L’Univers de l’espace – temps capitaliste. Les Maîtres des horloges et des espaces.

vendredi 29 septembre 2023.
 

Nous vous proposons ici une grille de lecture de la structure et du fonctionnement du capitalisme qui traverse notre environnement, nos corps et nos esprits.

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Nous reprenons ici la démarche d’Henri Lefebvre sur la production de l’espace en l’étendant au-delà des villes et en la complétant par la production capitaliste du temps.

Voir le précédent article : la production de l’espace par Henri Lefebvre sur notre site :

https://www.gauchemip.org/spip.php?...

Le texte qui suit montre que l’espace et le temps de l’activité productive et de la vie quotidienne, même la plus intime, sont non seulement sous le contrôle du système économique et idéologique du capitaliste mais sont produits par lui. Nous vivons dans l’espace-temps capitaliste.

Nous sommes, en quelque sorte, des Homo capitalistus à notre corps défendant !

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1 – Les Maîtres de l’Horloge.

1. 1 Sphère de la production.

a) La durée du travail

Dans la sphère de production des biens et services matériels ou immatériels, le temps de travail journalier, hebdomadaire et annuelle est déterminée par un contrat de travail dont le patronat détermine pour l’essentiel le contenu.

Le droit du travail qui est censé encadrer ce contrat est déterminé par des votes à l’assemblée nationale de parlementaires qui sont majoritairement, sauf exception, des serviteurs les intérêts de la bourgeoisie.

Ainsi la limitation du nombre d’heures de travail dans la semaine et la durée des congés annuels ont toujours été arrachée par des luttes sociales exerçant une forte pression sur la représentation parlementaire.

La durée des congés de maternité ou de paternité, les temps accordés pour la formation continue sont aussi le résultat de luttes politiques et syndicales.

Il en est de même de la durée globale du travail jusqu’à l’âge de la retraite. Cet âge légal et la durée légale de la période d’activité donnant droit à une pension de retraite sont le résultat d’un rapport de force syndicale et politique entre le salariat et le patronat.

Dans tous les cas, en raison de sa position économique dominante (propriété des moyens de production et du capital financier) et de sa position idéologiquement dominante par le contrôle total de l’appareil médiatique qui est à son service, les capitalistes arrivent à imposer leur volonté et leur contrainte temporelle sur les travailleurs.

La cause fondamentale de cette contrainte est la possibilité pour le capitaliste d’une extraction maximale de plus-value dans le processus d’exploitation de la force de travail.

Rappelons brièvement que le temps de travail T se répartit en deux parties : un temps t 1 au profit du travailleur permettant de se reproduire comme force de travail et un temps t 2 au profit du capitaliste permettant la réalisation d’un profit.

Ainsi :E = temps de travail en faveur du salarié pour réaliser son salaire + temps de travail en faveur du capitaliste pour réaliser son profit.

L’allongement global de la durée de travail T permet aux capitalistes d’augmenter le temps de travail à son profit. On voit ainsi que la bataille sur la durée hebdomadaire du travail et la bataille sur la durée de la période d’activité sur une vie relève de la même cause.

Remarquons que la durée globale du travail ne dépend pas seulement de l’âge de la retraite mais aussi de l’âge de l’entrée dans la période d’activité pour les jeunes. L’âge de la scolarité obligatoire est donc important. Le travail des enfants a été un enjeu de luttes sociales qui perdurent encore aujourd’hui dans certains pays.

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Le travail à temps partiel, le travail intérimaire, la Poly activité, les emplois précaires et de courte durée, le travail au noir sont déterminées par l’état du marché du travail et des contraintes salariales. (Bas niveau de salaire, qualification).

Ainsi, cette fragmentation du temps de travail résulte de la subordination de la disponibilité de la force de travail aux exigences fluctuantes de la production des entreprises.

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La salarisation croissante des femmes est donc l’allongement du temps de travail salarié au niveau familial a pour fonction d’augmenter la plus-value pour le capitaliste au niveau familial.

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b) La productivité du travail.

