De la féodalité au fascisme : les fantômes barbares (royalistes, cléricaux, conservateurs autoritaires) contre le progrès humain

jeudi 27 avril 2023.
 

1) Féodalité et fascisme

La féodalité représente le type même d’une société totalitaire. Le seigneur a tous les droits dans sa seigneurie. L’Eglise combat quiconque vit ou exprime des pensées non conformes à la lettre du dogme et à l’intérêt de la classe dominante. Aussi, du 10ème au 20ème siècle, ni les seigneurs, ni la religion n’ont laissé se développer un autre type de société sans combattre. Cette histoire est parsemée de cachots, de tortures ignobles, de bûchers et même de nombreux actes de génocide.

Lorsque les aspirations sociales et démocratiques des populations commencent à ébranler sérieusement la domination des "élites", ce conservatisme hérité de la féodalité apporte sa longue tradition culturelle autoritaire, son poids économique et politique pour contribuer à créer durant la première moitié du 20ème siècle une force contre-révolutionnaire décidée et puissante : le fascisme.

Je ne sous-estime pas le fait que le fascisme correspond surtout au choix délibéré de classes dominantes capitalistes, particulièrement dans les années 1920 à 1944. Je crois l’avoir assez argumenté dans plusieurs articles, sur l’Allemagne, l’Italie, la France...

Allemagne Pourquoi et comment le patronat a fondé le fascisme ?

De New-York à Berlin... Big Business avec Hitler

11 octobre 1931 Front de Harzburg (nazis, droite, patrons, militaires...)

Allemagne 1931 1932 Patronat, armée et droite marchent au nazisme

Le patronat français, allié de la Cagoule, organisation fasciste et terroriste

Le fascisme naît en Italie comme agent du patronat et de la droite libérale

J’affirme seulement que l’héritage idéologique et social de la féodalité, son alliance avec le fer de lance patronal et militaire d’extrême droite a contribué à faire du fascisme la force hégémonique en Europe en 1940. Dans ce cadre, l’apport des ouvrages de Zeev Sternhell s’avère excessivement riche.

2) Le combat au Moyen Age contre tout ferment de société démocratique

Durant la première moitié du 13ème siècle, des dizaines de milliers de seigneurs et spadassins armés affluent sans cesse dans le Languedoc pour écraser la civilisation occitane et massacrer ses défenseurs. Pourquoi ?

- parce qu’y vit une société bien plus démocratique que dans le reste de l’Europe (citoyenneté des cités, statut des femmes, pas de serfs...)

- parce que cette société a généré un christianisme non féodal : le catharisme

Les bûchers comme l’ensemble du génocide signent la volonté des féodaux (et leurs semblables cléricaux) d’empêcher la naissance de toute autre société que le totalitarisme médiéval vis à vis de tout ce qui ne lui ressemble pas.

Eté 1209 Cathares et civilisation occitane sont assassinés par les croisés SS assoiffés de sang assemblés par le pape

Génocide des cathares et crimes contre l’humanité perpétrés dans le Languedoc au 13ème siècle ? Pourquoi ?

La même détermination génocidaire se retrouve par exemple contre les hussites tchèques puis contre les partisans de Thomas Munzer en Allemagne.

3) Du 16ème au 18ème siècle, la longue résistance des milieux féodaux face à la nouvelle société

La croissance du capitalisme bouleverse alors les sociétés européennes :

- développement d’une économie marchande, des villes, de la bourgeoisie, des écrits et de l’imprimerie, des droits individuels et des procédures judiciaires, de la laïcisation d’institutions comme les hôpitaux et les écoles.

- évolution du servage au salariat, de la féodalité rurale éclatée aux royautés absolues, du monopole idéologique d’Eglise à une réflexion intellectuelle non prisonnière du pouvoir (humanisme, protestantisme, Ecole de Salamanque pour le droit, Lumières...).

