecte. Il fallait donc former comme une chaîne de communes, s’unir, se fédérer aux communes libres et révolutionnaires de la même province, de la même région. [...] Mais comme était grand l’enthousiasme général ! même les citoyens passifs participaient de toute l’émotion de leur cœur à la grande fête ; ils se sentaient haussés malgré tout avec la Nation tout entière, et je ne sais quelle espérance unanime et quelle unanime tendresse réalisa un moment, malgré la part d’égoïsme et d’oligarchie des institutions nouvelles, l’unité des nations, l’unité de classe... Il y avait dans ces contrastes, dans cet amalgame bizarre des formes anciennes et des pensées nouvelles, je ne sais quoi d’imprévu, de compliqué et de grand... La Fête de la Fédération... ajouta certainement à la force intime de la Révolution dans les âmes, à sa force de rayonnement dans le monde..."

Histoire socialiste de la Révolution française, Chapitre VIII, La Fédération, p. 827-835

Ernest Lavisse

"Ainsi, par toute la France, ces fédérations furent une explosion d’amour, une aspiration à la concorde et à l’unité nationale. Devant l’autel de la patrie, au milieu des danses, des "farandoles", des chants ou des banquets, les vieilles querelles se turent, les distinctions s’effacèrent ; un grand souffle passa sur tous les Français. Tous ceux qui participèrent à ces fêtes en gardèrent toute leur vie un souvenir doux et triste à la fois ; il leur semblait avoir joui du bonheur parfait. Plusieurs écrivaient, après la fête : "Maintenant je puis mourir" ; ou bien : "Ici finit le meilleur jour de ma vie".

Histoire de la France contemporaine, Tome Premier, chapitre II, Les forces révolutionnaires, p. 237


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