Dans une approche classique, la productivité du travail est définie par le quotient V/T ou le quotient P/T où V et le volume de marchandises produites et P le prix des marchandises produites. Le facteur temps T intervient dans la définition même de la productivité.

Si T augmente, la productivité diminue et inversement.

La mécanisation des tâches manuelles et intellectuelles augmente cette productivité mais ce n’est pas le seul moyen. Il est aussi possible d’agir sur le corps et l’esprit du travailleur.

Le rythme de travail, l’intensification du travail du salarié a pour fonction d’augmenter la productivité et donc la plus-value relative en diminuant la valeur de la force de travail. Ainsi, les temps de pause, de déjeuner sont des paramètres pris en compte par le capitaliste. La rationalisation de la division du travail a le même objectif.

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c) Le chômage.

La durée des périodes de chômage pour le travailleur dépend des contraintes du marché du travail déterminé par la politique économique du gouvernement et du patronat. Par exemple, la désindustrialisation, certaines délocalisations s’accompagnent de la suppression de milliers d’emplois et donc d’un chômage plus ou moins massif.

De même, dans l’agriculture, une politique productiviste s’accompagne aussi d’un chômage dans ce

Secteur. Il est bien connu que le chômage créait une « armée de réserves » qui fêtent pression sur les salaires et la combativité des salariés.

d) Durée du travail et incidence sur la disponibilité pour l’éducation et l’équilibre affectif des enfants.

Remarquons aussi que la durée du travail a non seulement une incidence sur la santé du travailleur, mais sur la disponibilité qui lui reste pour s’occuper de l’éducation de ses enfants.

De même, plus l’âge de la retraite et précoce, moins les grands-parents peuvent s’occuper de leurs petits-enfants et venir ainsi en aide à leurs enfants.

Des journées de travail trop longues contraignent les parents à placer leurs enfants dans des crèches, garderies, écoles élémentaires pendant une durée excessive. Il est ainsi fréquent que les enfants se trouvent ainsi séparés de leurs parents pendant 10 à 11 heures par jour lorsque les enfants sont plus autonomes et notamment les adolescents se retrouvent seuls dans l’appartement ou la maison sans pouvoir dialoguer avec leurs parents. Il peut en résulter des carences affectives dommageables pour le développement équilibré des enfants.

Défendre la vie de famille et une bonne éducation des enfants va donc de pair avec une limitation importante du temps de travail et de déplacement.

Mais ce lien, assez évident, ne semble pas accessible au niveau intellectuel des élus de droite qui prétende défendre la famille et la bonne conduite des enfants tout en s’opposant à la loi de 35 heures et de la retraite à 60 ans . Misère intellectuelle de la droite.

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e) l’incidence de la durée du travail sur le temps libre.

Il est bien évident que la durée du travail tant au niveau journalier, qu’hebdomadaire annuel à une incidence sur la durée du temps libre pour se détendre, se distraire récupérer ses forces et aussi sur le temps de sommeil.

La durée des vacances annuelles dépend de la législation en cours et des contraintes de l’entreprise.

L’utilisation de ce temps libre par fréquentation des salles de spectacles (cinéma, théâtre, etc.), d’un restaurant, par des locations de vacances, par fréquentation de salle de sport ou autre, dépendent du niveau de revenus du travailleur qu’il soit salarié ou indépendant. En effet, toutes ces utilisations du temps libre ne sont pas gratuites, sauf exceptions.

Le temps libre passé devant un écran de télévision dépend de la volonté de l’utilisateur mais le choix du contenu des programmes (films, variétés, émissions d’information,…) restent sous le contrôle du capitalisme marchand, sauf exceptions.

L’information journalistique est totalement subordonnée à l’idéologie de la classe dominante : et pour cause, elle en est le principal vecteur. Bref, l’utilisation du temps libre reste sous contrôle capitaliste et déterminées par des contraintes budgétaires pour les familles ou particuliers

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1. 2 Le – facteur temps dans la rotation du capital.