Durant ces trois siècles, les forces sociales féodales comprennent le danger pour elles des évolutions économiques, sociales et culturelles en cours. Elles ne se gênent pas pour en profiter si possible comme la noblesse anglaise dénoncée par Thomas More

Thomas More dénonce la naissance du capitalisme "Ces riches détestables, avec leur insatiable avidité, se sont partagé ce qui devait suffire à tous"

Elles ne se gênent pas non plus pour exterminer chaque fois que possible les groupes considérés responsables de l’affaiblissement de la féodalité et du monopole idéologique religieux.

Tel est le cas en France (16ème siècle) durant les guerres de religion avec la Ligue catholique (féodaux comme le duc de Guise, religieux intégristes...) qui croit pouvoir éradiquer par une violence génocidaire, les porteurs (bourgeois et intellectuels juifs, protestants...) et les signes d’une nouvelle société .

La Sainte Ligue sort victorieuse des Guerres de religion (Histoire de l’Aveyron 4)

Tel est encore le cas en France (17ème siècle) par exemple, de la Compagnie du Saint Sacrement, produit de la Contre-Réforme catholique du Concile de Trente, société secrète voulant influer sur la royauté française au profit de l’Espagne et de la papauté, premier instrument moderne d’une éradication physique des pauvres (hôpital général).

Dans l’Europe du 18ème siècle, le progrès scientifique et culturel subit les attaques de philosophes anti-Lumières comme Vico (italien), Burke (anglais) et Herder (prussien) dont il ne faut pas sous-estimer l’écho.

4) Monarchies autocratiques et pré-fascisme avant 1914

Dans les années 1890 à 1914, la progression du mouvement ouvrier et socialiste provoque un raidissement culturel et politique des forces héritées de la féodalité dans tous les pays d’Europe, par exemple :

- en Autriche-Hongrie Hitler naît le 20 avril 1889 en Autriche, fief du pré-fascisme

- en Russie L’Union du Peuple russe, organisation pré-fasciste

La Russie tsariste de Nicolas 2 : un état autocratique à caractéristiques pré-fascistes

- en France Action française : mouvement fasciste français (1889 à 1945)

...

Poids des institutions et forces sociales héritées de la féodalité dans le pré-fascisme et le conservatisme autoritaire des années 1903 à 1914

Les royautés et empires européens couvrent en 1914 une superficie dix fois supérieure aux républiques avec :

- Guillaume II, roi de Prusse et empereur d’Allemagne, secondé de princes comme Ruprecht de Bavière et Maximilien de Bade.

- François-Joseph Ier, empereur d’Autriche et roi de Hongrie

- Nicolas II, empereur de Russie

- Mehmed V, sultan de l’empire ottoman

- George V, souverain du Royaume-Uni

- Alphonse XIII, roi d’Espagne

- Constantin I de Grèce, roi des Hellènes

- Victor-Emmanuel III, roi d’Italie

- Ferdinand I, roi de Roumanie ;

- Ferdinand I, roi de Bulgarie

- Pierre Ier, roi de Serbie

- Albert Ier, roi de Belgique...

Ces monarques du 20ème siècle restent profondément imbus de principes hiérarchiques et anti-démocratiques hérités du Moyen Age. Leur politique est fortement marquée par le couple militarisme / autoritarisme. Même leur vie privée en est affectée. Guillaume II possède plus de 200 uniformes et en change plusieurs fois par jour (12 "valets" entretiennent cette collection) ; ses fils dont le kronprinz participent à la réunion qui prépare l’arrivée de Hitler au pouvoir.

Ces têtes couronnées ne sont que le sommet de la pyramide. Dans les campagnes, un nombre important de nobliaux conservent un rôle économique, social et culturel incontournable.

5) Le fascisme traditionaliste au sein de la constellation fasciste des années 1930

Quiconque analyse les années 1930, pays par pays, ne peut qu’être frappé par le rôle important des courants traditionalistes et cléricaux parmi les forces du fascisme.

Concordat entre Hitler et Eglise catholique allemande 20 juillet 1933

Etat fasciste catholique de Croatie et massacre de la grotte de Kletchka

Phalange espagnole, un mouvement fasciste

La Légion Française des Combattants, parti unique raté de l’Etat pétainiste

...

Jacques Serieys


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