Le capital doit être pensé comme mouvement, processus, métamorphose.

Le capitaliste avance un capital A avec lequel il achète des moyens de production et de la force de travail. Puis, ainsi que de production étend réalisée, il obtient une quantité de marchandises M ainsi fabriquées qu’il vend pour acquérir un nouveau capital A’ supérieur à A.

Après avancement du capital A , celui-ci se transforme en capital productif, puis capitale marchandise puis en capital argent. On obtient ainsi les trois formes du capital industriel de Karl Marx : capital argent, capital productif, capitale marchandise.. Dans ce processus de transformation, il y a deux phases de circulation du capital et une phase de production. Le surcroît de capital obtenu en fin de cycle résulte de la transformation sous forme argent de la plus-value obtenue par l’exploitation de la force de travail dans le procès de production.

Ces phases de transformation s’appellent aussi rotation du capital. Le temps de rotation et la période de temps nécessaire pour que A se transforme en A’ c’est-à-dire le temps nécessaire que doit attendre le capitaliste pour récupérer son capital de départ investi augmenter de son profit. On parle communément d’une manière un peu floue de « retour sur investissement ».

L’objectif du capitaliste est de diminuer le temps de rotation ce qui revient à 1) diminuer le temps du processus de production en augmentant la productivité du travail 2) ou bien (es) diminuer le temps de circulation (ce qui revient à augmenter la vitesse) du capital.

Pour diminuer le temps de la première phase de circulation du capital, il faut que les moyens de production dont les matières premières soient disponibles rapidement : il faut donc entre autres minimiser les temps de transport.

D’autre part, il faut que la force de travail soit mise à disposition de l’entreprise sans délai et soit adaptée aux fluctuations productives éventuelles en raison d’une demande variable des biens produits.

De plus, il faut augmenter aussi la vitesse de la seconde phase de la circulation du capital. Pour ce faire, il faut éviter que les marchandises produites ne soient stockées trop longtemps : on parle alors de « flux tendu ». Il faut que les marchandises soient vendues le plus rapidement possible, ce qui exige de nos jours une politique de marketing d’autre part le temps d’acheminement des marchandises du fabricant vers l’acheteur doit être aussi minimisé. Cette exigence a évidemment un impact sur le fonctionnement des sociétés de transport et les conditions de travail des chauffeurs routiers notamment.

Nous n’avons pas voulu ici compliquer la compréhension du processus en enchaînant plusieurs cycles de production et de circulation. La vitesse de rotation du capital, d’une manière globale, peut être considérée comme l’inverse du temps de rotation : plus le temps est petit plus la vitesse est grande. Pour augmenter cette vitesse, une stratégie consiste à minimiser le capital circulant c’est-à-dire un musée le coût des moyens de production de manière à diminuer la composition organique du capital C/v ce qui revient alors à augmenter le taux de profit. (Le capital constant C est la somme du capital circulant du capital fixe).

Prenons l’exemple simpliste : on peut fabriquer des objets de plus petite taille demandant moins de matière ou on à simplifier la fabrication et en fabriquer plus en économisant au final de la matière première.

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1. 3 – la pénurie de personnels : incidences temporelles

Cette pénurie concerne aussi bien le secteur marchand que non-marchand. Rappelons tout d’abord quelque réalité économique de base. Le nombre et le niveau de salaire des fonctionnaires et pour l’essentiel financé par l’impôt payé par la population active. Ils sont aussi déterminés par les choix budgétaires du gouvernement et des parlementaires en faveur ou non des services publics.

D’une manière analogue, le nombre de médecins et des différents agents du domaine de la santé publique travaillant dans le secteur privé ou le secteur public est financé par le montant des cotisations sociales et des impôts payés par les travailleurs de la population active qui financent la sécurité sociale. Idem pour le montant des salaires ou honoraires. Là encore, ce sont les choix politiques du gouvernement et des parlementaires qui déterminent les deux paramètres précédents. (Effectif et revenus).

Là encore, en remontant la chaîne causale, on constate que c’est la bourgeoisie capitaliste qui est maîtresse du jeu.

Indiquons que la pénurie de personnel peut avoir deux causes techniques découlant des choix politiques précédents : une action sur le recrutement (numerus clausus en médecine, nombre de postes mises au concours pour la fonction publique,…) et par le maintien d’un niveau de salaire trop faible au regard de la qualification et des responsabilités. Cette pénurie de aussi s’aggraver par des conditions de travail de plus en plus difficile et insupportables ce phénomène se rencontre pour le personnel enseignant et le personnel soignant pour ne citer que les cas les plus connus.

Quelles incidences de cette pénurie sur les contraintes temporelles ?

La pénurie de médecins généralistes hospitaliers peut s’accompagner d’un allongement considérable de leur temps de travail hebdomadaire pouvant même conduire au burnout. Il n’est pas rare que des médecins généralistes de ville ou hospitalier puissent travailler 60 à 70 heures par semaine.

Une autre incidence temporelle frappe les « usagers » : temps d’attente considérable pour obtenir un rendez-vous médical ou pour être opéré, allongement des temps d’attente dans les salles… d’attente.

La suppression massive du nombre de lits d’hôpitaux depuis plus de 30 ans avec les postes de soignants qui vont avec conduit à réduire le temps de séjour et d’observation des malades, à une réduction voir annulation du temps de dialogue entre les malades et les soignants hospitalisés. Le productivisme comptable néolibéral transforme les hôpitaux en usine à soins et les soignants en des robots.

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La pénurie de personnel dans les établissements de l’Éducation nationale ne permet pas le remplacement des enseignants malades et conduits à une perte de temps d’enseignement pour les élèves. Une autre conséquence de cette pénurie et l’allongement du temps de travail d’un certain nombre d’enseignants qui sont contraints de faire des heures supplémentaires pour pourvoir au manque de postes.

Cette pénurie conduite aussi à avoir des classes surchargées qui réduit ainsi le temps que l’enseignant peut consacrer à chaque élève individuellement dans la classe.

L’augmentation du nombre d’élèves par classe conduit aussi à allonger le temps de travail des enseignants à leur domicile dans leur travail de correction et de préparation.

On se limite ici aux situations les plus connues mais l’analyse précédente pourrait aussi s’appliquer, avec des variantes, à la pénurie de magistrats, la pénurie existant dans dont nombre d’administration des services publics.

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2 – Les capitalistes maîtres de l’espace.

2. 1 – L’implantation du logement dans l’espace capitalistique.

Le temps de transport entre le domicile et le lieu de travail impact de l’espace sur le temps.

Le prix du logement dans les grandes villes qui sont des bassins d’emploi est de plus en plus élevé qu’il soit sous forme de location ou de propriété. Les salariés sont donc contraints de s’éloigner des centres-villes ou se trouve souvent leur lieu de travail pour pouvoir louer ou acquérir un logement. Il en résulte un temps de transport accru que ce soit avec un transport en commun avec un véhicule personnel. Un problème semblable se pose pour les étudiants qui sont nombreux à ne pas avoir les moyens pour louer un logement dans la ville universitaire ils font leurs études. Il existe d’ailleurs une pénurie de résidence universitaire pour les étudiants.

Le prix des logements dépend du marché capitalistique de l’immobilier qui peut jouer, par exemple, sur la pénurie de l’offre. L’acquisition d’un logement à crédit dépend évidemment des revenus de l’acquéreur mais aussi des taux d’intérêts bancaires déterminés par le capitalisme financier. La spéculation immobilière dans certaines régions touristiques, notamment en bord de littoral, contraint de jeunes salariés à s’expatrier dans d’autres régions pour pouvoir se loger même s’il existe des possibilités d’emploi dans leur région d’origine. Dans ces mêmes régions, une forte demande étrangère (Angleterre, Pays-Bas, Allemagne,…) pour acquérir un logement (pas forcément de résidence secondaire) provoque une hausse considérable du prix de l’immobilier et du foncier. L’acquisition d’un logement devient alors très difficile pour les habitants de cette région ne disposant pas de revenus importants. Mais cette spéculation ne concerne pas seulement la vente d’habitations mais concerne aussi la location saisonnière notamment en été. Le montant des locations à la semaine peut atteindre des niveaux stratosphériques en bord de littoral notamment. Là encore la demande touristique étrangère fait grimper les prix. Les classes populaires ne disposent pas de revenus suffisants pour louer durant leurs vacances un appartement une maison en raison d’un coup élevé même en région pas forcément touristique. De la même manière, le prix des hôtels et des mobiles homes dans les campings ne sont pas à la portée de leur bourse. C’est souvent par l’accueil de membres de leur famille ou des amis que ces familles modestes peuvent trouver un logement de vacances. Là encore, en rencontre d’une autre manière une ségrégation socio – spatiale causé par le coût du logement.

* 2. 2 – l’aménagement du territoire dans la production de l’espace.

La désertification des villages et débours en commerce et en service public contraint les habitants à utiliser leur véhicule individuel pour faire leurs courses, se faire soigner, accompagner leurs enfants à l’établissement scolaire le plus proche. Cette politique de désertification résulte d’un choix politique d’aménagement du territoire ayant une incidence sur les lieux d’implantation des entreprises, les programmes de construction d’habitat collectif, la construction ou la rénovation d’un réseau routier ou ferroviaire.

Les chefs d’entreprise participent aux décisions concernant l’aménagement du territoire par le biais de différents organismes comme les chambres des métiers, les chambres de l’industrie, les chambres de l’artisanat, les chambres de commerce . Le MEDEF est aussi consulté pour ce genre de questions. Ils peuvent participer à différentes réunions gouvernementales ou territoriales. L’évolution du réseau ferré français ne s’explique pas seulement pour des raisons techniques et l’explosion du nombre d’automobiles et du développement du transport routier par camion, elle est liée aussi à une vision politique et économique de la société et notamment une politique de l’aménagement du territoire. L’abandon progressif et la détérioration du réseau secondaire au profit des lignes pour le TGV desservant les grandes villes laissant persister par ailleurs une centralisation vers Paris et le résultat d’une vision essentiellement marchande. Cela a eu des effets contradictoires au niveau temporel : un raccourcissement considérable du temps de transport entre certaines grandes villes comme Paris et Marseille par exemple et au contraire, un rallongement du temps de transport par train sur certaines lignes défectueuses ou qui aurait mérité une rénovation importante. En toile de fond, une privatisation de la SNCF (fret et voyageurs) et une gestion capitalistique ont conduit au « Yale management » faisant varier le prix du billet avec les fluctuations de la demande. D’une manière analogue, la construction puis la privatisation des autoroutes permettant de diminuer le temps de transport entre grandes villes ne s’est pas accompagnée d’une amélioration du réseau entier national et départemental même communal. On n’a six à une détérioration progressive de l’État des petites routes départementale et vicinale. * Le temps de transport nous permet ainsi d’articuler le temps à l’espace. L’aménagement des communes en équipements collectifs et services publics dépend de la politique économique et sociale communale ou territoriale mais aussi du montant des dotations budgétaires de l’État aux collectivités territoriales, dotations qui dépend de l’orientation politique gouvernementale et parlementaire. Les politiques néolibérales sont dévastatrices pour les services publics au niveau local : insuffisance du nombre de crèches, insuffisance du nombre de personnels pour l’aide à la personne, etc. *

On se réfère en partie ici aux travaux de Henri Lefebvre qui est l’auteur du concept marxiste de « production de l’espace ». On peut se reporter pour un développement de ce concept à l’article dont le lien est le suivant : https://geoconfluences.ens-lyon.fr/...

* 2. 3 – la répartition socio – spatiale de la population. La distribution spatiale ou géographique de la population n’échappe pas aux rapports de classes. À l’intérieur d’une même ville.

À l’intérieur d’une même ville, on a les quartiers bourgeois et les quartiers dits populaires ou ouvriers. Les classes laborieuses perçues comme dangereuses par la grande bourgeoisie sont repoussées vers la périphérie immédiate ou vers une banlieue plus étendue. On parle alors des « cités des banlieues ». Les sociologues Michel et Monique pinçon Charlot ont particulièrement bien étudié les répartitions spatiales de la grande bourgeoisie. Le prix du mètre carré immobilier est un critère capitalistique de répartition sociale. On parle de « quartier résidentiel » ou même de « lotissement résidentiel » qui sont le plus souvent des « zones pavillonnaires ». La petite bourgeoisie et les classes moyennes « émigrent » du centre des grandes villes vers certaines parties de la banlieue ou achète en milieu rural une maison individuelle dont le prix serait inaccessible en proche banlieue ou en centre-ville. La spéculation foncière et immobilière façonne l’espace urbain, périurbain et même rural.

Une véritable crise du logement est en train de se développer ces dernières années. Les programmes de construction de logements sont en berne. Taux de retour sur investissement insuffisant pour les promoteurs en raison du coût croissant des matériaux et de l’énergie, d’un pouvoir d’achat stagnant pour les acheteurs potentiels et de taux d’intérêt devenu élevé. Près de 300 000 acquéreurs potentiels existent mais les logements n’existent pas. Pour la première fois dans l’histoire, il n’existe aucun logement vacant dans le domaine du logement social. La rénovation est délaissée alors que 43 % des logements sont vétustes (classés E, F, G). Selon la fédération française du bâtiment, 300 000 emplois seront supprimés dans ce secteur. d’ici 2025

La demande en location HLM a augmenté de 7 % dans toutes les régions de France et 1,4 millions n’ont pas obtenu satisfaction. Pour plus de détails, voir l’émission de France Inter : on arrête pas l’écho du 16/09/2023 : https://www.radiofrance.fr/francein... (mettre le curseur à la 22e minute)

Remarquons que le capital immobilier de l’acquéreur d’un appartement, d’une maison ou d’un terrain ne dépend pas seulement du revenu familial mais aussi de l’existence ou non d’un héritage familial. Il n’y a pas d’uniformité absolue dans les conditions d’habitat des classes populaires (ouvriers et employés) : elles peuvent être variées : du petit pavillon en grande banlieue à un appartement situé au 25e étage d’un immeuble appartenant à un grand ensemble en périphérie de ville. Le prix des véhicules pour se déplacer, le prix du carburant et le prix du logement peuvent devenir des détonateurs sociaux. * La répartition socio – spatiale de la population entre les agglomérations. Certaines villes industrielles ou portuaires ont vu leur population devenir essentiellement ouvrières. Ce fut le cas pour le nord de la France et la Lorraine. Une ville comme le Havre compte encore une population ouvrière importante mais ce n’est pas le cas, par exemple, de Vanne plutôt bourgeoise. La désindustrialisation de la France depuis 40 ans a considérablement atténué ce phénomène. * 2. 4 – La temporalité marchande des villes.

De la ville industrielle manufacturière à la ville commerciale.

Comme l’a expliqué Henri Lefebvre, la ville est d’abord un lieu de commerce, de consommation y compris de biens culturels. Les marchés et les boutiques n’ont pas totalement disparu des villes mais une évolution de la répartition spatiale des commerces est constatable depuis au moins la fin des années 1960. Les petits commerces de proximité ont été progressivement remplacés par des grandes surfaces en périphérie de ville. Mais celles-ci voient à leur tour leur existence menacée par le commerce sur Internet. Ainsi, le temps passé par les consommateurs pour « faire leurs courses » dépend de ces évolutions dans la distribution commerciale. Remarquons l’apparition de caisses automatiques et de « drives » censée faire gagner du temps aux acheteurs. Remarquons l’entrelacement du paramètre temps du paramètre espace : un nombre insuffisant de caissières augmente le temps d’attente du consommateur et la distance du domicile à la grande surface détermine (avec le temps pour ce garer) le temps d’accès aux lieux d’achat. Là encore, en remontant la chaîne causale, on constate que le lieu d’implantation de la grande surface et le nombre de caissières est déterminé largement par le capitaliste propriétaire, y compris sous forme d’actionnariat, de la grande surface.

* 2. 5 – L’espace intérieur . L’espace n’est pas seulement extérieur mais aussi intérieur pour les logements et bâtiments du service public (établissement scolaire notamment). La surface habitable , le nombre de pièces , la qualité de l’isolation thermique et phonique, la qualité du chauffage, la qualité de la connexion aux différents réseaux (eau, égouts, électricité, Internet,) dépendent niveau de revenus de l’habitant et de la politique du logement au niveau local et gouvernemental. La proximité d’un réseau ferré et plus généralement d’un réseau de transport en commun par rapport au logement est aussi déterminante pour la valeur de celui-ci.

Remarquons que l’absence d’isolation phonique de qualité ou de climatisation dans les établissements scolaires résulte d’une politique méprisant les conditions d’enseignement pour la jeunesse. Tous les paramètres cités précédemment ne doivent donc pas être analysés uniquement en termes techniques mais aussi en termes économiques et politiques ou les rapports de classe sont bien encore présents. * 2. 6 – la problématique de l’insécurité dans les villes.

On peut se reporter à l’étude suivante :

L’évolution et les défis de la sécurité dans les villes https://www.un.org/fr/chronicle/art...

L’insécurité dans les agglomérations à des causes multiples analysées dans le document précédent. On peut retenir que l’inoccupation des jeunes provoquée par le chômage qui induit évidemment la déshérence mais aussi la pauvreté, la défiance totale envers les institutions locales ou nationales est une cause importante d’une délinquance multiforme instaurant un climat d’insécurité. Une politique économique désastreuse et une désertification des services publics dans certaines banlieues résultant d’une politique antisociale et mercantile sont les causes premières de cette insécurité.

Prolifèrent alors les clôtures, les grillages, les codes multiples pour accéder à un appartement ou même un pavillon, les caméras de vidéosurveillance. La police municipale trouve ici une cause de son essor. Il résulte que le militantisme politique de gauche utilisant le porte-à-porte devient problématique. La ville marchande devient ainsi aussi sécuritaire.

* * 2. 7 – L’espace naturel et l’espace cultivable. * La gestion des espaces cultivables relève des propriétaires de ces espaces généralement privés mais pas seulement. L’aménagement du territoire dans le domaine rural ou agricole et sous le contrôle des : il en existe une par région et dans certains départements pour un nombre total de 26. « Les sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (SAFER) sont des établissements publics à caractère administratif créés par la loi d’orientation agricole (LOA) de 1960. Elles ont pour mission d’améliorer les structures foncières par l’installation d’exploitations agricoles ou forestières, ou le maintien de celles existantes par l’accroissement de leur superficie, par la mise en valeur des sols et, éventuellement, par l’aménagement et le remaniement parcellaires. Également, elles ont pour mission de diversifier les paysages, protéger les ressources naturelles et maintenir la diversité biologique et, notamment, communiquer aux services de l’État, dans des conditions fixées par décret, les informations qu’elles détiennent à propos de l’évolution des prix et l’ampleur des changements de destination des terres agricoles. Elles ont pour mission d’assurer la transparence du marché foncier rural1.

En 1995, 2013 et 2014, les rapports de la Cour des comptes ont pointé les dysfonctionnements des SAFER, soulignant le fait que celles-ci avaient perdu de vue les missions d’intérêt général dont elles étaient investies et ont recommandé, sans succès, aux SAFER de se recentrer sur leur mission première origine … »

Source : Wikipédia https://fr.wikipedia.org/wiki/Missi...

Cette mission première était et est encore de favoriser l’installation des jeunes agriculteurs, ce qui n’a pas été vraiment réalisé.

Les gros propriétaires terriens ont racheté des parcelles plus petites pour accroître leur surface et leur patrimoine foncier.

La FNSEA à jouer un rôle prépondérant en favorisant la culture intensive sur de grandes surfaces.

Article très informatif dans Wikipédia.

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L’aviculture intensive qui a eu ses avantages en termes de productivité a eu et a de considérables inconvénients sur l’intégrité des sols et la biodiversité. La destruction de haies, pour ne prendre qu’un exemple, a contribué à une altération de la biodiversité.

Sachant que 75 % des forêts en France relèvent du domaine privé, leur entretien et exploitation, sauf exception, sont soumis à des contraintes commerciales de rentabilité.

Mais il peut en être de même des forêts domaniales qui sont soumises à des politiques étatiques néolibérales conduisant, par exemple à la suppression de nombreux postes d’agents de l’Office national des forêts à la suppression de poste dans la gestion des parcs régionaux ou nationaux.

L’absence ou le mauvais entretien des bois et des forêts est propice au développement de maladies de certaines espèces d’arbres et à la propagation des feux de forêt notamment avec le réchauffement climatique.

L’exploitation minière a été soumise à des impératifs capitalistiques ayant pu conduire à des pollutions considérables des sols en France.

La gestion des rivières et lacs qu’ils soient domaniaux ou non sont aussi soumis aux lois de l’entretien du coûtent minimum.

L’entretien des berges de rivières, des bords de lac ou des temps, les sentiers de randonnée est généralement très insuffisant. Le balisage et l’entretien des sentiers de randonnée dépend des ressources communales et régionales. Les subventions ont considérablement diminué ces dernières années. Sachant que la France possède environ 550 000 km de cours d’eau et 180 000 km de sentiers de randonnée.

La forêt avec 17,1 millions d’hectares ouvre 31 % de la surface de la France. Ce n’est pas les besoins d’entretien qui manque dans ce domaine qui devrait rester au service de l’intérêt général. https://www.francetvinfo.fr/france/...

Ainsi, une fois de plus, on constate que les espaces ruraux et naturels sont soumis à l’ordre capitaliste.

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Conclusion : la constitution d’un espace temps capitaliste planétaire. La mondialisation de la production et des échanges s’accompagne de l’implantation spatiale d’entreprises multinationales avec leurs filiales dans une multitude d’espaces nationaux. L’interconnexion des chaînes d’approvisionnement rend une multitude d’entreprises interdépendantes constituant un maillage spatio – temporel où circule un accéléré de matière, d’énergie et d’informations.

Au niveau productif, la coordination des systèmes de production grâce aux ex nouvelles technologies de l’information et de la communication et le recours à une main-d’œuvre la moins chère possible , à une taxation minimale de la production, les économies d’échelle baissent le coûte de production et augmente la plus-value pour les capitalistes. On augmenterait ainsi la vitesse de rotation du capital sous sa phase productive

Le développement des transports maritimes, aériens, terrestres de plus en plus performants, l’utilisation des TICE, l’existence d’un espace de consommateurs locaux permet d’augmenter la vitesse de rotation du capital au niveau planétaire dans sa phase de circulation.

Des organisations internationales comme l’OMC, l’OMS sous contrôle ( ou financées par) de sociétés multinationales participent à cette mondialisation de l’espace temps capitaliste.

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Annexe

On ne peut que conseiller la première référence qui suit :

La domination spatiale et temporelle du capital : un siècle de gouvernement de l’espace et du temps à Clermont-Ferrand source : Openedition

Du financement de la ville à sa financiarisation : capitaux, régulation et espace urbain Guilhem Boulay Dans L’Information géographique 2019/2 (Vol. 83), pages 23 à 39 Source : cairn info https://www.cairn.info/publications...

* Ville et émergence du capitalisme Flora Delhomme, Guillaume Gentile Dans Regards croisés sur l’économie 2021/1 (n° 28), pages 30 à 36 source : Cairn info https://www.cairn.info/revue-regard... *

Capitalisme et agriculture, constats et alternatives Source :Attac Liège https://liege.attac.org/2019/06/27/...

*

Hervé Debonrivage au


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